Il y a déjà quatre siècles que William Shakespeare a quitté la scène de la vie. Ce géant du théâtre laisse derrière lui une œuvre simplement immense, à la fois universelle et pleinement ancrée dans son époque. Mais qui est vraiment « Will le magnifique » ?
Shakespeare se montre excellent connaisseur de la nature aussi bien que des hommes (il cite pas moins de 108 plantes dans Roméo et Juliette). Il fréquente les tavernes avec la même aisance que les châteaux. Ses succès théâtraux et ses qualités d'investisseur lui permettent de jouir d'un coquet patrimoine.
Traversons le temps et retrouvons-le du côté de Stratford-upon-Avon et de Londres pour comprendre comment il est devenu un génie reconnu par-delà les siècles.
Tu seras gantier, mon fils
Chez les Shakespeare, on rêve de promotion sociale. En 1557, John Shakespeare, le père de William, est conseiller municipal de la petite ville de Stratford-upon-Avon, dans le centre de l'Angleterre. Il gravit patiemment les marches du pouvoir et se retrouve, onze ans plus tard, au poste de bailiff (maire).
Il a aussi du succès dans les affaires. Il fait fructifier son commerce de gantier mais aussi la fortune de son épouse, Mary Arden, liée à une prestigieuse famille de la région. Il arrondit également ses fins de mois, semble-t-il, par l'activité quelque peu illégale de trafic de laine dans l'arrière-boutique. Une belle ascension qui s'arrête brutalement en 1577 : il n’obtient pas le titre de gentleman et se retrouve soudain couvert d'amendes et de dettes.
C'est dans cet univers de la ganterie que naît le petit Gulielmus, dit Guillaume ou William, troisième d’une fratrie qui comptera huit enfants. D'après la tradition, il est baptisé le 26 avril 1564 dans l'Église de la Sainte Trinité.
Après avoir appris à gambader dans les forêts des environs qu'il peuple d'elfes et de fées, il se retrouve sur les bancs de l'école du quartier à écouter les leçons de l'abecedarius, le maître. Latin et grec, grammaire et rhétorique, les cours occupent l'essentiel de ses journées.
Sa seule évasion : les représentations des troupes de théâtre qui viennent réjouir la population. Mais il faut penser à l'avenir : à dix-huit ans, Will devient apprenti gantier. Son chemin semble tout tracé.
Courage, fuyons !
C'était sans compter sur les charmes de la belle Anne Hathaway... Lorsqu'il y succombe, William ignore qu'il tombe dans le piège d'un mariage express, célébré en 1582, alors que la promise est enceinte de 3 mois.
Le chef de famille est bien jeune. Il n'a que 18 ans et Anne déjà 26. De ce couple étrange naîtront trois enfants, une petite Susanna puis des jumeaux, Judith et Hamnet.
Notre futur écrivain a-t-il pris peur face à ses nouvelles responsabilités ? Pour Hugo, « Il n'a fait que traverser le mariage ».
Le voici en effet qui disparaît des annales pendant toute une décennie, baptisée « les années perdues » (1582-1592).
On sait qu'il n'a pas, à la différence des autres grands dramaturges de l'époque, suivi d'études universitaires, certainement du fait des soucis financiers et religieux qu'a connus son père.
L'époque est en effet plus que troublée pour ceux qui souhaitent rester fidèles au catholicisme romain.
Montée sur le trône d'Angleterre en 1558, Elizabeth 1ère poursuit la réforme anglicane amorcée par son père Henri VIII. Les complots catholiques, vrais ou supposés, la conduisent à envoyer à l'échafaud nombre de « séditieux ».
Le père de Shakespeare a-t-il eu peur de subir le même sort ? Même si, lorsqu'il était maire, il s'est empressé d'ordonner que les fresques catholiques de l'église de la ville soient recouvertes de chaux, on pense qu'il faisait partie des « récusants » restés papistes.
A-t-il confié son fils comme précepteur à un riche propriétaire catholique, protecteur d'une troupe de théâtre ? Ou le jeune homme turbulent s'est-il fait braconnier, palefrenier, boucher, jardinier, médecin puis, pourquoi pas, marin ?
Autant d'hypothèses fantaisistes sur « les années perdues » pour tenter d'expliquer l'immense savoir du futur poète et dramaturge. Finalement, elles ne font que nourrir le mystère d'un autodidacte de génie !
La fine équipe
Après une décennie d'éclipse, nous retrouvons donc notre héros déambulant en 1592 dans les rues de Londres.
Alors en pleine expansion, la ville a soif de vivre et de découvrir les nouveaux spectacles offerts par ces troupes de théâtre que chaque grand seigneur se soucie d'entretenir. Et même si l'industrie du spectacle reste localisée à la périphérie sous l'influence des puritains, même si les épidémies de peste obligent à tout moment la fermeture des lieux de divertissement, rien n'arrête l'expansion incroyable du théâtre.
