La peinture ci-dessous, gracieuse et troublante, érotique et pudique, est le premier nu de l'art espagnol ! Intitulée Vénus au miroir ou La toilette de Vénus, elle a été réalisée par Diego Vélasquez vers 1650, soit un siècle et demi après l'apparition des nus en Allemagne, Italie, France, Hollande...
Il faudra attendre encore un siècle et demi avant le deuxième nu espagnol, La Maja nue, oeuvre de Francisco Goya. Celui-ci représente une jeune femme allongée... et cette fois de face. Cette audace n'a pas été suivie d'effet, les grands peintres espagnols du XXe siècle, Miro, Dali et Picasso (avant son exil à Paris) s'étant tenus à l'écart de ce thème pictural.
Le maître du Siècle d'Or espagnol
Peintre majeur du Siècle d'Or espagnol (le début du XVIIe siècle), Diego Vélasquez (en espagnol Velázquez) est né à Séville, où il a été baptisé le 6 juin 1599. Son talent précoce s'affirme dans l'atelier du peintre Francisco Pacheco, l'un des plus réputés de cette ville plantureuse qui reçoit l'or des Amériques.
À la demande de celui-ci, très engagé aux côtés des Jésuites dans le débat sur l'Immaculée Conception de la Vierge, il compose différentes toiles sur ce thème.
Marié à la fille de son maître et père de deux fillettes, il monte à Madrid sur une sollicitation du Premier ministre, le très influent comte-duc d'Olivares. Le 30 août 1623, il obtient du jeune roi Philippe IV (18 ans) une séance de pose et le résultat lui vaut de devenir l'un des peintres officiels du roi le 6 octobre 1623. Ses portraits d'un réalisme remarquable vont faire de lui le portraitiste le plus en vue de la Cour d'Espagne.
Il fait la rencontre à Madrid de Rubens et devient son ami.
C'est à son instigation qu'il part en Italie pendant deux ans afin de compléter sa formation (1629-1631).
Il entreprend plus tard un deuxième séjour en Italie en vue d'acheter des oeuvres pour les palais du roi Philippe IV, mécène et collectionneur averti. Parti de Malaga le 21 janvier 1649, il ne reposera le pied en Espagne qu'en 1651.
Entre temps, il aura notamment peint le portrait saisissant de réalisme du pape Innocent X. « Troppo vero ! » (« Trop vrai ! ») aurait murmuré le Souverain Pontife devant l'oeuvre achevée.
Son génie s'étend à tous les domaines de l'art.
D'une extrême habileté, il peint « alla prima » directement sur la toile vierge, sans dessin préalable. On lui doit aussi une technique picturale originale, l'espumado ; un dégradé de couleurs destiné à représenter les lointains.
On en voit l'illustration dans La reddition de Breda (ou Las Lanzas, 1635, musée du Prado, Madrid), une toile de grandes dimensions commandée par son protecteur, le tout-puissant comte-duc Olivares, pour le palais du Buen Retiro.
Son oeuvre la plus aboutie et la plus troublante demeure sans aucun doute Les Ménines, une toile dans laquelle il se représente lui-même en train de peindre la petite infante entourée de ses demoiselles d'honneur (les ménines), sous le regard du couple royal que l'on aperçoit dans un miroir, au fond de l'atelier !
Couvert d'honneurs... et empêché de peindre autant qu'il le souhaiterait du fait de ses fonctions comme celle de maréchal du palais, Vélasquez s'éteint à 61 ans, le 6 août 1660, juste après avoir organisé les festivités du traité des Pyrénées.
De son oeuvre abondante, il ne reste qu'environ 110 toiles authentifiées, dont 49 sont au musée du Prado, à Madrid (aucune au Louvre !).
Mais elles vont inspirer jusqu'à nos jours les plus grands artistes, tel son compatriote Picasso, et lui valoir de Manet le surnom de « Peintre des peintres ».
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