L'immigration en France avant 1974

Industriels en quête de main-d'oeuvre

Dans le premier millénaire de son existence, la France n'a connu aucune immigration notable. C'est de manière continue, par les pèlerinages, le commerce, les guerres... et les mariages dynastiques que se sont brassées les populations des provinces françaises et de l'ensemble de l'Europe.

Un premier changement s'amorce au milieu du XIXe siècle, sous le Second Empire, en lien avec la révolution industrielle et la chute de la natalité. L'exode rural ne suffisant pas à assouvir les besoins en main-d'oeuvre des entrepreneurs, ceux-ci se tournent vers les voisins européens. Les étrangers sont un peu plus d'un million sur 40 millions d'habitants à la veille de la Grande Guerre : 420 000 Italiens, 290 000 Belges, 100 000 Espagnols, 100 000 Allemands, etc.

La Première Guerre mondiale va amplifier les handicaps démographiques du pays et conduire à une politique d'immigration beaucoup plus active et volontaire. De là date le nouveau visage de la France.

André Larané
Hommage aux amis de Montparnasse : Diego Rivera, Marie Marevna et sa fille, Ehrengourg, Soutine, Modigliani, Jeanne Hébuterne, Max Jacob, Kisling et Zorowski (panneau mural de Marie Marevna)
Migrations dans la France d'avant la France

Aux Ve-VIe siècles de notre ère, dans l'ancienne Gaule qui allait devenir pour l'essentiel la France, on évalue entre 5 et 10% l'apport migratoire des tribus germaines sur un total d'environ huit à dix millions d'habitants. À ces immigrants francs, burgondes, wisigoths... se sont ajoutés quelques dizaines de milliers de Bretons (Celtes) établis en Armorique.
La deuxième vague d'invasions, aux VIIIe-Xe siècles, a été beaucoup plus ténue, mis à part l'apport normand à l'embouchure de la Seine. Les Hongrois n'ont fait que passer et les Arabo-berbères musulmans ont été chassés par Charles Martel de la Septimanie (le Languedoc actuel) avant d'avoir eu le temps d'y faire souche.

L'appel de l'industrie

En 1851, lors d'un premier recensement, on dénombrait en France 380 000 étrangers, soit à peine plus d'un pour cent de la population nationale. Encore s'agissait-il pour l'essentiel de Belges, Suisses ou Allemands venus en voisin travailler dans les industries frontalières.

Tout allait changer avec l'industrialisation à marches forcées du pays sous l'impulsion de Napoléon III.

Ne trouvant pas assez de main-d'oeuvre dans les villes, les industriels allaient la chercher dans les villages encore surpeuplés, qui voyaient pour la première fois au milieu du XIXe siècle leur population diminuer : c'était le début de l'exode rural.

Mais ils allaient aussi faire appel à une immigration de masse, une première depuis... Rollon et ses Normands, près de mille ans plus tôt ! C'est que la France connaissait, bien avant tous les autres pays européens, une forte baisse de la natalité. Sa population, en un demi-siècle, avait augmenté de moins d'un quart (de 29 à 36 millions d'habitants) tandis que celle du Royaume-Uni avait doublé, de 12 à 23 millions d'habitants

Les grandes firmes désireuses de main-d’œuvre malléable et peu coûteuse allaient donc sciemment organiser la venue de travailleurs des pays voisins. C'est ainsi que les Houillères du Nord envoyèrent des agents recruteurs dans le Borinage (la région de Mons, en Belgique) dès les années 1860.

Les étrangers enregistrés atteignirent le nombre de 800 000 en 1876, soit deux fois plus qu'en 1851. Ils dépassèrent le million cinq ans plus tard et se tinrent à ce seuil jusqu'à la fin de la Grande Guerre (près de 3% de la population totale). Il s'agissait pour un tiers de Belges du Borinage venus s'employer dans les mines de charbon. Émile Zola y fait référence dans son roman Germinal.

En second lieu, on rencontrait des Italiens, essentiellement à Lyon, le long du littoral et de la vallée du Rhône. Ceux-là venaient en bonne partie de Vénétie. Ils s'employaient dans l'industrie, l'artisanat et aussi l'agriculture et leur nombre ne tarda pas à dépasser celui de toutes les autres nationalités.

La Suisse, qui n'était pas encore le pays insolemment prospère que l'on connaît, fut aussi un pays d'émigration important. Tout comme l'Espagne enfin, dont on rencontrait en France cent mille ressortissants en 1911. Il s'agissait essentiellement de gens proches de la frontière : Basques, Navarrais, Catalans. Sans surprise, Marseille devint alors une ville à dominante espagnole et italienne.

