Les tribulations des femmes à travers l'Histoire

De la Révolution à la Belle Époque : la grande régression

Le XVIIIe siècle ou Siècle des Lumières offre aux femmes de la haute aristocratie et de la grande bourgeoisie l'occasion de briller comme jamais en société. La France, en avance sur tous les autres pays, témoigne aussi d'une volonté inédite des couples de maîtriser leur fécondité. Mais il faut attendre la Révolution pour que s'améliore le statut des femmes. De l'égalité juridique au divorce par consentement mutuel et même au droit de porter des armes, les femmes deviennent d'authentiques citoyennes... à cela près qu'elles ne disposent pas du droit de vote.

Mais tout va basculer à partir de l'automne 1793, tant sous les gouvernements révolutionnaires que conservateurs ou bourgeois. En dépit du combat des premières militantes féministes et de la visibilité de quelques femmes de lettres, la révolution industrielle et l'apogée de l'Europe vont coïncider avec une régression sans pareille du statut social et politique des femmes dans l'Occident du dernier millénaire. Les premiers signes d'émancipation vont seulement apparaître à la « Belle Époque », au début du XXe siècle, et se concrétiser après la Première Guerre mondiale...

Isabelle Grégor et André Larané

Bravoure des femmes parisiennes à la journée du 5 octobre 1789, Jacques-Philippe Caresme, BnF, Paris.

Révolution française (1789-1793) : les « Tricoteuses » en marche !

Dès le milieu du XVIIIe siècle s'est fait sentir une aspiration des Françaises à plus d'autonomie, dans les campagnes comme dans les salons littéraires. Le signe le plus évident est un début de maîtrise de la fécondité, perceptible dès 1760 dans les tables de démographie : en avance d'une ou plusieurs générations sur le reste de la planète, les Françaises et leur conjoint se pénètrent de l'idée de limiter leur progéniture et, simultanément, d'assurer de meilleures garanties de survie aux enfants qui viennent à naître et à leur mère. C'est avant tout en retardant le mariage que s'amorce cette maîtrise de la fécondité. L'âge au premier mariage est alors de 28 ans pour les garçons et 26 ans pour les filles (25 et 23 ans en 1980).

Gravure révolutionnaire : Le grand abus, la paysanne supporte le fardeau de la nonne et de l'aristocrate (musée Carnavalet)Arrivées plus tard au mariage, les femmes se montrent moins disposées à la soumission et leur maturité va s'exprimer très tôt dans la Révolution. Dans certains cahiers de doléances de 1789, on peut ainsi lire la formule suivante, citée par Christine Le Bozec (Les Femmes et la Révolution, Passés/Composées, 2019) : « Les Français, dites-vous sont un peuple libre et tous les jours vous souffrez que 13 millions d’esclaves portent honteusement les fers de 13 millions de despotes ».

Les 5 et 6 octobre 1789, exacerbées par le coût de la vie et les difficultés d’approvisionnement, lasses des palinodies masculines, les Parisiennes vont chercher à Versailles « le boulanger, la boulangère et le petit mitron ». L'événement est capital car, en s'en prenant au souverain lui-même et non pas seulement à ses représentants ou ses symboles (la Bastille), ces femmes font irrévocablement basculer la France dans la Révolution. Et elles n'en restent pas là ! Certes, elles ne sont qu'un petit nombre, quelques milliers tout au plus, mais leur détermination et leur présence au coeur des événements vont avoir une incidence majeure sur l'Histoire en marche...

- Des avancées spectaculaires :

Les Tricoteuses jacobines, ou de Robespierre, Pierre-Étienne Lesueur, 1794, Musée Carnavalet, Paris.En premier lieu, les Parisiennes se saisissent du droit de pétitionner institué par la Constituante le 29 juillet 1789 pour déposer leurs revendications à l'Assemblée.  Elles s'introduisent également dans les clubs qui acceptent la mixité et créent leurs propres clubs de sorte qu'entre 1789 et 1793, cinquante-six clubs féminins voient le jour !

Omniprésentes dans les manifestations où elles poussent leurs hommes à agir, elles sont aussi très actives dans les tribunes de l'Assemblée ouvertes au public, et c'est au rythme de leurs aiguilles à tricoter que se déroulent les débats en contrebas.

L'une de ces « Tricoteuses », Pauline Léon, présente le 6 mars 1792 une pétition signée par 319 femmes qui réclame la création d'une garde nationale féminine et l'armement des femmes en vertu du droit naturel « qu'a tout individu de pourvoir à la défense de sa vie et de sa liberté ». Il s'agit d'un enjeu essentiel, la citoyenneté et le droit de vote étant depuis la Grèce antique associés au droit de porter des armes et au devoir de défendre la Patrie.