Plus de 2 000 pièces auraient vu le jour à cette époque ! Pour faire face à la demande on peut compter sur les « university wits » (« les beaux esprits des facultés »), un groupe de jeunes auteurs au talent aussi brillant que leur comportement est dissipé.
Parmi eux citons Thomas Kyd et surtout Christopher Marlowe, fils de cordonnier, devenu à 29 ans le symbole de cette Renaissance des Lettres anglaises, avant qu'un coup de poignard dans l'œil ne mette fin, au fond d'une taverne, à une carrière qui aurait pu faire de l'ombre à Shakespeare.
Mais lorsque ce dernier arrive à Londres, cette première génération a déjà presque totalement disparu : il a les mains libres pour se faire une place au soleil, quitte à être raillé par le très caustique Robert Greene.
Cet auteur outrancier, avant de finir dans le caniveau, a eu la bonne idée d'écrire un pamphlet contre notre apprenti écrivain : « Il y a là un parvenu, corbeau paré [de nos] plumes [d'university wits], qui avec son cœur de tigre recouvert d'une peau d'acteur, se croit aussi habile à gonfler un vers blanc que le meilleur d'entre vous ; il est devenu une sorte de Joannes factotum [touche-à-tout] ; il est, dans sa propre opinion, le seul shake-scene [« secoue-scène », jeu de mot à partir du nom de Shakespeare, « secoue-lance »] du pays ».
Le tigre se dévoile
Si Greene prend la peine de s'attaquer à Shakespeare, c'est parce qu'il a compris que le jeune auteur représente un concurrent dangereux. Et en effet, Shakespeare va très rapidement devenir indispensable au monde du théâtre londonien, accumulant en quelques années œuvres et richesses.
Auteur, acteur, actionnaire de sa troupe, il est partout, à la fois efficace et discret. Il n'a pas le goût de ses camarades pour les rixes et préfère se retirer pour créer, après s'être essayé à l'écriture à plusieurs mains.
Ses sonnets et surtout ses pièces, Titus Andonicus, La Mégère apprivoisée, Richard III et son célèbre « Mon royaume pour un cheval ! » (1590) lui ont gagné l'intérêt de la souveraine.
À la Noël 1594, il triomphe en parvenant à tirer une larme à Elizabeth, émue par la mort de Juliette et de son amant. « O Roméo ! Roméo ! Pourquoi es-tu Roméo ? »
En 1596, il offre à son père les armoiries si longtemps espérées mais, ce même été, il perd son jeune fils Hamnet. Il n'en laisse rien paraître dans ses comédies : l'appel de l'écriture est le plus fort.
Tragédies ou drames historiques, rien ne fait peur au dramaturge qui puise dans l'histoire nationale (Édouard III, 1596), dans le folklore (Le Songe d'une nuit d'été, 1594) ou chez d'autres écrivains (Macbeth, avant 1606) pour nourrir son inspiration.
Dans une langue magnifique, il sait parler des grands thèmes intemporels (l'amour, la vengeance, la folie...) et des problèmes de son temps sans pour autant se compromettre par rapport au pouvoir.
Désormais, tous reconnaissent son talent, à commencer par son ami et rival en littérature Ben Johnson, avec lequel il va vivre l'aventure du Globe.
Le monde est un théâtre... rond
Jusque là, Shakespeare et sa troupe du Chambellan jouaient dans le Theatre, un amphithéâtre construit au nord de Londres. Mais James Burbage, le propriétaire, vient de mourir en laissant ses fils en plein litige avec le propriétaire du terrain.
Qu'à cela ne tienne ! Un soir de décembre 1598, à la lueur des lanternes, les comédiens vont démolir le bâtiment en bois, pièce après pièce, et le transportent de l'autre côté de la Tamise. Il n'y a plus qu'à reconstruire !
En 8 mois, les habitants du quartier de Southwark voient s'élever le « Wooden O » (cercle de bois), désormais géré en partenariat par les frères Burbage et les comédiens de la troupe, dont Shakespeare.
Avec sa vaste scène, sa décoration en trompe-l'oeil et ses effets spéciaux, le Globe n'a pas peur de décevoir les 3 000 spectateurs qu'il accueille avec cette formule : « Totus mundus agit histrionem » (« Tout le monde fait l'acteur »).
C'est Jules César qui va essuyer les plâtres en 1599 avant de laisser la place à une pièce plus légère, Beaucoup de bruit pour rien. Et du bruit, il y en a !
Grâce à un large éventail de prix, riches et pauvres peuvent s'offrir quelques heures de détente, riant aux larmes ou pleurant à gros bouillons tout en mangeant, buvant ou discutant affaires d'argent ou de cœur.
Sur scène, les comédiens, désormais professionnels, jouent les rôles masculins comme féminins et se doivent de conquérir l'attention de ce public indiscipliné en faisant appel aux grands sentiments et à la grandiloquence.
