Aucun ministre français n'a laissé dans l'Histoire une meilleure impression que Sully, né Maximilien de Béthune.
Issu d'une famille de petite noblesse, les barons de Rosny, c'est un élève studieux du collège de Bourgogne, à Paris, quand survient le massacre de la Saint-Barthélemy. De confession calviniste, il échappe à la mort en se cachant chez le principal du collège.
Compagnon de jeunesse du futur Henri IV, Maximilien de Béthune met ses talents à son service sans jamais renoncer à sa foi protestante.
Pendant les guerres de religion, il sert Henri dans les combats avec grand courage. Il se distingue à Cahors comme à Coutras, en 1587. Il est blessé à Ivry comme au siège de Chartres, en 1591. Cette fidélité n'exclut pas la franchise et il arrive à plusieurs reprises que les deux hommes se mettent en colère l'un contre l'autre et se brouillent.
En 1593, Maximilien de Béthune, sans cesser de rester fidèle à sa foi calviniste, conseille à son ami d'y renoncer pour se faire enfin accepter de la majorité du peuple. Le mot qu'on lui prête : « Paris vaut bien une messe », est toutefois apocryphe. C'est ainsi que le roi se convertit le 25 juillet 1593 devant l'abbatiale de Saint-Denis et se fait sacrer à Chartres l'année suivante.
En 1598, Maximilien de Béthune, baron de Rosny, devient surintendant des Finances. Gestionnaire rigoureux, il redresse les finances du royaume, ruiné par les guerres de religion, au point que le budget retrouve l'équilibre dès 1604.
Il emploie pour cela des moyens peu orthodoxes. Ainsi impose-t-il au roi d'épouser Marie de Médicis, laquelle lui amène une dot conséquente. Il instaure aussi la Paulette, ce qui est moins drôle : en échange de cette taxe aux funestes conséquences, les officiers (fonctionnaires et magistrats) obtiennent le droit de léguer leur charge (et les revenus qui l'accompagnent).
Maximilien de Béthune cumule d'autres titres comme grand maître de l'artillerie et des fortifications, grand voyer de France (en quelque sorte ministre des ponts et chaussées), surintendant des bâtiments, capitaine héréditaire des eaux et rivières, gouverneur de la Bastille (il surveille les opposants qui y sont incarcérés), gouverneur du Poitou.
Attaché aux traditions agricoles et dédaigneux de l'industrie, Sully encourage les recherches menées par Olivier de Serres. Ce dernier est connu pour avoir publié en 1600 le premier ouvrage d'agronomie scientifique : Théâtre d'agriculture et mesnage des champs. On prête au ministre lui-même la formule : « Les labourage et pastourage sont les deux mamelles dont la France est alimentée et les vraies mines et trésors du Pérou ». Celle-ci sera reprise à la fin du XIXe siècle pour expliquer et justifier le retard industriel du pays !
En 1606, le ministre devient duc de Sully et pair de France après le rachat du château de Sully-sur-Loire et des terres environnantes. C'est désormais sous ce nom qu'il restera dans la postérité.
Le 26 janvier 1611, quelques mois après l'assassinat du roi, Marie de Médicis exclut Sully du conseil de régence sur l'intervention de son favori Concini.
En disgrâce mais nanti d'une grosse pension, Sully publie ses Mémoires sur les Économies royales dans lesquelles il magnifie Henri IV (Henri le Grand) et par voie de conséquence lui-même. Il prête au roi le Grand dessein d'une confédération chrétienne qui aurait regroupé une quinzaine d'États catholiques d'Europe.
Doté d'une immense fortune, l'ancien ministre mène un train de vie royal dans son château de Sully, sur les bords de la Loire. Il savoure par ailleurs une vieillesse fantasque dans le bel hôtel classique qu'il a acquis en 1634 dans le quartier du Marais, à Paris, sur la place Royale (aujourd'hui place des Vosges). La même année, Richelieu, son lointain disciple, l'élève à la dignité de maréchal.
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