À partir du XVIe siècle, la piraterie reste sévèrement réprimée. Elle connaît un grand essor dans les Antilles, centre de transit du commerce entre les Amériques et l'Europe. Pour autant, dans leur course à la puissance, les souverains européens s'en accommodent et créent le statut de corsaire (dico) afin de mieux combattre leurs ennemis et prendre leur part dans le pillage des galions espagnols...
Les Barbaresques dans la Méditerranée
C’est dans la Méditerranée que renaît la piraterie à l’aube de la Renaissance. Elle est portée par les corsaires basés en Afrique du Nord. Il s’agit d’aventuriers de toutes origines convertis à l’islam et entrés au service du sultan ottoman qui règne à Constantinople.
L’empire ottoman, alors à son apogée avec le sultan Soliman le Magnifique, se sert de ces pirates pour asseoir sa domination sur la Méditerranée et en chasser les commerçants chrétiens et en particulier italiens. Ces pirates sont appelés « Barbaresques », la Barbarie étant le nom sous lequel est désignée à l’époque l’Afrique du Nord ou Maghreb.
Au premier rang d’entre eux se trouve Khayr al-Din, dont le surnom Barberousse va devenir synonyme de terreur sur toutes les côtes de la Méditerranée. Il reçut du sultan le titre de pacha et acheva la conquête de l’Algérie grâce aux troupes de janissaires qu’il reçut.
Le 21 mai 1529, Barberousse s’empare d’Alger et déloge les Espagnols de la puissance forteresse du Penon, située en face de la ville. Trois ans plus tard, Soliman s’étant allié avec le roi de France François Ier, il mène des expéditions dans le sud de l’Italie avant d’aller mettre le siège devant Nice et d’hiverner à Toulon au grand scandale de la chrétienté, en 1543.
Barberousse mourut à Constantinople en 1546, mais les expéditions barbaresques en Méditerranée se poursuivirent avec d’autres capitaines tels que Dragut ou encore Salah Raïs dont les succès furent nettement moins éclatants.
Les corsaires d’Alger et la flotte ottomane subirent ensuite des défaites sévères dont celle de Lépante, en 1571, la fin de la prépondérance ottomane en Méditerranée. On en revint alors à une piraterie traditionnelle, portée sur le pillage et le trafic d’esclaves.
Jusqu’au XIXe siècle, les côtes du Maghreb furent une plaque tournante du trafic d’esclaves et les corsaires y prirent une part non négligeable. Les pirates barbaresques des Régences d’Alger et de Tunis sillonnaient la mer pour s’approprier les cargaisons des navires et réduire les passagers en esclavage.
Ils pouvaient même s’aventurer en dehors de la Méditerranée pour réduire en esclavages les habitants des côtes comme ce fut le cas en 1627 lors du pillage de la capitale islandaise Reykjavik par le pirate Mourad Raïs.
Le plus illustre de leurs captifs fut sans conteste Cervantès, embarqué sur la galère Sol, assaillie et abordée par un vaisseau pirate d’Alger en septembre 1575 à la hauteur des Saintes-Maries-de-la-Mer, qu’on appelait alors les « Trois-Maries ».
Métaux précieux et épices, trésors convoités
À partir du XVIe siècle, suite à la découverte de l’Amérique par les Espagnols et au contournement de l’Afrique par les Portugais, le commerce maritime et son corollaire, la piraterie, se reportent vers l’Atlantique et l’océan Indien. C’est par là que transitent les galions chargés de riches cargaisons à destination de l’Europe : métaux précieux, tabac, épices, bois exotiques...
Désireux de ruiner le monopole que se sont arrogés les Portugais et les Espagnols sur ce commerce, les souverains de France et d’Angleterre encouragent leurs propres marins et armateurs à les combattre.
Parmi ces armateurs figure le Dieppois Jean Ango. En 1522, huit navires de sa flotte, commandés par Jean Fleury, capturent trois caravelles chargées d’or en provenance du Mexique et envoyées par le conquistador Hernan Cortès au roi d’Espagne.
