Éthiopie

Le « pays des visages brûlés »

L’Éthiopie n’a pas fini de nous étonner : ce pays de la Corne de l’Afrique, que l’on avait laissé en proie à des famines et des affrontements, devient en ce XXIe siècle la nouvelle puissance africaine.

Pour comprendre cette mutation, nous vous proposons d’aller à la rencontre de la reine de Saba, s’enquérir du prêtre Jean, croiser Rimbaud et découvrir les négus qui ont fait la richesse de la longue histoire de ce pays, le seul en Afrique à n’avoir jamais été colonisé.

Isabelle Grégor

NB : cliquez sur les images pour lire les légendes et découvrir les images agrandies ou cachées.

Pêcheur sur le lac Tana

Un géant africain

La République fédérale d'Éthiopie est l'un des plus grands pays africains avec 1100000 km2 et 105 millions d'habitants (2017). La population est en augmentation rapide avec un indice de fécondité de 4,6 enfants par femme, dans la moyenne africaine. Elle devrait atteindre les 190 millions en 2050 !

Situé entre la Corne de l'Afrique et le bassin du Nil, le pays est constitué pour l'essentiel de hauts plateaux situés à plus de 2000 mètres d'altitude, bien arrosés à l'ouest, arides à l'est. La faille nord-sud (Rift) qui le traverse est piquetée de lacs. L'un d'eux donne naissance à l'Abbai ou Nil bleu. Chargé en limons et gonflé par les neiges d'hiver, ce cours d'eau rejoint le Nil blanc au Soudan. Il est à l'origine des crues qui fertilisent depuis la haute Antiquité la vallée du Nil.

Christianisée dès le IVe siècle, l'Abyssinie ou Éthiopie a pu majoritairement résister à la poussée de l'islam grâce à ses montagnes et ses hautes vallées.

Paysage éthiopien, église vue d'avion. Des enfants éthiopiens à Lalibela vous sourient lors de l'agrandissement. Photographies G. Grégor.

Un vieux puzzle de 52 pièces

C'est aujourd'hui encore la grande star de l'Éthiopie : 1 mètre 10 toute dépliée, les bras certes un peu longs et légèrement trop poilus pour les critères actuels de beauté, mais qu'importe !

Lucy, affiche du musée national d’Addis-Abeba. Photographie G. Grégor.La petite Lucy a su gérer sa légende depuis qu'elle est sortie des terres du nord-est du pays, en 1974. Il faut dire que ses découvreurs Maurice Taïeb et Donald Johanson ont bien fait les choses en la baptisant d'un prénom rendu populaire grâce aux Beatles.

Mais ce n'est pas la seule raison de son succès : Lucy est surtout l’une de nos plus lointaines ancêtres, digne représentante de la lignée des australopithèques et preuve presque vivante que ceux-ci, il y a 3 millions d'années, avaient adopté la position debout avant même de posséder notre gros cerveau.

Paysage boisé du nord de l'Éthiopie, photographie G. Grégor. L'agrandissement montre une carte de l'Afrique, berceau de l'humanité, Histoire-Géographie, Nathan, 2016.  Le joli coin où elle vivait, du côté de la ville d'Harar, est situé sur le Rift, cette longue faille qui coupe l'Afrique de Djibouti au Mozambique, et qui était alors essentiellement boisée. On comprend ainsi pourquoi la petite Lucy, tout en présentant des caractères « humains » comme la forme de son crâne ou sa bipédie, garde des éléments plus simiesques : ses épaules costaudes et ses phalanges recourbées, par exemple, lui permettaient de grimper aisément aux arbres.

Aujourd'hui le tchadien Toumaï, âgé de 7 millions d'années, a relégué notre fossile au rang des jeunettes mais Lucy conserve jalousement sa réputation. Même la petite Ardi, découverte elle aussi en Éthiopie et qui se présente comme le plus ancien squelette d'hominidé connu (4,4 millions d'années), n'est pas parvenue à ébrécher cette image, née de 40 ans de conviction qu'elle était la « mère de l'Humanité ».

L'Éthiopie qui, il est vrai, recèle de très nombreux sites paléontologiques, en particulier dans la vallée de l'Omo où ont été mis à jour les premiers restes de l'Homo Sapiens, devrait garder encore longtemps sa renommée de « berceau de l'Humanité ».