Quelques jours plus tard, une autre « Tricoteuse », Théroigne de Méricourt, appelle les femmes à former un « corps armé ». Les circonstances s'y prêtent du fait que le mois suivant, le 20 avril 1792, le gouvernement va déclarer la guerre au « roi de Bohême et de Hongrie ». Au final, quelques poignées de femmes seulement s'engageront dans les armées.

Dans cette première phase de la Révolution, optimiste et audacieuse, l'horizon des femmes s'illumine : « c'est en effet au cours de ces années que l'union libre est reconnue, comme les droits de l'enfant illégitime ou né hors mariage, que l'on considère la prostitution de manière indulgente, que les femmes sont acceptées dans les armées... » (Christine Le Bozec, ibid).

Depuis août 1790, un mari ne peut plus faire enfermer sa femme et ses enfants et il appartient aux tribunaux de régler les litiges familiaux. En avril 1791, l'égalité successorale est partout généralisée, préfigurant la loi du 7 mars 1793 qui instaure le partage égal des héritages entre les enfants.

Avant de se séparer, le 20 septembre 1792, l'Assemblée Législative institue le mariage civil. La loi proclame aussi l'égalité des époux et autorise le divorce par consentement mutuel... avec le vœu d'encourager ainsi le mariage en lui ôtant son caractère irrémédiable ! À vrai dire, il n'y a guère que les Parisiens qui vont en profiter avec six mille divorces la première année sur une population de près de 700 000 habitants.

Club des femmes patriotes dans une église, Chérieux, 1793, BnF Gallica, Paris.

- « Citoyennes sans citoyenneté »

La fermière en corvée. La paysanne fléchit sous le poids du clergé et de la noblesse, estampe, 1789, BnF, Paris.En avance sur le reste de l'Europe (et du monde), les Françaises se sont vues en l'espace de trois ans reconnaître les mêmes droits civils et juridiques que les hommes, mais à l'exception notable du droit de vote. Il ne faudrait tout de même pas pousser !

En décembre 1789, les députés de l'Assemblée constituante ont ainsi catalogué les femmes parmi les citoyens « passifs », comme les hommes qui ne sont pas assujettis à l'impôt. Du même coup, ils les ont exclues du droit de vote, ce qui en a fait en quelque sorte des « citoyennes sans citoyenneté ». Ils se sont donnés pour cela une bonne raison : la citoyenneté implique des devoirs dont celui de payer un minimum d'impôt et celui de défendre la Patrie et, s'il le faut, verser son sang pour elle. Or, les femmes ne sont pas requises pour porter les armes. CQFD.

D'aucuns reprochent aussi aux députés de ne pas avoir mentionné les femmes dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen d'août 1789. Mais en fins lettrés, ils ont de toute évidence employé le mot Homme (avec une majuscule) dans le sens générique d'« être humain »...

Les protestations furent rares. La plus notable est celle du marquis de Condorcet, le dernier « philosophe » du Siècle des Lumières. Poussé par son épouse Sophie, il publie en 1790 un traité Sur l'admission des femmes au droit de cité dans lequel il écrit avec une pointe d'ironie : « Il serait difficile de prouver que les femmes sont incapables d'exercer les droits de cité. Pourquoi des êtres exposés à des grossesses et à des indispositions passagères ne pourraient-ils exercer des droits dont on n'a jamais envisagé priver les gens qui ont la goutte tous les hivers et qui s'enrhument aisément ? »

Et n'oublions pas la dynamique Olympe de Gouges *. Celle-ci dédie à la reine Marie-Antoinette sa Déclaration des Droits de la femme et de la citoyenne, dans laquelle elle écrit : « La femme a le droit de monter à l'échafaud, elle doit avoir également le droit de monter à la tribune » (article 10). Considérée comme l’une des pionnières du féminisme, Olympe de Gouges revendique le droit de vote sans distinction de sexe.

Déclaration des Droits de la femme et de la citoyenne, par Olympe de Gouges (extraits)

