Le 24 mai 1543, un chanoine inconnu de 70 ans rend l'âme à Frauenburg (aujourd'hui Frombork, en Pologne), une petite ville située à l'embouchure de la Bande, sur la mer Baltique. Publiée à sa mort seulement, son oeuvre va transformer le monde et la représentation que les hommes s'en font.
Un érudit de la Renaissance
De mère allemande et de père polonais, Nicolas Copernic naît le 19 février 1473 à Torún, ville de la Hanse sur la Vistule, qui, jusqu'en 1466, appartenait à l'ordre des Chevaliers Teutoniques, sous le nom de Thorn, avant d'être incorporée au royaume de Pologne. Celui-ci, sous la dynastie des Jagellon, est alors à son apogée et rivalise avec les États d'Europe occidentale.
Après des études dans la prestigieuse université Jagellonne de Cracovie, Copernic devient chanoine à Frauenburg, ce qui ne l'empêche pas de parcourir l'Europe.
En véritable érudit de la Renaissance, Copernic se montre ouvert à tous les domaines de la connaissance. Il est à la fois théologien, médecin, mathématicien, économiste et bien sûr astronome (il a étudié cette science à Bologne, en Italie). Il rédige un traité notable sur la monnaie et intervient dans les affaires politiques de son temps, notamment dans la lutte contre les Chevaliers teutoniques.
À la demande du pape, désireux de réformer le calendrier, il se lance dans l'étude des planètes et du soleil.
Copernic s'interroge sur la cosmologie de Claude Ptolémée, un astronome, mathématicien et géographe grec qui a vécu au IIe siècle de notre ère. L'Almageste, son traité fondamental, écrit vers l'an 141 de notre ère, passait jusqu'à la Renaissance pour la vérité établie. Il situait la Terre au centre de l'univers, le Soleil et les planètes décrivant de façon complexe différents cercles autour d'elle.
Le savant polonais découvre des incohérences dans la conception de Ptolémée et en conclut que le Soleil, et non la Terre, est au centre du système. « Après de longues recherches, je me suis enfin convaincu : que le Soleil est une étoile fixe entourée de planètes qui roulent autour d'elle et dont elle est le centre et le flambeau » écrit-il.
Plutôt bien vu... mais cette théorie le met en contradiction avec la doctrine traditionnelle de l'Église qui situe l'Homme, et donc la Terre, au centre de l'univers.
Craignant, à juste titre, les foudres de Rome et de Wittenberg, centre du luthérianisme alors en plein essor, Copernic attend l'approche de sa mort pour publier le fruit de ses travaux dans un traité écrit en latin, la langue internationale de la Renaissance, De revolutionibus orbium coelestium libri sex (« Des révolutions des corps célestes »). Il n'oublie pas une belle dédicace au pape Paul III pour revendiquer le droit à la liberté d'expression.
Quoique très imparfait sur le plan scientifique et dans sa conception d'un univers héliocentrique, organisé autour du Soleil, son traité s'impose très vite par son évidence. À la génération suivante, l’Allemand Johannes Kepler (1571-1630) et l’Italien Galilée (1564-1642) approfondissent les travaux de Copernic. Les conclusions de Galilée, publiées en italien et largement diffusées, lui valent un procès sous l’accusation de contredire les Écritures saintes. Il est obligé de se rétracter malgré le soutien de son ami, le pape Urbain VIII. Grâce à Copernic, Kepler et Galilée, la recherche scientifique allait néanmoins s'émanciper de la théologie, l'une et l'autre se déployant désormais dans des champs distincts.
Héros national polonais à titre posthume, l'astronome a été inhumé en grande pompe le 22 mai 2010 dans l'église de Frombork...
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