Richard III ne régna que deux ans sur l'Angleterre, à la fin du Moyen Âge mais laissa la réputation d'un tyran sans égal. Treizième et dernier roi de la dynastie des Plantagenêt, il fut aussi le dernier roi anglais à mourir à la guerre.
À 32 ans, en 1485, il est en effet tué à Bosworth, à l'issue d'une bataille contre des barons rebelles, après s'être battu avec fougue et courage. En dépit de cela, sa dépouille nue est lacérée de mille façons, ficelée sur un cheval et traînée jusqu'à Leicester où elle est inhumée dans la chapelle des Frères mineurs.
La tombe du roi a disparu peu à peu de la mémoire des hommes jusqu'à ressurgir à l'occasion de fouilles archéologiques sous un parking de la ville de Leicester, en 2012. Après l'exhumation du squelette et son analyse ADN, les scientifiques ont pu alors affirmer avec certitude avoir retrouvé le roi maudit. Le 25 mars 2015, ses restes ont été inhumés dans la cathédrale de la ville avec une pompe toute royale.
Dernier souverain de la Maison d'York, branche directe de la dynastie des Plantagenêt, Richard III laisse le trône à une nouvelle dynastie, les Tudor, et c'est à eux et au plus grand auteur de leur époque que Richard III devra sa très mauvaise réputation.
Richard III a inspiré à Shakespeare, un siècle après sa mort, l'une de ses pièces les plus célèbres et les plus jouées avec cette formule prêtée au roi sur le champ de bataille de Bosworth : «Un cheval ! Mon royaume pour un cheval !»
La tragédie se déroule en cinq actes. Elle débute en 1471 avec la rencontre entre le futur Richard III (Gloucester) et sa future femme Anne Neville. Elle se poursuit avec le meurtre du roi Henri VI, de son frère George de Clarence et de ses neveux, les enfants du Édouard IV, enfin la bataille de Bosworth.
Shakespeare suggère que Richard III est à l'origine de toutes ces morts violentes et qu'il a épousé Anne Neville sous la contrainte. Il fait de lui le prototype des tyrans sanguinaires et de son vainqueur, le duc de Richmond, futur Henri VII Tudor, un homme aimable entre tous. Il est vrai qu'il écrit sous le règne d'Élisabeth 1ère Tudor et se doit de complaire à la dynastie régnante. Sa tragédie Richard III a tous les aspects d'une oeuvre de propagande.
Un prince aimable
Le futur Richard III est le quatrième et dernier fils de Richard d'York (ou Richard Plantagenêt) et de Cécile Neville. C'est encore un nourrisson quand débutent les hostilités entre son père, prétendant à la couronne anglaise, et le roi en titre, Henri VI de Lancastre. Cette guerre des Deux-Roses (la rose blanche d'York et la rose rouge de Lancastre) prendra fin avec sa mort.
Après la mort de son père à la bataille de Wakefield, en 1460, Richard et son jeune frère George se réfugient avec leur mère dans les Pays-Bas bourguignons. Ils rentrent en Angleterre au bout de quelques mois, après que leur frère aîné eut vaincu Henri VI à Townton et ceint la couronne sous le nom d'Édouard IV.
Richard, qui n'a encore que 9 ans, est fait chevalier de l'Ordre de la Jarretière et duc de Gloucester. Il est élevé au château de Middleham, chez le comte Richard de Warwick, avec son frère George, lui-même fait duc de Clarence. La guerre des Deux-Roses aurait pu s'arrêter là sans les manigances de Warwick.
En 1469, George rejoint Warwick dans un complot contre leur frère Édouard IV mais Richard reste fidèle à celui-ci. Bien lui en prend car le complot échoue. Nommé connétable d'Angleterre, Richard écrase un soulèvement dans le pays de Galles.
Peu après, cependant, Warwick, en exil en France, auprès du roi Louis XI, retourne sa veste et s'allie à la Maison des Lancastre. Il replace brièvement Henri VI sur le trône en 1471. C'est au tour d'Édouard IV et de Richard de traverser la Manche.
Richard suit son frère aîné dans son bref exil en Bourgogne et l'assiste dans les batailles de Barnet et Tewkesbury, en 1471, qui le réinstallent au pouvoir et causent la mort de Warwick, du roi Henri VI et de son fils, le prince Édouard.
Richard (19 ans) déclare alors sa flamme à Anne Neville (16 ans), fille cadette de Warwick, déjà veuve du prince Édouard, fils d'Henri VI. Fait notable, il l'aimera et lui sera fidèle, dit-on, tout le restant de sa vie.
En 1478, George de Clarence, pardonné après sa trahison avec Warwick, se reprend à comploter contre le roi son frère. Celui-ci le fait juger et mettre à mort. On dit que George, connu pour son goût de la boisson, demanda à être noyé dans un tonneau de malvoisie.
Richard, partagé entre sa fidélité à son royal aîné et son affection pour le frère félon, se retire dès lors sur ses terres, dans le Yorkshire. Il en veut tout particulièrement à sa belle-soeur la reine Élisabeth Woodville, qui n'a de cesse de placer ses parents aux plus hautes fonctions de la cour. Sans doute a-t-elle plaidé pour la mort de Clarence.
Gouverneur militaire du Yorkshire, le duc de Gloucester mène à partir de 1480 plusieurs campagnes contre son turbulent voisin, le roi Jacques III d'Écosse, allié du roi de France Louis XI. Victorieux, il fait même son entrée à Édimbourg.
