L’art du vitrail est au centre d’une nouvelle polémique autour de la restauration de Notre-Dame de Paris. L’annonce par le Président de la République de la dépose des vitraux conçus par Viollet-le-Duc pour le chœur de la cathédrale et de leur remplacement par des créations contemporaines suscite une vive opposition. Elle nous donne l’occasion de revenir sur la longue histoire de cet art de la couleur et de la lumière, célébré dans la Cité du Vitrail récemment inaugurée à Troyes.
Les origines de l'art du vitrail
Intimement lié aux cathédrales médiévales dans l’imaginaire collectif, l’art du vitrail (dico) remonte pourtant à l’Antiquité. Les premiers témoignages en sont donnés par des sources littéraires. Tertullien, Paul le Silenciaire, Prudence et d’autres auteurs chrétiens évoquent la magnificence de vitraux aux couleurs éclatantes dans leurs descriptions de Saint-Paul-hors-les-Murs de Rome et de Sainte-Sophie de Constantinople.
Ils sont confirmés par de rares vestiges archéologiques de vitraux colorés, assemblés grâce à du stuc ou du marbre, retrouvés en Italie et en Grèce. Le plus ancien fragment de vitrail mis au jour en France date de la fin du IVe siècle : il a été découvert lors de fouilles sur le site du complexe religieux de Saint-Martin de Tours.
La présence de vitraux dans les églises de Gaule romaine est également attestée par un texte de l’évêque Sidoine Apollinaire qui décrit la basilique de Lyon vers le milieu du Ve siècle.
Comment définir précisément un vitrail ? Jean Favier propose dans son Dictionnaire de la France médiévale : « composition polychrome formée de pièces de verre coloré dans la masse unies par des filets de plomb ». Grand spécialiste du sujet, Louis Grodecki donne dans l’article « vitrail » de l’Encyclopedia universalis une définition qui souligne son lien avec l’architecture : « clôture de baie, généralement de fenêtre, faite de verre à vitre découpé suivant une composition décorative ou figurative et assemblée au moyen de plombs ». L’historien de l’art ajoute toutefois que « dans les plus anciennes œuvres occidentales (…), les verres n’étaient pas assemblés par des plombs, mais sertis dans des découpages de stuc, de pierre, de marbre, voire de bois ». Cette précision est d’autant plus importante que le plomb n’est presque plus utilisé dans les créations contemporaines. On trouve ainsi d’autres définitions, plus générales, qui n’évoquent ni le réseau de plomb, ni le rôle architectural du vitrail. Pour l’historien de l’art Jean Lafont, le vitrail est avant tout « une composition décorative qui tire son effet de la translucidité de son support ».
L’apparition du vitrail figuré
Les exemples datant du Haut Moyen Âge sont tout aussi rares. Quelques découvertes archéologiques prouvent la présence de vitraux enchâssés dans des réseaux de plomb qui ornaient des églises et des demeures aristocratiques aux époques mérovingienne et carolingienne.
Une fouille menée en 2000 sur le site d’un édifice religieux de la seconde moitié du VIIe siècle à Bondeville (Normandie) a révélé un réseau de plomb et 135 fragments de feuilles de verre, de couleurs variées, découpées selon des formes très diverses.
Vraisemblablement liée au développement de la peinture à la grisaille aux VIIe-VIIIe siècle, l’apparition de la technique du vitrail figuré (ou vitrail historié) n’est pas datée avec certitude.
Les premiers exemples connus sont la tête de Lorsch (Hesse) conservée au musée de Darmstadt qui remonte aux IX-Xe siècle et la tête du Christ de Wissembourg (Musée de l’Œuvre Notre-Dame à Strasbourg) qui aurait été réalisée aux alentours de 1060. Les plus anciennes sources textuelles concernant des vitraux historiés sont datées du Xe siècle : il s’agit de descriptions de Saint-Bénigne de Dijon et Saint-Rémi de Reims.
Les grandes cathédrales
Le grand mouvement de construction des cathédrales à partir du XIIe siècle favorise l’essor de l’art du vitrail, particulièrement en France, en Angleterre et dans le Saint Empire romain germanique. Les progrès de l’architecture, romane puis gothique, permettent d’augmenter la taille des fenêtres et donc l’importance des vitraux.
