Benjamin Disraeli (1804 - 1881)

Le dandy de la reine

Premier ministre conservateur, d'origine juive, dandy et écrivain, confident de la reine, Benjamin Disraeli détonne dans l'Angleterre victorienne. Il est l'antithèse de son rival Willliam Gladstone, l'autre grand dirigeant britannique de la fin du XIXe siècle.

Yves Chenal

Un dandy ambitieux

Né en 1804 dans une famille israélite, Benjamin Disraeli se fait baptiser à l'âge de treize ans dans la religion anglicane. Il change également, un peu plus tard, son nom de D'Israeli en Disraeli, mais ne renie pas ses origines pour autant : plus tard, alors qu'un adversaires lui en fera grief, il répondra que ses propres ancêtres étaient prêtres du Temple de Salomon alors que ceux de son interlocuteur étaient des sauvages dans une île inconnue ! Il n'aura de cesse aussi de faire abolir les discriminations dont sont encore victimes les israélites.

Son père, écrivain, le destine à une carrière d'avocat, qu'il abandonne rapidement. Dans les années 1820, il se ruine dans diverses spéculations ainsi que le lancement d'un journal. Il écrit aussi des romans inspirés de son histoire personnelle. La plupart sont des échecs, mais une trilogie publiée dans les années 1840 lui vaut encore aujourd'hui une certaine renommée littéraire : Coningsby, Sybil ou les deux nations, décrivant la misère des classes laborieuses anglaises, et Tancrède, sur les liens entre le judaïsme et le christianisme.

Imbu de lui-même, convaincu de réussir en dépit d'une éducation ordinaire, il multiplie les conquêtes féminines avant de faire un mariage heureux avec une femme plus âgée que lui de douze ans. Ses relations avec les hommes sont plus difficiles et il suscite tout au long de sa vie de très vivaces haines.

Conservateur et (néanmoins) réformiste

Entré en politique, Benjamin Disraeli soutient un temps les radicaux, mais c'est comme conservateur (tory) qu'il se fait élire député en 1837 et la tension entre ces deux pôles marquera toute sa carrière : il sera toujours soucieux du sort des ouvriers. Son premier discours au Parlement est une catastrophe mais dans les années qui suivent, il gagne de l'influence.

En 1844, le parti conservateur se divise entre les partisans du libre-échange, favorables à une suppression des droits de douane sur les céréales pour diminuer le prix du pain et donc le salaire des ouvriers, et ceux qui souhaitent maintenir ces droits et protéger l'agriculture. Disraeli se range dans ce dernier camp, contre le Premier ministre Robert Peel et la plupart des tories. Il se retrouve ainsi à la tête de cette faction et devient à ce titre incontournable sur la scène politique.

En 1851, il est chancelier de l'Échiquier (ministre des finances) mais, victime de vieilles rancunes, il entraîne le gouvernement de Lord Derby dans sa chute. Il redevient néanmoins ministre dans le gouvernement de ce dernier en 1858-59 puis en 1866. L'année suivante, il lui succède comme Premier ministre et fait voter une grande réforme électorale qui double pratiquement le nombre d'électeurs.

Mais les élections de 1868 et son échec face au libéral Willliam Gladstone le renvoie dans l'opposition. La vie politique britannique sera dès lors rythmée par l'affrontement entre les deux hommes.

La vocation impériale de la Grande-Bretagne

Dans l'opposition, Disraeli combat les initiatives du Premier ministre Gladstone en faveur des Irlandais. Le 24 juin 1872, dans le Crystal Palace, le somptueux palais des expositions londonien inauguré vingt ans plus tôt par le prince Albert, il prononce un retentissant discours en faveur des conquêtes coloniales (« uphold the Empire of England », dit-il). Ce discours guidera l'essentiel de sa politique étrangère dans la suite.

En 1874, le triomphe électoral des tories lui permet de former un nouveau gouvernement. Il se fait rapidement apprécier de la reine Victoria, qui deviendra son plus fidèle soutien et l'honorera du titre de 1er comte de Beaconsfield. Lui-même lui offre le titre d'impératrice des Indes en 1877 ; ainsi place-t-il la souveraine au même rang que le tsar de Russie, dont il appréhende les visées dans les Balkans et les confins indiens.

Sa mandature est surtout marquée par les mesures sociales : protection des ouvriers contre les patrons, destructions des taudis et construction de logements décents, généralisation de l'eau courante... Elle s'achève sur une défaite électorale en 1880. Le vieux dirigeant n'y survivra qu'une année.


Publié ou mis à jour le : 2019-04-30 00:02:28

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