15 mars 1667

La Reynie dote Paris d'une police moderne

Le 15 mars 1667, par un édit signé à Saint-Germain-en-Laye, le roi Louis XIV confie à Gabriel Nicolas de La Reynie (42 ans), un magistrat originaire de Limoges, la charge inédite de lieutenant de police de Paris. C'est l'acte de naissance de la police moderne.

Le roi, habituellement jaloux de son autorité, ne craint pas de déléguer à La Reynie des pouvoirs très étendus sur l'administration et la population de la capitale.

Alban Dignat

La cour des Miracles au XIXe siècle, illustration de Notre-Dame de Paris de Victor Hugo, par Célestin Nanteuil-Leboeuf

Une capitale indigne du Roi-Soleil

Le jeune roi, qui vit encore au Louvre, tolère mal l'insécurité et la saleté de la capitale. Paris, qui attire des gens de tout le royaume depuis le Moyen Âge, compte alors un demi-million d'habitants dont environ 30 000 larrons et mendiants. Ces malfrats constituent une véritable puissance parallèle sous l'autorité d'un chef occulte qui défie le Roi-Soleil.

Déguisés en estropiés, pendant la journée, ils harcèlent le chaland en tout point de la capitale. Mais la nuit, ils se replient dans un quartier mal famé adossé à l'ancienne enceinte de Charles V, près de la porte Saint-Denis. Ils « ne sont pas plutôt de retour chez eux, qu'ils se dégraissent, se débarbouillent et deviennent sains et gaillards en un instant » (Dictionnaire historique de Paris, 1779). Cette transformation proprement « miraculeuse » vaut au quartier l'appellation ironique de « Cour des miracles » !

Pour faire face à cette engeance, la capitale disposait avant la nomination de La Reynie de guets, gardes et polices inefficaces, mal gérées et rivales, héritées du Moyen Âge et subordonnées à telle ou telle magistrature ou corporation. De son côté, le gouvernement de Mazarin avait tenté de chasser les mendiants de l'espace public. En 1656, la Compagnie du Saint-Sacrement avait créé un « Hôpital général des pauvres » qui regroupait plusieurs établissements hospitaliers de la capitale et sommé les mendiants soient de s'y rendre, soit de quitter la ville. Ce fut un échec.

Un policier en odeur de sainteté

Le nouveau lieutenant de police prend à cœur sa tâche. Installé au Châtelet, près de la Seine et de l'île de la Cité, il rassemble sous son autorité tous les corps de police (commissariats, prévôté de l'île, archers et exempts du guet, compagnie du lieutenant criminel). Il se fait représenter dans les 17 quartiers de la ville par 48 commissaires de police.

Il liquide aussi la Cour des miracles. Se rendant sur place avec des sergents à cheval et des soldats du guet, il fait ouvrir six brèches dans l'enceint de Charles V puis avertit au porte-voix les occupants qu'il va investir le lieu et que les douze derniers qui n'auront pas fui à temps seront pendus ou envoyés aux galères. Les truands ne se le font pas dire deux fois et s'enfuient par les brèches sans demander leur reste.

La Reynie n'a obtenu qu'une victoire provisoire car d'autres Cours des miracles se reconstitueront au fil des ans, nourries par la misère qui chasse des campagnes quantité de malheureux.

La Reynie se signale aussi par son zèle et son efficacité dans l'« Affaire des poisons », un sordide fait divers qui va jeter une ombre sur le règne du Roi-Soleil. Suite à l'arrestation et l'exécution d'une empoisonneuse, la marquise de Brinvilliers, le 17 juillet 1676, il lance ses limiers dans les milieux interlopes de Saint-Denis, où se pratique le commerce des poisons (aimablement qualifiés de « poudre de succession » car ils facilient les héritages). De fil en aiguille, de découvertes en accusations, ils remontent ainsi jusqu'à la Cour de Versailles et à l'entourage du roi, jusqu'à compromettre gravement la maîtresse en titre de celui-ci, Madame de Montespan.

Le lieutenant de police, plus tard lieutenant général de police, a une vision extensive de sa mission. Il fait ainsi installer l'éclairage public dans les rues à l'aide de lanternes afin d'en diminuer l'insécurité. Il développe aussi le pavage des rues et l'adduction d'eau et engage avec méthode la lutte contre les incendies et les épidémies, faisant de Paris l'une des métropoles les plus propres d'Europe... À bout de forces, il ne se retirera qu'en 1697, entouré de l'estime générale.

Publié ou mis à jour le : 2023-06-27 22:44:26
MUNIER (02-12-2020 16:41:41)

Bonjour , je pense que c'est son successeur d' ARGENSON qui a organiser l'éclairage des rues. Il fallait économiser les bouts de chandelles si lune pleine. Et il y a une jolie chanson coquine " le b... Lire la suite

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