Stèles sculptées à Tiya en Éthiopie. L'agrandissement montre le bas-relief de l'une des stèles incrusté d'une épée.

De drôles de stèles

L'Éthiopie n'a pas échappé au phénomène des mégalithes. Depuis le IIe millénaire av. J.-C. qui a vu l'apparition des premiers dolmens, les habitants se sont attachés à ériger des pierres.
Stèles phalliques du site de Tuto Fela, photographie de Roger Joussaume.On peut en découvrir sur le site de Tiya, classé au Patrimoine mondial de l'UNESCO : fièrement dressées, elles exhibent pour la plupart des bas-reliefs figurant épées et symboles encore mystérieux.

Plus évident par contre est le message donné par les innombrables stèles du sud de l'Éthiopie, appelées soddos. De forme phallique, elles ont été érigées pendant une période allant de l'époque néolithique jusqu'à nos jours, puisque la tradition perdure dans certaines peuplades. Les archéologues y voient une façon de commémorer les morts valeureux, même si la datation et le but exact de ces réalisations restent à définir. On en trouve l'aboutissement dans les impressionnantes stèles d'Axoum de dizaines de mètres de haut. Ornées de décorations représentant la façade d'une maison avec portes et fenêtres, elles se dressent au-dessus d'une nécropole. La plus grande de ces centaines de stèles se trouve à terre, brisée en quatre. De plus de 5000 tonnes pour 33 mètres, elle s'est sûrement écroulée le jour même de son érection.

À ses côtés se trouve « la grande stèle de Rome » au destin original puisque c'est la seule qui traversa les océans : elle se fit voyageuse en 1937, lorsque Mussolini, maître du pays, décida de l'envoyer en quatre morceaux en Italie. On dut renforcer et élargir les routes, aménager des gués, faire appel à un solide bateau à vapeur puis à un train tout aussi robuste pour lui faire rejoindre Rome. Ce n'est qu'en 1997 que la décision fut prise de la renvoyer chez elle. On la découpa donc de nouveau avant de l'installer bien soigneusement dans un Antonov, destination Axoum. Enfin chez soi !

Champ des stèles, Axoum. L'agrandissement montre la stèle éthiopienne de Rome en gros plan. Photographies G. Grégor.

La grandeur d'Axoum

Pendant que l'Homme se dispersa sur l'ensemble du globe, les terres éthiopiennes continuèrent d’accueillir des peuplades nomades, et bien décidées à le rester. La révolution néolithique, très peu pour elles ! Dans la vallée du Rift, certains groupes sont en effet restés attachés à leur mode de vie de chasseurs fort longtemps, puisqu'on pouvait encore les croiser au XIVe siècle, au moment de l'arrivée des monothéismes.

Ruines du temple pré-axoumite de Yeha.À leur côté se mirent en place les premières civilisations de la région : si l'on hésite à y localiser le pays de Pount, cher aux Égyptiens et à la pharaon Hatshepsout, on n'a aucun doute sur l'existence du royaume de Daamat (IXe-Xe av. J.-C.), en lien avec les peuples de Saba (Yémen). Contrôlant les échanges liés aux aromates, ces habiles commerçants apportèrent leur langue, leur écriture et leur religion, dont témoigne encore, 27 siècles après sa construction, l'exceptionnel grand temple de Yeha (nord du pays).

Au Ier siècle av. J.-C., c'est une avancée scientifique qui va changer le destin de la région avec la découverte par les Grecs du mécanisme de la mousson. Désormais, les flottes romaines et gréco-égyptiennes peuvent rejoindre les Indes en faisant des haltes sur les côtes de la mer Rouge.

Ces allers et venues font les affaires du nouveau royaume d'Axoum, dont la capitale est située au coeur de l'actuelle province éthiopienne du Tigré. Il va en profiter  pour acquérir stabilité et prospérité, multipliant les échanges avec les grandes puissances de l'époque jusqu'à Rome, Palmyre et Ceylan.

Cela ne suffit pas à contenter les rois d'Axoum qui lancent des expéditions militaires en Arabie, s'emparant en 272 du port d'Aden. Pour se représenter aujourd'hui cet Âge d'or, on peut admirer les stèles géantes de granit de 20 à 30 mètres de haut qui, pour certaines, n'ont pas bougé depuis cette époque. 