Duels, interventions de spectres, coups de théâtre à répétition... Shakespeare sait y faire pour imposer ses personnages et renvoyer aux spectateurs leur propre image, sans jamais se montrer acerbe : « Les uns doivent rire et les autres pleurer, ainsi va le monde » (Hamlet).
Le théâtre finira dans les flammes en 1613, avant de renaître une première fois quelques années plus tard. Fermé par les puritains en 1642 et détruit, il ouvre de nouveau ses portes en 1996 pour devenir l'un des monuments phares de Londres.
En septembre 1599, le voyageur suisse Thomas Platter se rend à une représentation de la pièce de Shakespeare, Jules César, au théâtre du Globe.
« Le 21 septembre après le déjeuner, vers deux heures, nous traversâmes le fleuve et allâmes voir la tragédie du premier empereur Jules César fort bien représentée dans un théâtre au toit de chaume, par près de quinze personnages. A la fin de la pièce, comme c'est ici la coutume, deux d'entre eux habillés en hommes et deux d'entre déguisés en femmes dansèrent avec grande élégance. [...]
Les acteurs jouent sur une scène surélevée et tous ceux qui sont venus pour voir ne perdent absolument rien du spectacle. Et pourtant, il y a des galeries et des emplacements divers, où les sièges sont plus confortables, plus plaisants… c’est la raison pour laquelle ils coûtent plus cher. Le spectateur qui reste debout, en bas, ne débourse qu’un seul pfenning ou penny d’Angleterre. Mais celui qui veut une place assise, on le fait entrer par une autre porte où il paie encore un denier [1 penny] supplémentaire. Notre homme désirerait-il maintenant, assis sur des coussins, jouir de l’endroit le plus confortable, d’où l’on peut voir à la perfection ce qui se passe sur scène et aussi être regardé, être vu, ce qui n’est pas non plus à négliger ? En ce cas, il se doit de passer par une troisième porte, et il verse pour la circonstance un penny de plus. Pendant que se joue la comédie, on fait circuler dans l’auditoire boissons et nourriture : ceux qui le souhaitent peuvent aussi en avoir pour leur argent et refaire leurs forces. » (Thomas Platter, 1599)
« Ma fin sera le désespoir » (La Tempête, 1611)
En 1601, alors qu'il reprend une œuvre de jeunesse pour créer Hamlet, Shakespeare est à son apogée : tout Londres se demande avec le « doux prince » dépressif s'il faut « Être ou ne pas être » avant d'expliquer qu' « il y a quelque chose de pourri au royaume du Danemark ».
Se consacrant tout entier à l'écriture, il ne monte plus sur scène et ne prend pas la peine de publier ses œuvres, sans cesse en évolution. Il est souvent sollicité par le nouveau roi Jacques Ier, en l'honneur duquel on a rebaptisé la troupe de comédiens King's Men.
Les représentations d'Othello (1604) à Whitehall s'enchaînent avant de laisser place à des pièces sombres venues de l'Antiquité (Antoine et Cléopâtre, 1606), reflétant un pessimisme certain face aux fragilités de la société qui se met en place. Folie du pouvoir, légitimité de l'action...
Shakespeare adresse-t-il un avertissement au roi qui inquiète à nouveau les catholiques, y compris dans la famille de l'écrivain ?
Comme « c'est le malheur du temps que les fous guident les aveugles » (Le Roi Lear, 1606), celui qu'on surnomme « le bon Will » se retire de plus en plus souvent dans son Stratford natal.
Il éprouve la fatigue après vingt ans d'une existence de création sans répit qui a donné vie à trente-sept pièces.
À quarante-sept ans, il prend le prétexte de l'incendie du Globe pour retrouver sa famille et s'atteler à son testament. Ce n’est pas chose facile : il doit protéger sa fille Judith, mariée avec un indélicat qui a déjà engrossé une autre jeune femme, décédée par la suite avec son enfant illégitime.
C'est aussi l'occasion de régler des comptes : à son épouse Anne Hathaway, il ne lègue que son « lit numéro deux » comme pour souligner la faiblesse des liens qui les unissaient. Doit-on en effet s'interroger sur leur affection lorsque l'on lit le vers suivant, comprenant un jeu de mot sur le nom de l'épouse : « I "hate" from hate away she threw » (« De ce "je hais" elle retira la haine »).
Il décède le 23 avril 1616 et sera enterré dans la petite église de Stratford ; sur sa tombe, on a tracé ses derniers mots :
« Ami, pour l’amour de Jésus, abstiens-toi
De déranger la poussière qui est enclose ici,
Béni soit celui qui épargnera ces pierres,
Et maudit soit celui qui touchera à mes os ».
Cet avertissement était-il vraiment utile ? Son ami Ben Johnson avait bien compris que Shakespeare appartenait désormais à l'humanité entière :
« Tu es un monument sans tombe
Et tu resteras en vie tant que ton Livre vivra » (1623).
