La « science de la maison ». Tel est le sens du terme écologie, construit à partir du grec oikos, maison, et logos, science (dico). Le terme apparaît en 1866, sous la plume du biologiste allemand Ernst Haeckel (1834-1919). Il qualifie une science, qui ambitionne d’étudier les interactions entre les êtres vivants et les milieux.
Si ce terme est donc récent, le fait d’étudier la nature, voire de s’alarmer de sa destruction, est quant à lui très ancien et remonte à la haute Antiquité.
Le plus vieux mythe écrit, l’épopée de Gilgamesh, montre déjà que ses auteurs sont conscients de ce que le recul des forêts entraîne l’aridification de régions entières. Il pose aussi la possibilité de destruction de l’humanité par un événement géologique, le Déluge, vu comme une punition divine : les dieux souhaitent en finir avec les humains car ils les trouvent trop bruyants.
Plus tard, le grand naturaliste Aristote subodore que si les Grecs doivent partir conquérir les richesses de Perse, c’est qu’ils ont trop érodé leurs collines à force d’agriculture (note)
Les limites démographiques
À partir des Temps modernes, en Chine comme en Occident, ces concepts pré-écologiques prennent parfois des accents que nous jugeons prophétiques. Ainsi, en Europe, le révérend Malthus publie anonymement en 1798 son Essai sur le principe de population.
L’ouvrage est l’argumentaire d’un pessimiste. Il vise à clouer le bec du père de l’auteur, archétype de l’optimiste. Le géniteur de Malthus, comme une majorité de ses compatriotes, est persuadé que l’humanité peut par son industrie transformer la Terre en paradis, car telle est la volonté de Dieu.
Malthus, lui, défend qu’il existe des limites : selon lui, la population humaine a une capacité de croissance excédant les capacités de production agricole. À chaque fois que la nourriture est abondante, elle nourrit une croissance démographique qui crée de nouvelles bouches et réduit rapidement ce gain à néant, créant les conditions d’une famine qui en retour décime la population.
L’auteur, plébiscité, republie son ouvrage en assumant cette fois sa signature et recommande de ne pas aider les pauvres – ils en profiteraient pour se multiplier, selon lui.
En décrivant ce « piège » ou « cliquet malthusien », liant la croissance démographique à la disponibilité des ressources, Malthus a raison et tort à la fois, ce pourquoi son œuvre (comme les alertes écologiques contemporaines) a suscité les prises de position les plus extrêmes.
Il a raison parce que sa règle a été effective tout au long de l’histoire humaine. Il a tort parce que la société britannique dans laquelle il vit commence tout juste à sortir du piège qu’il vient de décrire, avec la Révolution industrielle, la capacité de drainer des ressources du monde entier grâce à la colonisation puis au commerce international, et le recours aux énergies fossiles.
Six ans avant Malthus, le fonctionnaire chinois Hong Liangji (1746-1809) s’est déjà penché sur l’analyse des conséquences possibles de la surpopulation dans un monde fini, dans un livre intitulé Du gouvernement et du bien-être de l’Empire (1793).
À la fois ivrogne et ingénieur hors-pair, Hong Liangji est inspecteur dans la misérable province du Guizhou, dans le Sud-Ouest de la Chine. Il réalise que la population de sa province a été multipliée par cinq en trois décennies, sous l’effet des migrations internes à la Chine et du radoucissement du climat. Il évalue la croissance d’une famille type, calcule les progrès possibles en matière d’intensification des cultures et d’extension de la surface agricole, et conclut que l’État court à la catastrophe.
En un siècle, dit-il, la population sera multipliée par dix ou vingt, alors que la production agricole sera au mieux quadruplée et plus probablement doublée. Vivre frugalement ne suffira pas à enrayer la catastrophe.
Dans son livre, Hong pose une question : « Le cosmos a-t-il une réponse à une telle situation ? » Et il répond : « Oui. Inondations, sécheresses et épidémies sont les instruments du cosmos pour procéder aux ajustements nécessaires. »
Hong Liangji a bien anticipé ce qui va se passer en Chine au XIXe siècle. Il a juste oublié de mentionner la guerre (guerre de l’opium, révolte des Taiping, etc.), qui viendra conjuguer ses effets avec ceux des inondations, sécheresses et épidémies. En 1799, le gouvernement chinois s’avise de la publication de son livre et le censure, faisant comprendre à Hong qu’il doit se taire… ou disparaître. Il opte pour la discrétion (note).