Olympe de Gouges (1748–1793), Alexander Kucharsky, collection particulière.« Homme, es-tu capable d’être juste ? C’est une femme qui t’en fait la question ; tu ne lui ôteras pas du moins ce droit. Dis-moi ? Qui t’a donné le souverain empire d’opprimer mon sexe ? Ta force ? Tes talents ? […]
Bizarre, aveugle, boursouflé de sciences et dégénéré, dans ce siècle de lumières et de sagacité, dans l’ignorance la plus crasse, [l’homme] veut commander en despote sur un sexe qui a reçu toutes les facultés intellectuelles ; il prétend jouir de la Révolution, et réclamer ses droits à l’égalité, pour ne rien dire de plus. […]
Article premier : La Femme naît libre et demeure égale à l’homme en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune.
Article X : Nul ne doit être inquiété pour ses opinions mêmes fondamentales, la femme a le droit de monter sur l’échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la Tribune ; pourvu que ses manifestations ne troublent pas l’ordre public établi par la Loi. […]
POSTAMBULE : Femme, réveille-toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l’univers ; reconnais tes droits. Le puissant empire de la nature n’est plus environné de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensonges. Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l’usurpation. L’homme esclave a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers. Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne. Ô femmes ! femmes, quand cesserez-vous d’être aveugles ? Quels sont les avantages que vous avez recueillis dans la révolution ? Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. […] Quelles que soient les barrières que l’on vous oppose, il est en votre pouvoir de les affranchir ; vous n’avez qu’à le vouloir. »
(Olympe de Gouges, Déclaration des Droits de la femme et de la citoyenne, 1791).

- Printemps 1793 : les femmes se divisent et inquiètent

Fondée le 22 septembre 1792, la Première République française est immédiatement confrontée à l'invasion étrangère mais aussi à un hiver pénible. On manque de pain dans la capitale et les prix explosent. Les sans-culottes et leurs femmes dénoncent le gouvernement girondin, jugé trop modéré. Ils réclament un « maximum » sur le prix des denrées de première nécessité.

Pauline Léon (25 ans), toujours très active, délaisse la chocolaterie familiale et fonde le 10 mai 1793 un club exclusivement féminin, les Citoyennes révolutionnaires et républicaines. Ses membres se jettent dans le combat contre les députés de la Gironde. Ceux-ci sont arrêtés et éliminés à l'issue des journées révolutionnaires du 31 mai et du 2 juin 1793. Il s'ensuit la mise en place d'un Comité de Salut public dirigé par Robespierre.

Le 5 septembre 1793, la taxation des prix s'avérant impuissante à freiner l'inflation et le mécontentement populaire, l'assemblée de la Convention met « la Terreur à l'ordre du jour » ! Il s'agit par une justice prompte et inflexible de briser et « terroriser » les ennemis de la Révolution et de la France.

Les tensions s'aggravent, y compris au sein de la gent féminine. Celle-ci se divise sur la « guerre des cocardes ». La Convention ayant rendu le port de la cocarde tricolore obligatoire pour les hommes le 3 avril 1793, les militantes révolutionnaires, qui s'estiment tout autant citoyennes, réclament que cette obligation soit étendue aux femmes ! Il s'ensuit des échauffourées dans les rues avec les autres femmes, qui n'en voient pas l'utilité. De guerre lasse, la Convention donne raison aux premières par le décret du 21 septembre 1793 et impose le port de la cocarde à toutes les femmes ! C’est une courte victoire qui n'aura pas de suite car l'horizon féminin s'assombrit. L'orage éclate dès le mois d'octobre 1793.

De Robespierre à Napoléon, le retour de bâton (1793-1816)

Sale temps pour les femmes, de quelque bord qu'elles soient. Hostile à la Terreur et proche des Girondins, Olympe de Gouges s'est opposée aux Montagnards et à leur chef, Robespierre, ce qui lui a valu d'être arrêtée le 20 juillet 1793, un mois après les chefs girondins. Elle est condamnée à l'échafaud après deux mois de détention et un procès bâclé. « Enfants de la Patrie, vous vengerez ma mort ! » lance-t-elle avant de mourir, le 3 novembre 1793.

Tandis que la Révolution s'emballe, d'autres femmes, religieuses, aristocrates ou bourgeoises... se signalent à l'attention des nouveaux maîtres de la France par leur engagement en faveur des prêtres réfractaires ou simplement par leur dénonciation de la Terreur. Normande de petite noblesse de 25 ans, Charlotte Corday * a ainsi sympathisé avec les Girondins, traqués par Jean-Paul Marat. Elle a vu en ce dernier le fossoyeur de son idéal de liberté et, le 13 juillet 1793, elle a poignardé le tribun dans sa baignoire. Elle est guillotinée quatre jours plus tard, sur la place de la Révolution (aujourd'hui place de la Concorde). Son acte ravive chez les révolutionnaires les vieux préjugés misogynes contre les sorcières. La reine Marie-Antoinette, « mauvaise mère, épouse débauchée, immorale sous tous les rapports et nouvelle Agrippine » (Le Moniteur universel), est à son tour guillotinée le 16 octobre 1793. Madame Roland, égérie des Girondins, suit de peu les précédentes dans la mort, le 8 novembre 1793.

