Deux mille ans après sa période de plus grande gloire, Rome continue de fasciner et inspirer le monde occidental.
La Ville éternelle était à l'origine une cité parmi bien d'autres, formée de paysans et d'artisans tous prêts à défendre leur communauté les armes à la main, gouvernée par les représentants des principales familles, assemblés au Sénat (dico). Puis Rome a grandi et subjugué de proche en proche toutes les cités de la péninsule italienne...
Rome et son immense empire sont aussi connus que mystérieux. Comment une telle puissance a-t-elle pu se constituer et se maintenir quasiment pendant mille ans alors que tant d’autres disparaissaient constamment ? C’est le mystère qu’essaie de percer Vincent Boqueho dans son dernier ouvrage, « L’Histoire de Rome comme si vous y étiez ! » (384 pages, 2024, Armand Colin).
Passionnant de bout en bout, il se penche sur une période toujours trop rapidement survolée, celle de l’époque « archaïque » qui permet de comprendre l’importance décisive des apports grecs et étrusques ainsi que la façon particulière dont les Romains se sont émancipés de ces influences. Mieux encore, Vincent Boqueho plonge en permanence le lecteur au cœur de l’action en le mettant dans la peau de différents personnes de l’époque : un colon grec, un plébéien participant à révolte, un esclave, un soldat combattant contre les Germains, mais aussi Jules César ou encore Saint Augustin ! Pour vous remettre de toutes vos émotions, rien de tel qu’un retour à la vie moderne.
Dans cette vidéo, Vincent Boqueho couvre toute l’Histoire de Rome en cartes animées, depuis ses débuts au VIIIe siècle av JC jusqu’à la chute de l’Occident en 476 avec exactement 6 secondes par décennie, ce qui permet de prendre conscience de l’emballement des événements.
Une cité promise à la domination de l'univers
Au IIIe siècle avant notre ère, Rome vainc Carthage, grande cité marchande de la rive sud de la Méditerranée. Au siècle suivant, après avoir imposé sa domination aux populations de la Méditerranée occidentale, elle soumet les cités hellénophones de la Méditerranée orientale, alors sur le déclin.
C'est ainsi que Rome, insensiblement, en est venu à imposer ses lois à tout le bassin méditerranéen. Par nécessité, la réalité du gouvernement est passée de l'assemblée du Sénat, inapte à diriger un tel ensemble, à un homme nanti de tous les pouvoirs, un « empereur » (imperator, à l'origine, un général célébré pour ses victoires). Au début de notre ère, il en est résulté une paix relative et une prospérité appréciable, la pax romana.
Puis l'empire s'est usé, faute de nouveaux territoires à conquérir. Et bientôt à la fin du IIIe siècle de notre ère sont apparues les premières menaces extérieures. On a commencé de fortifier les villes et bientôt le gouvernement central a été emporté, laissant la place en Occident à des royaumes barbares fondés par les nouveaux-venus. L'Orient romain a quant à lui perduré encore un millénaire en revivifiant son identité grecque.
Le mythe de Rome va perdurer pendant de nombreux siècles, disons même jusqu'à nos jours. Charlemagne puis Otton tenteront de ressusciter l'Empire d'Occident aux IXe et Xe siècles. Plus tard, les clercs de l'Église rendront vie à la langue latine, laquelle imprègne encore très largement les langues européennes. Enfin, les institutions, les lois et les codes romains seront aussi réhabilités aux Temps modernes et même encore de nos jours. Rome est décidément toujours vivante...
Les rois étrusques de Rome
L'Histoire de Rome débute au milieu du VIIIe siècle av. J.-C. avec la fondation de Cumes, première colonie grecque d’Italie. C'est un peu au nord que va apparaître Rome. Ces débuts correspondent à la fondation légendaire de Rome par Romulus en 753.
Plus au nord dans l’actuelle Toscane, les Étrusques sont également influencés par la civilisation grecque par le biais du commerce : ils créent leur propre alphabet à cette époque en s’inspirant de l’alphabet grec, et ils adoptent la formation en phalange des Grecs. La civilisation étrusque se développe ainsi progressivement à partir de ce mélange entre la culture de Villanova originelle et les apports grecs. Elle combine une grande puissance militaire terrestre et navale avec une certaine douceur de vivre dans laquelle la femme a une place importante. Ils ont de grandes connaissances dans le domaine de l’urbanisme et de la médecine et ils ont beaucoup recours à la divination.
