Appelé Gallia (Gaule) par Jules César, le territoire compris entre les Pyrénées et le Rhin appartient à l'immense domaine de peuplement celte qui s'étend des îles britanniques jusqu'au bassin du Danube et même jusqu'au détroit du Bosphore (le quartier de Galatasarai, à Istamboul, rappelle la présence de Galates, cousins des Gaulois, dans la région).
Avant notre ère, le territoire de la Gaule est partagé entre Rome et des tribus indépendantes celtes, mais aussi ibères ou encore germaniques. Les Romains occupent le littoral méditerranéen, la Gaule Narbonnaise, aussi appelée la Province (dont nous avons fait Provence).
La Gaule qui échappe à Rome compte 64 « pagus » ou pays. Elle est communément appelée « Gaule chevelue » en raison de l'importance de ses forêts. Rien à voir avec la pilosité de ses habitants. Les Éduens, au centre, sont fortement influencés par la culture latine. Les régions proches des Pyrénées sont appelées Aquitaine ; au-delà de la Seine, elles sont appelées Belgique.
Que sont « nos ancêtres les Gaulois » devenus ?
C'est au début du XIXe siècle qu'un jeune historien aujourd'hui oublié, Amédé Thierry, sort les Gaulois de l'oubli dans son Histoire des Gaulois (1934) en se fondant surtout sur les récits des Grecs et des Romains.
De façon quelque peu abusive, il assimile la France à la Gaule en oubliant le millénaire gallo-romain et franc qui les sépare. Il y voit « race de laquelle descendent les dix-neuf vingtièmes d'entre nous Français », une fraction qui mériterait d'être revue à la baisse.
Napoléon III, féru d'histoire romaine, porte Vercingétorix au pinacle et lui donne même ses traits sur la statue qui le représente à Alésia.
Sous la IIIe République, la référence à « nos ancêtres les Gaulois » n'a jamais été employée textuellement dans les manuels scolaires des collèges en France, encore moins dans les colonies !
On la rencontre toutefois dans des manuels édifiants destinés aux jeunes écoliers : « Nos ancêtres les Gaulois étaient donc de pauvres malheureux, parce qu'ils ne connaissaient pas comme nous le bon Dieu » (H. Guillemain et l'abbé Le Ster, Histoire de France, cours élémentaire, 1934).
Voici ce qu'écrit aussi Le Tour de France par deux enfants (G. Bruno, Belin, 1877), livre de lecture très populaire sous la IIIe République : « La France, notre patrie, était, il y a bien longtemps de cela, presque entièrement couverte de grandes forêts. Il y avait peu de villes, et la moindre ferme de votre village, enfants, eût semblé un palais. La France s'appelait alors la Gaule, et les hommes à demi sauvages qui l'habitaient étaient les Gaulois. Nos ancêtres, les Gaulois, étaient grands et robustes, avec une peau blanche comme le lait, des yeux bleus et de longs cheveux blonds ou roux qu'ils laissaient flotter sur leurs épaules... »
Gardons-nous d'ironiser sur ce genre de billevesées et songeons à ce que les générations futures retiendront par exemple de notre approche de l'islam dans les manuels scolaires de 2016 (note) !
Albert Malet et Jules Isaac, qui ont inspiré les manuels d'histoire de la IIIe et de la IVe République, ont magnifié la défaite du héros gaulois mais plus encore célébré l'œuvre civilisatrice de Rome : « Les Gaulois n'étaient encore qu'à demi civilisés quand ils furent soumis par Jules César (51 av. J.-C.). Ils adoptèrent rapidement la civilisation romaine » (A. Malet & J. Isaac, classe de quatrième, Hachette, 1926).
Depuis la fin du XXe siècle, les découvertes archéologiques ont fait litière des préjugés sur la sauvagerie de la Gaule. Les historiens s'accordent aussi sur la diversité de son territoire et de ses habitants.
Dans la France moderne, c'est sans conteste l'héritage romain et non gaulois qui prédomine dans la langue et les mœurs. Également dans les structures familiales si l'on en croit l'anthropologue Emmanuel Todd (les familles de type nucléaire caractéristiques du Bassin Parisien sont un héritage de Rome et n'ont rien à voir avec les Celtes et les Germains).
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Le territoire entre Rhin et Pyrénées que César appelle Gaules dans son célèbre compte-rendu de la guerre des Gaules est composé d'environ 64 pays relativement divers et sans guère d'unité.
C'est un ensemble fortement peuplé, aux ressources agricoles et minières abondantes, mais dans lequel il serait hasardeux de chercher la France des origines.
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