Une petite partie seulement des migrants firent souche dans le pays. Sur 1,8 million d'Italiens qui arrivèrent en France, c'est le cas de seulement 420 000 d'entre eux, les autres choisissant soit de rentrer chez eux, soit de partir vers d'autres cieux. Il est vrai qu'ils devaient travailler dur pour se faire une place au soleil, sans aide d'aucune sorte (note).

Le massacre des saliniers italiens d'Aigues-Mortes le 17 août 1893 (gravure du Petit Journal)Et il arrivait aussi qu'ils entrent en conflit avec des nationaux.

Le cas le plus dramatique concerne des saisonniers piémontais employés dans les marais salants d'Aigues-Mortes par la Compagnie des Salins du Midi.

Celle-ci avait constitué des « colles » ou brigades au sein desquelles ces Italiens étaient associés à des « trimards », vagabonds ou chômeurs recrutés pour la saison. Les premiers, payés au rendement, reprochent aux seconds de casser les cadences. Il s'ensuit des rixes qui débouchent le 17 août 1893 sur un véritable pogrom aux cris de : « Mort aux Christos ! » (Mort aux chrétiens !). Une dizaine d'Italiens sont tués avant que la gendarmerie ait pu intervenir.

En dépit de cela, ces premières vagues migratoires sont plutôt bien acceptées sous la IIIe République, bien que la France soit dominée par les notables ruraux, soucieuse de renouer avec sa grandeur passée et frappée par la grande dépression des années 1873-1896.

À l'époque de l'affaire Dreyfus, les outrances xénophobes sont dirigées contre les juifs réputés « cosmopolites » plutôt que contre ces migrants en voie d'assimilation. Et notons-le, plusieurs sommités françaises ont des noms à consonance italienne qui trahissent un aïeul d'origine transalpine : Léon Gambetta, Émile Zola, Joseph Gallieni, Savorgnan de Brazza... La saignée de la Grande Guerre va bousculer cette tranquille cohabitation.

Briquetiers originaires de Vénétie, dans le sud de la France (1920)

Immigrationnisme et natalisme

Pendant la Grande Guerre (1914-1918), la France, contrainte de mobiliser ses jeunes hommes sur le front, est confrontée au manque de main-d'oeuvre dans les usines, les chantiers et les champs, aggravé par le retour d'une partie des travailleurs étrangers dans leur pays d'origine. C'est le cas des Italiens en particulier.

La main-d'oeuvre féminine ne suffisant pas, loin de là, à combler les manques, l'État prend les choses en main.

Il crée un service de l'immigration et va quérir environ 150 000 travailleurs dans tous les pays méditerranéens, à commencer par l'Espagne. Il se tourne aussi vers ses colonies. Le ministère des Colonies organise le transfert en métropole de 78 000 travailleurs algériens ainsi que de 55 000 Marocains et Tunisiens, 50 000 Annamites, des Malgaches et même 37 000 Chinois. Au total 230 000 hommes. Ce sont les premiers travailleurs originaires d'outre-mer à débarquer sur le continent européen.

La guerre finie, tous ces travailleurs sont renvoyés chez eux par l'administration coloniale. Les organismes professionnels prennent le relais et vont eux-mêmes recruter des travailleurs dans tous les pays européens pour remplacer les ouvriers morts dans les tranchées. Dès 1919, le Comité central des Houillères fait venir 7 000 mineurs italiens et affrète un premier train de 800 mineurs polonais. C'est ensuite par villages entiers que les Polonais s'installent dans le Nord de la France, les hommes travaillant dans les mines et les femmes dans les filatures.

Travailleurs italiens dans la campagne toulousaine dans les années 1920La Société générale d'immigration créée en mai 1924 par les compagnies charbonnières, les maîtres de forge et les syndicats ruraux envoie des missions de recrutement dans tous les pays de l'Europe méditerranéenne et orientale, du Portugal à la Pologne en passant par les Balkans. Les travailleurs font l'objet chez eux d'un examen sanitaire avant d'être expédiés à Toul, en Lorraine, et de là, redistribuer vers les sites d'emploi.

Dans les campagnes toulousaines, dépeuplées par l'exode rural et une dénatalité brutale, les autorités procèdent à un repeuplement par cent mille paysans de l'Italie du Nord. Leurs descendants sont aujourd'hui parfaitement assimilés dans les villages de la Haute-Garonne et du Gers auxquels ils ont rendu la vie.