En 1543, le port colombien de Carthagène (Cartagena de Indias) est pillé par trois cents Français et Anglais. En 1555, la troupe du huguenot rochelais Jaques de Sore envahit la Havane et s’empare d’un butin énorme...
Les pirates anglais, et notamment les « Chiens de Mer » (Sea dogs) de John Hawkins, s’élancent dans le sillage des Dieppois et des Rochelais. Le plus illustre d’entre eux fut Sir Francis Drake, également connu pour avoir été le premier capitaine à terminer le tour du monde.
En 1572, avec le corsaire-géographe français Guillaume Le Testu (qui meurt dans l’expédition), Drake s’empare du convoi (flota en espagnol) qui, périodiquement, apportait à travers l’isthme de Panama les lingots d’or du Pérou. Héros national, il est fait baron et amiral par la reine Elizabeth Ière.
Du côté des Pays-Bas espagnols, les « Gueux de la mer » s’illustrent lors de la prise de la cité de La Brielle, le 1er avril 1572. Cette bataille aura de grandes conséquences dans le conflit qui débouchera sur l’indépendance des Pays-Bas.
Sus aux galions ! Flibustiers et Frères de la Côte
Au XVIIe siècle, l’exploitation du Nouveau Monde et le développement du commerce avec les Indes et la Chine, tant par les Espagnols que par les Anglais et les Néerlandais, suscitent une nouvelle poussée de la piraterie.
Des marins et aventuriers, souvent victimes de la misère et du chômage, vont chercher fortune sur les mers. Ils s’installent dans des repaires stratégiques non loin des routes commerciales maritimes et en particulier dans les nombreuses îles des Antilles, au large des colonies espagnoles.
La plus célèbre d’entre elles est l’île de la Tortue, toute proche de la grande île d’Hispaniola, partagée aujourd’hui entre Haïti et la République dominicaine. Elle accueille des pirates français et anglais que l’on désigne à partir des années 1650 sous le nom de « flibustiers » (du néerlandais vrijbuiter, « libre faiseur de butin »).
Ainsi la définition du flibustier est-elle géographique puisque réservée aux corsaires ou pirates (selon qu’ils avaient ou non des commissions) qui agissaient dans la mer des Antilles et le golfe du Mexique.
Ces flibustiers se ravitaillent auprès des éleveurs de bétail d’Hispanolia. Ils conservent la viande grâce à une très ancienne méthode utilisée par les Indiens : ils la découpent en lanières, la salent, la déposent sur des claies nommées par eux barbaco (qui donnera plus tard « barbecue ») sous lesquelles ils allument un feu. Les Indiens appellent boucan cette sorte de viande fumée, d’où boucaniers, terme par la suite souvent employé à tort comme synonyme de flibustier.
Le pionnier de la flibuste fut sans doute le Dieppois Pierre Le Grand qui, en 1635, se distingua en abordant un galion espagnol faisant route vers Cuba. À la tête de vingt-huit pirates bien armés qui naviguaient à bord d’un lougre portant quatre canons, il s’attaqua au vaisseau amiral (capitane) d’une flota, un bâtiment armé de 54 canons et chargé à bloc de richesses et de vivres. Pierre Le Grand et son équipage l’abordèrent après avoir fait couler leur propre bateau à coups de hache pour s’enlever la tentation de battre en retraite (ce genre d’action était très caractéristique de la tactique flibustière).
Ils prirent le contrôle du galion, firent débarquer les prisonniers sur l’île d’Hispaniola puis mirent directement le cap sur la France. Une fois arrivés à Dieppe, les sommes provenant de la vente de la cargaison et de celle du galion lui-même furent partagés à la satisfaction de tous. Ainsi, Pierre Le Grand demeura à Dieppe où il vécut comme un riche bourgeois. Cette histoire fit beaucoup de bruit en France et suscita de nombreuses vocations.