Parallèlement, l’amélioration des procédés de fabrication permet d’obtenir des verres plus lumineux et translucides. Tout concourt donc à la création de grandes baies illuminées par des vitraux. La peinture murale cède progressivement la place à des verrières de plus en plus hautes qui jouent un rôle essentiel dans le programme décoratif des édifices religieux.
Alors que la lumière est perçue symboliquement comme une émanation et une représentation du divin, le vitrail est considéré comme l’art le plus approprié pour transcrire les scènes bibliques et l’enseignement des Évangiles.
De nombreux auteurs médiévaux le soulignent, comme Pierre de Roissy, chancelier du Chapitre de Chartres, qui écrit : « Les fenêtres vitrées par lesquelles se transmet la clarté du soleil, signifient les Saintes Écritures qui repoussent de nous le mal, tout en nous illuminant », et Durand, évêque de Mende : « Les fenêtres vitrées sont les écritures divines qui versent la clarté du vrai soleil, c’est-à-dire de Dieu, dans l’Église, c’est-à-dire dans les cœurs des fidèles, tout en les illuminant. »
Selon l’abbé Suger, le vitrail, par sa double qualité (matérielle et immatérielle), permet d’élever l’esprit des fidèles vers le ciel. Il fait ainsi réaliser entre 1140 et 1145 dans l’abbatiale de Saint-Denis des vitraux qui fixent les principes que l’on retrouve par la suite : représentations de grands personnages isolés, (rois, saints, évêques,…) ; assemblage de compartiments rectangulaires, circulaires ou de formes plus complexes, contenant des scènes destinées à former un ensemble cohérent (scènes tirées d’un livre de l’Ancien Testament, d’un Évangile, de la vie d’un saint, etc.) ; encadrements et fonds ornementaux à motifs végétaux ou géométriques de couleurs variées.
Si beaucoup de vitraux du XIIe siècle ont disparu (comme ceux de Notre-Dame de Paris), les cathédrales de Chartres, Reims, Châlons, Angers, Poitiers et du Mans conservent encore des verrières datant de cette première génération.
« Une technique complexe qui s’apparente à celle du céramiste, utilise la métallurgie, mais appartient dans son essence à l’art de la peinture », résumait l’historien de l’art Louis Grodecki. La réalisation d’un vitrail se déroule en plusieurs longues étapes et nécessite l’intervention de différents acteurs. Si les procédés n’ont cessé d’évoluer depuis l’Antiquité, on peut néanmoins remarquer des constantes. Certaines techniques encore utilisées aujourd’hui étaient déjà exposées dans le De diversis artibus rédigé au début du XIIe siècle par le moine Théophile qui décrit la fabrication et la cuisson du verre ainsi que l’assemblage du vitrail.
Les feuilles de verre sont produites dans des verreries spécialisés. Elles sont composées de silice (sable) et d’une autre substance (potassium, soude, etc.) destinée à réduire le degré de chaleur nécessaire à la fusion (entre 1200 et 1500°C). Des oxydes métalliques peuvent être ajoutés au cours de la fusion afin de teinter le verre dans la masse.
De manière traditionnelle, le verre est soufflé à la bouche ce qui produit des inégalités de matière et de couleur qui enrichissent ses effets. Le verrier peut souffler le verre jusqu’à obtenir une forme de bouteille appelée « manchon » qui est ensuite découpée, ouverte et aplatie, ou souffler tout en tournant sa canne afin d’aplatir progressivement la boule de verre jusqu’à créer une pièce ronde nommé « cive ».
Le verre peut également être coulé à plat ce qui lui confère une égalité de surface et de transparence. Il s’agit là d’une technique remontant à l’Antiquité et qui fut reprise au XVIIe siècle pour la fabrication ordinaire du verre à vitre.
Le maître-verrier découpe ensuite le verre (selon différentes techniques : fer rouge, diamant à partir du XVe siècle…) selon un dessin (le « carton ») qui a d’abord été approuvé par le commanditaire. Il réunit les différentes pièces de verre pour juger de l’effet, puis ajoute éventuellement des détails sur les verres au moyen d’une peinture vitrifiable (grisaille, jaune d’argent, émail) qui s’incorpore au verre grâce à une seconde cuisson au four (600°C).
