La Société de Géographie

Une boussole pour découvrir le monde

Cartier, Bougainville, Lapérouse... En ce début de XIXe siècle, la France peut déjà s'enorgueillir des exploits d'un certain nombre de ses explorateurs, prêts à redessiner les cartes pour la plus grande gloire du pays. Il est temps de mettre un peu d'ordre dans ce bel enthousiasme en créant une Société de Géographie, la toute première au monde. Âgée de deux siècles, cette vénérable est riche d'un passé à faire pâlir toute autre société savante.

Une poignée de passionnés

En cette année 1821, la géographie est à la mode : les curieux se souviennent encore des résultats de l'expédition Bonaparte de 1798 en Égypte qui avait donné naissance à un ouvrage de référence d'une richesse inégalée, La Description de l'Égypte. Le maître d'oeuvre de cette publication est Edme-François Jomard, un passionné de géographie.

C'est ainsi qu'a lieu le 19 juillet 1821 une première réunion. Elle ne réunit que cinq savants mais rapidement, ce sont 217 souscripteurs-fondateurs qui donnent vie au projet, avec quelques noms déjà célèbres : Cuvier, Chateaubriand, les frères Champollion ou encore Humboldt.

Anne-Louis Girodet-Trioson, La Leçon de géographie, 1887, Montargis, musée Girodet. Agrandissement : Friedrich Georg Weitsch, Humboldt et Aimé Bonpland au pied du volcan Chimborazo, 1806.

Le temps des géants

Très vite, d'autres organismes sont créés sur son modèle à travers le monde, que ce soit à Berlin (1828), Londres (1830) et même Mexico (1839). Il faut dire que la Société parisienne a su faire parler d'elle en organisant l'attribution de prix destinés aux explorateurs les plus audacieux.

C'est le cas de René Caillé qui, le 20 avril 1828, parvient à entrer dans la ville interdite de Tombouctou, et surtout à en ressortir vivant... Il y gagne 10 000 francs et une Médaille d'Or, tout comme, en 1841, le navigateur Jules Dumont d'Urville envoyé dans le Pacifique à la recherche de l'épave de Lapérouse.

Président éphémère de la Société, d'Urville laisse la place au Prussien Alexander von Humboldt, considéré comme un géographe d'exception avec à son actif des milliers d'observations dans le domaine du volcanisme, de la botanique ou encore de l'altitude.

À la conquête du grand public

Toute prestigieuse qu’elle soit, la vénérable institution n'en peine pas moins à recruter puisqu'en 1864 elle ne compte que 240 adhérents. Il faut trouver un nouveau souffle ! L'amiral La Roncière-Le Noury va s'en charger avec un congrès international (1875), la construction d'un nouvel immeuble boulevard Saint-Germain (1878) et le soutien au projet de canal à Panama.

C'est d'ailleurs Ferdinand de Lesseps qui prend la tête de l'organisation pour l'année 1882, avec parmi ses objectifs une plus large ouverture au public féminin. Va lui succéder le grand géographe Élisée Reclus avec toujours la démocratisation comme priorité, selon le principe qui lui est cher : « Étudier la géographie, c'est voyager à prix réduit à travers le monde ».

Nouvelle Calédonie. Indigènes de la tribu de Néfoué. Canala. Côte Est, 1874, Ernest Robin, Paris, BnF. Agrandissement : Illustration de Gabriel Bonvalot dans son livre De Paris au Tonkin à travers le Tibet inconnu publié en 1891.

L'explorateur, cet « éclaireur du géographe » (Roland Bonaparte)

Si elle s'attache à développer la vulgarisation, la Société de Géographie n'en néglige pas pour autant le terrain. Elle a su reconnaître les mérites de Francis Garnier, pionnier en Indochine (1869), de Pierre Savorgnan de Brazza, remercié pour son travail dans le centre du continent africain (1879) et de Charles de Foucauld, lauréat pour son livre Reconnaissance du Maroc (1885).

La Société incite aussi à l'exploration des profondeurs terrestres (grotte de Padirac,1889) comme marines (travaux d'Albert Ier de Monaco, 1886). Elle profite des retombées des expéditions de renom comme celle de Charcot dans les régions polaires ou de Citroën en Afrique et en Asie centrale (1925 puis 1932).

Mais avec l'après-guerre, la décolonisation et l'influence des idées marxistes mettant en avant les questions sociales, la géographie change de visage. On s'intéresse désormais davantage à l'Homme, comme le montre le soutien apporté à l'ethnologue Claude Lévi-Strauss (1993).

L'institution bicentenaire cherche aujourd'hui plus que jamais à faire souffler le vent de la découverte auprès des jeunes générations, sensibilisées non plus à l'identité du globe mais à son avenir.


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Les expéditions polaires
Publié ou mis à jour le : 2023-11-26 23:53:43

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