Pour Robespierre et les Montagnards, il est désormais clair que la Révolution est une affaire trop sérieuse pour être confiée aux femmes ! Le 29 octobre 1793, le député et poète Fabre d'Églantine dénonce à la tribune de la Convention les adhérentes des clubs féminins, qu'il qualifie de « grenadiers femelles » (il sera heureusement mieux inspiré quand il baptisera les mois du calendrier républicain : Germinal...). Le lendemain, un autre député de la Montagne, un dénommé Amar, avocat de l'Isère, pose la question qui tue : « Les femmes peuvent-elles exercer des droits politiques, et prendre une part active aux affaires du gouvernement ? Peuvent-elles délibérer, réunies en associations politiques ou sociétés populaires ? » Poser la question, c'est y répondre. La Convention vote la fermeture des clubs féminins et l'exclusion des femmes de la vie publique. Et c’est à coups de fouet et de bâton qu'elles sont chassées des tribunes du club des Jacobins, les 9-11 novembre 1793, et des tribunes de la Convention, le 20 mai 1795 !

Les révolutionnaires n'ayant pas pour habitude de faire les choses à moitié, ils votent dès le lendemain de l'intervention du citoyen Amar une loi interdisant le « travestissement », autrement dit le port d'uniformes et de vêtements masculins par des femmes et inversement le port de vêtements féminins par des hommes. Avec le règne de la Vertu par la Terreur, la femme est renvoyée dans l’espace domestique, seul domaine où on la tolère désormais. La Révolution s'accommode mal de la liberté des moeurs, qu'elle assimile à la dépravation aristocratique de l'Ancien Régime. Les prostituées sont placées sous la surveillance de la police et le Directoire, qui a succédé à la Convention, lance même des rafles contre les 18 000 « nymphes du pavé » qui hantent les rues parisiennes et notamment les abords du Palais-Royal.

La Désolation des filles de joie, estampe d’après la gravure de Jean-Baptiste Huet (1745-1811), BnF Gallica, Paris.

Absentes de l'espace public, les femmes retrouvent leur place dans les salons, à l'image de Germaine de Staël *, Mme Tallien, Joséphine de Beauharnais ou encore Juliette Récamier *. Mais si brillantes qu'elles soient, elles ne peuvent prétendre à aucun rôle actif.

L’inégalité homme-femme devient officielle avec l’arrivée au pouvoir de Napléon Bonaparte et la promulgation du Code civil, le 21 mars 1804 : « Les personnes privées de droits juridiques sont les mineurs, les femmes mariées, les criminels et les débiles mentaux » (1124). Faisant retour au droit romain de l'Antiquité, le Premier Consul replace la femme sous l'autorité de son père et de son mari. Elle ne possède rien en propre, n'a pas d'autorité légale sur ses enfants, ne peut rien entreprendre sans l'autorisation expresse de son mari. Pour ne rien arranger, le « devoir conjugal » devient en 1810 une obligation. Dans le même temps, on multiplie les exigences pour rendre pratiquement impossible le divorce. Celui-ci est finalement abrogé sous la Restauration, le 8 mai 1816, à l'initiative de Louis de Bonald. Le mariage et les enfants, il n’y a que ça de vrai !

Les femmes oseraient-elles prétendre jouer un rôle dans le développement des connaissances, comme l’a pu le faire dans les années 1770 Marie-Anne Paulze *, l’épouse du chimiste Lavoisier ? Elles sont systématiquement dénigrées : « On ne connaît pas de femmes savantes qui n’aient été ou malheureuses ou ridicules par la science » (Joseph de Maistre, Lettre à sa fille Constance, 1808). Veulent-elles s’adonner à la rédaction de quelques vers ? « L’encre ne sied pas aux doigts de rose » (Écouchard-Lebrun). Sylvain Maréchal, auteur du Manifeste des Égaux(1796), précurseur de l’anarchisme et du communisme, publie en 1801 un Projet d’une loi portant défense d’apprendre à lire aux femmes dont on a peine à se convaincre qu’il ne s’agit pas d’un canular.

La religion fait enfin son grand retour sous le Consulat et l'Empire, et les femmes sont poussées en première ligne dans la rechristianisation du pays. « Élevez-nous des croyantes et non des raisonneuses ! » déclare Napoléon en 1807.

Les femmes de la Révolution : libératrices ou mégères ?

Loin d’être passives, les femmes des années révolutionnaires ont été au premier rang des contestataires, dans un sens comme dans l'autre. La Liberté méritera d’être représentée par Eugène Delacroix sous les traits d'une femme dans son fameux tableau de 1831 !... Il n'empêche que le peintre romantique réserve sur son tableau le beau rôle à un jeune bourgeois. Comme ses contemporains du XIXe siècle, il a de grandes réserves sur la capacité des femmes à participer à la vie civique. 

La Liberté guidant le Peuple, Eugène Delacroix, 1831, Musée du Louvre, Paris.

