Parlez-moi de la France

Histoire, Idées, Passions

Michel Winock (Perrin, 350 pages, 21,50 €,  1995)

Parlez-moi de la France

Michel Winock est célèbre autant pour ses ouvrages sur l'Histoire contemporaine et l'Histoire des idées que pour ses chroniques dans Le Monde. Il réagit par cet ouvrage au débat ouvert par la campagne présidentielle de 2007 sur l'immigration et l'identité nationale.

«Les Français veulent-ils encore rester une nation ?» demande-t-il d'entrée de jeu.

Les Français, comme les autres Européens, manifestent une inquiétude grandissante devant les vagues migratoires, inquiétudes confortées par des travaux universitaires anglo-saxons que rappelle Michel Winock.

David Coleman, professeur à Oxford, écrit en 2006 : «Les processus découlant d'une fécondité faible et d'une immigration forte changent la composition des populations nationales et, par là, la culture, l'apparence physique, les expériences sociales et l'identité conscient des habitants des nations européennes» (Population and Development Review).

La construction européenne et la France

La construction européenne contribue également au malaise identitaire. Identité, dites-vous ? «La France n'est pas une géographie ; c'est une histoire», rappelle l'historien.

Sa construction, il est vrai, est l'oeuvre hasardeuse d'une famille dynastique, les Capétiens, bien plus que des déterminismes géographiques. Ceux-ci n'appellent en rien les Corses, les Bretons et les Alsaciens à partager un même destin.

Si l'Église catholique a elle-même participé à la construction de la Nation, sa place aujourd'hui est devenue ténue, pour ne pas dire insignifiante.

Michel Winock manifeste sa surprise que, malgré le délitement de la foi, une majorité de Français persistent à se dire «catholiques». C'est que cette appartenance se rattache à des souvenirs d'enfance (catéchisme, rituel de la messe), lesquels participent à une conscience identitaire nationale.

À partir de ces prémices, l'auteur développe un portrait tout en nuances du peuple français, avec ses paradoxes, ses faiblesses et ses passions : aspirations aristocratiques, goût de la propriété, attachement à la terre...

Peut-être manque-t-il à ce portrait une certaine forme d'anarchisme, qui s'observe dans les récriminations à l'encontre de l'État et des fonctionnaires. L'Américain Laurence Wylie l'a relevée dans son étude antérieure d'un demi-siècle (Un village du Vaucluse).

Michel Winock porte une attention particulière à la démographie et aux conséquences du vieillissement sur le vote : «Tous les chiffres s'accordent : la corrélation est constante entre le vote à droite et l'âge avancé des électeurs... Ces comportements politiques révèlent au moins une tendance : une certaine peur de l'avenir, un besoin d'autorité, la crainte de l'innovation, la demande exigeante de sécurité. Un vieillissement accru de la population risque bel et bien de détruire l'équilibre fécond entre les penchants conservateurs et les aspirations progressistes de la société».

André Larané

Publié ou mis à jour le : 10/06/2016 09:42:47

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