Le siècle des génocides

Shoah et autres génocides du XXe siècle

Nous avons lu Le siècle des génocides, Violences, massacres et processus génocidaires de l'Arménie au Rwanda par Bernard Bruneteau (Armand Colin, 2004, 256 pages, 20 euros).

Le siècle des génocides

L'horreur d'Auschwitz n'est pas d'essence extra-terrestre mais constitue une synthèse paroxystique de différents éléments que l'on retrouve tout au long du XXe siècle.

Bernard Bruneteau est professeur d'histoire contemporaine à l'université Pierre Mendès France-Grenoble II. Avec Le siècle des génocides, il s'est mis en quête du fil conducteur qui relie entre eux les crimes génocidaires du XXe siècle.

Il montre la continuité et la parenté entre ces génocides, au nombre de quatre (Arméniens 1915, Juifs d'Europe 1941-1945, Cambodgiens 1975, Tutsis 1994),  et les crimes contre l'humanité qui ont débuté à l'époque coloniale et se poursuivent jusqu'à nous.

« À titre rétrospectif, le XXe siècle peut s'assimiler au règne de la violence paroxystique », rappelle Bernard Bruneteau. Mais le surgissement de cette violence a été préparé par des éléments du siècle précédent : « L'ère impérialiste qui voit la nouvelle pensée raciste justifier un expansionnisme colonial sanglant inaugure en effet les massacres administratifs ; la guerre de 1914 qui combine animalisation de l'ennemi, violence extrême et mort de masse débouche par ailleurs sur la brutalisation des sociétés européennes ».

Aux origines de la violence du XXe siècle

Bernard Bruneteau revient bien évidemment sur les massacres liés aux conquêtes coloniales, en Algérie, en Afrique noire, en Australie... sans parler des guerres indiennes livrées par les Américains aux premiers habitants de leur pays.

« Si la majorité des massacres de l'ère coloniale ne relèvent pas de la stricte catégorie du génocide », note Bernard Bruneteau, « l'indifférence dans laquelle ils se déroulèrent ne se sépare pas toutefois d'une forme d'idéologie, et qui plus est à visée universaliste »... C'est au nom du « peuple souverain » que des États comme la France ont entrepris de soumettre les peuples non européens.

Les guerres coloniales ont été justifiées en invoquant le darwinisme social, excroissance monstrueuse de la théorie de la sélection naturelle de Charles Darwin, et la vocation des « races supérieures » à dominer les autres.

Le succès de ce genre de théorie a été rendu possible par la sécularisation des sociétés européennes et l'affaiblissement de la morale chrétienne, avec pour conséquences le rejet de la compassion en politique et la désacralisation de l'être humain.

La Grande Guerre de 1914-1918, en atteignant un seuil de violence sans précédent, a également contribué à chambouler les consciences. « Lieu de l'hécatombe et de la terreur la plus insupportable, la bataille des années 1914-1918 a rendu banale la disparition de millions d'hommes, faisant accepter par exemple que la moitié des morts de la guerre n'aient pas de sépulture. Le consentement à la mort de masse est indissociable de la désacralisation subite de la vie humaine », note Bernard Bruneteau.

Ces préambules permettent à l'auteur de dérouler le fil des événements tragiques qui ont jalonné le XXe siècle, du massacre des Arméniens à celui des Tutsis, en passant par les liquidations de masse en URSS, la Shoah et le génocide cambodgien.

Force est donc de constater que ce siècle méritera de rester dans l'Histoire comme le « siècle des génocides », sans que l'on sache encore comment des hommes, généralement intelligents et héritiers d'une grande culture, ont pu se laisser entraîner à de pareilles folies.

André Larané
Publié ou mis à jour le : 2019-09-12 12:46:57

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