L'Affaire Cicéron, 1943

François Kersaudy (Perrin, Tempus,  2008)

C'est à un mauvais polar que s'intéresse l'historien François Kersaudy dans ce livre : L'Affaire Cicéron, 1943 (Tempus, Perrin, 2009, 8 euros).

En effet, si un auteur de roman noir faisait commettre tant de négligences à ses personnages, nul doute qu'on l'accuserait de facilité et de paresse !

L'affaire Cicéron paraît a priori simple : les protagonistes ont presque tous publié des mémoires, journaux ou livres sur l'affaire.

La sortie de celui de Ludwig Moyzisch, l'interlocuteur allemand de Cicéron, provoque même en 1950 une interpellation du ministre des Affaires Étrangères, Ernest Bevin, à la Chambre des Communes britanniques. Ce dernier prétend que les plans d'Overlord ont bien été photographiés et transmis aux nazis. Que peut-on donc découvrir de plus aujourd'hui ?

Pourtant, les plans ultra-secrets d'Overlord n'ont jamais été transmis à l'ambassade d'Ankara : la réponse du ministre n'est que la énième gaffe des services de Sa Majesté. C'est une des caractéristiques de cette affaire : tout le monde ment ou se trompe, comme le montre l'analyse minutieuse mais très lisible de François Kersaudy.

Cette accumulation d'invraisemblances a conduit des auteurs à voir dans l'affaire une manipulation des services secrets britanniques. Le chef du MI6 («Military Intelligence Section 6») aurait ainsi déclaré : «Bien entendu, Cicéron était sous notre contrôle».

Problème, la nature des documents et des renseignements transmis vient invalider cette hypothèse et l'ouverture des archives des services secrets en 2003 et 2005 a permis d'écarter définitivement cette théorie.

Les Britanniques n'ont pas manipulé Cicéron, dont ils n'ont découvert l'identité qu'en août 1945, après avoir longuement interrogé les diplomates allemands. Ce n'est que bien après l'affaire qu'ils ont réalisé l'ampleur des négligences commises par leurs services et tenté d'éviter qu'elles ne se reproduisent.

Toutes les zones d'ombre ne disparaissent pas pour autant : il semble que Cicéron (Elyesa Bazna) n'ait pas eu la moindre connaissance en photographie, ce qui rend probable qu'il ait eu un(e) complice, dont nous ne savons rien. L'histoire, même sous la lumière de ces nombreux témoignages, garde donc sa part de mystère...

Yves Chenal

Publié ou mis à jour le : 10/06/2016 09:42:47

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