9 novembre 1867

Le Japon entre dans l'« ère des Lumières »

Le 9 novembre 1867 commence au Japon l'ère Meiji (lumière en japonais), d'après le nom que l'empereur Mutsuhito a choisi pour qualifier son règne et se faire désigner après sa mort.

Le Japon féodal en crise

Depuis 1616, soit plus de deux siècles, l'Empire du soleil levant était gouverné par une famille, les Tokugawa. Ils exercaient la fonction de shogun (ou maire du palais) tandis que l'empereur héréditaire gardait une fonction symbolique à caractère religieux.

Les Tokugawa maintenaient le pays dans un total isolement diplomatique et lui conservaient ses structures féodales. Mais l'irruption d'une escadre américaine en 1853 avait fait chavirer les esprits et suscité de violents conflits entre conservateurs et réformistes.

C'est ainsi que le 8 novembre 1867, suite à des émeutes et sous la pression de quelques grands seigneurs ou daimyos qui entourent le souverain, le dernier shogun, Tokugawa Yoshinobu, remet ses pouvoirs au jeune empereur Mutsuhito.

La famille impériale japonaise, Torajiro Kasai , 1900, musée national des arts asiatiques Guimet, Paris. L'empereur Mutsuhito se tient debout au centre).

L'« ère des Lumières »

Né le 3 novembre 1852, le 122e empereur du Japon a 15 ans à peine. Il prend le nom de règne de Meiji Tenno et s'attribue officiellement tous les pouvoirs. Dans son ombre gouvernent de fait les daimyos réformistes.

L'empereur déplace sa résidence officielle de Kyoto (qui signifie en sino-japonais ville capitale) à Yedo (ou Edo), qui est déjà depuis 1603 la capitale administrative du pays et l'une des principales villes du monde avec plus d'un million d'habitants. La nouvelle capitale du Japon prend le nom de Tokyo (capitale de l'Est).

Mutsuhito se donne pour insigne officiel le chrysanthème, une fleur déjà honorée par ses lointains ancêtres, d'où l'expression « trône du chrysanthème » qui désigne parfois le pouvoir impérial. Il réinvente par ailleurs une « tradition nationale japonaise » fondée sur le culte d'État, le shintoïsme. Il fait en particulier édifier le temple Yasukuni réservé aux morts pour la patrie. Les bouddhistes, très influents à l'époque des Tokugawa, sont obligés de s'aligner sur les nouvelles valeurs patriotiques.

En 1871, l'empereur abolit officiellement la hiérarchie instaurée par les shoguns. Les samouraï, qui étaient tenus d'obéir de père en fils à leur seigneur, le daimyo, conformément au code de l'honneur, le bushido, se mettent au service de l'empereur ou se reconvertissent dans les affaires. La même année, l'empereur envoie en Occident une mission d'étude, la mission Iwakura, en vue de collecter toutes les idées de bon aloi. Sa mission va durer de décembre 1871 à septembre 1873 !

Dès 1872, le Japon se dote de sa première ligne de chemin de fer. Empruntant sans état d'âme aux Occidentaux ce qu'il estime bon, l'empereur instaure le service militaire et bâtit une armée moderne sur le modèle allemand. C'en est fini des beaux uniformes des samouraïs et de leur armement féodal, notamment le katana (sabre). Les nouvelles troupes portent des uniformes inspirés des Français et sont armées de fusils occidentaux. Quant aux malheureux samouraïs, ils se reconvertissent dans les affaires... sauf une poignée d'irréductibles qui meurent pour l'honneur à la bataille de Shiroyama.

Visite des jeunesses hitlériennes à la procession de la couronne de shintô de l’État du sanctuaire Yasukuni, octobre 1938.

Pomme de discorde

Dans le temple Yasukuni, dont le nom signifie « pays [kuni] pacifié [yasu] », sont aujourd'hui honorés plusieurs acteurs de la Seconde Guerre mondiale, à l'origine de crimes de guerre dans les pays occupés. Pour cette raison, ce temple revient régulièrement au centre de querelles diplomatiques.

L'empire triomphe

En quelques années, le pays s'arrache ainsi à la féodalité et rejoint le peloton des nations les plus avancées. En 1889, Meiji Tenno peut s'offrir le luxe de boucler l'ère des réformes en introduisant une Constitution et en se défaisant d'une partie de son pouvoir au profit de deux assemblées élues.

Le succès de la politique impériale trouve une spectaculaire consécration avec, en 1905, la victoire du Japon sur la Russie. C'est la première fois depuis plusieurs siècles qu'une puissance européenne est défaite par une puissance asiatique.

Le prodigieux essor de l'empire du soleil levant sous l'ère Meiji trouve une explication dans le très haut degré d'éducation du peuple japonais. En effet, au XIXe siècle, le taux d'alphabétisation était déjà comparable à celui des provinces européennes les mieux éduquées (50% de la population adulte savait lire et écrire).

Béatrice Roman-Amat
Publié ou mis à jour le : 2019-04-30 15:41:11

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