Une fois nettoyées, les pièces de verre sont posées sur la table de montage pour être définitivement assemblées. Le matériau le plus utilisé pendant des siècles est le plomb dont la malléabilité permet de sertir solidement les verres. Les baguettes de plomb, soudées entre elles, créent un véritable réseau très résistant, parfois encore renforcé par des barres de fer (les « barlotières ») pour les grandes verrières. Mais bien d’autres matériaux, comme le stuc, la pierre, le marbre, le bois, le béton, peuvent être utilisés pour enchâsser les pièces de verre.
Le XIIIe siècle, l’âge d’or du vitrail
Alors que le rouge et le bleu pâle dominent dans la coloration des grandes verrières du XIIe siècle, le célèbre bleu de Chartres est abandonné au XIIIe siècle au profit d’un bleu plus saturé qui s’harmonise mieux avec l’éclat du rouge vif. Les bruns et verts sont également de mieux en mieux maîtrisés, et sont parfois complétés par du jaune et du violet.
À la même époque, l’iconographie des vitraux s’enrichit de nouveaux motifs, comme des représentations des saisons, des métiers et de scènes de la vie quotidienne.
L’apogée de l’architecture gothique permet d’évider largement les murs ce qui entraîne la création d’immenses verrières dans les cathédrales de Chartres (2600 m2 de vitrail), Rouen, Bourges, Sens, Laon, Tours, Strasbourg, Auxerre, Lyon, Canterbury, Lincoln, Naumburg, Erfurt, etc.
À Paris, les grandes roses du transept de Notre-Dame, et surtout la Sainte-Chapelle (1248), véritable « chasse de verre » aux 15 verrières composées de 1134 scènes, constituent des chefs-d’œuvre incomparables.
Vers une véritable peinture sur verre
À la fin du XIIIe siècle, un changement majeur modifie la gamme chromatique des vitraux, d’abord en France, puis dans le reste de l’Europe. Vraisemblablement lié à des raisons économiques, des panneaux de verre incolore traités en grisaille apparaissent au cœur des compositions colorées.
La technique des vitraux en grisaille était utilisée dès le XIIe siècle, notamment dans les églises des abbayes cisterciennes (Pontigny, Heiligenkreuz), en accord avec les exigences de Bernard de Clairvaux qui prônait la sobriété de l’ornementation des édifices. Ces panneaux, réalisés en verre glauque ou en verre blanc, présentaient des entrelacs de motifs géométriques et végétaux.
En revanche, dans les nouveaux vitraux qui se répandent largement au XIVe siècle, les deux techniques sont associées : les grandes figures et les scènes sont représentées en polychromie, magnifiées par des décors géométriques ou végétaux traités en camaïeu de gris, comme à la cathédrale de Beauvais et à Saint-Urbain de Troyes.
Cela entraîne deux conséquences importantes : un éclairage plus abondant des édifices, baignée d’une lumière plus importante, et une évolution de l’art du vitrail vers une coloration et une composition plus raffinée.
De la juxtaposition de verres colorés (produisant des résultats plus ou moins subtils, notamment dans le rendu des visages), l’art du vitrail évolue vers une technique plus picturale, notamment grâce à la mise au point du jaune d’argent vers 1300-1310.
Ce nouveau procédés, obtenu grâce à des sels d’argent, permet de nuancer le coloris du verre à la cuisson, et donc d’obtenir des teintes différentes sur un même morceau de verre. Les vitraux peuvent ainsi se composer de larges plages de verre aux délicates nuances (et non plus d’un assemblage d’une multitude de petits morceaux) ce qui diminue l’importance de la structure en plomb et allège la composition.
Le modelé à la brosse facilite aussi ce passage à une véritable peinture sur verre, qui se rapproche de l’enluminure et de la peinture de chevalet, comme à Saint-Urbain de Troyes, dans les cathédrales de Rouen (chapelle de la Vierge), d’Évreux, de Cologne, etc. La représentation des personnages y donne lieu à de véritables portraits.
Le vitrail à la Renaissance
L’art du vitrail connaît à la Renaissance une nouvelle période faste. Il s’épanouit grâce à la virtuosité d’une production qui a atteint un très haut niveau technique et à la créativité d’artistes majeurs qui rivalisent de talent.
L’introduction des émaux (poudres de verre, colorées par des oxydes métalliques, qui sont appliquées sur la surface du vitrail pour former de fines couches de couleurs brillantes) permet d’obtenir toutes les teintes possibles et rapproche encore le vitrail de la peinture de chevalet. Dans le dialogue qui s’établit entre les arts, les innovations picturales de la fresque italienne ou de la miniature française et anglaise sont traduites dans les techniques du vitrail.