Le pays étrusque n’est pas uni politiquement, mais il est caractérisé par une confédération de cités-états depuis Volterra au nord jusqu’à Veies au sud qui est voisine de Rome. La zone d’influence étrusque s’étend peu à peu, vers le nord jusqu’à la plaine du Pô, et vers le sud jusqu’à la ville de Capoue. La ville de Rome finit à son tour par tomber sous le joug étrusque : en 616 av. J.-C., le trône revient à Tarquin l’Ancien, originaire de la ville de Tarquinia.
La présence étrusque permet de sécuriser les environs, notamment face aux Sabins qui peuplent les montagnes. Des égouts sont construits pour assainir la ville et la place du forum est créée en tant que point de convergence des collines alentour.
Servius Tullius succède à Tarquin vers 578 av JC. Il fait ériger de nouveaux remparts et réforme l’armée pour la rendre plus performante. Cette époque correspond à l’apogée de la civilisation étrusque : la maîtrise des mers leur permet notamment de prendre pied en Corse aux dépens des Grecs vers 540, et la confédération étrusque devient une véritable thalassocratie en Mer Tyrrhénienne.
Tarquin le Superbe succède à Servius Tullius en 535 av. J.-C. et laisse le souvenir d’un roi tyrannique.
La cité grecque de Cumes commence alors à soutenir militairement les cités latines contre la domination étrusque : la population de Rome chasse dès lors Tarquin du trône en 509 av. J.-C. et fonde la République, sous l'autorité du Sénat.
Sous l’influence étrusque, les villes voisines tentent aussitôt d’attaquer Rome, mais celle-ci triomphe de la coalition et s’impose à la tête de la Ligue Latine en 493.
Triomphe de la République !
Les institutions de la République romaine sont basées sur l’élection de deux consuls pour une année de mandat qui exercent le pouvoir civil et militaire, mais sous le contrôle des sénateurs qui sont nommés à vie par les consuls. En pratique, les fonctions sénatoriales et les magistratures sont accaparées par les patriciens, chefs des riches familles dont l'origine remonte à la fondation de la ville.
La fonction de tribun de la plèbe est créée pour compenser cette fracture et contrebalancer le pouvoir du Sénat.
Le Ve siècle voit l’affaiblissement progressif de la confédération étrusque : impuissants face aux attaques des Samnites, ils perdent Capoue en 423. Dans le même temps, leur présence en Corse s’érode au profit des Grecs, puis des Carthaginois. Enfin les Étrusques doivent faire face à des incursions celtiques depuis la Gaule cisalpine autour de l’an 400.
Les Romains en profitent pour s’emparer de la ville de Veies en 396. Cependant, les Gaulois menés par Brennus ravagent le pays étrusque et s’avancent jusqu’à Rome qu’ils pillent en 390. Cet évènement marquera durablement les esprits. Par la suite, les remparts sont reconstruits en englobant les sept collines de Rome.
On arrive maintenant à une époque charnière : après des débuts modestes, Rome va enfin amorcer sa formidable ascension.
Au IVe siècle, les Étrusques doivent faire face simultanément à la poursuite des raids gaulois et aux tentatives d’expansion de Rome, ce qui contribue à dévaster tout le pays. En 343, la ville de Capoue appelle les Romains à l’aide face aux attaques des Samnites, ce qui marque véritablement les débuts de l’expansion romaine. En 327, c’est au tour de la ville grecque de Naples de faire appel à Rome contre les Samnites. Les Romains tracent la première voie romaine, la Via Appia, qui relie Rome à Capoue. Peu après, la côte des Pouilles se place à son tour sous la protection de Rome.
Une grande alliance des Samnites, Étrusques, Ombriens et Gaulois est alors constituée contre les Romains. Rome triomphe de ses adversaires et annexe le territoire samnite en 290. Puis elle entreprend de conquérir les cités étrusques une à une.
Le danger romain pousse les Grecs d’Italie à demander l’aide du roi d’Épire Pyrrhus, cousin d’Alexandre le Grand, mais qui finit par ployer sous le nombre. Les Romains peuvent s’emparer des cités grecques, achèvent leur conquête du pays étrusque en 264, puis déclarent la guerre aux Carthaginois pour le contrôle de la Sicile. La première guerre punique pousse Rome à développer une flotte de guerre, ce qui lui permet de triompher en 241 av JC : elle récupère alors la Sicile, la Sardaigne et la Corse.