On note d'autres initiatives patronales comme celle de la Société lyonnaise de soie artificielle qui recrute à partir de 1924 des rescapés du génocide arménien dans les faubourgs de Salonique et d'Athènes ainsi que dans le Levant. C'est au total 65 000 Arméniens qui débarquent en France dans les années 1920, le plus souvent à Marseille. Leurs descendants, aujourd'hui environ 600 000, ont su concilier l'amour de leurs origines avec celui de la France.

Travail dans un atelier de confection arménien : l’atelier Terzian durant l’entre-deux-guerres (photo : centre de recherche sur la diaspora arménienne)

La République française, qui fait figure de havre de paix dans un continent chamboulé par les séquelles de la Grande Guerre, a accueilli également des Russes chassés par la Révolution bolchévique - au total environ 65 000 -,  des Italiens chassés par le fascisme - environ 20 000 -, des Espagnols également, chassés par la dictature de Primo de Rivera etc. Notons aussi pour mémoire l'embauche de quelques jeunes étudiants chinois et indochinois dans les usines de la métropole. De retour dans leur pays, plusieurs atteindront les sommets du pouvoir : Deng Xiaoping, Ho Chi Minh, Zhou Enlai...

Ces éléments font de la France, dans les années 1920, le premier pays d'immigration au monde, devant les États-Unis eux-mêmes ! Sur le siècle écoulé, l'ensemble des étrangers et des naturalisés équivaut au croît de la population, environ quatre millions de personnes. 

En 1931, les étrangers sont 2,9 millions sur 41,8 millions d'habitants, parmi lesquels 808 000 Italiens, 508 000 Polonais, 352 000 Espagnols, 250 000 Belges, 100 000 Suisses... À quoi s'ajoutent quelques dizaines de milliers de Kabyles d'Algérie. Les Polonais et, dans une moindre mesure, les Italiens vivent dans des communautés repliées sur elles-mêmes, avec leurs organisations culturelles, sociales et religieuses pilotées par les gouvernements de Varsovie ou Rome.

Beaucoup d'immigrants - tant européens que kabyles - retournent au pays après avoir amassé un pécule. Les retours s'accélèrent dans les années 1930 du fait de la crise économique, de la montée de la xénophobie et de l'approche de la guerre. Pour ces raisons et aussi du fait de la dénatalité, laquelle n'a fait que s'aggraver malgré des mesures coercitives comme la criminalisation de l'avortement en 1920, la population de la France va stagner jusqu'à la Seconde Guerre mondiale.

Réunion des dames du Rosaire à l'estaminet franco-polonais Janicki, Cité des Alouettes à Bully-les-Mines (milieu des années 30)

Émergence de la xénophobie

Avant la Première Guerre mondiale, l'arrivée de travailleurs étrangers avait provoqué ça et là des tensions avec les travailleurs locaux et des rixes parfois meurtrières comme à Aigues-Mortes le 17 août 1893, mais elle n'avait guère suscité de débat dans la sphère politique. L'écrivain nationaliste Maurice Barrès y voyait un remède à la dépopulation et s'émerveillait de leur assimilation rapide dans le « creuset » national. Il est vrai que ceux qui n'arrivaient pas à s'assimiler retournaient simplement chez eux. De 1873 à 1914, 1,8 millions d'Italiens sont arrivés en France mais on n'en dénombrait que 420 000 en 1911. La plupart des autres étaient rentrés au pays ou repartis vers d'autres cieux.  

Les rares réticences venaient de la gauche marxiste et des syndicats ouvriers. Dans Le Cri du Peuple du 10 février 1886, le socialiste révolutionnaire Jules Guesde avait publié un article intitulé : « Meurent les ouvriers français », dans lequel on pouvait lire : « Ils sont 800 000 ouvriers étrangers qui, travaillant à tout prix, font outrageusement baisser les salaires, quand ils ne les suppriment pas complètement pour nos ouvriers expulsés des usines ». Cela n'empêche pas le gouvernement de préciser par la loi du 17 mars 1891 qu'aucun métier n'est fermé aux étrangers.

Dans la décennie qui suit le conflit, l'opinion publique, la classe dirigeante et même les syndicats ouvriers se montrent bienveillants à l'égard des étrangers. La loi du 10 août 1927 assouplit les conditions de naturalisation en ramenant à trois ans la durée de résidence préalable.

Cette immigration européenne des années 1920 investit massivement les mines, les usines, les chantiers de travaux publics et même les champs tandis que les travailleurs nationaux commencent à se détourner des métiers manuels et leur préférent les emplois de services. 

