Le 30 mai 1837, le général Thomas Bugeaud conclut avec l'émir Abd el-Kader le traité de la Tafna. Peu désireux de soumettre l'Algérie, il espère, grâce à ce traité, pouvoir limiter la présence française au littoral...
Après la prise d'Alger pour des raisons de politique intérieure, la France veut limiter l'occupation de l'Algérie à quelques ports du littoral : Oran, Mostaganem, Bône et bien sûr Alger. Dans cette perspective, le gouvernement de Louis-Philippe Ier se garde de renverser les chefs traditionnels musulmans qui tiennent l'intérieur du pays. Le 22 juillet 1834, faute de mieux, il institue un gouvernement général pour les « possessions françaises du nord de l'Afrique », sans plus de précision.
Dans le Constantinois, les Français s'appuient sur le bey Ahmed. En Algérie occidentale, ils s'appuient sur Abd el-Kader, un marabout qui s'enorgueillit de descendre du Prophète. Il a été proclamé à 25 ans émir des tribus de Mascara, une région proche d'Oran. Les Français comptent sur lui pour pacifier l'arrière-pays et l'aident même à constituer son armée : 2 000 cavaliers, 8 000 fantassins avec fusils modernes à baïonnette, 250 artilleurs, etc.
Mais le jeune Abd el-Kader ne supporte bientôt plus la présence des Français impies. Renonçant à sa vocation première, l'étude des textes sacrés, il engage la lutte contre les intrus et met en échec le général Trezel dans les marais de La Macta le 26 juin 1835. Le général Thomas Bugeaud se doit de venger cette défaite. C'est chose faite lors d'une bataille livrée aux troupes de l'émir à Sickak (ou Sikkak).
Fort de sa victoire, Bugeaud impose à Abd el-Kader le traité de paix de La Tafna. Par désir d'accommodement, il laisse l'émir maître de l'arrière-pays d'Oran et d'Alger et ne prête pas attention aux erreurs et aux non-dits du traité.
Or, il se trouve que les limites du royaume d'Abd el-Kader englobent la tribu des Ben Zetoun, fidèle aux Français. Abd el-Kader ne se fait pas faute de les égorger, à l'exception de 1 600 survivants que recueillent les Français.
Bugeaud n'a cure de cet acte inique. Il juge sa mission accomplie et se rembarque pour la France en déplorant une « possession onéreuse dont la nation serait bien aise d'être débarrassée ».
Sur place, la situation se dégrade. Voilà que le bey Ahmed n'accepte plus de faire allégeance aux Français. Le maréchal Sylvain Valée s'empare non sans mal de sa capitale Constantine le 13 octobre 1837.
C'est la première opération militaire d'une certaine ampleur depuis le début de l'occupation.
Pour relier Constantine à Alger, le duc d'Orléans franchit une gorge située sur le territoire d'Abd el-Kader : les « Portes de fer ».
Abd el-Kader ne se fait pas faute de dénoncer une violation du traité de La Tafna. Il proclame la guerre sainte le 18 novembre 1839.
Aussitôt, ses cavaliers ravagent la plaine de la Mitidja, derrière Alger, où commencent à s'implanter des colons européens.
L'insurrection devient générale et consacre l'échec de la politique de concertation avec les chefs algériens.
Le gouvernement français doit choisir entre l'évacuation et la riposte. En choisissant cette dernière, il entre dans un engrenage qui va le conduire à occuper tout le pays. C'est ainsi que l'Algérie va devenir le principal champ de bataille de la « monarchie de Juillet ».
L'économiste et historien Alfred Sauvy a pu écrire à propos de l'Algérie : « Le responsable de la conquête n'est pas Bugeaud, mais Abd el-Kader. Les pouvoirs publics français étaient prêts à se contenter de quelques ports marchands, quand la révolte a obligé l'armée à rétablir l'ordre et le Parlement à voter les crédits nécessaires » (note).

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