Dans ses Mémoires d'Outre-tombe (1848), François-René de Chateaubriand  décrit les militantes qui se sont illustrées au début de la Révolution comme des « poissardes, sales bacchantes ivres et débraillées »Alphonse de Lamartine, grand poète romantique et sentimental (« Ô lac ! l'année à peine a fini sa carrière,... ») mais aussi historien et ministre de la Seconde République (1848), est dans les mêmes dispositions d'esprit que Delacroix et Chateaubriand. Il exprime ci-après sa répulsion des femmes de la Révolution, surtout quand elles se risquaient à traiter de questions étrangères à leur sexe, comme au club de Saint-Eustache :
« Les femmes de Paris, accourues à la tête des bandes de la capitale, avaient […] violé les premières le palais du roi, brandi le poignard sur le lit de la reine, et rapporté à Paris, au bout de leurs piques, les tètes des gardes du corps massacrés. Théroigne de Méricourt et ses bandes avaient marché à l'assaut des Tuileries le 20 juin et le 1er août. Terribles pendant le combat, cruelles après la victoire, elles avaient assassiné les vaincus, mutilé les cadavres, égoutté le sang. La Révolution, ses agitations, ses journées, ses jugements, ses supplices étaient devenus pour ces mégères un spectacle aussi nécessaire que les combats de gladiateurs l'étaient aux patriciennes corrompues de Rome. […]
La Société Fraternelle de femmes […] était composée de femmes lettrées qui discutaient avec plus de décence les questions sociales analogues à leur sexe, telle que le mariage, la maternité, l’éducation des enfants, les institutions de secours et de soulagement à l’humanité. Elles étaient les philosophes de leur sexe. Le caractère utopique et vague de ses institutions était conforme au génie des femmes, plus propres à rêver le bonheur social qu'à formuler le mécanisme des sociétés.
La Société Révolutionnaire siégeait à Saint-Eustache. Elle était composée de femmes perdues, aventurières de leur sexe, recrutées dans le vice, ou dans les réduits de la misère, ou dans les cabanons de la démence. Le scandale de leurs séances, le tumulte de leurs motions, l’audace de leurs pétitions importunaient le Comité de Salut Public. Ces femmes venaient dicter des lois sous prétexte de donner des conseils à la Convention »
(Alphonse de Lamartine, Histoire des Girondins, 1847).

Révolution industrielle : la femme, « prolétaire du prolétaire  » (Flora Tristan)

En 1830, le souffle de la révolution des Trois Glorieuses, qui voit Charles X abdiquer en faveur de Louis-Philippe, ramène les femmes sur les barricades et dans les réunions où l’on refait le monde, grâce à la nouvelle liberté d’expression garantie par le pouvoir. On rejette l’emprise du mari, on réclame l’éducation, on aspire à l’égalité juridique... Et c'est une femme, drapeau au vent, qui guide le Peuple sur les barricades dans le célèbre tableau de Delacroix.

Une Barricade vers 1830, Pierre Manguin, 1834, Musée Carnavalet, Paris.Toujours très présentes dans les travaux des champs et à la ferme, les femmes participent aussi pleinement à la révolution industrielle qui transforme en profondeur le pays et la société. Près d’un quart d’entre elles travaillent hors du cadre familial pour apporter un salaire d’appoint indispensable à la survie de la famille, tandis que 40% des citadines sont célibataires et doivent se débrouiller seules.

Aux métiers traditionnellement féminins (pas de petites mains masculines dans le textile !) se sont ajoutées des activités encore plus physiques, aussi bien en usine que dans les mines. Les ouvrières subissent de plein fouet la dureté du travail, que ce soit du fait de sa durée (souvent plus de dix heures par jour) ou des souffrances corporelles occasionnées alors même qu’elles ne peuvent éviter les grossesses à répétition.

L'une d'elles, une jeune coloriste du nom de Flora Tristan *, va prendre la parole en leur nom et, quelques années avant Marx et Engels, en appeler à « l’union ouvrière » (1843).

Flora Tristan (1803-1844), gravure extraite de l’ouvrage Les belles femmes de Paris, Au Bureau (éd.), 1839, National Library of the Netherlands, La Haye, Pays-Bas.Lucide, cette militante socialiste souligne la position particulièrement défavorable de la femme au sein de la famille ouvrière : « Le prolétaire le plus opprimé peut opprimer un être, qui est sa femme ; [elle] est le prolétaire du prolétaire même » (L’Union ouvrière, 1843).

Opprimée donc dans son ménage, la femme l’est aussi dans son travail puisque, sous-payée, elle peine à gagner de quoi subvenir totalement à ses besoins.