À l'occasion de la traduction de l'œuvre du dramaturge anglais par son fils, Victor Hugo n'a pu résister au plaisir d'écrire quelques pages sur le grand homme :
« Shakespeare a l'émotion, l'instinct, le cri vrai, l'accent juste, toute la multitude humaine avec sa rumeur. Sa poésie, c'est lui, et en même temps, c'est vous. […]
La comédie éclate dans les larmes, le sanglot naît du rire, les figures se mêlent et se heurtent […]. À un pôle lady Macbeth, à l'autre Titama. Une pensée colossale et un caprice immense.
Shakespeare, c'est la fertilité, la force, l'exubérance […]. A-t-il bientôt fini ? Jamais. Shakespeare est le semeur d'éblouissements. À chaque mot, l'image ; à chaque mot, le contraste ; à chaque mot, le jour et la nuit...
Raffinement, excès d'esprit, afféterie, gongorisme, c'est tout cela qu'on a jeté à la tête de Shakespeare. On déclare que ce sont les défauts de la petitesse, et l'on se hâte de les reprocher au colosse. Mais aussi ce Shakespeare ne respecte rien, il va devant lui, il essouffle qui veut le suivre, il enjambe les convenances […]. Son écritoire fume comme un cratère. Il est toujours en travail, en fonction, en verve, en train, en marche. Il a la plume au poing, la flamme au front, le diable au corps.
Othello, Roméo, Iago, Macbeth, Shylock, Richard III, Jules César, Obéron, Puck, Ophélia, Desdemona, Juliette, Titania, les hommes, les femmes, les sorcières, les fées, les âmes, Shakespeare est tout grand ouvert, prenez, prenez, en voulez-vous encore ? […] Ecce Deus, c'est le poète, il s'offre, qui veut de moi ? Il se donne, il se répand, il se prodigue ; il ne se vide pas. Pourquoi ? Il ne peut. L'épuisement lui est impossible, il y a en lui du sans fond. Il se remplit et se dépense, puis recommence. C'est le panier percé du génie. […] Au-dessus de Shakespeare il n'y a personne. Shakespeare a des égaux, mais n'a pas de supérieur. » (Victor Hugo, À Propos de William Shakespeare, 1864)
Mais... a-t-il vraiment existé ?
Cette question toute simple, des générations se la posent depuis le XIXe siècle. Comment en effet un fils d'artisan sorti d'un coin de campagne et sans aucune formation universitaire a-t-il pu produire une œuvre d'une richesse telle qu'elle semble insurpassable ?
Pourquoi n'a-t-il laissé aucun papier faisant allusion à son œuvre ? Ce Shakespeare, ce petit acteur au talent limité, ne serait-il pas simplement un prête-nom et le complice d'une belle histoire de mystification ?
Les anti-strafordiens ne peuvent accepter qu'un homme dont les parents signaient d'une croix et qui a laissé ses filles illettrées ait pu acquérir une telle culture, aussi bien en matière de fauconnerie, d'anatomie, de droit que de comportement dans la haute société.
Aussi ces doubters (« ceux qui doutent ») lui cherchent-ils des remplaçants, des érudits ayant parcouru le vaste monde tout en étant familiers de la cour. Mark Twain, Henry James ou encore Sigmund Freud se sont ainsi lancés à la poursuite de la perle rare, désignant successivement le philosophe Francis Bacon, le comte d'Oxford et même le corsaire Walter Raleigh.
Internet et les réseaux sociaux nourrissent à leur tour nombre d'hypothèses dans l'ignorance du contexte d'écriture de l'œuvre du maître. Pour lever le mystère, on s'attaque même à sa tombe, « radiographiée » récemment dans le cadre d'un documentaire avec scoop à l'appui, bien sûr... Le grand Will n'a pas fini de se moquer !
La bardolâtrie
Respecté de son vivant, le barde Shakespeare est devenu après sa mort l'objet d'un véritable culte de la part de ses compatriotes. « Étoile des poètes » pour Ben Johnson, il est pour Samuel Johnson, auteur en 1765 du premier dictionnaire de langue anglaise, « au-dessus de tous les écrivains » au point d'avoir droit, en 1769, à un jubilé à Stratford.
Désormais qualifié de monument national dans son pays, il laisse la France des Lumières quelque peu perplexe : s'il est donné en exemple par Diderot dans son article « Génie » de l'Encyclopédie (« Le sublime et le génie brillent dans Shakespear [sic] comme des éclairs dans une longue nuit »), il devient un « génie barbare » pour Voltaire qui se moque méchamment de l'intrigue de Hamlet avant de reconnaître qu'il comporte des « traits sublimes ». Il est d'ailleurs le premier à le traduire en s'attaquant à Jules César en 1731.
