8 mars 2011

Les Françaises à l'Assemblée nationale

Les Françaises ont accédé à des postes ministériels sous le Front populaire, en 1936. Elles ont acquis le droit de vote en 1945. Mais en ce début du XXIe siècle, elles sont encore sous-représentées parmi les élus. Serait-ce la faute au cumul des mandats ?...

Le 8 juillet 1999, une révision constitutionnelle ajoute à l'article 3 de la Constitution française de 1958 la disposition suivante « la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives » et prévoit que les partis doivent « contribuer à la mise en oeuvre » de ce principe (art. 4).

Plus de dix ans après, force est de constater que la France a accompli très peu de progrès en la matière. Le nombre d'élues à l'Assemblée nationale stagne à moins de 20% (107 sur 577 aux élections des 10 et 17 juin 2007). Mais l'on peut tout autant déplorer la représentation des jeunes et des citoyens issus de milieux populaires ou « de la diversité » (aucun en ce qui concerne les circonscriptions de la métropole).

Constat amer

Les élus ont jugé plus facile d'inscrire la parité hommes-femmes dans la Constitution que de rechercher la cause de ce phénomène et de la corriger.

La France se distingue de la plupart des grandes démocraties européennes par la très faible représentation des femmes dans la vie politique mais aussi l'âge moyen des parlementaires, de plus en plus élevé : en 2007, une douzaine de députés seulement sur 577 ont moins de 40 ans, un record historique !

La classe politique se singularise également par son appartenance majoritaire à la haute fonction publique, très loin d'une quelconque parité sociale. Lors de sa conférence de presse du 14 juillet 1997, le président de la République alors en fonction, Jacques Chirac, a relevé cette singularité. « L'élu français type est un haut fonctionnaire mâle ! » a-t-il constaté à cette occasion. « Issu de la bourgeoisie blanche », aurait-il pu ajouter.

Masculinité, expérience et cumul des mandats

Ces spécificités peu enviables tiennent à un même défaut : le droit au cumul des mandats politiques.

Le cumul tend à professionnaliser les fonctions politiques. Il donne un avantage évident aux hommes qui peuvent, dès la sortie des études, s'engager à temps plein dans la carrière politique sans jamais avoir à l'interrompre pour élever une famille. Cela commence par un modeste mandat local (conseiller municipal). Avec un peu de chance, le conseiller devient maire, puis conseiller général ou député, etc. La notoriété acquise dans les premiers mandats facilite l'élection à de nouveaux mandats. L'élu acquiert ainsi de l'influence et des pouvoirs d'intervention accrus lorsqu'il s'agit de rendre service à ses électeurs (octroi d'un logement, amende à « faire sauter »...).

Le cumul des mandats tend donc de lui-même à se renforcer. Entre deux candidats dont l'un a déjà un ou plusieurs mandats électoraux et l'autre n'en a aucun, les électeurs sont enclins à choisir le premier car ils le connaissent mieux et sont sensibles à son influence politique et à ses réseaux de débiteurs.

Toutefois, les « cumulards » se justifient en mettant en avant leur expérience du terrain et leur proximité avec les citoyens. Cette expérience leur vient  de leur mandat local. Elle est utile quand il s'agit de débattre des lois au Parlement et elle fait défaut aux autres parlementaires, généralement parachutés de Paris par leur parti. Les « cumulards » se justifient aussi en arguant qu'en joignant un mandat national (député ou sénateur) à un mandat local (maire ou conseiller général), ils ont plus de poids pour défendre les « intérêts » de leurs administrés auprès de l'administration centrale. Argument oiseux, car un élu qui cumule un mandat de maire et un mandat de député est moins disponible que si l'un et l'autre mandat relèvent d'un élu à plein temps, le second faisant avancer à Paris les dossiers du premier. 

Le cumul des mandats dissuade les jeunes femmes mais aussi les professionnels du secteur privé de se lancer dans l'action politique... Les futurs élus doivent en effet être libérés des contingences matérielles pour prendre le risque de se consacrer à plein temps à la politique. Aussi appartiennent-ils en nette majorité à la haute fonction publique. C'est que les fonctionnaires français bénéficient du privilège de retrouver leur emploi au terme de leur campagne électorale, en cas d'échec, ou au terme de leur mandat.

Ce n'est pas une fatalité... La démocratie britannique interdit aux fonctionnaires de se présenter à des élections pour éviter tout conflit d'intêrêt entre les fonctions de représentation du peuple et l'appartenance à un corps au service de ce même peuple. Les fonctionnaires britanniques désireux de se faire élire doivent donc au préalable sacrifier leur emploi garanti. Un exemple à suivre ?

André Larané
Publié ou mis à jour le : 2024-03-15 19:43:02

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