Est-ce parce que les hommes regardent d’un œil suspicieux celles qui leur font concurrence ? « On les paie moins, et c’est très juste, puisqu’elles vont plus vite que les hommes ; elles gagneraient trop si on les payait le même prix ! » Ce témoignage d’un imprimeur, rapporté par Flora Tristan, montre qu’il y a du chemin à faire pour détruire bien des préjugés.

À la génération suivante, sous le Second Empire et la IIIe République, le romancier Émile Zola porte témoignage dans ses romans et en particulier dans Germinal (1885) de cette condition à laquelle sont réduites les ouvrières de la mine et de l'industrie. Personnage secondaire de Germinal, La Maheude fait partie de ces femmes que l’on n'oublie pas. Si son nom semble la renvoyer dans l’ombre de son mari, Maheu, c’est en réalité une femme de tête qui porte toute la maisonnée sur ses épaules. « D’une beauté lourde, déjà déformée à trente-neuf ans par sa vie de misère et les sept enfants qu’elle avait eus », elle se dévoue à sa famille, quitte à mettre sa fierté de côté pour demander crédit à l’épicier. Ce symbole du bon sens et de l’honnêteté finit par se laisser emporter par les idées révolutionnaires et la violence. Elle-même pousse les hommes à la révolte en tête de cortège. Mais lorsque l’espoir se brise, elle retourne prendre la place de son mari au fond de la fosse, « l’échine brisée »...

Les femmes des classes populaires doivent aussi supporter au travail le « harcèlement sexuel ». Il menace plus particulièrement les servantes de ferme, « aisément engrossées dans la torpeur des granges estivales » (Michelle Perrot, Mon Histoire des femmes), les petites bonnes des sixièmes étages urbains que décrit Zola dans Pot-Bouille, enfin les ouvrières, exposées aux avances des contremaîtres. Les intéressé(e)s sont conscients du caractère abject de ces pratiques. Ainsi, à la fin du XIXe siècle, les journaux ouvriers du nord de la France comme Le Forçat ouvrent des « tribunes des abus » dans lesquels ils dénoncent la lubricité des « chiens couchants du capital », et en 1905, chez Haviland, un grand porcelainier de Limoges, un fait de harcèlement sexuel est à l’origine de l’une des grèves les plus dures de l’époque.

La crinolonomanie - Comme il est difficile d'entrer dans un omnibus, lithographie, Charles Vernier, vers 1850, BnF, Gallica, Paris.

Bas-bleus contre crinolines chez les bourgeoises

Une Femme comme moi, remettre un bouton ?, Honoré Daumier, Charivari, 23 mai 1844, BnF, ParisAu sein de la bourgeoisie, l’ambiance n’est guère meilleure pour ces dames. « Le mari gouverne, la femme administre, les enfants obéissent. Le divorce [supprimé en 1826] est bien entendu interdit ; et la femme est confinée au foyer » (Simone de Beauvoir, Le Deuxième sexe, 1949)

Il faut dire que même chez les plus grands penseurs, les préjugés sont tenaces : pour Auguste Comte, la féminité est une « sorte d’état d’enfance continue » (Cours de philosophie positive, 1839) et pour Joseph Proudhon, « La femme est un diminutif d’homme à qui il manque un organe pour devenir autre chose qu’un éphèbe. Partout éclate la passivité de la femme sacrifiée, pour ainsi dire, à la fonction maternelle : délicatesse de corps, tendresse de chairs, ampleur des mamelles, des hanches, du bassin, jusqu’à la conformation du cerveau. » (De la Justice dans la Révolution et dans l’Église, 1858).

Dans les numéros du Charivari de 1844, Honoré Daumier prend plaisir à caricaturer celles qui veulent faire évoluer les choses, en particulier les « bas-bleus », terme péjoratif pour désigner les nouvelles femmes savantes qui font parler d’elles dans les salons.

Il n'est pas anodin qu'Aurore Dupin ait choisi un pseudonyme à consonance masculine, George Sand, pour faire son entrée dans la littérature en 1832. Dandy reconnaissable à l’usage du pantalon, de la cigarette et de l’indépendance en amour, elle crée le scandale à une époque où même les sous-vêtements semblent avoir été élaborés pour ôter toute liberté à celle qui les porte.

Comment peut-on simplement envisager de se déplacer avec une certaine liberté dès lors que l’on est engoncée dans un corset qui vous étouffe, et obligée de traîner des kilomètres de tissu formant robe ? Ne parlons même pas de la largeur des crinolines qui, si elles permettent enfin de mouvoir les jambes sans se prendre dans les multiples jupons, atteignent sous le Second Empire des largeurs infernales qui font le bonheur des marchands de tabourets.