Rome peut alors focaliser son attention contre les Gaulois : elle achève la conquête de la plaine du Pô en 222. Quatre ans plus tard, les Carthaginois menés par Hannibal tentent de prendre leur revanche contre Rome ; mais après de premiers succès, ils sont finalement vaincus à Zama, sur la côte africaine, en 202 av. J.-C. : Rome peut ainsi récupérer leurs possessions en Espagne tandis que la Numidie et la Maurétanie s’érigent en royaumes indépendants.
Les légions à la conquête de l'Orient
Dominant dès lors toute la Méditerranée occidentale, Rome se tourne contre la Macédoine qui s’était alliée à Carthage : après trois guerres successives, les Romains finissent par s’emparer de ce royaume en 168 av. J.-C. En parallèle, ils entreprennent la conquête de l’Hispanie qui va les occuper pendant plus d’un siècle. Enfin, ils décident de mettre un terme à l’indépendance de Carthage et s’en emparent après trois ans de guerre en 146 av JC. En Grèce, la Ligue Achéenne tombe la même année sous la domination de Rome.
En 133 av. J.-C., les Romains héritent du royaume de Pergame en Asie Mineure, dont le souverain était un fidèle allié. Peu après, ils entreprennent la conquête de la Gaule Transalpine pour connecter leurs possessions d’Espagne et d’Italie. Mais les attaques germaniques menacent la ville elle-même, ce qui pousse le général Marius à de profondes réformes militaires. Fort de ses succès et de sa popularité, il en viendra à prendre de facto les rênes de la République.
Rome profite d’une guerre entre les royaumes berbères pour vassaliser la Numidie. Elle hérite aussi de la Cyrénaïque qui s’est détachée de l’Égypte. La République commence déjà à tanguer lorsque Sylla devient temporairement dictateur en 82.
Peu après, Rome hérite encore de la Bythinie, ce qui provoque l’entrée en guerre de l’Arménie aux côtés du Pont. Le général Pompée remporte une victoire décisive en 66 av. J.-C. : il vassalise le Pont, annexe la Syrie puis vassalise la Judée. Peu après, Jules César entreprend la conquête du reste de la Gaule. Fort de son prestige, il élimine Pompée et se fait nommer dictateur. Son assassinat en 44 av. J.-C. provoque une scission entre ses deux héritiers, son petit-neveu Octave et son fidèle lieutenant Marc Antoine, allié à la dernière reine d'Égypte, Cléopâtre. Octave triomphe en 31 av. J.-C., récupère l’Égypte et se fait proclamer empereur sous le nom d’Auguste. Le Sénat conserve un rôle important, mais il est dorénavant supervisé par l’empereur qui détient donc l’essentiel des pouvoirs.
Quelle époque incroyable ! Après l’expansion de la République, le Haut Empire va mener Rome vers son apogée.
Les douze Césars et l'apogée de Rome
Sous le règne d’Auguste, l’expansion se poursuit : l’Asie Mineure, la Judée et la Numidie sont annexées, la Maurétanie est vassalisée, et la conquête de l’Hispanie est achevée. Par ailleurs, le territoire romain est agrandi jusqu’au Danube.
Tibère succède à Auguste en 14 après J.-C., ce qui marque une pause dans l’expansion territoriale. La Judée est alors secouée par des prédicateurs juifs suite à son annexion, notamment un certain Jésus. Sa crucifixion et la croyance en sa résurrection vont donner naissance au christianisme.
Sous le règne de Claude, la Maurétanie est annexée, la Thrace est conquise, et la conquête de la Bretagne débute. Son successeur Néron finit dans l’opprobre suite au grand incendie de Rome.
Le général Vespasien, sans lien familial avec les empereurs julio-claudiens, fonde une nouvelle dynastie en 69.
Face aux révoltes en Judée, il fait détruire le Temple de Jérusalem, marquant la dernière étape de la diaspora juive, entamée six siècles plus tôt avec la déportation à Babylone.
Vespasien fait aussi construire le Colisée à Rome. Son fils Domitien poursuit la conquête de la Bretagne, mais il meurt assassiné et une nouvelle dynastie de généraux, les Antonins, arrive au pouvoir.
L’empereur Trajan conquiert la Dacie au nord du Danube, annexe le royaume de Pétra en 106, puis conquiert la Mésopotamie aux dépens de l’empire parthe en 114. Mais les révoltes contraignent son successeur Hadrien à renoncer à cette nouvelle acquisition. Il entreprend alors de consolider et de stabiliser les frontières, et il mate sévèrement les dernières révoltes dans l’empire : en 138, l’empereur Antonin hérite d’un empire complètement pacifié. Son règne marque l’apogée de l’empire romain.
