La guerre de Sept Ans (1756-1763), que les Anglais dénomment « French and Indian War » (la guerre contre les Français et les Indiens), est la principale guerre du XVIIIe siècle. C'est aussi, selon une observation de Winston Churchill, la première guerre mondiale car on se battit alors sur tous les continents !
Les prémices de la guerre
Les hostilités ont débuté deux ans avant la déclaration de guerre officielle avec une échauffourée dans les forêts du Nouveau Monde : une poignée de Virginiens sous le commandement d'un certain... George Washington (22 ans), attaque une délégation française et tue son chef, Jumonville, dans le dessein de s'emparer de Fort-Duquesne, un fort qui tient la vallée de l'Ohio, la « Belle Rivière ».
De riposte en réaction, Londres, qui n'arrive pas à l'emporter sur terre, ordonne la saisie de 300 navires de commerce français dans différents ports, partout dans le monde. La guerre générale devient dès lors inéluctable... En prévision de celle-ci, le gouvernement anglais ne néglige aucune précaution. C'est ainsi qu'il ordonne la déportation des Acadiens francophones susceptibles de trahir la couronne.
Une guerre mondiale avant l'heure
Se déroulant sur le continent européen mais aussi en Amérique, en Afrique, aux Indes et sur les mers, en impliquant toutes les grandes puissances européennes, cette guerre sera a posteriori considérée par les historiens comme la première guerre mondiale !
Elle est provoquée d'une part par l'amertume des Français qui, dans la guerre de la Succession d'Autriche (1740-1748) ont « travaillé pour le roi de Prusse » et sont, outre-mer, de plus en plus en concurrence avec les Anglais ; d'autre part par la soif de revanche des Autrichiens qui se sont vus enlever la Silésie par le roi de Prusse Frédéric II pendant la guerre précédente.
Le 16 janvier 1756, le roi d'Angleterre Georges II (également Électeur de Hanovre) signe à Westminster un traité de « neutralité » avec le roi de Prusse. Du coup, l'impératrice Marie-Thérèse et le roi de France Louis XV enterrent officiellement une rivalité de 250 ans qui remontait à Charles Quint et François 1er et concluent le 1er mai 1756 un « renversement des alliances » qui prend à rebours leurs opinions publiques. Ils s'allient à la tsarine Élisabeth, fille de Pierre le Grand, ainsi qu'à la Suède, la Saxe et l'Espagne.
La guerre commence très mal pour les Français. Le prince de Soubise est défait par Frédéric II à Rossbach le 5 novembre 1757 malgré l'écrasante supériorité numérique de son armée. Habile stratège, Frédéric II vainc les Autrichiens à Leuthen, le 5 décembre de la même année et les Russes à Zorndorf le 25 août 1758. Cela lui vaut de porter désormais le qualificatif de Frédéric le Grand !
Mais la Prusse finit par être submergée sous le nombre des assaillants. Elle est un moment sur le point de disparaître après sa défaite à Kunersdorf, sur l'Oder, le 12 août 1759. Le roi Frédéric II est blessé et manque d'être capturé. Les troupes russes ont même le loisir de défiler à Berlin.
Heureusement pour la Prusse, la Russie se retire inopinément du conflit à la mort de la tsarine Élisabeth le 5 janvier 1762. Son neveu le nouveau tsar Pierre III, fervent admirateur de Frédéric II, n'a rien de plus pressé que de se retirer de la coalition contre la Prusse, sauvant son héros d'une situation désespérée. Il lui restitue la Poméranie et la Prusse-orientale.
La France de Louis XV et l'Autriche de Marie-Thérèse négligent d'exploiter leurs victoires et permettent à Frédéric II de se ressaisir et même de reconquérir la Silésie.
Dans le même temps, les Anglais, dont la situation n'était guère plus brillante que celle des Prussiens, portent à la tête de leur gouvernement un homme d'une grande énergie, William Pitt l'Ancien (Pitt The Elder), 49 ans. Les Français lui opposent un secrétaire d'État aux Affaires étrangères qui ne manque pas de talent, le duc de Choiseul.
La guerre outre-mer
Outre-mer où s'activent les Anglais, les choses se gâtent pour les coalisés. Fort-Duquesne est pris en 1758 par les Anglais et rebaptisé Pittsburgh en l’honneur de leur Premier ministre (c'est aujourd'hui une grande métropole industrielle du Middle West). Plus grave, la France perd sa colonie de la Nouvelle-France malgré le sacrifice de Montcalm devant Québec.
La guerre sévit aussi aux Indes où les Anglais ne tiennent pour l'heure que Bombay, Madras et Calcutta, tandis que les Français, grâce à Dupleix, dominent la moitié du sous-continent.
Le 23 juin 1757, une armée anglo-indienne commandée par Robert Clive défait l'armée du nabab (souverain) du Bengale, alliée aux Français, à Plassey, près de Calcutta. Le 16 janvier 1761, Lally-Tollendal capitule à Pondichéry, l'un des derniers comptoirs qui restent aux Français.
La paix va venir des dissensions internes et de la lassitude, principalement en Angleterre. Bien qu'immensément populaire dans son pays, William Pitt doit démissionner à l'automne 1761, un an après que George III (22 ans) a succédé à son grand-père George II. Son successeur à la tête du gouvernement est le favori du nouveau roi, Lord Bute, qui reproche à Pitt de trop en faire sur le continent européen.
Il entame les pourparlers de paix, au scandale de l’opinion qui espérait cueillir plus d’avantages de ses efforts.
Ceux-ci sont suspendus du fait de l'entrée en guerre de l'Espagne aux côtés de la France et la guerre ne se terminera qu'en 1763 avec deux traités, à Paris et Hubertsbourg, qui dessineront pour un siècle et demi le nouveau visage de l'Europe.
Notons que l’Angleterre, lourdement endettée par l'effort de guerre, décide de taxer les colons américains qui en sont les principaux bénéficiaires. Quoi de plus normal, après tout ? Mais lesdits colons ne l’entendent pas de cette oreille. « No taxation without representation » (pas d’impôt sans représentants au Parlement), proclament-ils, ce qui ne manque pas non plus de logique… Il va s'ensuivre une nouvelle guerre, dix ans plus tard, et l'indépendance des États-Unis d'Amérique.
Guerres
Vos réactions à cet article
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joel (09-12-2013 17:06:51)
Les deux articles (la guerre elle-même et les deux traités qui y mettent fin) racontent très bien l'histoire et m'ont beaucoup appris. Mais j'aimerais comprendre comment les dirigeants de la France... Lire la suite
joel (09-12-2013 17:06:00)
Les deux articles (la guerre elle-même et les deux traités qui y mettent fin) racontent très bien l'histoire et m'ont beaucoup appris. Mais j'aimerais comprendre comment les dirigeants de la France... Lire la suite