Un homme qui avait fait face aux canons peut être tenu en respect par la crinoline, La Crinoline, ses difficultés et ses dangers, 1850, National Portrait Gallery, Londres.

Malheur aux vaincues !

Dans son essai Physiologie du mariage, Honoré de Balzac vient au secours des femmes… en prenant ici le point de vue des misogynes.
« La femme n'est-elle donc pas douée d'une âme ? N'a-t-elle pas comme nous des sensations ? De quel droit, au mépris de ses douleurs, de ses idées, de ses besoins, la travaille-t-on comme un vil métal duquel l'ouvrier fait un éteignoir ou un flambeau ? Serait-ce parce que ces pauvres créatures sont déjà faibles et malheureuses qu'un brutal s'arrogerait le pouvoir de les tourmenter exclusivement au profit de ses idées plus ou moins justes ? […]
Voici notre réponse : avez-vous jamais compté combien de formes diverses Arlequin et Pierrot donnent à leur petit chapeau blanc ? Ils le tournent et retournent si bien, que successivement ils en font une toupie, un bateau, un verre à boire, une demi-lune, un béret, une corbeille, un poisson, un fouet, un poignard, un enfant, une tête d'homme, etc. Image exacte du despotisme avec lequel vous devez manier et remanier votre femme.
La femme est une propriété que l’on acquiert par contrat, elle est mobilière, car la possession vaut titre ; enfin, la femme n’est, à proprement parler, qu’une annexe de l’homme ; or, tranchez, coupez, rognez, elle vous appartient à tous les titres. Ne vous inquiétez en rien de ses murmures, de ses cris, de ses douleurs ; la nature l’a faite à notre usage et pour tout porter : enfants, chagrins, coups et peines de l’homme.
Ne nous accusez pas de dureté. Dans tous les codes des nations soi-disant civilisées, l’homme a écrit les lois qui règlent le destin des femmes sous cette épigraphe sanglante : Væ victis ! Malheur aux faibles.
Enfin, songez à cette dernière observation, la plus prépondérante peut-être de toutes celles que nous avons faites jusqu’ici : si ce n’est pas vous, mari, qui brisez sous le fléau de votre volonté ce faible et charmant roseau ; ce sera, joug plus atroce encore, un célibataire capricieux et despote ; elle supportera deux fléaux au lieu d’un. Tout compensé, l’humanité vous engagera donc à suivre les principes de notre hygiène »
(Honoré de Balzac,Physiologie du mariage, 1829).

Le Club des femmes libres, Masson, 1848, BnF, Paris.

Émergence timide du féminisme

Grisettes, cocottes et mondaines se résignent mal au sort que la société leur promet. Les plus audacieuses se retrouvent pour lancer les premiers combats féministes. Elles y sont encouragées par des penseurs comme Saint-Simon ou encore par le très influent philosophe britannique John Stuard Mill. Assisté de sa femme Harriett, il publie en 1869 un essai retentissant, The Subjection of Women, pour que l'on cesse d'assimiler les femmes à d'éternelles mineures.

Les Vésuviennes, Édouard de Beaumont, 1848.En France apparaissent le Club des femmes libres ou encore celui des Vésuviennes qui revendiquent l'égalité totale, quitte à devoir partir au service militaire. 

Pour faire connaître leurs doléances, elles peuvent compter sur la presse féminine qui rencontre un succès croissant : La Gazette des femmes (1836) et autres Voix des femmes (1848) crient haut et fort l'ouverture des emplois publics ou encore l'instruction pour toutes.

C'est d'ailleurs dans ce domaine que les avancées se font les plus visibles avec notamment l'incitation à créer une école pour les filles dans les communes de plus de 800 habitants (loi Falloux de 1850) et le succès symbolique de Julie-Victoire Daubié * au baccalauréat, en 1861. Institutrice de 36 ans et militante acharnée pour les droits des femmes, elle est la première Française à obtenir ce diplôme. Mais Gustave Rouland, alors ministre de l’Instruction publique, refuse de le signer au prétexte qu’il « ridiculiserait le ministère » !

Quelques années plus tard, c'est une autre institutrice, Louise Michel *, qui n'hésite pas à brandir un fusil pendant la Commune de 1871 pour protester contre le conservatisme et appeler à la Révolution. Quand, le 18 mars 1871, sur ordre d'Adolphe Thiers, des soldats se disposent à aller récupérer les canons de la butte Montmartre, c'est elle qui, au pied de la butte, alarmée par les mouvements de troupes, alerte les femmes du quartier. Ensemble, elles rattrapent les soldats sur la butte et leur font face. Quand les officiers donnent l'ordre d'ouvrir le feu, les soldats préfèrent mettre la crosse en l'air. C'est le début de l'insurrection. Louise Michel déploie alors une activité inlassable, forte de son énergie et de son charisme : propagandiste, animatrice d'un club politique, ambulancière, elle participe également à la plupart des combats contre les troupes de Versailles.