Les écrivains romantiques ne pouvaient que succomber aux ambiances étranges et sombres des pièces de Shakespeare.
Certains auteurs ont ainsi œuvré à sa défense et à sa reconnaissance : Stendhal appelle à l'imiter dans Racine et Shakespeare (1825) et Victor Hugo préface la traduction complète, par son fils, des œuvres du grand homme (1865).
Un vent anglais souffle également dans le monde de la peinture où apparaissent des toiles représentant la douce Ophélie ou l'inquiétante Macbeth, tandis qu’Eugène Delacroix aime à se représenter dans le costume d'Hamlet.
Le XXe siècle poursuit et amplifie l'hommage au grand homme en lui offrant le nouveau support du cinéma : dès 1907, Méliès tourne un premier Hamlet avant que l'Angleterre bien sûr (Hamlet de Laurence Olivier ou Beaucoup de bruit pour rien de Kenneth Branagh), les États-Unis (Othello et Macbeth avec Orson Welles, Jules César avec Marlon Brando) ou encore l'Australie (Romeo + Juliet de Baz Luhrmann) ne lui emboîtent le pas.
Le génie de Shakespeare est en effet d'être universel, et on ne s'étonnera donc pas que son Roi Lear soit repris au Japon par Akira Kurosawa (Ran) et que Roméo et Juliette deviennent des jeunes amants new-yorkais (West Side Story de Robert Wise). La bardolâtrie a encore de beaux jours devant elle !
« Les Anglais ne croient pas assurément plus que les Romains aux revenants ; cependant ils voient tous les jours avec plaisir, dans la tragédie d'Hamlet, l'ombre d'un roi qui parait sur le théâtre dans une occasion à peu près semblable à celle où l'on a vu à Paris le spectre de Ninus [amoureux de Sémiramis]. Je suis bien loin assurément de justifier en tout la tragédie d'Hamlet : c'est une pièce grossière et barbare qui ne serait pas supportable par la plus vile populace de la France et de l'Italie. Hamlet y devient fou au second acte, et sa maîtresse devient folle au troisième ; le prince tue le père de sa maîtresse, feignant tuer un rat, et l'héroïne se jette dans la rivière. On fait sa fosse sur le théâtre ; des fossoyeurs disent des quolibets dignes d'eux, en tenant dans leurs mains des têtes de morts ; le prince Hamlet répond à leurs grossièretés abominables par des folies non moins dégoûtantes. Pendant ce temps-là, un des acteurs fait la conquête de la Pologne. Hamlet, sa mère et son beau-père boivent ensemble sur le théâtre : on chante à table, on s'y querelle, on se bat, on se tue. On croirait que cet ouvrage est le fruit de l'imagination d'un sauvage ivre. Mais parmi ces irrégularités grossières, qui rendent encore aujourd'hui le théâtre anglais si absurde et si barbare, on trouve dans Hamlet, par une bizarrerie encore plus grande, des traits sublimes, dignes des plus grands génies. Il semble que la nature se soit plue à rassembler dans la tête de Shakespeare ce qu'on peut imaginer de plus fort et de plus grand, avec ce que la grossièreté sans esprit peut avoir de plus bas et de plus détestable. » (Préface de Sémiramis, 1748)
« Words, words, words » (« Des mots, des mots, des mots », Hamlet)
« Sa poésie a le parfum âcre du miel fait en vagabondage par l'abeille sans ruche. Ici la prose, là le vers ; toutes les formes, n'étant que des vases quelconques pour l'idée, lui conviennent » (Victor Hugo). Certes, Shakespeare savait imaginer des histoires, mais comme le rappelle Hugo, il savait surtout les mettre en mots.
N'oublions pas qu'il est aussi poète : même si ses sonnets sont des œuvres de commande, ils n'en sont pas moins d'une grande qualité.
Profitant du répit que lui impose la peste, il s'adresse, dans des vers plein de sous-entendus qui firent penser à une relation homosexuelle entre les deux hommes, à une mystérieuse Dark Lady et à un étrange Mr W. H. (certainement Henry Wriothesley, comte de Southampton).
Mais c'est surtout au théâtre que la langue de Shakespeare va prendre toute son ampleur.
Pour la majorité de ses pièces il choisit les vers blancs qui, sans être assujettis à la contrainte de la rime, créent un rythme régulier qui leur permet de danser comme sur une musique, très présente dans les œuvres.
Mais c'est surtout la richesse de son vocabulaire et de ses expressions qui est remarquable : saviez-vous qu'on lui doit « my salad day » (« mes vertes années »), « fair play » ou les très à la mode addiction et fashionable ?
À l'époque où le latin recule dans toutes les cours d'Europe, Shakespeare impose en Angleterre un mélange de tournures populaires et de vocabulaire savant, une nouvelle alliance entre familiarités et néologismes.
