3 septembre 401 av. J.-C.

Les Dix Mille et le début de l'Anabase

Le 3 septembre de l'an 401 av. J.-C., les Dix Mille, mercenaires grecs au service d'un prince perse, livrent combat à Canouxa, en Mésopotamie, du côté de Babylone. Battus, ils décident de rentrer dans leur pays. Leur équipée va donner lieu à un récit devenu nom commun : L'Anabase.

Camille Vignolle

Défaite

À l'origine de l'équipée, il y a la mort d'un roi perse, Darius II, lointain descendant de l'illustre fondateur de la dynastie achéménide, Cyrus II le Grand. Darius II est intervenu indirectement dans la guerre du Péloponnèse en soutenant financièrement Sparte contre Athènes, une façon de venger l'humiliation infligée par celle-ci à son aïeul Xerxès à Salamine...

Le fils aîné de Darius II, Artaxerxès Mnémon, lui succède mais son autre fils Cyrus ne l'entend pas de cette oreille et lève des troupes pour faire valoir ses droits. C'est ainsi qu'il engage les Dix Mille, des Grecs essentiellement originaires de Sparte et du Péloponnèse.

Le combat décisif, à Canouxa, se solde par la mort de Cyrus et la débâcle de ses troupes.

Episode de la retraite des Dix Mille, par Adrien Guignet (1843, musée du Louvre, Paris)

Les mercenaires grecs, livrés à eux-mêmes après la mise à mort de leurs principaux chefs par un satrape perse, hissent à leur tête des hommes neufs tel Xénophon. Ils décident de rentrer chez eux par les confins de l'empire perse, en rejoignant le Pont-Euxin (la mer Noire).

Au total, en deux ans, les survivants, au nombre d'environ cinq mille, auront parcouru plus de 6000 kilomètres avant d'atteindre le royaume grec de Pergame et les rivages de la mer Égée.

L'Anabase (d'un mot grec qui désigne une marche vers le haut) raconte ce tragique retour. L'auteur en est Xénophon qui, lui-même, prit part à l'aventure et guida ses compagnons d'infortune sur le chemin du retour. Sa justification tient en quelques mots : « Il est doux, quand on a dit et fait quelque chose de viril et de beau, de laisser un souvenir de soi dans l'âme de ceux où l'on désire qu'il survive ».

L'ouvrage, en sept parties, n'est pas seulement un récit d'aventures. C'est aussi une description précise de l'empire perse et de ses peuples. Elle va être mise à profit plus tard par Alexandre le Grand, lorsque celui-ci offrira aux Grecs une revanche sur les Achéménides.

Xénophon, l'énergie au service de la pensée

Xénophon d'Athènes, chef et chroniqueur de l'Anabase est un personnage hors du commun, un homme de grande culture qui allie l'action à la réflexion, la plongée dans l'actualité à la création littéraire et philosophique.

Né près d'Athènes, en 430 av. J.-C., dans une famille aristocratique, il suit l'enseignement de Socrate avant de rejoindre l'expédition des Dix Mille. De retour en Grèce, il se met au service du roi de Sparte Agésilas, ennemi juré d'Athènes, en 396 av. J.-C.. Quelques années plus tard, il se retire dans un domaine dont les Spartiates lui ont fait don, à Scillonte, en Élide. Là, entouré de sa femme et de ses deux fils, il va pendant vingt ans rédiger ses différents ouvrages.

Outre l'Anabase, il écrit l'Apologie de Socrate, différents traités d'économie, de politique et de stratégie (L'Économique....), d'équitation (L'Hipparque et De l'Art Equestre) ainsi que des ouvrages sur l'histoire de la Grèce (Agésilas, Les Helléniques [la suite de La guerre du Péloponnèse par Thucydide]....). En 371, la guerre ayant éclaté entre Sparte et Elis, Xénophon s'en va à Corinthe. Il disparaît vers l'âge de 75 ans, en 355 av. J.-C., au moment où Philippe II de Macédoine s'apprête à mettre la main sur les cités grecques.

D'une anabase à l'autre

Depuis deux millénaires, hommes de lettres et commentateurs utilisent l'expression anabase pour qualifier des marches militaires un tant soit peu épiques ou héroïques.

Ainsi en est-il de la retraite de Russie ou encore de la chevauchée ravageuse de l'amiral de Coligny de la Guyenne à la Bourgogne pendant les guerres de religion. L'expression pourrait aussi s'appliquer à la Longue marche des communistes chinois et de Mao Zedong...

Publié ou mis à jour le : 2021-01-16 16:37:17

Voir les 5 commentaires sur cet article

Mi chel Pesneau (04-09-2015 12:30:27)

Comme Thierry Godet je me souviens avoir traduit Xenophon et en avoir retenu le cri (et le sens) de thalassa bien avant qu'il soit popularisé par une émission de télévision. Regrettable en effet q... Lire la suite

Daniel (04-09-2015 10:54:04)

Les Grecs ont gagné leur (partie de la )bataille, mais Cyrus a été tué au cours des combats. Ils ont donc perdu leur employeur et ont donc entrepris la célèbre retraite des 10000 en pays hostile... Lire la suite

Pierre-Bernard Lainé (04-09-2015 09:35:08)

Programmes de l'Education Nationale aidant, cette grande référence historique ne sera jamais connue des jeunes générations qui, à l'opposé, n'ignoreront rien des... "priorités du moment". Bravo... Lire la suite

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