En réaction, les Espagnols chassèrent les pirates d’Hispaniola et détruisirent systématiquement tout le bétail de l’île pour affamer les pirates. Les boucaniers et chasseurs rejoignirent alors les flibustiers de l’île de la Tortue plus facilement défendable. L’ensemble des flibustiers et boucaniers qui vivaient alors en communauté se regroupèrent en une confrérie, les « Frères de la Côte ».
Au printemps 1640, un gentilhomme français huguenot, nommé Le Vasseur, ex-capitaine de la marine royale, se dota d’une lettre de marque auprès de Louis XIV et s’empara de la Tortue, officiellement propriété des Anglais. Il plaça les Frères de la Côte sous son autorité et construisit un fort, ce qui permit d’assurer la sécurité et donc la prospérité de l’île.
Beaucoup de flibustiers devinrent ainsi corsaires, et dans les années 1660, le nouveau gouverneur, Bertrand d'Ogeron, fournit lui-même des commissions de corsaire à ses propres colons, ce qui porta le flibustier des Caraïbes à son apogée.
Le gentilhomme languedocien Daniel Monbars, dit Monbars l’Exterminateur (1645-1707), se lança dans la flibuste, motivé par la seule volonté d’aller tuer des Espagnols, et pour cause ; il avait été indigné à la lecture des œuvres du dominicain Las Casas qui décrivait les conditions des Indiens dans les colonies espagnoles. On retrouve Monbars sur l’île de la Tortue puis comme capitaine d’un navire pourvu d’un équipage d’anciens esclaves Indiens qu’il avait lui-même délivrés et qui désormais lui étaient dévoués jusqu’à la mort.
Mais le plus redoutable et le plus sanguinaire des flibustiers fut sans doute Jean-François Nau, dit l’Olonnois. Né en 1630 aux Sables-d’Olonne, il embarqua à vingt ans depuis La Rochelle pour rejoindre trois ans plus tard la société des boucaniers. Il mena de nombreux combats avec les lanceros (cavaliers espagnols) et passa à la Tortue en 1655 où il reçut du gouverneur Jérémie du Rausset une lettre de marque ainsi qu’un navire. Il pilla la ville de Maracaïbo (Venezuela), et conclut une alliance avec Michel Le Basque, un autre pirate français avec lequel il s’attaqua à Gibraltar (Venezuela).
Les deux lieutenants de l’Olonnois, Moïse Vauquelin et Pierre Le Picard, commandaient chacun un des navires de la flotte. Ensemble ils pillèrent San Pedro (Honduras) au cours d’une expédition qui est restée selon les Espagnols un exemple de barbarie et contribua à déconsidérer la flibuste en France jusque dans l’esprit de Louis XIV.
À 41 ans, l’Olonnois fini capturé, découpé en morceaux et mangé, selon les annales de la flibuste, dans le courant de l’année 1671. Sa mort marqua la fin de la flibuste française.
Un autre champion de la flibuste mais britannique cette fois, le Gallois Henry Morgan (1635-1688), se fit connaître par ses actes de cruauté.
Voulant comme tant d’autres tenter la fortune aux îles, il passa d’abord cinq ans à la Tortue puis s’installa en Jamaïque, possession anglaise depuis 1655, aussi connue comme étant un repaire de flibustiers.
La Jamaïque était entourée des possessions espagnoles de Saint-Domingue, de Cuba, de la Floride, du Mexique, de l’Amérique centrale et du Sud, et constituait ainsi un point stratégique pour la Couronne anglaise.
Le gouverneur de l’île envoyait souvent des corsaires en expédition. C’est ainsi qu’Henry Morgan participa en 1668 au pillage de Puerto Principe (Cuba) puis de Portobelo (Panama). L’année suivante, il débarqua à Maracaïbo qui fut une nouvelle fois mise à sac (elle le sera trois fois entre 1667 et 1678). Il pratiquait surtout le pillage sur terre ferme et utilisait son navire plus comme un moyen de transport que comme une arme. Très vite il devint l’un des pirates les plus craints des Antilles.