Joan Blaeu, Carte de l'Éthiopie (Aethiopa Superior vel Inferior vulgo Abissinorum sive Presbiteri Ioannis imperium), 1635, Paris, BnF.

Le « pays des visages brûlés »

L'Occident s’est très tôt familiarisé avec l’Éthiopie, on en trouve d'ailleurs mention dans les textes d'Homère : « Zeus est parti du côté de l'Océan prendre part à un banquet chez les Éthiopiens sans reproche » (Iliade, VIIIe siècle av. J.-C.). Pourtant, bien des légendes l'entourent, comme le montre cet extrait de Pline : « Le pays entier a été appelé Aethérie, puis Atlantie, puis Éthiopie, d'Éthiops fils de Vulcain. Il n'est pas étonnant que des formes monstrueuses d'hommes et d'animaux se produisent vers l'extrémité de l'Éthiopie ; car le feu, élément mobile, est l'artisan de la configuration du corps et de la ciselure des formes. Toujours est-il qu'on dit qu'au fond de sa partie orientale sont des peuples sans nez, dont toute la face est plane ; d'autres sans lèvre supérieure, d'autres sans langue ; quelques-uns, ayant la bouche close et privés de narine, ne respirent que par un pertuis qui sert aussi de passage à la boisson, aspirée à l'aide d'un tuyau d'avoine, et à la nourriture, consistant en grain de la même plante, qui croît spontanément. Certains ne parlent que par signes et gestes ; il en est à qui l'usage du feu a été inconnu jusqu'au règne de Ptolémée Lathyre [IIe siècle av. J.-C.] » (Pline, Histoire naturelle, Ier siècle).
Évoquée dans l’Antiquité comme le « pays des visages brûlés », cette région a par la suite été baptisée par les Européens du nom d’Abyssinie (« mélangé »), désignant à l’origine les Hauts Plateaux du centre puis le royaume qui s’y est développé. Le terme d’Éthiopie n’a été officiellement adopté qu’au début du règne de Ménélik II (1889). Le pays a deux fois plus d'étendue que la France, avec des paysages très variés, allant du désert aux volcans, de la savane aux forêts d’eucalyptus, espèce omniprésente depuis son introduction au XIXe siècle par Ménélik II pour aider à la construction d’Abeba. On compte dans ses neuf régions administratives quelque 80 ethnies parlant plus d’une centaine de langues, dont certaines n’ont pas encore été classifiées. Parmi les populations principales, citons les Oromo, éleveurs autrefois animistes et aujourd’hui majoritairement musulmans, et les Amharas, chrétiens orthodoxes.

Illustration extraite du manuscrit L'Histoire du monde de Rashi ad-Din, 1314, décrivant le Négus d'Abyssinie (roi d'Aksoum) refusant la demande d'une délégation venue de la Mecque lui demandant de livrer les musulmans.

Un empire chrétien en Abyssinie

Quelle activité ! Au royaume d'Axoum se croisent des commerçants venus de tous horizons, et en particulier des chrétiens qui forment, dès le IVe siècle, une belle communauté. Sur les deux rives de la mer Rouge, on compte aussi une importante diaspora juive.

Eliza Codex 23 - Manuscrit biblique éthiopien, Minnesota, Université Saint John's.Un élément va alors jouer un rôle primordial : il s'agit d'une écriture de type alphabétique venue du Yémen qui permet de retranscrire la langue de la région, le guèze, et donc de traduire la Bible dès le Ve siècle.

Mais les souverains d'Axoum n'ont pas attendu cela pour se convertir. Dès 340, le roi Ezana, qui avait l'habitude de dédier ses victoires au dieu de la guerre Mahrem, change d'avis. Il fera désormais graver sur ses inscriptions : « À Dieu Père et Saint-Esprit et en son Fils Jésus-Christ ».

Sa conversion résulte de l'enseignement de son précepteur, un Syrien du nom de Frumence (ou Frumentius), qui reste connu en Éthiopie sous le nom d'Abba Salama (« Père de la Paix »). L'archevêque d'Alexandrie Athanase Ier fait de lui le premier évêque de l'Église éthiopienne.