À la fois simple et recherchée, sa langue a la capacité de créer des expressions qui frappent le lecteur, restant ensuite longtemps dans la mémoire. Par quel miracle ? That is the question…
Une belle galerie de portraits !
On croit les connaître, on y retrouve tous une part de notre personnalité, mais ils recèlent encore bien des secrets. Voici les principaux personnages, ces « fantômes éternels, [l]es uns terribles, les autres adorables » (Victor Hugo) qui peuplent l'œuvre shakespearienne :
Que de soucis lorsqu'on est prince de Danemark (où, tout le monde le sait, « il y a quelque chose de pourri ») et que son oncle a, semble-t-il, tué son père ! Pour enquêter, Hamlet va feindre la folie et devenir un des personnages les plus sombres de Shakespeare.
Représenté en train de jouer avec un crâne de bouffon ou de parler au spectre paternel, il inspira les Romantiques qui admirèrent sa volonté de justice mêlée de mélancolie suicidaire, traits de caractère par exemple du pauvre Lorenzaccio d'Alfred de Musset (1834).
« Le professeur : Élève Hamlet!
L'élève Hamlet (sursautant) :
... Hein... Quoi... Pardon.... Qu'est-ce qui se passe... Qu'est-ce qu'il y a... Qu'est-ce que c'est ?...
Le professeur (mécontent) : Vous ne pouvez pas répondre "présent" comme tout le monde ?
Pas possible, vous êtes encore dans les nuages.
L'élève Hamlet : Être ou ne pas être dans les nuages!
Le professeur : Suffit. Pas tant de manières. Et conjuguez-moi le verbe être, comme tout le monde, c'est tout ce que je vous demande.
L'élève Hamlet : To be...
Le professeur : En Français, s'il vous plaît, comme tout le monde.
L'élève Hamlet : Bien, monsieur. (Il conjugue:)
Je suis ou je ne suis pas
Tu es ou tu n'es pas
Il est ou il n'est pas
Nous sommes ou nous ne sommes pas...
Le professeur (excessivement mécontent) : Mais c'est vous qui n'y êtes pas, mon pauvre ami !
L'élève Hamlet :
C'est exact, monsieur le professeur,
Je suis "où" je ne suis pas
Et, dans le fond, hein, à la réflexion,
Être "où" ne pas être
C'est peut-être aussi la question ».
(Jacques Prévert, Paroles, 1949)
« Sur l'onde calme et noire où dorment les étoiles
La blanche Ophélia flotte comme un grand lys »...
Ces vers du jeune Rimbaud témoignent bien de la postérité de ce personnage finalement secondaire.
Trop gentille, Ophélie ne veut blesser ni son père ni Hamlet, qu'elle croit aimer. Elle finira noyée par maladresse, selon la version officielle ; par suicide, pour les soupçonneux romantiques...
« La reine - Un malheur vient sur les talons de l’autre.
Tant ils se suivent de près. Votre sœur est noyée, Laërte.
Laërte - Noyée ? Où s’est-elle noyée?
La reine - Au-dessus du ruisseau penche un saule, il reflète
dans la vitre des eaux ses feuilles d’argent
Et elle les tressait en d’étranges guirlandes
Avec l’ortie, avec le bouton d’or,
Avec la marguerite et la longue fleur pourpre
Que les hardis bergers nomment d’un nom obscène
Mais que la chaste vierge appelle doigt des morts.
Oh, voulut-elle alors aux branches qui pendaient
Grimper pour attacher sa couronne florale ?
Un des rameaux, perfide, se rompit
Et elle et ses trophées agrestes sont tombés
Dans le ruisseau en pleurs. Sa robe s’étendit
Et telle une sirène un moment la soutint,
Tandis qu’elle chantait des bribes de vieux airs,
Comme insensible à sa détresse
Ou comme un être fait pour cette vie de l’eau.
Mais que pouvait durer ce moment ? Alourdis
Par ce qu’ils avaient bu, ses vêtements
Prirent au chant mélodieux l’infortunée,
Ils l’ont donnée à sa fangeuse mort.
Laërte - Hélas, elle est noyée?
La reine - Noyée, noyée ».
(William Shakespeare, Hamlet, 1600)
Ce « bouton de fleur que ronge un vers envieux » est un idéaliste qui ne peut vivre qu'un amour total. Sa passion pour Juliette le mènera donc logiquement à la mort. Il représente à jamais l'amour adolescent, total et destructeur.
C'est une gamine ! Mais une gamine qui a bien la tête sur les épaules : elle est amoureuse, certes, mais elle sait que dans cette société elle ne peut vivre heureuse sans mariage. Mensonges et ruses improbables lui feront connaître deux fois le froid du tombeau.
Juliette est restée l'image de la très jeune fille qui sort à peine de l'enfance pour tomber dans les déchirements créés par l'amour. Comme son élu, elle est malheureusement trop souvent devenue le symbole un peu niais des beautés de l'amour pur, les successeurs de Shakespeare ayant oublié la richesse de caractère qu'il avait donné à ces deux adolescents.