Le déboisement et l’extinction d’espèces
À l’autre bout de l’Eurasie, les 70 000 morts portugais lors du tremblement de terre de Lisbonne, le 1er novembre 1755, affectent la culture européenne : on verra Emmanuel Kant et d’autres élaborer des hypothèses scientifiques pour expliquer le séisme, et l’État portugais intervenir puissamment pour parer au désastre sanitaire et économique.
À la fin du XVIIIe siècle, dans l’Europe des Lumières, le consensus dominant veut que le défrichement et l’agriculture adoucissent le climat et créent des conditions météorologiques propices à l’épanouissement de la civilisation. Là réside l’explication selon laquelle l’Europe est civilisée et les Amériques pas encore.
En 1780, Buffon, dans Les Époques de la nature, explique que « la face de la Terre porte aujourd’hui l’empreinte de la puissance de l’homme ». Il va jusqu’à supputer que l’humanité pourra un jour « modifier les influences du climat qu’elle habite et en fixer pour ainsi dire la température au point qui lui convient ».
Buffon met à mal le dogme fixiste, qui veut que Dieu ait créé le monde avec un nombre invariable d’espèces animales, en montrant que des animaux (en l’occurrence les mammouths, dont on avait retrouvé des restes) peuvent disparaître, ce qu’avait déjà deviné le penseur Bernard Palissy en 1563 en étudiant des fossiles de trilobites (note).
À partir du XIXe siècle, des questions écologiques deviennent sujets de débats scientifiques : couper des arbres est-il ou non bénéfique pour le climat ? En France, la controverse se conclut par la négative. Ce qui permet aux autorités de l’État, dans les années 1820, d’interdire aux paysans d’abattre des arbres sous peine de modifier le climat.
Le gouvernement, alors royaliste, impute aux révolutionnaires l’origine des troubles climatiques : en confisquant les bois à une aristocratie au fait de la gestion des forêts, en procédant à des coupes supposées sauvages, les suppôts de Danton et Robespierre auraient plongé la France dans un chaos environnemental dont il faut la faire sortir.
La même logique se prolonge dans les colonies : il est supposé que l’Afrique du Nord est trop chaude parce qu’elle aurait été déboisée et qu’il sera possible de rendre son climat plus agréable en la reboisant. En Algérie, les autorités coloniales encouragent ainsi dans les années 1860 la plantation de deux millions d’eucalyptus. L’arbre odorant est supposé faire barrage aux « miasmes » émanant des localités indigènes présumées sales et donc propices aux épidémies.
Ce préjugé colonial sert avec d’autres de paravent à la mainmise sur les ressources environnementales : durant la colonisation, les Européens sont censés savoir mieux gérer la nature, pour le bien des autochtones qu’ils expulsent des meilleures terres.
Les îles tropicales sont un cas particulier. Elles constituent des environnements fragiles où les destructions des biotopes sont davantage visibles et deviennent le laboratoire des politiques de protection de l’environnement.
L’agronome Pierre Poivre, intendant de l’île Maurice à partir de 1760, est déjà conscient que le déboisement dégrade le milieu : les ports s’envasent, les glissements de terrain se multiplient. Il parvient à freiner l’abattage des forêts face au développement des plantations sucrières, et fait adopter par une loi le concept de réserve naturelle.
Sa politique sera partiellement reprise par les Britanniques dans leur administration coloniale. Ces idées se diffusent dans la pensée des conservationnistes états-uniens, tels le peintre George Catlin (1796-1872) et le philosophe Henry David Thoreau (1817-1862). Elles seront une des sources de la création des premiers parcs nationaux, à commencer par celui de Yellowstone en 1872.
Le réchauffement climatique
Conscient que le climat peut changer au fil du temps, le chimiste suédois Svante Arrhenius formule en 1896 une loi sur l’effet de serre, prolongeant les intuitions du Français Joseph Fourier. En 1908, Arrhenius estime qu’un réchauffement est probablement à l’œuvre. Le taux de CO2 dans l’atmosphère croît lentement, diagnostique-t-il. Au point qu’il va doubler dans les trois millénaires à venir.