On repère aussi de nombreux étrangers dans les cabarets et les ateliers d'artistes ! Dans ces « Années Folles », Paris, qui a gardé un grand attrait culturel, attire en effet les intellectuels, écrivains et artistes de toute l'Europe ainsi que d'Amérique et même des autres continents. L'« École de Paris » illustre ce cosmopolitisme fécond, avec Picasso, Zadkine, Soutine, Chagall, Modigliani, Foujita, etc.

La science politique conserve toutefois de fortes réticences quant à l'absorption de populations exotiques. Le socialiste Albert Thomas, député et ministre de l'Armement pendant la Grande Guerre écrit : « Si nous voulons assimiler, intégrer dans la population française les étrangers qui viendront s'établir chez nous, il convient alors d'opérer à la frontière les sélections nécessaires : sélectionner des races, sélectionner des individus, sélectionner des travailleurs enfin » (note).

Le climat s'assombrit à partir de 1931, quand l'Europe et la France commencent d'être frappées par la crise économique venue des États-Unis. Dans un vent de panique, les gouvernements occidentaux pratiquent une politique malthusienne qui aggrave les maux : limitation des prix et des salaires, freins à l'embauche, réduction réglementaire du temps de travail, etc. Quelques centaines de milliers de travailleurs étrangers quittent la France en quelques mois, sous l'effet du chômage et de la pression sociale.

Le 10 août 1932, le gouvernement d'Édouard Herriot, sous la présidence d'Albert Lebrun, promulgue une loi qui limite à 5% la proportion des travailleurs étrangers dans les marchés publics, demande aux entreprises privées de se fixer elles-mêmes des limites à l'embauche d'étrangers et soumet enfin les nouvelles embauches d'étrangers à une autorisation ministérielle.

Quelques drames exacerbent la xénophobie de l'opinion : l'affaire Stavisky, juif d'origine ukrainienne, l'assassinat du roi Alexandre Ier et du ministre Louis Barthou par des terroristes croates et l'assassinat du président Paul Doumer par un réfugié russe. Cette xénophobie frappe de larges couches de la population. Ainsi voit-on un jeune étudiant du nom de François Mitterrand dans une manifestation de l'Action Française contre les médecins étrangers au cri de « La France aux Français », le 1er février 1935.

Manifestation xénophobe d’étudiants parisiens devant la faculté de médecine, 1er février 1935

Le gouvernement français freine le regroupement familial et la naturalisation par le décret du 6 février 1935. Il organise aussi le retour des travailleurs « en surnombre », avec voyage offert, de sorte qu'en 1936, on compte 400 000 étrangers de moins qu'en 1931 ! Le bon côté de l'affaire, c'est que les étrangers qui restent mesurent l'avantage de la France sur les régimes dictatoriaux de leur pays d'origine et s'assimilent à la communauté nationale (note).

La situation s'aggrave brutalement à partir de 1937 avec la guerre d'Espagne et son flot de réfugiés. Quand un demi-million de malheureux démunis et en haillons franchissent en février 1939 les cols pyrénéens enneigés, les Français de tous bords, émus aux larmes, les accueillent sans réticence. C'est qu'ils n'ont guère le choix. Le général Franco, vainqueur par KO de la guerre civile, exécute sans pitié les opposants républicains.

Mais le gouvernement français craint que les Espagnols de la Retirada (« retraite » en Espagne) ne déséquilibrent le marché de l'emploi et les dirige vers des camps de concentration aménagés à la hâte dans les Pyrénées-Orientales, à Gurs (note) ou Rivesaltes, et dans le Sud-Ouest. Le démographe Alfred Sauvy dénonce cette vision malthusienne et plaide en vain pour que les nouveaux-venus soient mis à contribution dans la lutte qui se prépare contre le IIIe Reich.

Réfugiés espagnols dans les cols pyrénéens en février 1939

Par la même étroitesse d'esprit, quand la guerre est déclarée, en septembre 1939, le gouvernement décide d'interner les réfugiés allemands, y compris des Juifs et d'authentiques opposants au nazisme qui, pourtant, ne demanderaient pas mieux que de combattre aux côtés des soldats français. Il ouvre à leur intention le camp des Milles, près d'Aix-en-Provence. À la signature de l'armistice du 22 juin 1940, le gouvernement accepte même de livrer 800 de ces internés au IIIe Reich. 