L'horizon se couvre
Cependant, cette longue pax romana tend à affaiblir l’armée romaine et laisse le temps aux ennemis de reprendre leurs forces : lorsque Marc Aurèle lui succède en 161, il doit faire face simultanément à la reprise des guerres contre l’empire parthe et à l’attaque des Germains qui percent le Danube. Il passe son règne à guerroyer, et la paix n’est rétablie qu’en 188 sous son successeur Commode. Mais celui-ci devient de plus en plus tyrannique et il finit assassiné.
Après une courte guerre civile, Septime Sévère fonde une nouvelle dynastie en 193. Cet événement marque le complet effacement du Sénat : dorénavant, les empereurs tireront toute leur légitimité de l’armée.
Caracalla lui succède et guerroie beaucoup contre les Germains comme les Parthes. Mais en 224, les Perses sassanides récupèrent l’empire parthe et se montrent très menaçants. L’empereur Sévère Alexandre est accusé de mollesse et il est assassiné par ses soldats en 235. Le Sénat étant devenu inaudible, ça entraîne un véritable bal d’empereurs sans grande légitimité qui se succèdent à un rythme effréné : l’empire est débordé par les attaques germaniques qui dévastent le territoire tandis que les guerres contre les Perses se poursuivent. Des empereurs rivaux font même temporairement sécession en Gaule et en Syrie, avant que l’empereur Aurélien ne rétablisse son contrôle sur tout l’empire.
On vient d’entrer dans une période de décadence, dite aussi Antiquité tardive, qui va entraîner des bouleversements culturels de premier plan. Voici maintenant les soubresauts du Bas Empire.
Une succession de généraux originaires d'Illyrien, parviennent à maintenir la cohésion de l'empire. Le plus grand d'entre eux, l'empereur Dioclétien, s’adjoint un co-empereur pour lutter simultanément sur plusieurs fronts à la fois. Mais après son abdication en 305, les guerres entre plusieurs prétendants remettent en cause ce système.
Finalement, c’est l’empereur Constantin qui finit par vaincre tous ses rivaux en 324. Il donne à l'empire une nouvelle capitale, la Deuxième Rome, qui prendra plus tard son nom, Constantinople. Il s'y installe afin d'être plus près du front.
Constantin favorise le christianisme aux dépens du paganisme traditionnel. Cependant les guerres contre les Perses et les Germains se poursuivent sous le règne de ses deux fils Constant et Constance II qui se partagent l’empire. Cette époque connaît une véritable bascule religieuse avec l’essor rapide du christianisme : Julien qui récupère le trône en 361 sera le dernier empereur païen.
En 364, l’empire est à nouveau divisé entre deux collègues, Valens et Valentinien, qui passent leur temps à combattre aux frontières. Puis l’arrivée des Huns en Europe augmente encore la pression : les Germains sont autorisés à s’installer dans l’empire pour aider à repousser les barbares.
L'empire d'Occident devient la proie des Barbares
Le règne de Théodose Ier marque une dernière phase de stabilité. L'empereur fait du christianisme la religion d'État et interdit toutes les dissidences. Mais sa mort en 395 marque la division définitive de l’empire entre deux empereurs.
L’empire d'Occident se retrouve submergé par les barbares et Rome est mise à sac par les Wisigoths en 410. Ils obtiennent ensuite un royaume en Aquitaine tandis que les Suèves s’installent en Hispanie. Quant aux Vandales, ils conquièrent l’Afrique à partir de l’an 429. Peu après, les Francs fondent un royaume au nord de la Gaule. L’île de Bretagne est abandonnée.
Appuyés par leurs vassaux germaniques, les Huns menés par Attila extirpent des tributs de la part de l’empire d’Orient, puis ils se tournent vers l’Occident. Mais ils subissent une défaite en Gaule, puis en Italie, et leur empire éclate peu après.
Tandis que les Vandales s’emparent des îles, les Wisigoths s’étendent fortement en Gaule et en Hispanie et les Burgondes sont installés dans l’est de la Gaule. Le dernier empereur est déposé en 476 par le Germain Odoacre qui prend le titre de patrice d’Italie. Il ne reste alors plus qu’une dernière enclave romaine en Gaule qui est conquise par Clovis en 486.
L’histoire de l’Occident sera dorénavant caractérisée par la lutte entre royaumes germaniques, ce qui marque les débuts du Moyen Âge. Quant à l’Empire d’Orient, il va évoluer jusqu’à prendre des caractéristiques proprement grecques et byzantines. Adieu Rome et la latinité triomphante.
L'Antiquité tardive (193 à 641)
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