L’apparition de la perspective dans la peinture italienne trouve son écho dans les verrières de Saint-Ouen de Rouen et du chœur de l’ancienne église abbatiale de Königsfelden (Suisse). Ce rapprochement se fait d’autant plus facilement que les plus grands peintres sont parfois sollicités pour donner des cartons de vitraux : Nicolas Froment, Hans Baldung Grien, Ghirlandaio, Pérugin, etc.
Alors que les maîtres-verriers et peintres verriers médiévaux ont rarement laissé leurs noms à la postérité, les œuvres sont à présent attribuables à des artistes bien identifiés, comme Engrand Leprince qui travaille à Saint-Étienne de Beauvais, Arnaud de Moles à la cathédrale d’Auch, Arnoult de Nimègue à la cathédrale de Tournai, Nicolas Rombouts à la cathédrale d’Anvers, Guillaume de Marcillat à la cathédrale d’Arezzo, Dirck Vellert à la chapelle du King’s College de Cambridge…
La circulation des gravures contribue aussi à la diffusion des modèles. Les vitraux s’inspirent parfois directement d’estampes, comme le cycle de l’Apocalypse d’Albert Dürer qui sert de modèle pour les verrières des églises Saint-Georges de Chavanges et Saint-Jean-Baptiste de Chaource (Aube).
Cet âge d’or est brutalement interrompu par les guerres de religion qui ravagent l’Europe, freinant la production, mais aussi provoquant d’importantes destructions. L’art du vitrail connaît alors une longue période de désaffection, de la fin du XVIe au début du XIXe siècle. Passé de mode, on lui préfère de vastes baies en verre blanc qui laissent largement pénétrer la lumière dans les édifices.
Il subsiste néanmoins une faible production, notamment dans les châteaux et les riches demeures. Ces créations, qui portent souvent les armes des commanditaires, présentent des sujets variés, religieux ou profanes. Les vitraux corporatifs sont particulièrement appréciés en Suisse et en Rhénanie.
Le renouveau du vitrail au XIXe siècle
L’intérêt pour le vitrail renaît grâce à la vogue du néogothique qui se répand dans toute l’Europe au cours de la première moitié du XIXe siècle.
Il suscite un extraordinaire renouveau de l’art du verre dans le but de retrouver les techniques, savamment perfectionnées au cours du Moyen Age, qui avaient été en partie oubliées depuis le XVIe siècle. À la manufacture de Choisy-le-Roi, Georges Bontemps parvient ainsi à redécouvrir le secret de la fabrication du verre rouge (grâce à la coloration produite par l’oxyde de cuivre).
Ces nombreuses expériences aboutissent même parfois à la mise au point de nouveaux procédés. Elles trouvent leur application immédiate sur les grands chantiers de restauration, en particulier à la Sainte-Chapelle de Paris qui avait perdu la moitié de ses verrières lors de sa transformation en dépôt d’archives du Palais de Justice à partir de 1803.
La création des nouveaux vitraux est alors supervisée par l’archéologue François de Guilhermy, et réalisée de 1847 à 1858 par le maître-verrier Henri Gérente (décédé en 1849), le cartonnier Louis-Auguste Steinheil et le peintre-verrier Antoine Lusson. Elle constitue l’expérience de restauration de vitraux la plus réussie du XIXe siècle et contribue au développement du vitrail dit « archéologique » qui reprend à la perfection l’iconographie médiévale.
Si le pastiche historiciste domine généralement pour les vitraux destinés aux églises (qu’il s’agisse de restaurations d’anciens édifices ou de nouvelles constructions), une créativité renouvelée se déploie dans le domaine du vitrail civil en plein essor.
La mode des verrières se répand dans les mairies, les grands magasins, les hôtels, les restaurants, et les demeures privées. Peintes à l’émail sur du verre blanc industriel, elles bénéficient de prix plus abordables qui contribuent à sa large diffusion. Des catalogues proposent même aux clients une multitude de sujets de toutes sortes.
Parallèlement à cette production essentiellement décorative, les plus grands peintres du XIXe siècle s’intéressent au vitrail : Delacroix, Ingres, Devéria, Gustave Doré, Peter Cornelius, Burne-Jones, William Morris, etc. fournissent des cartons aux maîtres-verriers.