Le savant s’en réjouit. Il estime que cela entraînera une hausse progressive des températures planétaires moyennes, +5 °C en trois mille ans. Le climat sera adouci, et nos lointains descendants jouiront d’effets bénéfiques, par exemple en plantant des vignes en Suède.
Un match décisif entre pro- et anti-changement climatique se joue alors à Londres. Au cours du XIXe siècle, des dizaines d’explorateurs se sont succédé en Asie. Ils ont arpenté, cartographié, relevé les pressions atmosphériques, mesuré le niveau des lacs, le débit des rivières et l’altitude des montagnes, exhumé les ruines de villes autrefois prospères. Leurs informations ont convergé vers la Royal Society.
Sur la base des données recueillies, deux géographes croisent le fer : Sven Hedin (1865-1952) et Ellsworth Huntington (1876-1947).
Le rebelle Huntington formule une théorie du cycle climatique dans The Pulse of Asia (1907). Il est convaincu que l’on assiste à une « pulsation » à l’échelle continentale, qu’il a décelée par exemple au Lob Nor.
Ce marécage du désert du Taklamakan, dans la province chinoise du Xinjiang, recule, et les couches de sédiments qui l’entourent montrent que ce lieu était autrefois occupé par un grand lac que le sable a progressivement envahi.
Or, bien qu’ayant aussi étudié de près le Lob Nor, le « ponte » qu’est devenu Hedin s’obstine à défendre que le climat reste constant. Le consensus qui finit par émerger au sein de la Royal Society renforce les préjugés coloniaux : comme ses populations, l’Asie serait une terre inerte, passive, indolente, rétive à tout changement fût-il environnemental.
Ostracisé par ses pairs, Huntington reste fidèle à ses idées. Il publie en 1915 un ouvrage pionnier, Civilization and Climate, dans lequel il établit de nombreux liens entre changement climatique et histoire humaine.
En 1938, l’ingénieur britannique Guy Stewart Callendar (1897-1964) défend devant la Royal Meteorological Society qu’un réchauffement est en cours, et que les hommes en sont responsables par leurs émissions de gaz à effet de serre. Ce qui selon lui serait une bonne nouvelle : l’humanité repousserait ainsi le retour des glaciations.
Dès les années 1950, plusieurs climatologues et physiciens démontrent à des échelles locales que le taux de CO2 augmente, que l’Islande se réchauffe ou que certains glaciers reculent.
En 1957, les scientifiques Roger Revelle et Hans E. Suess, conscients de l’accumulation de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère, posent le diagnostic suivant : « Dans quelques siècles, nous aurons envoyé dans l’atmosphère le carbone stocké dans les roches sédimentaires depuis des centaines de millions d’années. Cette expérience, si nous la documentons précisément, devrait nous apporter une connaissance approfondie des processus altérant la météorologie et le climat. »
En 1958, le météorologue Charles D. Keeling met en évidence, depuis le sommet californien de Big Sur, que le taux de CO2 augmente globalement dans l’atmosphère.
L’idée d’un réchauffement climatique d’origine anthropique et potentiellement dangereux a longtemps mûri. Aux États-Unis, elle a été tenue sous le boisseau par les mêmes lobbies qui assuraient les pouvoirs publics et les opinions de l’innocuité relative du tabac.
La fin des ressources énergétiques
En 1860, lors de la signature du traité de libre-échange entre Angleterre et France, le Parlement britannique s'inquiète de la menace d’épuisement des mines nationales de charbon. Le débat mobilise l’opinion publique.
L’économiste Stanley Jevons publie en 1865 The Coal Question. An inquiry concerning the progress of the Nation, and the probable exhaustion of our coal-mines. Il y expose son fameux paradoxe, appelé « effet rebond » : le fait de rendre les machines plus économes en énergie n'amène pas une baisse de la consommation globale de combustible, car les machines devenant plus productives, elles produisent à moindre coût et suscitent une demande accrue de leurs produits de sorte que l'on est conduit à utiliser davantage de machines.
