Turcs et Russes

1- Enfants de Byzance

Ennemies et parfois alliées, la Russie et la Turquie entretiennent des rapports crispés depuis près de six siècles.

Les empires russe et ottoman qui les ont précédées ont eux-même connu des trajectoires étrangement parallèles, de leur ascension à leur brutale disparition à l'issue de la Première Guerre mondiale.

Thomas Tanase

Deux empires issus d'un affrontement avec les Mongols

Vladimir Ier, Grand Prince de Kiev, peinture de l'iconostase de l'Hermitage de l'Annonciation, archidiocèse du Canada.L'histoire russe est déterminée par le choix du grand-prince de Kiev, Vladimir, de se convertir à l’orthodoxie byzantine en 988. 

Selon la Chronique des temps passés, cette conversion résulte de la fascination de son ambassade devant la beauté de la liturgie orthodoxe et des églises grecques de Constantinople.

Même si le monde russe a toujours eu le regard tourné vers les rives du Bosphore, il faut néanmoins rappeler son autre obsession : les luttes incessantes contre les nomades de la steppe asiatique.

Après de rudes épreuves, elles lui permettront de réunir d'un seul tenant l’Asie intérieure et l'Europe orientale.

- Les Russes : assaillis par les Mongols

Dimitri Donskoï, Tsarsky Titulyarnik, XVIIe siècle.Après des débuts prometteurs, la première Russie est ruinée par les Mongols qui s'emparent de Kiev en 1240. Divisées mais toujours fidèles à leur foi et à leur langue, les principautés russes tombent sous la domination de la Horde d'Or, un royaume mongol des bords de la mer Caspienne.

L'une d'entre elles, Moscou, prend de plus en plus d'importance. Son grand-prince Dimitri Donskoï refuse de payer le tribut dû à la Horde d'Or et, le 8 septembre 1380, il vainc les Mongols à Koulikovo, sur les bords du Don (d'où son surnom : Donskoï). Les Mongols ne sont pas défaits pour autant et reviennent à la charge deux ans plus tard...

Bataille de Koulikovo, miniature du XVIIe siècle, chronique « La Légende de Mamay ».

- Les Turcs : dans le sillage des Mongols

C’est aussi aux marges de ce monde des steppes et de l’épopée mongole que naît l’empire ottoman. Les Turcs venus d’Asie intérieure avaient déjà fondé la grande dynastie des Seldjoukides, qui, au XIe siècle, avait pris le plateau anatolien aux Byzantins et déclenché en retour les croisades.

Le siège de Moscou par Tokhtamych, khan de la Horde d'or, en 1382, enluminure médiévale.Selon une tradition largement légendaire, les ancêtres de la dynastie ottomane arrivèrent en Anatolie dans le sillage des Mongols. Vers 1300, leur chef Osman se taille un royaume à proximité de Nicée et de la mer de Marmara.

Orhan, fils d’Osman, intervient dans les conflits internes de l’empire byzantin et s’empare de Gallipoli en 1354. Mourad Ier traverse le détroit du Bosphore, prend Andrinople dans les années 1360 et vainc les Serbes au Kosovo le 28 juin 1389. 

Constantinople est provisoirement sauvée par la victoire de Tamerlan sur le sultan Bajazet à Angora, en 1402. 

Pendant ce temps, le khan de la Horde d’Or Tokhtamych pille Moscou en 1382 et restaure l’autorité mongole sur les principautés russes. Comme si cela ne suffisait pas, les Russes doivent aussi affronter Tamerlan qui arrive à son tour en 1395 aux portes de Moscou. Le grand-prince Vassili s’empresse alors d’y faire transporter l’icône de la Vierge de Vladimir, offerte par les Byzantins à Kiev vers 1131. Et l’incroyable se produit : les troupes de Tamerlan se retirent. La Vierge sera désormais vénérée comme une protectrice miraculeuse.

Entrée du sultan Mehmet II à Constantinople le 29 mai 1453, Benjamin Constant, 1876, musée des Augustins, Toulouse.

- Exit les Mongols : Russes et Turcs face à face

L'assassinat de Tokhtamych en 1406 laisse la Horde d’Or dans une situation dont elle ne se relèvera pas. À partir des années 1430, elle finit par éclater  en plusieurs khanats rivaux, ceux de Crimée sur la mer Noire, de Kazan et d’Astrakhan sur la Volga. L’empire fondé par Tamerlan ne tarde pas à s’effondrer à son tour, permettant du même coup aux pouvoirs ottoman et russe de reprendre leur marche en avant.

Mehmed II le Conquérant, Gentile Bellini, 1480, National Gallery, Londres.En 1453, Mehmed II s’empare de Constantinople. L’événement, d’un retentissement sans égal à Moscou, ne tarde pas à être interprété comme une punition divine pour l’union conclue entre l’Église de Rome et le patriarcat de Byzance en 1439.

Les Ottomans poursuivent leur mise au pas des Balkans. Ils vassalisent progressivement les principautés roumaines et atteignent l’embouchure du Danube. Ils arrivent aux portes de l’Europe centrale et d’un royaume de Pologne qui, par son rapprochement avec la Lituanie, a réussi lui aussi à s’étendre, en s’emparant d’une large partie de l’Ukraine actuelle, jusqu’à Kiev. En 1475, ils placent le khanat de Crimée sous leur protectorat : la mer Noire devient un lac ottoman...


Publié ou mis à jour le : 2020-03-06 07:47:45
Anacho (07-05-2017 07:49:56)

Résumé fort intéressant il me semble qu'à cette époque seule la volonté de puissance animait les protagonistes la religion n'étant pas le moteur de leurs actions ce qui n'est plus le cas en ce ... Lire la suite

Jean Louis Taxil (28-04-2017 17:49:03)

L'empire des steppes... Merci de cet article qui invite à se replonger dans l'histoire de ces grandes régions, la biographie de Marco Polo ainsi que dans Hérodote.com

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