Le vitrail devient même parfois une œuvre autonome, détachée de tout contexte architectural : Henri de Faucigny-Lucinge et Eugène-Stanislas Oudinot réalisent ainsi des verrières indépendantes, comparables à des tableaux de chevalet, recherchées par les collectionneurs.
Les recherches techniques se poursuivent tout au long du siècle avec la mise au point de la gravure à l’acide sur verres plaqués, ou du « vitrail photographique » qui consiste à développer sur verre le tout récent procédés photographique. L’art du vitrail connaît son plein épanouissement avec l’Art nouveau.
Les créations de Louis Comfort Tiffany remportent de grands succès dans les expositions internationales. Ses œuvres, facilement identifiables grâce au traitement brillant et irisé du verre, sont très recherchées des deux côtés de l’Atlantique, aussi bien pour orner les églises que pour décorer des demeures privées.
L’ouverture à la modernité
« Il fallut attendre la guerre, « la grande pitié des églises de France », pour que nous osions faire du vitrail religieux contemporain », déclare en 1924 le peintre verrier Jacques Gruber, alors que cinq mille édifices du nord et de l’est de la France ont perdu leurs vitraux au cours de la Première Guerre mondiale.
La politique de reconstruction se double d’une réflexion nouvelle sur le vitrail et son rôle qui provoque un profond renouvellement, symbolisé par les Ateliers d’art sacré crées par Maurice Denis et Georges Desvallières en 1919. Le vitrail doit exprimer une « magie suggestive » selon l’expression employée par le père Marie-Alain Couturier, figure intellectuelle majeure de ce renouveau.
Cet intérêt porté au vitrail contribue également à une étude scientifique beaucoup plus poussée à l’échelle européenne qui conduit à la création en 1952 du Corpus vitrearum Medii Aevi (ou Corpus des vitraux du Moyen Âge), patronné par l’Union académique internationale et le Comité international d’histoire de l’art afin de promouvoir les recherches sur les vitraux anciens.
Alors que le béton et l’acier s’imposent comme les matériaux de construction contemporains, de nouvelles techniques sont expérimentées dans le domaine du vitrail, comme la dalle de verre qui permet de jouer sur le volume du matériau.
Ce procédé est mis au point par François Décorchemont et par René Lalique qui l’utilise à l’église Saint-Nicaise-du-Chemin-Vert de Reims en 1925. Il est ensuite largement repris, notamment par Fernand Léger à l’église du Sacré-Coeur d’Audincourt (Doubs) en 1951. De manière novatrice, le verrier travaille le verre dans son épaisseur afin de dégager la forme de la matière même et non plus de la couleur.
Tout au long du siècle, la gamme des verres imprimés incolores à usage industriel se développe avec une multiplication des effets : verres striés, cannelés, etc. La mise au point du verre armé permet de traiter de gigantesques surfaces.
Dans certaines églises, comme à Sainte-Agnès à Fontaine-les-Grès (Aube), les hautes verrières traditionnelles sont remplacées par une fenêtre bandeau qui court tout le long de l’édifice, composée de plaques de verre armé, peint au pistolet.
De nouveaux sujets font leur apparition, comme l’automobile, symbole de la modernité dans les années 1920, qui inspire une composition panoramique, presque cinématographique, à Jacques Simon, artiste issu d’une longue lignée de maîtres verriers de Reims.
Les recherches picturales des plus grands artistes contemporains renouvellent l’art du vitrail. Dans la lignée des créations spectaculaires de Matisse pour la chapelle du Rosaire des dominicaines de Vence en 1948, le service des Monuments historiques passe de nombreuses commandes de vitraux à partir des années 1950 : Chagall est sollicité en 1959 pour la cathédrale de Metz, Maria Helena Vieira da Silva en 1973 pour Saint-Jacques de Reims, Pierre Soulages à Sainte-Foy de Conques, Jean-Michel Othoniel à la cathédrale d’Angoulême en 2008, Véronique Ellena pour le Vitrail du millénaire de la cathédrale de Strasbourg en 2015, etc.
Ces commandes donnent lieu à de nouvelles expérimentations : verre thermoformé, impression numérique à partir de poudre d’émail… qui prouvent la vitalité et la capacité de renouvellement d’un art millénaire.
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michel (25-02-2024 16:00:08)
magnifique travail dont la lecture et la contemplation nous enrichissent à chaque ligne et chaque image reproduite. merci