Henri Grégoire (1750 - 1831)
« Les rois sont dans l'ordre moral ce que sont les monstres dans l'ordre physique [...]. L'histoire des rois est le martyrologe des peuples »
L'abbé Grégoire adressa cette grandiloquente formule à l'Assemblée de la Convention, le 21 septembre 1792, jour de son ouverture et de la fondation officielle de la première République française. Henri Grégoire est le fils d'un paysan lorrain. Ayant montré des dispositions pour les études, il est éduqué au collège jésuite de Nancy, ordonné prêtre en 1776 et nommé curé à Embermesnil, en Lorraine. Très ouvert aux idées généreuses des «Lumières», il publie en 1788 un Essai sur la régénération physique, morale et politique des juifs qui est distingué par l'Académie de Metz. Député du clergé aux états généraux en 1789, l'abbé demande et obtient la réunion des trois ordres. Il vote la Constitution civile du clergé (1790) puis l'égalité des droits civils pour les juifs (1791). Devenu évêque assermenté de Blois, il siège à la Convention, dans les rangs de la Montagne (la gauche révolutionnaire). Son action réformatrice ne faiblit pas. C'est ainsi qu'il fait voter l'abolition de l'esclavage (1794) et se penche sur les patois et dialectes en vue d'établir la suprématie définitive du français, défini comme langue de la liberté et de la démocratie. Grégoire contribue également à la fondation de l'Institut et du Conservatoire des Arts et Métiers. On lui doit l'invention du mot vandalisme, en référence à des Barbares qui saccagèrent Rome en 455. Il emploie ce mot dans un rapport adressé à la Convention le 11 janvier 1794 où il dénonce les destructions intempestives de monuments et d'oeuvres d'art par les armées républicaines. Avec lui émerge donc le concept de protection du patrimoine. Absent lors du procès de Louis XVI en 1793, Grégoire se prononce pour sa condamnation tout en réclamant l'abolition de la peine capitale. Après la chute de Robespierre, il devient membre du Conseil des Cinq-Cents (1795-1798) puis du Corps législatif (1800), enfin sénateur (1802). Il se range dans l'opposition libérale sous l'Empire et sous la Restauration. À sa mort, il est interdit de sépulture chrétienne en raison de ses engagements passés !