« Juliette - Veux-tu donc partir ? Le jour n'est pas proche encore : c'était le rossignol et non l'alouette dont la voix perçait ton oreille craintive. Toutes les nuits il chante sur le grenadier là-bas. Crois-moi, amour c'était le rossignol.
Roméo - C'était l'alouette, la messagère du matin, et non le rossignol. Regarde, amour ces lueurs jalouses qui dentellent le bord des nuages à l'orient ! Les flambeaux de la nuit sont éteints, et le jour joyeux se dresse sur la pointe du pied au sommet brumeux de la montagne. Je dois partir et vivre, ou rester et mourir.
Juliette - Cette clarté là-bas n'est pas la clarté du jour je le sais bien, moi ; c'est quelque météore que le soleil exhale pour te servir de torche cette nuit et éclairer ta marche vers Mantoue. Reste donc, tu n'as pas besoin de partir encore.
Roméo - Soit ! qu'on me prenne, qu'on me mette à mort ; je suis content, si tu le veux ainsi. Non, cette lueur grise n'est pas le regard du matin, elle n'est que le pâle reflet du front de Cynthia ; et ce n'est pas l'alouette qui frappe de notes si hautes la voûte du ciel au-dessus de nos têtes. J'ai plus le désir de rester que la volonté de partir, que vienne la mort, et elle sera bien venue !… Ainsi le veut Juliette… Comment êtes-vous, mon âme ? Causons, il n'est pas jour.
Juliette - C'est le jour, c'est le jour ! Fuis vite, va-t'en, pars : c'est l'alouette qui détonne ainsi, et qui lance ces notes rauques, ces strettes [morceau final d'une fugue] déplaisantes. On dit que l'alouette prolonge si doucement les accords ; cela n'est pas, car elle rompt le nôtre. On dit que l'alouette et le hideux crapaud ont changé d'yeux : oh ! que n'ont-ils aussi changé de voix, puisque cette voix nous arrache effarés l'un à l'autre et te chasse d'ici par son hourvari [vacarme] matinal ! Oh ! maintenant pars. Le jour est de plus en plus clair.
Roméo - De plus en plus clair ?… De plus en plus sombre est notre malheur ».
(William Shakespeare, Roméo et Juliette, 1597)
Shakespeare a créé pour Le Marchand de Venise le personnage d'un usurier juif à une époque où les membres de la communauté israélite étaient rarissimes en Angleterre mais où les préjugés étaient nombreux.
D'abord détestable par sa volonté de retrouver à tout prix son argent (y compris contre « une livre de chair » humaine !), il devient poignant lorsqu'il réclame l'égalité : « Un Juif n'a-t-il pas des yeux ? Un Juif n'a-t-il pas des mains, des organes, des dimensions, des sens, de l'affection, de la passion [...] ? Si vous nous piquez, ne saignons-nous pas ? Si vous nous chatouillez, ne rions-nous pas ? Si vous nous empoisonnez, ne mourrons-nous pas ? Et si vous nous bafouez, ne nous vengerons-nous pas ? »
Shakespeare avait-il croisé ce lutin dans les forêts ou dans les contes de son enfance ? Magicien malicieux, Puck représente la fantaisie de ce monde merveilleux dont ne s'est jamais vraiment éloigné le grand Will.
Rabelais aurait pu créer ce personnage de bouffon haut en couleurs, reconnaissable à la bedaine qui le précède et peu avare de mensonges et de plaisanteries obscènes. Son nom est devenu synonyme de bon vivant qui n'hésite pas à verser du côté de la méchanceté pour parvenir à ses fins.
À Venise, tout le monde connaît et apprécie le Maure qui a épousé la fille d'un sénateur. Mais lui aime trop sa Desdémone pour accepter les rumeurs qui courent sur son compte. Il préférera la tuer que de la perdre, devenant le symbole de la jalousie qui détruit.
Personnage attachant par sa souffrance même, Othello aurait été inspiré à Shakespeare par l'ambassadeur du Maroc auprès d'Elizabeth Ière. Notons qu'il est l'un des rares personnages exotiques du théâtre de l'époque, sans que Shakespeare ne tombe dans le piège de l'exotisme facile.
« Elle, contre sa nature,
Son âge, son pays, son honneur, toute chose,
Tomber amoureuse de ce qu'elle avait peur de regarder » !
Passant outre les préjugés, Desdémone la Vénitienne est allée vers Othello le Maure qu'elle admire jusqu'à lui pardonner ses reproches et sa folie. Shakespeare nous peint ici un amour inattendu, surprenant par sa grande modernité.
« Desdémone - Qui est là ? Othello ?
Othello - Oui, Desdémona.
Desdémone - Voulez-vous venir au lit, monseigneur ?
