Après avoir triomphé en 1856 au congrès de Paris, qui a mis fin à la guerre de Crimée, Napoléon III, empereur des Français, forme le projet de renverser le président mexicain et de transformer le Mexique en un empire latin et catholique.
Il y est encouragé par son demi-frère le duc de Morny, pour des raisons financières, et son épouse Eugénie de Montijo, soucieuse de développer l'influence de la France en terre hispanique et catholique. Cet empire serait en Amérique du nord le pendant des États-Unis anglophones et protestants, au même moment à feu et à sang en raison de la guerre de Sécession.
Mais cette « plus grande pensée du règne » va sombrer dans le drame.
De l'intimidation à la guerre
En 1860, un conflit politique a éclaté au Mexique entre conservateurs catholiques et libéraux anticléricaux. Ces derniers, conduits par Benito Juarez, l'ont emporté sur l'ancien président Miramon. Devenu président, Juarez exerce aussitôt des représailles contre le clergé, frappe d'un impôt les résidents étrangers et suspend le paiement des intérêts de la dette.
La France convainc l'Angleterre et l'Espagne d'intervenir avec quelques troupes pour obliger le président à honorer les dettes de son pays.
Sur les 260 millions de francs-or que représente la dette mexicaine, la Grande-Bretagne en réclame 85, l'Espagne 40 et la France 135. Mais dans les faits, les investisseurs et résidents français ne sont créditeurs que de 60 millions de francs-or. Le reste de la dette revendiquée par la France correspond aux « bons Jecker »...
Le gouvernement conservateur de Miramon avait emprunté 3 750 000 francs-or à un établissement suisse, la maison Jecker, qui avait reçu en contrepartie des bons d'un montant de... 75 millions de francs-or exigibles à tout moment du gouvernement mexicain ! Lorsque Juarez remplace Miramon à la tête du gouvernement, le banquier Jean-Baptiste Jecker présente aussitôt ses bons et exige d'être remboursé. Refus de Juarez.
Le banquier, opportunément naturalisé français, soudoie le demi-frère de l'empereur des Français, le duc de Morny, un affairiste et viveur qui est aussi le président du Corps Législatif. En échange d'une commission de 30% sur ses crédits mexicains, il le convainc d'intervenir auprès de l'empereur pour obtenir le remboursement de la dette mexicaine et, qui sait? mettre la main sur un pays, le Mexique, aux ressources prometteuses.
En décembre 1861, un modeste corps expéditionnaire de 2 500 Français et 700 Britanniques débarque à Vera-Cruz pour une simple manoeuvre d'intimidation. Mais il est rejoint par 6.000 Espagnols venus de Cuba sous le commandement du général Prim puis de deux renforts successifs de 3 000 et 4 500 Français supplémentaires.
En avril 1862, furieux que Napoléon III veuille les entraîner dans une véritable guerre de conquête, Anglais et Espagnols se retirent.
L'empereur Napoléon III justifie la guerre en affichant sa crainte que les États-Unis ne s'emparent du Mexique et ne bouleversent de la sorte l'équilibre politique du continent.
Il projette de transformer le Mexique en empire et d'en confier la couronne à l'archiduc Ferdinand-Maximilien, le frère cadet de l'empereur autrichien François-Joseph 1er.
Mais les Français se heurtent à la résistance farouche et inattendue des Mexicains qui prennent le parti de Juarez. Une première armée de 7.000 hommes est repoussée devant Puebla, une ville fortifiée sur la route de Mexico. Il faut envoyer en catastrophe 28.000 hommes en renfort, sous le commandement du général Forey, pour enfin avoir raison de la résistance de la ville.
En souvenir de leur victoire de Puebla, les Mexicains ont fait de l'anniversaire du 5 mai 1862 un jour férié et chômé.
Pendant le siège de Puebla se produit le drame de Camerone et la résistance héroïque d'une poignée de légionnaires.
Succès de la résistance mexicaine
Après la prise de Puebla et l'entrée des Français à Mexico, un simulacre d'assemblée nationale octroie la couronne de l'Empire du Mexique à Ferdinand-Maximilien. Celui-ci hésite longtemps avant d'accepter et finalement se rend au Mexique.
Le général François Achille Bazaine remplace Forey à la tête de l'armée française. Il doit faire face à la guerilla des partisans juaristes et peine à former une armée mexicaine au service du nouvel empereur. En désespoir de cause, il demande à celui-ci le droit de faire fusiller tous les rebelles pris les armes à la main, décision qui a pour effet de relancer la guerilla.
Pour tout compliquer, Bazaine, marié à une aristocrate mexicaine, croit habile de traiter pour son compte, dans le dos de Ferdinand-Maximilien, avec un général de Juarez, Porfirio Diaz.
Entre temps, les États-Unis, arrivés au terme de leur guerre civile exigent le retrait de la France. En Europe même, la situation internationale se dégrade rapidement. Une guerre se profile entre la Prusse et l'Autriche qui débouchera sur Sadowa.
En avril 1866, Napoléon III décide de rapatrier le corps expéditionnaire en catastrophe. Il laisse sur place quelques rares volontaires au service de l'armée mexicaine.
Après avoir longtemps hésité, l'éphémère empereur du Mexique refuse au dernier moment de s'enfuir, sur les instances de son épouse, l'archiduchesse Charlotte, fille du roi des Belges Léopold Ier. Ayant renoncé à ses droits sur la couronne d'Autriche, il n'a rien à espérer en Europe.
Ferdinand-Maximilien (36 ans) est pris et fusillé par les juaristes le 19 juin 1867 au Cerro de las Camparas, une butte qui domine la ville de Queretaro, avec deux de ses généraux.
Sa dernière pensée est pour sa femme, devenue folle de chagrin : Pauvre Charlotte, murmure-t-il avant de mourir. Charlotte, en effet, a sombré dans la folie la même année après avoir tenté de mobiliser les souverains d'Europe et le pape en sa faveur.
La mort tragique de Ferdinand-Maximilien affecte gravement Napoléon III dans son prestige et son honneur à un moment où l'Empire français doit affronter une situation européenne des plus périlleuses.
Trois ans plus tard, Napoléon III est lui-même battu et fait prisonnier par les Prussiens à Sedan. Bazaine, rentré du Mexique avec une épouse métisse et devenu maréchal, se rend aux mêmes Prussiens avec son armée à Metz.
Reste le souvenir de Camerone. Depuis 1906, l'anniversaire de ce fait d'armes est commémoré avec faste par la Légion étrangère. Les légionnaires réunis à Aubagne rendent à cette occasion les honneurs à... la main en bois du capitaine Danjou.
La guerre franco-prussienne
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Xavier ROUX (29-08-2006 03:01:11)
Si les enfants de notre pays connaissaient les leçons de courage que nous enseignent ces ces hommes,ils pourraient être fiers de leur patrie. Je raconterai cette histoire à mon enfant, il faut se... Lire la suite
Dominique ENON (14-07-2006 14:06:35)
Vive la Légion Etrangère. Le courage, l'honneur, l'abnégation méritent d'être mis en avant...