Les « Vierges rouges »

Sous la Commune, la journaliste André Léo * (de son vrai nom Victoire Béra) interpelle l'état-major des révoltés :
« Savez-vous, Général Dombrowski, comment s’est faite la révolution du 18 Mars ? Par les femmes. On avait dirigé de grand matin des troupes de ligne sur Montmartre. Le petit nombre des gardes nationaux qui gardaient les canons de la place Saint-Pierre avait été surpris et les canons enlevés ; on les descendait sur Paris, sans obstacle […]. Mais alors, sur la place de l'abbaye, les femmes, les citoyennes de Montmartre, se portèrent en foule, saisirent la bride des chevaux, entourèrent les soldats et leur dirent :
Quoi ! Vous servez les ennemis du peuple, vous, ses enfants ! […]
Les soldats comprirent ces reproches, et ils mirent en l'air la crosse de leurs fusils. […] On replaça les canons ; désormais la confiance, l'enthousiasme, un indomptable courage remplissaient les âmes, indécises un instant auparavant. La Révolution était faite.
Grâce aux femmes surtout »
. (André Léo, La Sociale, 8 mai 1870).

Interdites de politique !

En France, après la Commune, la IIIe République ne se montre guère généreuse pour sa moitié féminine : on continue à lui interdire la majorité des professions, à lui imposer un salaire subalterne, à la laisser rêver à un éventuel droit de vote, malgré les actions tonitruantes des suffragettes. Notons cependant une belle victoire dans le domaine privé avec le rétablissement du droit au divorce, par la loi Naquet de 1884, droit qui dans les faits ne change guère la condition des femmes, toujours soumises à leur famille.

Le statut social des femmes n'est guère meilleur dans les autres pays. L’Université libre de Bruxelles ayant ouvert ses portes aux étudiantes, Marie Popelin *, première Belge reçue docteur en droit, fait en 1888 la demande de prestation de serment lui permettant de devenir avocate. Au terme d’un procès retentissant, l’accès à la profession lui est refusé par la Cour d'appel ! En réaction, elle crée en 1892, avec Isala Van Diest *, première femme belge devenue médecin, la Ligue belge du droit des femmes. Six ans plus tard, elle organise le Congrès féministe international de Bruxelles qui connaît un important succès. Mais tout ou presque reste à faire...

Les premières femmes à obtenir pour de bon le droit de vote furent les habitantes du territoire américain du Wyoming en 1869, suivies par les Néo-Zélandaises en 1893, les Australiennes en 1902, les Finlandaises en 1906, enfin les Norvégiennes en 1913. À la veille de la Première Guerre mondiale, nous sommes encore très loin du compte. L'Europe bourgeoise du XIXe siècle, plus riche et plus puissante que jamais, a réussi à dominer la planète en plaçant sa moitié féminine dans un état de sujétion plus pesant que dans les siècles précédents, plus pesant aussi que sous le « beau Moyen Âge ».

Notons ce fait remarquable qu'après la mort de Catherine II de Russie en 1796, aucune femme dans le monde n'a exercé de responsabilités politiques comme chef d'État. La seule autre souveraine que l'on connaisse après cette date est la reine Victoria, laquelle s'en est sagement tenue au rôle de potiche, le seul que les hommes du XIXe siècle aient bien voulu accorder aux femmes ! Si l'on met à part l'impératrice douairière Cixi, qui a dirigé la Chine de 1861 à 1908, il faut attendre l'accession d'Indira Gandhi à la tête du gouvernement indien en 1966 pour qu'enfin les femmes reviennent aux responsabilités après plus d'un siècle et demi d'absence.

Publié ou mis à jour le : 2024-03-20 14:39:41

Voir les 4 commentaires sur cet article

Jean-Pierre (11-03-2018 11:03:53)

Pour compléter l’article d’Isabelle Grégor sur Joséphine Baker et les étonnantes Flappers californiennes qui affirment leur liberté par leur façon de s’habiller, vous pouvez lire mon artic... Lire la suite

Pène Olivier (09-03-2018 15:10:44)

C'est une question concernant les femmes. Le numéro spécial de Politis sur mai 68 dit la chose suivante citant Evelyne Sullerot " l'écart des rémunération féminines avec les rémunérations ma... Lire la suite

jfl86 (13-03-2017 11:26:35)

Je vous recommande la lecture du "dictionnaire historique des françaises connues pour leurs écrits" paru en 1804 et ainsi faire connaissance avec son auteure, Fortunée Briquet (1782-1815), "icône ... Lire la suite

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