Elle est partout et sa présence passe presqu’inaperçue. Et pourtant... Combien de prodiges ont pu être réalisés grâce à l’eau et l’ingéniosité humaine ! Les vestiges des premières grandes civilisations sont là pour en témoigner : la puissance des royaumes Khmer reposait en grande partie sur la maîtrise de cet élément. L’ère moderne n’a fait que confirmer cette loi en élargissant son champ d’action. Ingénieurs, urbanistes, médecins, dirigeants : tous ont mis l’eau à contribution !
Les Khmers, maîtres de l'eau
Alors qu'en Europe on recommençait à exploiter efficacement les ressources en eau, l'Asie était depuis longtemps devenue experte en la matière. Des rizières humides organisées en terrasses depuis l'Antiquité ont ainsi dessiné les paysages, à commencer par ceux de Chine. Familiers des moussons, les habitants ont su s'adapter en développant par exemple des habitats sur pilotis.
C'est le cas, au Cambodge, des Khmers qui ne se contentèrent pas de se mettre à l'abri des inondations mais qui parvinrent à se rendre maîtres du Tonlé Sap, ce lac immense qui triple sa superficie à la saison humide. Établie sur une de ses rives, leur capitale Angkor s'est développée à partir du VIe siècle grâce à un système complexe de digues complété par la suite par l'aménagement de grands réservoirs, les barays, veillés en leur centre par un sanctuaire.
Ainsi, la « Cité hydraulique » est-elle devenue une des plus importantes villes du monde médiéval avant qu'elle ne soit abandonnée, peut-être justement parce que cette maîtrise de l'eau avait atteint ses limites face aux besoins d'une population de près de 800 000 personnes.
Voilà un métier qui ne faisait guère envie, si l'on en croit la description de Plaute : « On te donnera une amphore et un sentier à suivre, on t'indiquera une source, un chaudron et huit jarres ; s'ils ne sont pas constamment pleins, moi, je te remplirai le dos de coups de fouet. Je ferai en sorte que, à force de porter l'eau, tu aies le dos si courbé que l'on pourra te transformer en sous-ventrière pour les chevaux » (Casina, IIIe siècle av. J.-C.). Pourtant, dans l'Antiquité comme sous l'Ancien Régime, qui n'attendait pas avec impatience le cri de « À l'eau, à l'eau ! » qui annonçait la venue des porteurs d'eau ?