Si sa cruauté, notamment la torture des prisonniers et des habitants, lui valut quelques réprimandes, il fut néanmoins toujours couvert par le gouverneur.
Son exploit le plus mémorable fut sans aucun doute la prise de Panama en janvier 1671. Avec une armée de 2200 hommes, il mit à sac la ville pourtant particulièrement bien fortifiée et protégée contre les attaques des flibustiers. En effet, Panama était le point de chute de tous les galions espagnols chargés d’argent qui arrivaient des mines du Pérou (l’argent était ensuite transporté à dos de mulet jusqu’à Portobelo puis envoyé en Espagne).
À la fin de sa vie, Henry Morgan fut anobli par la Couronne d’Angleterre et nommé gouverneur de la Jamaïque.
Les pirates dans la géopolitique européenne
Dans ses guerres contre les puissances européennes et en particulier l’Angleterre et les Provinces-Unies, Louis XIV eut recours aux services de nombreux corsaires. Les plus connus furent le dunkerquois Jean Bart (1650-1702), célèbre pour ses exploits contre les Hollandais, et le malouin Duguay-Trouin (1673-1736) qui durant la guerre de succession d’Espagne (1701-1714), s’empara de Rio de Janeiro dans le but d’intercepter la flotte annuelle de l’or qui apportait du Brésil à Lisbonne les métaux précieux (le Brésil était alors une colonie portugaise alliée de l'Angleterre contre la France).
Après la paix signée à Utrecht en 1713 entre la Grande-Bretagne et la France, les marins de la Royal Navy et les corsaires laissés inoccupés s’enrôlèrent en masse dans la piraterie aux Caraïbes, sur la côte Est américaine, la côte Ouest africaine et l'océan Indien. En outre, le commerce triangulaire (dico) commençait à se développer et contribua fortement à la propagation de la piraterie à travers l’Atlantique Ouest.
Les navires transportant des esclaves étaient des cibles fructueuses pour les pirates. Ces derniers pouvaient les libérer et les intégrer à leur équipage ou bien les vendre s’ils n’avaient pas assez de place sur leurs navires.
Derrière les quelques rares exploits qu’on aime toujours à citer se cachaient en réalité une vie de misère où chaque petit profit était bon à prendre. Les pirates étaient des réprouvés, des apatrides naviguant sous pavillon noir, des criminels en marge de la société qui risquaient à tout moment de finir au bout d’une corde. C’est pourquoi ils furent qualifiés de forbans (« hors du ban » ou hors la loi).
Un des corsaires les plus connus de cette époque fut le Britannique Bartholomew Roberts (1682-1722). Dans les années 1720 il partit à l’assaut des Antilles puis des côtes africaines, et captura plus d’une centaine de navires qui la plupart du temps transportaient des esclaves. Il est décrit comme un homme élégant, mélomane et qui ne buvait jamais et fut à l’origine d’un des « codes des pirates » les plus connus.
Les codes de pirates, aussi appelés « chasse-partie », étaient adoptés par les corsaires puis par la plupart des pirates aux XVIIe et XVIIIe siècles : quelques jours avant le départ, l’équipage adoptait un contrat qui fixait un code de conduite, des règles sur le partage des butins, une police d’assurance pour chacun, et le rôle du capitaine de navire. Ce dernier était souvent élu par l’équipage et pouvait être destitué par un vote populaire.
On retrouve des principes similaires de solidarité et de démocratie dans certaines sociétés de pirates à l’instar de la « République des pirates » basée à Nassau sur l’île de New Providence dans les Bahamas. Ce repaire facilement accessible et sécurisé avait adopté son propre code de lois et servait de lieu de stockage pour les biens volés.
En 1718, la « République » de Nassau fut détruite par le gouverneur britannique Woodes Rogers et cette date marqua pour de bon le déclin de la piraterie dans les Antilles.