Othello - Avez-vous prié ce soir, Desdémona ?
Desdémone - Oui, monseigneur.
Othello - Si vous vous souvenez de quelque crime que la grâce du ciel n'ait pas encore absous, implorez-la vite !
Desdémone -- Hélas ! monseigneur, que voulez-vous dire par là ?
Othello - Allons ! Faites et soyez brève. Je vais marcher en attendant. Je ne voudrais pas tuer ton âme sans qu'elle fût préparée. Non ! Le ciel m'en préserve ! Je ne voudrais pas tuer ton âme.
Desdémone - Vous parlez de tuer ?
Othello - Oui, j'en parle.
Desdémone - Alors, que le ciel ait pitié de moi !
Othello - Amen ! De tout mon coeur !
Desdémone - Si vous parlez ainsi, j'espère que vous ne me tuerez pas.
Othello - Humph !
Desdémone - Et pourtant j'ai peur de vous ; car vous êtes fatal quand vos yeux roulent ainsi. Pourquoi aurais-je peur ? Je l'ignore, puisque j'ignore ma faute ; cependant je sens que j'ai peur. Othello - Pense à tes péchés.
Desdémone - Ce sont les tendresses que j'ai pour vous.
Othello - Oui ! Et c'est pour cela que tu meurs ».
(William Shakespeare, Othello, 1604)
Quel personnage détestable et détesté ! Partant du principe que « rien n'existe en ce monde qui ne mérite d'être détruit », il va s'acharner à détruire Othello par jalousie en calomniant son épouse Desdémone.
« L'honnête Iago », comme l'appelle son pauvre ami, y a gagné le titre de pire traître de l'histoire du théâtre, voire de la littérature !
Mais pourquoi Lear a-t-il eu l'idée étrange de diviser son royaume entre ses trois filles suivant l'amour qu'elles lui témoigneraient ? Le résultat ne se fait pas attendre : le voici abandonné de tous.
Cette histoire vous rappelle quelque chose ? Effectivement, le père Goriot de Balzac lui ressemble comme un frère ! Mais Goriot ne connaîtra pas le secours de la folie qui va frapper Lear, le laissant errant avec son bouffon dans les landes anglaises ou japonaises (Ran de Kurosawa).
Macbeth n'aurait pas dû écouter ces trois sorcières qui lui prédisaient qu'il serait roi, et encore moins en parler à sa femme qui le pousse ardemment à régler le problème en tuant son souverain.
Ni une, ni deux, voilà chose faite ! La suite est faite d'assassinats, d'apparitions, de spectres et de cauchemars ensanglantés.
La tête de Macbeth finira sur une pique pour mieux nous rappeler les aspects les plus sombres de nos personnalités : goût pour la trahison, absence de pitié, soif du pouvoir... Macbeth et sa charmante épouse sont aujourd'hui l'exemple même du couple peu fréquentable !
« Macbeth : Hélas, demain, demain, demain, demain
Se faufile à pas de souris de jour en jour
Jusqu'aux derniers échos de la mémoire,
Et tous nos hiers n'ont fait qu'éclairer les fous
Sur le chemin de l'ultime poussière.
Éteins-toi, brève lampe !
La vie n'est qu'une ombre qui passe, un pauvre acteur
Qui s'agite et parade une heure, sur la scène,
Puis on ne l'entend plus. C'est un récit
Plein de bruit, de fureur, qu'un idiot raconte
Et qui n'a pas de sens ».
(William Shakespeare, Macbeth, avant 1606)
Bibliographie
Stephen Greenblatt, Will le Magnifique, éd. Flammarion, 2014.
François Laroque, Shakespeare, comme il vous plaira, éd. Gallimard (Découvertes), 1991.
Henriette Chardak, Shakespeare (la vie du dramaturge en roman), éd. L’Archipel, 2016.
« Shakespeare, le génie de l'Angleterre », L'Histoire n°384, février 2013.
« William Shakespeare, Le Théâtre du monde », Le Figaro (hors-série).
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Voir les 8 commentaires sur cet article
suzy (09-04-2024 13:56:03)
Très bel article merci. Je vois avec plaisir que nous partageons beaucoup de sources. Mais n'oublions pas que nous aimons l'histoire, et peut être aussi un peu la philo ! les dix années perdues n... Lire la suite
JPL (24-04-2016 17:06:51)
Par une coïncidence amusante de l'histoire, W. Shakespeare et M. de Cervantès sont mort tous deux le 23 avril 1616, il y a donc tout juste 400 ans. N'en déduisons cependant pas qu'ils sont morts le... Lire la suite
Margane (17-04-2016 21:30:18)
Très beau rappel, on ne se lasse pas de Shakespeare! Merci. Comment expliquer une telle créativité ! Dommage pour ces 10 années inconnues. Cela fait penser à Molière et l'énigme Corneille! GM... Lire la suite