22 janvier 1905

Dimanche rouge à Saint-Pétersbourg

Le 22 janvier 1905 est qualifié de « Dimanche rouge » par les Russes. Ce jour-là (9 janvier selon le calendrier julien encore en vigueur en Russie), à Saint-Pétersbourg, devant le Palais d'Hiver, résidence officielle du tsar Nicolas II, 100 000 grévistes manifestent en silence et sans armes.

Sous la conduite d'un personnage équivoque, le pope Gapone, les manifestants désirent transmettre une supplique à leur souverain. En tête de cortège, ils brandissent des icônes du tsar et des bannières religieuses.

André Larané
Dimanche rouge à Saint Pétersbourg, photographie d'époque

Tragique malentendu

Les autorités, qui ont eu vent du projet, ont prévu que le tsar se rendrait ce jour-là dans son palais de Gatchina, au sud de la ville, et que les grévistes, informés de son absence, renonceraient à manifester...

Mais l'information n'arrive pas aux manifestants. Sur un terrible malentendu, l'armée tire et fait des centaines de morts. « Il n'y a plus de Dieu ni de tsar », s'écrie Gapone. Le massacre, qui a eu lieu sous les fenêtres mêmes de l'ambassade britannique, provoque une vague d'indignation dans le monde entier.

Dimanche rouge à Saint Pétersbourg, photographie d'époque

Révolution en marche

C'est le début de la Révolution de 1905. Les étudiants russes décrètent la grève tandis que, dans les usines, les ouvriers forment des embryons d'assemblées révolutionnaires. Les minorités de l'empire (juifs, Polonais, Baltes...) sautent sur l'occasion pour revendiquer un supplément de droits.

L'agitation se nourrit de la crise économique que traverse le pays. Elle redouble d'intensité avec les désastres militaires qui surviennent en Extrême-Orient, face aux armées japonaises.

Le 20 octobre 1905, une grève des cheminots immobilise l'immense empire et débouche sur une grève générale. Dans les usines apparaissent les premiers conseils d'ouvriers (soviets en russe). Des mutineries éclatent dans la base navale de Cronstadt et sur certains navires de guerre comme le célèbre Potemkine.

Le tsar est dès lors obligé de céder aux revendications ! Sur le conseil du comte Serge Witte, qui, dans les années antérieures, présida comme ministre au décollage économique de la Russie, il publie le 30 octobre 1905 un manifeste par lequel il promet à ses sujets les libertés de conscience, de réunion, de parole... (« les fondements immuables de la liberté civile » selon Witte).

Le tsar promet aussi d'ériger l'assemblée consultative de la Douma en Assemblée législative, apte à voter des lois.

Serge de Witte (Tbilissi, 29 juin 1849 - Petrograd, 13 mars 1915)Le 6 novembre 1905, Witte devient lui-même le Premier ministre du premier gouvernement constitutionnel de la Russie. Il négocie auprès de la France un nouvel emprunt, plus colossal que les précédents, en vue de relancer l'économie nationale. La Russie semble dès lors engagée sur la voie de la démocratie et du progrès.

Mais le tsar, qui aspire à restaurer sans tarder l'autocratie en s'appuyant sur la paysannerie qui lui reste fidèle, rejette la réforme agraire proposée par son Premier ministre. Et les concessions démocratiques ne suffisent pas à rétablir la confiance entre les ouvriers et Nicolas II. 

Les élections d'avril 1906 se traduisent par la victoire des radicaux et des libéraux de gauche, les « Cadets ». Witte se retire dès le 6 mai, sans attendre d'être désavoué par le tsar. Il est remplacé par le très conservateur Ivan Goremykine qui revient sur tous les engagements antérieurs mais doit jeter l'éponge dès le 21 juillet 1906 faute de pouvoir faire face à l'obstruction de la Douma. Le tsar se résout à appeler à la tête du gouvernement un homme à poigne réformateur, Piotr Stolypine.

Mais Nicolas II prend aussi le risque de détourner la colère populaire sur les juifs... Sa police, l'Okhrana, suscite la formation de ligues loyalistes et antisémites comme l'Union du peuple russe, surnommée les Cent-Noirs. L'Okhrana fomente aussi des pogroms. Pour nourrir la haine contre les juifs, nombreux dans les villes occidentales de l'empire, elle diffuse un faux document appelé à une sinistre notoriété : Les Protocoles des Sages de Sion (il s'agit d'un tissu d'inepties sur de prétendus crimes rituels pratiqués par les juifs).

Valentin Serov, Soldats, soldats, où est passée votre gloire ? 1905, Saint-Pétersbourg, Musée russe.

Publié ou mis à jour le : 2022-01-21 14:52:18

Voir les 6 commentaires sur cet article

Claude (24-01-2017 15:26:58)

@Dragases Merci pour votre remarques. Elles reprennent cependant trop la propagande de guerre et d'après-guerre d'une administration française désireuse de cacher son laxisme imprudent envers la Ru... Lire la suite

Guyard (22-01-2017 17:40:02)

Centaines de morts sous les fenêtres de l'ambassade de Grande Bretagne: le monde est indigné. Le même jour, les Zoulous mettent une raclée à l'armée de Grande Bretagne. Qui s'indignera des massa... Lire la suite

Hugo (22-01-2017 17:37:03)

Bonjour, Il serait tout à l'Honneur d'Hérodote de ne pas tomber dans le travers commun, car le vrai nom de la ville est Санкт-Петерб... Lire la suite

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