Cette même année mourut le fameux Barbe Noire, de son vrai nom Edward Teach, lors de la bataille de l’île d’Ocracoke, alors que son navire, l'Aventure, s'était échoué dans un combat avec le HMS Pearl du lieutenant Robert Maynard.
Beaucoup de ce que l'on sait de lui provient de l’Histoire générale des plus fameux pyrates de Charles Johnson, publiée en Grande-Bretagne en 1724. L’un de ses exploits les plus marquants fut sans doute le blocus de la colonie britannique de Charleston au terme duquel il obtint une rançon des habitants. Sa vie et sa personne furent beaucoup romancées et inspirèrent un grand nombre d’œuvres de fiction sur le thème des pirates.
Très vite, d’autres grandes figures de la piraterie disparurent. En octobre 1720, les troupes du Capitaine Barnet, qui travaillaient pour le Gouverneur de Jamaïque, capturèrent John Rackham, aussi appelé « Calico Jack » car il portait des vêtements très colorés faits de calicots. Ce dernier fut surtout connu parce qu'il comptait parmi les membres de son équipage les deux plus célèbres femmes pirates : Ann Bonny et Mary Read. Après leur capture, elles furent emmenées avec leurs compagnons d’infortune à Port Royal pour y être jugées et pendues. Anne Bonny réussit à éviter la pendaison d'une manière inconnue tandis que Mary Read mourut de fièvre jaune dans sa cellule.
Les pirates de Madagascar et de l’océan Indien
À partir des années 1690, les Antilles étaient devenues de moins en moins propices aux activités de course. Les gouverneurs coloniaux ne distribuaient plus aussi facilement de lettres de marque. En outre, les sociétés de pirates commencèrent à être perçues comme un danger pour les mœurs et la religion car bon nombre d’entre elles prônaient un mode de vie libertaire ou des idées égalitaires incompatibles avec les mœurs coloniales. Aussi les Frères de la Côte furent-ils progressivement chassés de leur repaire.
La Couronne anglaise, au vu des nombreuses pétitions de marchands, entreprit tout bonnement de chasser les pirates de l’espace caribéen pour protéger la navigation et le commerce. Le Parlement multiplia les traités dont le Navigation Act de 1696 qui désignait le pirate comme hostis humani generis (littéralement « ennemi du genre humain »). Des centaines de pirates furent ainsi pendus.
La répression poussa les capitaines à fuir l’espace caribéen et à migrer vers d’autres mers, notamment vers l’océan Indien qui devenait une cible de plus en plus riche et tentante pour la flibuste.
En effet, la production économique des Indes surpassait à cette époque celle de l'Europe, en particulier dans les textiles de grande valeur tels que la soie et le calicot. De nouvelles routes commerciales maritimes s’imposèrent et en particulier celles qui passaient par le canal du Mozambique ainsi qu’au large des côtes orientales de Madagascar. En outre, aucune marine puissante ne sillonnait l'océan Indien, laissant à la fois la navigation locale et les navires de diverses compagnies de l'Inde orientale vulnérables aux attaques.
Les pirates s’installèrent sur de petites îles comme l’île Sainte-Marie, près de Madagascar. Elles servaient de bases arrière où ils pouvaient entretenir le navire et se ravitailler en eau de source. De là, ils pouvaient intercepter les vaisseaux des compagnies des Indes anglaises, portugaises, néerlandaises, ou françaises en provenance de Chine ou d’Extrême-Orient. Les pirates agissaient aussi en mer Rouge où ils pouvaient piller les navires musulmans notamment les bateaux de l’Empire moghol et les navires arabes ou indiens qui se dirigeaient vers la Mecque.
Tous ces galions transportaient des épices, surtout du poivre ou de la muscade, du textile indien ou des soies du bengale, mais aussi de la porcelaine : un butin idéal pour les pirates. Après leurs pillages, ces derniers passaient des accords avec des marchands pour écouler le produit de leurs captures, car les biens saisis ne restaient pas longtemps entre leurs mains et repartaient donc sur d’autres navires. Ces marchandises volées alimentèrent le marché noir en Amérique du Nord qui constituait une menace importante pour le commerce de l’Angleterre.
