En six mois, la campagne des présidentielles françaises de 2017 a donné lieu à pas moins de trois joutes télévisées, non compris les tournois des primaires (PS et LR). Nous étions 8,5 millions devant le débat Juppé-Fillon le 24 novembre 2016, 5,5 millions pour Hamon-Valls le 26 janvier 2017, et 16,5 millions soit 60% du public pour le final Emmanuel Macron-Marine Le Pen du 3 mai. Contrairement à certaines prévisions, l’effet de saturation n’a pas joué. Les Français semblent au contraire y avoir repris goût.
Née et formalisée aux États-Unis dans les années 60, cette confrontation télévisuelle est devenue l’une des cérémonies obligées de la démocratie directe. Si, en France, celle qui draine l'audience maximale oppose les deux candidats qualifiés pour le second tour de l'élection présidentielle, ailleurs, d'autres débats suscitent aussi l'intérêt, notamment ceux qui mettent aux prises le chef du gouvernement et celui de l’opposition.
Une tradition américaine
La confrontation directe entre candidats nous vient des États-Unis où, dès 1858, Abraham Lincoln affronta en public son rival Stephen A. Douglas pour le poste de gouverneur de l’Illinois dans un marathon de trois heures où chacun s’exprimait à son tour en proposant ses solutions et en réfutant celles de son adversaire. Une pratique facilitée par la vie politique américaine qui oppose pour le fauteuil présidentiel les champions des deux grands partis, le parti démocrate et le parti républicain.
Mais c’est l’année 1960 qui marque le véritable démarrage du face-à-face télévisé avec la confrontation entre Kennedy et Nixon, le 26 septembre dans les studios de CBS. Elle a mobilisé 66 millions de téléspectateurs sur une population de 179 millions habitants.
L'expérience n'a pas été renouvelée en 1964, 1968 et 1972, sauf à l’occasion des primaires démocrates. Elle a été seulement relancée en 1976 avec trois débats télévisés qui ont opposé le républicain Gérald Ford et le démocrate Jimmy Carter.
Depuis lors, les formes des débats ont varié mais le principe est codé, parfois même par un protocole d’entente préalable entre les deux candidats. Le face-à-face se déroule dans une grande salle où chacun, debout derrière son pupitre, répond aux questions des journalistes, du public, voire aujourd’hui des internautes, sans qu’il y ait de véritable échange entre les deux protagonistes.
Les attaques, comme au billard, ne peuvent se faire que par la bande, avec reprise des propos de l’adversaire dont on démontre ensuite la nocivité. Le débat est retransmis en direct à la radio, à la télévision et sur la toile, avec à chaque fois des audiences très élevées. Aujourd’hui l’étiage moyen se situe autour des 30% de la population totale, bien plus qu’en France.
En 1980, Carter, président sortant, affronte Ronald Reagan. Pourtant handicapé au départ par un net retard dans les sondages, ce dernier va dominer son adversaire grâce à son talent d’acteur. En 1984, Reagan écrase le candidat démocrate Mondale. En 1988, George Bush père fait de même avec Michael Dukakis. En 1992, ils sont trois : le président républicain sortant George Bush, le démocrate Bill Clinton qui l’emportera, et le milliardaire indépendant Ross Perot.
La confrontation à deux redevient ensuite la règle : Clinton pulvérise Dole en 1996, George W. Bush, bien que minoritaire dans les suffrages des électeurs, coiffe le démocrate Al Gore au finish en 2000 et bat plus largement John Kerry en 2004. En 2008 commence le règne de Barack Obama qui triomphe du républicain John Mc Cain et réédite en 2012 son succès aux dépens cette fois de Mitt Romney, malgré une perte importante de voix.
En 2016, c’est la surprise du chef. Donald Trump, avec moins de suffrages mais plus de grands électeurs désignés par les États, l’emporte sur Hillary Clinton après un suspense qui laisse sans voix les journalistes américains et étrangers, très majoritairement opposés à Trump. Le premier débat télévisé des deux candidats avait réuni plus de 84 millions de téléspectateurs !
La règle du jeu
Le face-à-face à la française est encadré par des règles formelles strictes... (...)
La Ve République
Vos réactions à cet article
Recommander cet article
Philippe MARQUETTE (20-04-2022 10:39:16)
Que de temps de perdu, autant que regarder un épisode de « plus belle la vie » Lire ou relire un petit livre de PB « Sur la télévision », ceux qui l'auront lu et compris mourront moins idiots ... Lire la suite