De la sorte, celle-ci va demeurer sous l'autorité du patriarcat d'Alexandrie jusqu'en 1959. Lors du concile de Chalcédoine, en 451, elle va suivre son aînée sur un point doctrinal important : l'affirmation de l'union du divin et de l'humain dans le Christ. Après le concile, les Églises d'Égypte et d'Éthiopie vont rester fidèles au monophysisme et s'éloigner de ce fait de leurs consoeurs dyophysites de Byzance, Antioche et Rome.

Dans le même temps, en 380, le souverain d’Himyar, un royaume des bords de la mer Rouge, se convertit quant à lui au judaïsme, peut-être pour faire pièce à son rival, le souverain d'Axoum. Sa conversion et celle d'une partie de ses sujets seront à l'origine de la communauté juive éthiopienne des Falachas.

Suite à la conversion d'Ezana, l'Éthiopie devient la plus vieille nation chrétienne au monde, après l’Arménie mais son évangélisation en profondeur débute seulement vers 500, quand neuf ermites et moines monophysites ayant fui la Syrie trouvent refuge dans le royaume d’Axoum. Monastères et églises se multiplient dès lors jusqu'à Sanaa, au Yémen, où le dernier grand roi d'Axoum, Kaleb, fait construire une cathédrale (VIe siècle).

À son apogée, le royaume d'Axoum s'est étendu du Nil Blanc jusqu'au Yémen inclus. Mais en 572, les souverains d'Axoum sont chassés du Yémen par les Perses. Et au siècle suivant, le royaume est fragilisé par des révoltes et une perte d'influence dans le commerce de la région due à l'arrivée des négociants musulmans qui bloquent l'accès à la mer. Il faut appeler Alexandrie au secours.

On assiste alors à un retournement de situation inattendu avec l'arrivée de la dynastie tigréenne des souverains Zagwé (XIIe-XIIIe siècles), particulièrement pieux. Ils vont abandonner Axoum et déplacer leur capitale vers l'intérieur, dans les montagnes du Lasta. Parmi eux, le roi Lalibela (XIIe siècle) va marquer l'histoire de son pays en ordonnant la construction d'églises hors du commun, taillées dans la roche.

En 1270, un chef amhara nommé Yekuno Amlaka s'empare du Tigré. Il fonde la dynastie salomonide (ou salomonien) qui légitime son pouvoir par de soi-disant liens de parenté avec le roi d'Israël Salomon. Rien que cela ! Et ça marche : la dynastie est restée au pouvoir jusqu'en 1974, longévité qu'on ne retrouve qu'au Japon. Désormais, le Tigré devient une province parmi d'autres de l’empire éthiopien, mais les empereurs continuent d'être intronisés dans la cathédrale d’Axoum.

Piero della Francesca, La Réception de la reine de Saba par le roi Salomon, 1464, Arezzo, basilique San Francesco.

Mystérieuse reine de Saba

« La reine de Saba entendit parler de la réputation de Salomon pour le nom du Seigneur, et elle vint le mettre à l’épreuve par des énigmes. Elle arriva à Jérusalem avec une suite très importante, des chameaux portant des essences odoriférantes, de l’or en très grande quantité et des pierres précieuses » (Livre des rois). Ainsi commence le récit biblique de la rencontre entre le roi Salomon et la reine de Saba, personnage qui n'a pas pu être identifié d'un point de vue historique. Mais pour les Éthiopiens, aucun doute : la souveraine n'est autre que Makeda, fille du héros Angabo, roi d'Axoum du Ier millénaire av. J.-C. Et son aventure ne s'arrête pas à des échanges de politesse et de trésors, comme veut le faire croire le texte sacré : lors d'un second voyage, elle aurait accepté l'hospitalité de son hôte, lui faisant promettre de ne pas abuser d'elle. Affaire conclue ! à condition, ajouta Salomon, qu'elle ne se serve de rien dans le palais. Mais le roi, comme on le sait, était rusé : il avait laissé trainer une jarre d'eau, sachant que le climat de la région la pousserait au bord de la soif... C'est ainsi que vint au monde, quelques mois plus tard, le petit Ménélik, promis à un grand destin. À travers cette histoire on redécouvre les liens réels qui existaient entre les deux pays mais aussi l'unité politique qui existait alors entre le royaume de Saba (Yémen actuel) et l'Éthiopie, qui s'appropriera le personnage de la reine pour en faire une des figures fondatrices de la nation.

