L'apogée du califat abbasside (de 750 à 861)
Après s’être étendu fortement jusqu’en 720, le califat omeyyade commence à stagner après cette date. Dans les années 730, il doit lutter contre l’invasion de peuples turcs qui ravagent le territoire. En parallèle, les rentrées d’argent dues aux pillages et aux tributs diminuent fortement. Ces difficultés favorisent les révoltes, notamment chez les musulmans non arabes qui revendiquent les mêmes droits que l’élite arabe. Dans l’actuel Maroc, les tribus berbères reprennent leur indépendance.
Les califes affaiblis subissent des coups d’état à répétition et la capitale est transférée à Harran en 744. Les Omeyyades doivent faire face à des califes rivaux en Irak et à une vaste insurrection dans le Khorasan menée par le clan des Abbassides. Ceux-ci triomphent des Omeyyades en 750 à la bataille du Grand Zab et as-Saffah devient le premier calife abbasside. Presque toute la famille omeyyade est massacrée, sauf Abd al-Rahman qui parvient à s’enfuir en Espagne où il fonde un émirat indépendant en 756.
La nouvelle capitale est implantée en Irak, d’abord à Koufa, puis al-Anbar, et enfin Bagdad à partir de 762. Les rentrées d’argent, qui étaient jusqu’alors très dépendantes des raids menés hors des frontières, reposent de plus en plus sur l’agriculture et le commerce. Des vizirs sont nommés à la tête de l’administration et le contrôle sur les gouverneurs est renforcé. La taille des villes augmente, notamment Bagdad qui devient l’une des plus grandes du monde.
L’apogée des Abbassides est incarné par le règne d’Haroun al-Rachid de 786 à 809. La traduction en arabe des textes persans et romains favorise un nouvel essor des sciences et des lettres. Le commerce avec la Chine permet l’introduction du papier qui remplace rapidement les parchemins. Les contacts avec l’Inde favorisent quant à eux l’adoption des chiffres indiens qu’on appellera les chiffres arabes.
A l’ouest du califat, les tribus berbères commencent à former de puissants royaumes unifiés avec la fondation de l’état rostémide en 761 dans l’actuelle Algérie, puis celle de l’émirat idrisside en 789 dans l’actuel Maroc. Ça pousse les émirs de Kairouan à obtenir une grande autonomie vis-à-vis du califat en 800, fondant la dynastie des Aghlabides. Celle-ci redonne une nouvelle vigueur à la région, incarnée par l’agrandissement de la grande mosquée de Kairouan et le début de la conquête de la Sicile qui va s’échelonner de 827 à 902. Cette époque voit aussi la conquête de la Crète.
Après la mort d’Haroun al-Rachid, la dynastie est affaiblie par une guerre entre ses deux fils : Al-Amin obtient le califat, mais al-Ma’moun se rebelle depuis son bastion du Khorasan et s’empare du pouvoir en 813 avec l’aide du général Tahir. En échange, celui-ci devient le gouverneur des provinces en Iran et en Asie Centrale et acquiert une grande autonomie en 822, fondant la dynastie des Tahirides.
Malgré cette difficulté à contrôler les marges du califat, le règne d’al-Mamoun n’en reste pas moins prospère sur le plan culturel : féru de sciences, il fonde l’observatoire astronomique de Bagdad et la Maison de la Sagesse qui rassemble les ouvrages venus de toutes les civilisations. Ça favorise l’essor de scientifiques arabes tels qu’al-Kwarizmi.
Cependant la croissance de Bagdad entraîne une insécurité croissante dans la capitale. Son successeur al-Mutasim s’entoure d’une garde rapprochée formée d’esclaves turcs islamisés capturés en Asie Centrale, les Ghulams : ceux-ci vont très vite former les troupes d’élite du califat. Al-Mutasim décide finalement de quitter Bagdad pour fonder une nouvelle capitale en 836, Samarra. La grande mosquée de Samarra avec son célèbre minaret en spirale est achevée par al-Mutawakkil en 852.
L’ascendant acquis par les Turcs au sein de l’armée va pourtant finir par se retourner contre les califes. A partir de 861, les Ghulams se mettent à faire et à défaire les califes, ce qui entraîne une période d’anarchie dans la capitale. L’affaiblissement de l’autorité des Abbassides va favoriser la création de nouveaux états indépendants qui vont accélérer la fragmentation du monde musulman.
Tandis que le califat rayonne, la Chine n’est pas moins vigoureuse à cette époque grâce au dynamisme de la dynastie Tang : c’est ce que nous verrons dans le prochain épisode.
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