Le dictionnaire de l'Histoire

Croisade

Le mot « croisade » désigne usuellement huit expéditions militaires dirigées par les chrétiens d'Occident contre les musulmans, de 1095 à 1270.

Les « voyages vers la Terre sainte »

À l'époque carolingienne et aux alentours de l'An Mil, la chrétienté occidentale ne pesait pas lourd par rapport à la chrétienté byzantine et à l'Orient, encore majoritairement chrétien mais dominé par le califat musulman de Bagdad. 

Pénétrés d'une foi naïve et profonde, les Occidentaux de toutes conditions étaient nombreux à se rendre en pèlerinage en Terre Sainte, sur le tombeau du Christ. Ils employaient des expressions aussi variées que « voyage vers la Terre sainte »« voyage d'outre-mer » ou « passage » pour désigner ces expéditions.

Les pèlerins étaient plutôt bien accueillis par les habitants de la Terre Sainte, tant musulmans que chrétiens, car ils contribuaient à leurs revenus.

Mais au XIe siècle, le Moyen-Orient et l'empire byzantin sont bouleversés par l'irruption des nomades turcs qui, bien que convertis à l'islam, n'en manifestent pas moins une grande violence. Les pèlerinages deviennent périlleux et nécessitent un encadrement militaire. La défaite du basileus byzantin à Malazgerd en 1071 et sa capture par les Turcs font craindre qui plus est pour la survie de Byzance. 

Stations de Londres à Jérusalem (détail du manuscrit montrant la traversée du bassin parisien) (Historia Anglorum. France, St Albans ; 1250-1259, British Library)Le 27 novembre 1095, le pape Urbain II, qui s'est rendu à un concile à Clermont (Auvergne) en vue de régler les affaires matrimoniales du roi capétien Philippe Ier, saisit l'occasion de ce concile pour appeler les guerriers francs à délivrer les Lieux Saints de l'emprise turque et secourir leurs frères d'Orient. Son appel obtient un écho inespéré, y compris chez les paysans. C'est que la chrétienté occidentale, encore fragile et fruste, déborde d'énergie et de foi et commence à se sentir à l'étroit dans ses terres du bout du monde...

La première expédition militaire se met en marche après trois années de préparation, avec pas moins de 150 000 participants. Les contemporains les qualifient de « croisés » eu égard à la croix qu'ils cousent sur leur épaule gauche. 

En dépit de pertes importantes, l'expédition débouche sur un succès avec la conquête de la Terre Sainte et la prise de Jérusalem. Pendant le demi-siècle qui suit, les croisés renforcent les États francs de Palestine qui deviennent d'une certaine manière et pour peu de temps les premières colonies occidentales. 

Ces États sont administrés selon les mêmes principes que l'Europe féodale mais jamais il n'y est question de convertir de force les infidèles musulmans ou les chasser, encore moins de les exterminer. En cela, les croisades se distinguent des guerres de religion et de la guerre sainte musulmane (djihad), qui est une guerre de conquête. 

La contre-offensive musulmane se met en marche avec la reprise d'Édesse en 1147, la victoire de Saladin à Hattîn et dans la foulée, en 1187, la reprise de Jérusalem ! Les ultimes efforts des croisés ne peuvent empêcher l'inéluctable : la chute en 1291 de Saint-Jean d'Acre, dernier établissement franc en Terre Sainte. Au final, l'épopée des croisades présente un bilan en demi-teinte...

Un mot d'apparition tardive

Le mot « croisade » qui dérive de croix, apparaît pour la première fois en langue d'oc (« crozada ») ainsi que l'indique l'historien Michel Roquebert, mais c'est pour désigner l'Affaire de la Paix et de la Foi, autrement dit la croisade contre les Albigeois (des chrétiens hérétiques) : on repère le mot à la laisse (vers) 130 de la Chanson de la Croisade (Canso de la Crozada), un poème écrit par Guillaume de Tudèle vers 1213.

En 1229, une chronique relative aux expéditions vers la Terre sainte désigne celles-ci sous le mot « croiserie » (du latin Cruce signati, relatif à la croix cousue sur le vêtement des pèlerins). 

Mais c'est seulement à la fin du XVe siècle que le mot « croisade » est appliqué en français à ces expéditions, alors qu'elles relèvent déjà d'un lointain passé. Il est étendu ultérieurement à la Reconquista espagnole (le terme Reconquista remonte seulement à la fin du XVIIIe siècle) et au Drang nach Osten allemand.

Il est depuis lors employé sans contenu religieux pour désigner une opération civile à vocation humanitaire... ou une guerre prétendûment « juste ». En 1885, le chef républicain Jules Ferry justifiait la colonisation en la présentant comme une « nouvelle croisade civilisatrice ». Plus près de nous, le président américain George Bush parle de la guerre contre le terrorisme comme d'une « croisade » du Bien contre le Mal !

Voir : La première croisade

Aucune réaction disponible

Respectez l'orthographe et la bienséance. Les commentaires sont affichés après validation mais n'engagent que leurs auteurs.

Actualités de l'Histoire
Revue de presse et anniversaires

Histoire & multimédia
vidéos, podcasts, animations

Galerie d'images
un régal pour les yeux

Rétrospectives
2005, 2008, 2011, 2015...

L'Antiquité classique
en 36 cartes animées

Frise des personnages
Une exclusivité Herodote.net