Sur ces entrefaites meurt le roi Édouard IV, le 9 avril 1483... Il laisse une fille, Élisabeth, et deux garçons, Édouard, 12 ans, et Richard, 10 ans.
Un roi impitoyable
Richard a été désigné par son frère comme Protecteur du royaume en attendant le couronnement du nouveau roi Édouard V. Mais d'emblée, il se heurte à l'hostilité du clan Woodville, qui fait venir le nouveau roi à Londres au plus vite afin de le couronner et, dans le même temps, manoeuvre pour que le protectorat de Gloucester soit mué en conseil de régence.
Informé de ces manigances par Lord Hastings, un ami du roi défunt, Richard de Gloucester intercepte son neveu sur la route de Londres avec l'aide du puissant duc de Buckingham. Celui-ci, comme une bonne partie de la vieille noblesse, supporte mal la mainmise du clan Woodville sur le pouvoir.
Tandis qu'Édouard V et son frère Richard sont séquestrés dans la Tour de Londres, Richard songe à se faire lui-même couronner. Pour cela, il lui faut déshériter ses neveux. Lord Hastings refuse de le suivre dans cette voie. Qu'à cela ne tienne, Richard le fait arrêter en plein Conseil le 20 juin 1483 et décapiter sur le champ.
Le temps presse pour Richard car le couronnement de son neveu Édouard V, fils d'Édouard IV, est prévu le 24 juin.
Fort opportunément, le 22 juin 1483, un porte-parole du duc de Gloucester fait valoir que le mariage d'Édouard IV avec Élisabeth Woodville était invalide et que leurs enfants sont donc des bâtards, interdits de régner ! Les malheureux ne seront plus vus vivants par quiconque. Force est d'admettre que leur oncle les a faits mettre à mort dans leur prison, ne pouvant tolérer qu'ils se soulèvent un jour contre lui.
À la fin juin, le Parlement adresse une supplique au duc de Gloucester pour qu'il accepte la couronne. Après un semblant d'hésitation, il accepte et devient Richard III. Son couronnement, le 6 juillet 1483, réunit quasiment toute la noblesse anglaise.
Mais cette belle unanimité se fissure très vite. Dès le mois d'octobre, le duc de Buckingham se réconcilie avec les Woodville et tous rejoignent le parti des Lancastre, représenté par un lointain cousin en exil, Henri Tudor, comte de Richmond.
Le conflit débute bien pour Richard III. Après que de fortes tempêtes se soient abattues sur son armée, Buckingham est capturé sans combat et exécuté à Salisbury le 2 novembre 1483.
Élisabeth Woodville, qui désespère de revoir ses fils vivants mais a de la ressource, négocie avec Henri Tudor un arrangement aux termes duquel celui-ci épousera sa fille Élisabeth. Cela revient à unir les deux anciennes maisons rivales, les York et les Lancastre, en guerre depuis déjà une génération !
Richard III voit le sort se retourner contre lui avec la mort de son fils unique, le prince Édouard, en avril 1484. En mars 1485, nouveau coup dur avec la mort de la reine Anne Neville.
Le 7 août 1485, Henri Tudor débarque à Milford Haven, dans le pays de Galles. L'affrontement décisif a lieu deux semaines plus tard, près du village de Market Bosworth. Richard III est tué d'emblée en chargeant à la tête de sa cavalerie. Pressés d'en finir enfin avec la guerre dynastique, les Anglais se rallient sans maugréer au vainqueur.
Né le 28 janvier 1457, Henri Tudor, comte de Richmond, est le fils d'Edmond Tudor et Margaret Beaufort. En exil, il a pris la tête du parti des Lancastre, chassés du trône par leurs cousins d'York.
Son père Edmond est le demi-frère de l'ancien roi Henri VI. L'un et l'autre sont nés de Catherine de Valois. Henri VI est le fils de son premier mari Henri V et Edmond de son deuxième mari, Owen Tudor. Sa mère Margaret Beaufort est l'arrière-petite-fille de Jean de Gand, fils cadet du roi Édouard III. Autant dire que ses prétentions dynastiques sont minces.
Mais son arrangement matrimonial avec la veuve d'Édouard IV et son mariage avec leur fille Élisabeth vont faciliter le ralliement d'une très grande partie de la noblesse anglaise à Henri Tudor, couronné sous le nom d'Henri VII après la bataille de Bosworth.
Vos réactions à cet article
Recommander cet article
Voir les 7 commentaires sur cet article
niki (02-10-2018 20:36:19)
très bon article - effectivement richard III n'a pas assassiné ses neveux - c'est plus que probablement la mère de l'usurpateur tudor qui les a fait exécuter, pour éviter qu'ils ne viennent venge... Lire la suite
jean-louis (03-04-2015 14:25:08)
Ma réaction à la lecture de cet article est proche de celle de Catherine Lefèvre. J'ai pris un papier et un crayon, mais cela ne m'a pas aidé à comprendre les liens entre les différents interve... Lire la suite
Jak40 (28-03-2015 09:10:54)
Cela ressemble aux Mode d'Emploi qui sont rédigés par de mauvais pédagogues pour des gens qui savent déjà tout.... On constate aussi cependant, que les peuples alors n'étaient comptables que d... Lire la suite