Les « monstres » automobiles que sont les actuels SUV témoignent de ce paradoxe : leurs moteurs sont beaucoup plus performants que ceux des petites voitures d’il y a un demi-siècle, mais au lieu de continuer à rouler dans de petites voitures en consommant moins de carburant, nous avons fait le choix de consommer toujours autant de carburant, sinon plus, en nous offrant de plus grosses voitures.
C'est un peu la même chose avec les « passoires thermiques ». Leurs habitants endurent un certain inconfort et limitent le chauffage aux pièces principales de leur logement. Après une rénovation énergétique, ils choisissent à dépense constante d'améliorer leur confort plutôt que de rester dans le même inconfort avec une dépense moindre. Si la rénovation énergétique est un bienfait social, elle n'est souvent d'aucun bénéfice en matière de lutte contre l'effet de serre...
Les pénuries alimentaires
En 1898, le chimiste britannique William Crookes estime que la population humaine croît plus vite que les ressources agricoles. Il pronostique en conséquence qu’avant 1930, la planète plongera dans la famine et sera ravagée par une guerre mondiale... À moins que l’on ne trouve un moyen de créer des engrais à volonté : il s’agirait de prélever l’azote de l’air (ce gaz compte pour les 4/5e de notre atmosphère) en le fixant sous la formule chimique des nitrates.
Solubles dans l’eau, ces nitrates fourniraient un afflux important de nourriture aux plantes cultivées. Il serait alors possible de planter de façon massive et répétitive. Grâce aux nitrates de synthèse, on pourrait chaque année refertiliser massivement les champs, multiplier les ressources alimentaires, sauver l’humanité de la famine.
C’est en Allemagne, pays leader dans la chimie, que le miracle a lieu. Durant le XIXe siècle, les nitrates allemands sont pour l’essentiel importés d’Amérique du Sud, sous forme de guano – excréments d’oiseaux riches en azote.
En 1909, désireux de rendre son pays moins vulnérable à un blocus, le chimiste allemand Fritz Haber réussit à fixer l’azote de l’air pour fabriquer de l’ammoniac. En 1913, associé au chimiste Carl Bosch (1874-1940) au sein du groupe BASF (toujours numéro un mondial de la chimie, avec un chiffre d’affaires de 63 milliards d’euros en 2018), il dépose le brevet du procédé de synthèse de l’ammoniac.
Lorsque la guerre éclate, Fritz Haber supervise l’utilisation des gaz de combat, dans le but de hâter la victoire de l’Allemagne. Paradoxe : en 1919, Fritz Haber, bien qu’inculpé de crime de guerre, reçoit le prix Nobel de chimie, le récompensant de ses travaux pour « le bien-être de l’humanité ».
L’invention du nitrate de synthèse n’empêche pas les guerres mondiales. Elle les favorise. Parce que les nitrates permettent de fabriquer les explosifs. Ce qui était l’intention première du patriote Haber : permettre à l’Allemagne de fabriquer de la poudre et de la dynamite même si elle était chassée des océans.
Ses découvertes trouvent aujourd’hui une application pratique : les engrais azotés déversés dans les champs pour pallier la disparition des insectes et lombrics qui en assuraient la fertilité, ainsi que les pesticides et herbicides permettant d’optimiser la production des monocultures au détriment du bien-être et de l’autonomie des agriculteurs, dérivent directement de ses travaux et de ceux de ses successeurs.
Les dust bowls, signaux de l’Anthropocène
La Première Guerre mondiale marque un seuil avec le passage d’un monde où l’énergie mécanique devient plus importante, en volume, que l’énergie animale. La bascule survient autour de 1917. La guerre, qui a commencé avec des charrettes tractées par des chevaux, se termine par le défilé de divisions blindées.
Les mécanismes de l’Anthropocène sont en train de se construire comme l’a synthétisé l’historien John R. McNeill (note). Épisode majeur, la crise économique des années 1930 se double, aux États-Unis, d’une alerte environnementale forte : les dust bowls.
Dans la seconde moitié du XIXe siècle sont établies d’importantes liaisons transatlantiques avec des paquebots mus par la vapeur. L’Europe envoie ses excédents de population vers l’Amérique du Nord. Les immigrants, souvent pauvres, payent de quelques années de travail leur ticket pour la traversée de l’Atlantique.