L'Affiche rouge du groupe ManouchianSous l'Occupation, le gouvernement du maréchal Pétain conduit cette politique à son terme. La loi du 22 juillet 1940 impose la révision de toutes les acquisitions de nationalité française accordées depuis la loi du 10 août 1927 et annule par voie rétroactive 15 000 naturalisations obtenues sous le Front populaire. Le gouvernement interdit aussi l'accès de la fonction publique aux enfants de père étranger et, sans remords, livre aux Allemands les juifs d'origine étrangère.

Ce n'est donc pas sans raison que la Résistance et la France Libre du général de Gaulle sont rejointes par un certain nombre d'étrangers.

Parmi eux les héros du réseau FTP-MOI (Francs-Tireurs et Partisans-Main-d'Oeuvre Immigrée), que l'Affiche rouge immortalisera, et les républicains espagnols de la IIe DB du général Leclerc qui entreront à Paris le 25 août 1944 sur des engins baptisés Guadalajara, Brunete, Madrid, Teruel, d'après des batailles de la guerre civile.

Les « Trente Glorieuses »

La Libération n'a rien à voir avec la fin de la Première Guerre mondiale. Dès 1942, au coeur de l'Occupation, la fécondité des Françaises a entamé une nette remontée pour des raisons qui demeurent tout autant incompréhensibles que sa rechute en 1974. C'est donc une population en voie de rajeunissement et pleine de confiance en l'avenir qui reconstruit le pays. Les nouvelles entreprises industrielles puisent leur main-d'oeuvre dans le vivier rural et ce sont les jeunes paysans - bien plus que les immigrants - qui vont contribuer au « miracle économique » de l'après-guerre.

Anticipant le recours à l'immigration, le gouvernement a néanmoins créé dès le 2 novembre 1945 un Office national d'immigration (ONI) pour organiser le recrutement de travailleurs étrangers mais la plupart des nouveaux entrants contournent cet organisme aux procédures trop administratives. Dans les années 1950, l'immigration demeure modeste, limitée à quelques Italiens et 200 000 Algériens. Les Polonais et Italiens déjà installés dans l'hexagone achèvent de s'assimiler à la communauté nationale. 

C'est dans les années 1960 que l'immigration reprend de plus belle avec l'arrivée en masse d'Espagnols chassés par la misère puis de Portugais qui fuient tout autant la misère que la conscription et les guerres  coloniales. On en compte près de 800 000 en 1982. 

L'exode des pieds-noirs d'Algérie (été 1962)À cela s'ajoute le choc colonial. La fin de la guerre d'Algérie amène en France, en 1962, plus d'un million de pieds-noirs (dico), colons d'origine européenne mais aussi juifs séfarades (natifs d'Afrique du Nord) et harkis (musulmans demeurés fidèles à la France). Cet afflux brutal suscite des récriminations dans la presse et la classe politique mais, à l'exclusion des harkis, les réfugiés d'Afrique du Nord vont néanmoins réussir leur intégration au-delà de toute espérance.

En 1974, les « Trente Glorieuses » s'achèvent sur la guerre du Kippour, le premier choc pétrolier et une chute brutale de la fécondité dans l'ensemble du monde occidental. De 2,4 à 3 enfants par femme en moyenne, elle tombe aux environs de 2 ou même en-dessous. La France ne reçoit plus d'immigrants européens à l'exception des Portugais et des réfugiés des guerres yougoslaves. Sa démographie entre dans une nouvelle phase avec l'immigration d'outre-mer, jusque-là limitée pour l'essentiel à l'Afrique du Nord. 

Bibliographie

La plus remarquable synthèse que nous connaissions sur l'immigration en France s'intitule : Histoire des étrangers et de l'immigration en France (sous la direction d'Yves Lesquin, Larousse, 2006). C'est de cet ouvrage que nous avons tiré la plupart des données chiffrées.

Publié ou mis à jour le : 2024-02-19 19:10:51

Voir les 7 commentaires sur cet article

Constant (14-09-2019 21:32:35)

Excellent article , dans lequel je reconnais en partie l'histoire de ma famille . En effet, je suis né en France au debut des années 40,d'un père Républicain Espagnol. Par la suite,comme nombre ... Lire la suite

CHOLLET-RICARD (26-05-2014 19:05:32)

Excellent article mais justement, on attend la suite: l'immigration d'outre-mer et celle d'Afrique du Nord qui s'est poursuivie après 1974. Et puis un bilan chiffré de cent cinquante années d'immig... Lire la suite

CHOLLET-RICARD (26-05-2014 19:01:12)

Excellent article mais justement, on attend la suite: l'immigration d'outre-mer et celle d'Afrique du Nord qui s'est poursuivie après 1974. Et puis un bilan chiffré de cent cinquante années d'immig... Lire la suite

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