Un des premiers pirates anglais à avoir quitté les Bermudes et les Amériques pour aborder l’Afrique occidentale puis l’océan Indien, fut le britannique Thomas Tew. Il serait mort en 1695 lors d'un affrontement après la chute de Libertalia, une colonie pirate utopique et libertaire qu’il aurait fondé au nord de Madagascar mais dont l’existence réelle n’est pas prouvée. Néanmoins il est certain que Thomas Tew ouvrit la voie à bien d’autres pirates.
Parmi eux, Henry Every dit Long Ben, fut en 1695 l’homme le plus recherché du monde, et pour cause. Avec son équipage, il pilla le Ganj-i-Sawai, le navire du Grand Moghol Alamgir Ier qui transportait, outre sa fille et sa suite, une quantité colossale d’or et de pierreries. Avec sa tête mise à prix, Henry Every aurait navigué en direction de l’Amérique du Nord pour écouler son butin.
Il disparut ensuite sans que l’on sache trop ce qu’il était devenu, mais le nom d’Henry Every refit surface en 2014, lorsqu’on découvrit dans un verger de Middletown, dans l’État de Rhode Island (Etats-Unis), plusieurs pièces en argent frappées au Yémen en 1693. Certains membres de l’équipage du capitaine Every se seraient installés en Nouvelle-Angleterre, où ils auraient dépensé leur butin.
On doit enfin citer le capitaine William Kidd (1645-1701) également réputé pour son trésor profondément enfoui. Il était d’ailleurs un marchand respectable installé à New-York avant de devenir un corsaire pour le compte de grands seigneurs anglais. Avec son navire Adventure Galley, équipé de 40 canons et 70 hommes, il devait attaquer les navires français.
Progressivement le capitaine Kidd devint un véritable pirate et se retrouva avec le gouvernement anglais sur le dos. Puis il navigua jusqu’à Madagascar en 1698 où un échec le força à revenir à New York. Là il reçut une lettre du gouverneur Richard Coote, comte de Bellomont, lui donnant rendez-vous à Boston et qui lui promettait de régler son problème.
Kidd fut en fait trahi et capturé puis envoyé en Angleterre pour y être jugé de ses actes de piraterie. Son procès fut très médiatisé ; Kidd ne pouvait prouver qu’il avait été corsaire car il avait perdu ses lettres de marques. Il tenta même de sauver sa tête en échange de son trésor et la légende lança de nombreux chercheurs sur sa piste. Finalement, William Kidd fut pendu devant une foule considérable et son corps fut ensuite attaché à un poteau suspendu au-dessus de la Tamise en guise d'avertissement pour les futurs pirates.
Dans l’océan Indien, les navires des Compagnies avaient donc du souci à se faire. Edward England se distingua avec la prise du navire anglais Cassandra lors du combat d’Anjouan (Comores) le 25 juillet 1720. Ce dernier opérait depuis Madagascar, accompagné d’autres pirates comme John Taylor, Christopher Condent, et Olivier Levasseur, dit « La Buse », un ancien corsaire français qui avait combattu pour Louis XIV.
Ensemble, le 26 avril 1721, ils attaquèrent un vaisseau portugais nommé la Vierge du Cap et dérobèrent des diamants et autres trésors d'une valeur totale de 800 000 £. Cette attaque est toujours considérée comme la plus grosse prise de l'histoire de l'âge d'or de la piraterie !
Mais vers la fin des années 1720, les pirates sentirent le vent tourner. À force d’être traqués par les flottes anglaise et française, et voyant les exécutions s’enchaîner, beaucoup acceptèrent les amnisties royales et abandonnèrent leurs activités. L’Âge d’or de la piraterie prenait fin. Certains pirates comme « La Buse », avant de partir, laissèrent au monde un dernier message codé avec à la clef un trésor « à qui saura le déchiffrer ».
• 10 juin 1805 : traité entre Washington et Tripoli
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