Quarante-cinq millions d’Européens s’exilent dont 34 millions aux États-Unis. Ils mettent en œuvre les techniques qui assurent en Europe le rendement des monocultures. Mais l’échelle du continent nord-américain est différente : des plaines immenses, où des vents puissants sont susceptibles de créer une forte érosion.
Ces plaines étaient jusque-là couvertes de prairies et de bosquets. Leur mise en culture et en pâturage intensifs entraîne un phénomène d’érosion. Le 24 octobre 1929, la bourse de New York décroche. La Grande Dépression économique se double d’une crise écologique majeure : les dust bowls. À partir de 1930, un effondrement écologique lié à la surexploitation des terres agricoles transforme d’immenses étendues fertiles en plaines sableuses parcourues de tornades.
Kansas, Colorado, Texas, Oklahoma et Nouveau-Mexique... Entre 1931 et 1939, 20 millions d’hectares de terres agricoles sont transformés en dunes et steppes. Le journaliste Timothy Egan résume : « Les Américains étaient devenus une épouvantable force géologique, capable de changer le visage de la Terre à une échelle supérieure à l’activité des volcans, des séismes, des tsunamis, des cyclones et à toutes les excavations que l’humanité avait pu creuser depuis le début de l’histoire. »
Des études ont souligné que la monoculture du blé et le pâturage intensif ont modifié le climat à l’échelle continentale, en amplifiant considérablement la sécheresse. La crise climatique qui frappe aujourd’hui la Californie, sur fond d’asséchement des nappes phréatiques et de mégafeux carbonisant les forêts, trouve ses racines dans cette histoire.
À partir de la fin de la Seconde Guerre mondiale, le consumérisme triomphe. Les pays développés connaissent une croissance forte, dite en France les Trente Glorieuses. Les bénéfices, en termes sanitaires (eau courante et réseaux de soins), alimentaires (nourriture variée et abondante), économiques (surface habitable étendue, appareils de toute sorte, véhicules et réseaux de transports…) sont tellement évidents qu’ils éclipsent tout le reste. Rares sont ceux qui perçoivent les changements environnementaux à l’œuvre.
Les écosystèmes en péril
Pourquoi la destruction des écosystèmes, documentée aujourd’hui, a-t-elle longtemps échappé à l’attention ? Les poissons de Key West en fournissent une illustration : cette série de photos montre des pêcheurs posant, année après année, depuis 1952, avec leurs prises à date fixe, devant un panneau qui sert d’échelle. On y voit toute l’évolution des écosystèmes dans la seconde moitié du XXe siècle : des poissons qui diminuent en taille (et pour certaines espèces disparaissent), des humains qui grossissent
Le biologiste Daniel Pauly résume ce processus en une formule célèbre, shifting baseline, que l’on pourrait traduire par « références flottantes ». Chaque génération a en mémoire la taille des poissons qu’elle a connus et ne s’alarme pas de voir que les daurades ont perdu en trente ans la moitié de leur taille car, quand les adultes deviennent rares, les juvéniles assurent la reproduction, ce qui réduit la taille des animaux. À lire l’extraordinaire texte La Mer de Michelet, on se prend à rêver des côtes atlantiques françaises et des écosystèmes extraordinaires qu’elles abritaient au XIXe siècle, alors même qu’ils étaient déjà fortement dégradés par rapport à l’Antiquité, au temps où le grand pingouin folâtrait sur nos côtes, où les aurochs paissaient dans d’innombrables marécages.
Si une peur habite les années 1950-1970, c’est celle de l’hiver nucléaire. Une inquiétude scientifiquement fondée. Elle est exposée crûment dans le film Le Dernier Rivage.
La distinction est importante : la crainte du futur que manifestent certains mouvement écologistes aujourd’hui s’appuie non sur l’interprétation de textes religieux, mais sur des argumentations résultant de la lecture d’articles scientifiques.
On sort du domaine de la croyance pour entrer dans celui de la controverse…
Calamités et catastrophes
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Pajonk (24-05-2020 11:51:56)
Avec Fritz Haber il convient de rendre à César ce qui lui revient et se souvenir aussi de Blaise Pascal qui relevait que: " l'homme n'est ni ange ni bête....". Les recherches scientifiques de Haber... Lire la suite