On a volé l'Arche !

Kebra Nagast (Le Livre de la gloire des rois) : c'est sous ce nom qu'a été rédigé au XIIIe ou XIVe siècle le texte fondateur de la dynastie salomonide.

Salomon et la reine de Saba, illustrations extraites du Livre de la gloire des rois, entre 1400 et 1450, La Haye, Meermanno Koninklijke Bibliotheek.Il revient sur la légende de la reine de Saba et de sa rencontre avec Salomon. La belle Makeda ne s'est pas en effet contentée de rentrer chez elle avec un bébé et quelques coffres débordant d'or, comme l'affirme la Bible.

Lorsque son petit Ménélik devint grand, elle le renvoya chez son père pour y acquérir une bonne éducation. Après quelques années de formation, le galopin eut l'idée de rapporter comme souvenir à sa mère non le tissu recouvrant la fameuse Arche d'alliance, comme elle le lui avait demandé, mais l'Arche entière !

Grâce à l'aide de l'ange de Dieu, il parvint à fuir les armées de son père et à déposer à Axoum le précieux coffre contenant les Tables de la Loi.

Désormais, le royaume d'Éthiopie peut lui aussi se vanter d'avoir été élu par Dieu et d'être pleinement associé à l'histoire biblique. Descendants de David, ses rois revendiqueront jusqu'en 1974 le titre de « Lions vainqueurs issus de la tribu de Juda ».

Du coup, ce n'est plus la peine de chercher l'Arche perdue : elle est toujours à Axoum, dans une chapelle construite par le dernier empereur, gardée par un moine qui ne peut jamais sortir du bâtiment. Et pas question d'aller la contempler, elle deviendrait invisible à tout jamais !

Chapelle de l'Arche d'Alliance, dans l'enclos de l'église Sainte-Marie-de-Sion à Aksoum. L'agrandissement est une photographie de Sainte-Marie-de-Sion. Photographies G. Grégor.

Deux frères sous un arbre

Voici comment, selon l'auteur latin Rufin d'Aquilée (IVe siècle), l'Éthiopie a été évangélisée :
« Avant que Constantin ait pu rendre la paix à l'Église […], un philosophe nommé Métrodore poussé par la curiosité de voir le pays et de connaître le monde entreprit divers voyages et passa jusqu'à l'Inde ultérieure [l'Éthiopie]. Son exemple excita un autre philosophe appelé Mérope de la ville de Tyr en Phénicis qui entreprit le même voyage pour un semblable motif, et mena avec lui deux jeunes enfants qu'il instruisait et dont il prenait soin, parce qu'ils étaient proches parents. Le plus jeune se nommait Edèse, l'autre Frumence. Mérope ayant satisfait sa curiosité se mit en chemin pour revenir en son pays. […] Le vaisseau fut attaqué ; le philosophe et tous les autres furent tués. On trouva sous un arbre les deux enfants qui étudiaient et préparaient leurs leçons. Les barbares en eurent pitié, et les menèrent à leur roi. […] il fit Édèle son échanson ; et croyant voir en Frumence plus d'esprit, de lumière et de conduite, il lui confia les écritures et les comptes […]. En mourant il laissa le royaume à sa femme avec un fils encore enfant […] La reine qui ne connaissait personne plus fidèle qu'eux dans tout le royaume les pria instamment de vouloir partager avec elle les soins du gouvernement jusqu'à ce que son fils fût en âge. [Lorsque le jeune roi Ezana prit le pouvoir], Frumence prit le chemin d'Alexandrie [où il rencontra saint Athanase qui] l'ordonna évêque, et lui ordonna de retourner avec la grâce de Dieu au lieu d'où il venait. Ce lieu était la ville d'Axoum […]. Frumence y répandit la semence de l'Évangile qui y produisit des fruits merveilleux » (Adrien Baillet, La Vie des saints, 1739, d'après L'Histoire ecclésiastique de Rufin d'Aquilée).

[Suite : Les Lions vainqueurs de la tribu de Juda]


Publié ou mis à jour le : 2020-12-08 12:48:55

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