Diplomatie

Un dilemme intemporel

5 mars 2014 : inspiré d'une pièce de théâtre dans laquelle se sont illustrés les deux mêmes acteurs, ce film se réfère au dilemme auquel se trouva confronté le gouverneur militaire de Paris en août 1944, à la veille de la libération de la capitale : obéir à Hitler en détruisant Paris ou lui désobéir...

Diplomatie (2014, Volker Schlöndorff, avec André Dussolier et Niels Arestrup) Diplomatie est l’adaptation cinématographique de la pièce de théâtre de Cyril Gely, mise en scène par Stephan Meldegg au Théâtre de la Madeleine, à Paris, pour plus de trois cent représentations.

Le film est servi par les même deux acteurs, Nils Arestrup, jouant le général Dietrich von Choltitz et André Dussolier, incarnant Raoul Nordling, consul général de Suède et chef d'entreprise.

La réalisation du film a été confié à Volker Schlöndorff, un habitué des films se déroulant durant la Seconde guerre mondiale et qui a obtenu une Palme d’or pour son adaptation du roman de Günter Grass, Le Tambour, en 1979.

Le film n'est pas sans rappeler par sa structure Le Souper de Jean-Claude Brisville et Édouard Molinaro (1992). Il retrace en effet le dialogue totalement imaginaire entre le général allemand dont les ordres, en août 1944, était de détruire les ponts de Paris et certains monuments ; et le consul suédois francophile et amoureux de Paris qui chercha à l’en dissuader.

Des écarts avec l'Histoire

Il ne s’agit pourtant pas d’un film historique. Comme l’on affirmé le réalisateur et le scénariste lors d’une avant-première, il s’agit de divertir en faisant de l’histoire un « terrain de jeu » (ce sont les mots de Volker Schlöndorff).

Les deux hommes discutent par exemple en français durant leur entretien et le consul lit un texte en allemand alors que lors de leurs véritables rencontres, les deux hommes ont fait appel à un interprète, Choltitz ne parlant pas français et Nordling ne parlant pas l'allemand !

Les motivations du général allemand ne correspondent pas non plus à la réalité ou du moins à ce qu’il a bien voulu en dire dans ses mémoires (Un soldat parmi les soldats) parues en 1950. Dans le film, c’est la promesse de la mise à l’abri de sa famille par un réseau de résistance en Suisse qui le persuade d’épargner Paris alors que c’est en réalité dans le but de préparer au mieux son statut de futur prisonnier (il sera emprisonné jusqu’en 1947).

Le film donne une image plutôt positive du général, homme d’honneur qui prend soin de ses hommes, incarnant en quelque sorte la Wehrmacht « propre ».

Le personnage historique est beaucoup plus sombre : il a donné l’ordre de détruire le centre ville de Rotterdam lors de la campagne de Hollande en 1940 et il participa à la politique d’extermination sur le front de l’est en 1942. Et s’il a discuté avec le consul Nordling, c’est en habile négociateur : la libération de plus de 3000 détenus politiques et la courte trêve qui permet d’évacuer les insurgés de la Préfecture de Police lui ont permis de gagner du temps en attendant des renforts. Mais ceux-ci n’arriveront jamais.

Le consul Nordling a plaidé dès le mois de mai 1944, auprès de Pétain, en faveur de l’arrêt des combats à Paris a commencé. Le 19 août, il a négocié avec les résistants qui ont pris la préfecture de Paris et a obtenu un cessez-le-feu qui permet aux vingt mille soldats allemands de quitter Paris n'en laissant que deux mille sur place.

Autre petit accroc à l’histoire, la présence d’un ingénieur des mines français ayant mis au point le dispositif de destruction des ponts et des monuments. Le réalisateur a expliqué que ce personnage avait été introduit pour un problème linguistique : les Allemands évoquant le plan devaient le faire en français pour être compris du public et éviter les sous-titres (alors qu’il y en a à d’autres moments du film) et il a eu l’idée de placer un Français dans la conversation pour rendre cela logique. Le problème est que ce personnage n’est pas crédible dans sa volonté de participer à la destruction de Paris et le fait qu’il se rachète à la fin est encore une faiblesse à mon sens.

Diplomatie reste un bon film, un duel psychologique entre deux personnalités retorses. Mais comme l’a dit le réalisateur lui-même, il aurait très bien pu situer l’action dans la Rome de Néron, avec un sénateur pour donner la réplique à l’empereur avant l'incendie de la Ville.

Pierrick Auger
Publié ou mis à jour le : 2023-04-04 18:04:44

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