Soliman II, surnommé le Magnifique par les Occidentaux, et le Législateur (Suleiman Kanouni) ou le Grand (Asametleu) par les Turcs, est indéniablement le plus grand sultan de l’empire ottoman... et surtout celui dont le règne a été le plus long (46 ans, de 1520 à 1566).
Succès militaires en cascade
L'empire ottoman a été fondé par les Turcs à la fin du Moyen Âge, sur les ruines de l’empire byzantin. À cheval sur l'Europe et l'Asie, il a pour capitale Constantinople.
Quand il succède le 20 septembre 1520 à son père Sélim Ier, justement surnommé le Cruel, Soliman, alors âgé de 25 ans, a la chance de trouver un empire remis en ordre après les errances des sultans précédents.
L'administration ottomane tient les provinces bien en main et la menace que fait peser la Perse (aujourd'hui l'Iran) sur les frontières orientales est contenue.
Avec le concours du grand vizir Ibrahim Pacha, un compagnon d'enfance, Soliman poursuit donc la politique paternelle. Il achève sans tarder la conquête de la Méditerranée orientale, illustrée trois quarts de siècle plus tôt par la prise spectaculaire de Constantinople.
Dès 1521, il s'empare de la ville de Belgrade, une position stratégique dans les Balkans. Puis, le 20 décembre 1522, après cinq mois de siège, il s'empare de la forteresse de Rhodes que défendent les chevaliers de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Ces chevaliers quittent l'île pour une autre, Malte, au coeur de la Méditerranée. Ils en seront chassés trois siècles plus tard par un autre conquérant, Bonaparte.
La menace vient désormais de l'Occident que domine l'empereur Charles Quint, assisté de son frère Ferdinand, archiduc d'Autriche. C'est ainsi que Soliman noue une alliance de revers avec le roi de France François Ier. Cette « alliance impie », la première du genre entre une nation chrétienne et un État musulman, fait scandale chez les chrétiens et se révèlera, qui plus est, sans aucun profit pour le Français. Mais elle manifeste avec éclat l'évolution des mentalités au sortir du Moyen Âge. Pour la première fois, en effet, en Occident, l'intérêt de l'État l'emporte sur la solidarité religieuse.
Profitant de ce que François Ier relance à l'Ouest la guerre contre l'empereur, le sultan monte une expédition préventive contre la Hongrie du roi Louis II, située entre ses possessions des Balkans et celles des Habsbourg. Les Hongrois sont écrasés à Mohacs le 28 août 1526 et leur roi périt dans la bataille.
Fort de cette victoire inattendue qui l'amène aux portes de l'Occident, le sultan peut dès lors s'emparer tranquillement de Buda (aujourd'hui Budapest), capitale du royaume hongrois.
Désireux d'exploiter son succès, il met le siège devant Vienne, capitale de Charles Quint, le 27 septembre 1529 ! La résistance des habitants et celle des vingt mille soldats de sa garnison ont raison de sa détermination et il doit bientôt se retirer. Mais jusqu'à la fin de son règne, il n'aura de cesse de disputer la Hongrie aux Habsbourg, ces derniers conservant la partie occidentale du pays (et le titre royal) et lui-même annexant la partie orientale.
Là-dessus, Soliman se retourne à l'Est contre l'Iran séfévide. En 1534, avec son armée de janissaires , il conquiert l'Azerbaïdjan, Tabriz et Bagdad, soit la plus grande partie de l'Irak actuel. Dans le même temps, les corsaires barbaresques, sous les ordres de Barberousse, écument la Méditerranée occidentale pour son compte. Lui-même signe en 1536 avec son allié François Ier le traité des capitulations, par lequel le roi de France obtient la protection des Lieux Saints et des chrétiens de l'empire, une manière de gommer l'effet désastreux de son alliance militaire.
Apogée de l'empire ottoman
Avec Soliman II, l’empire ottoman a atteint sa plus grande expansion territoriale, des frontières du Maroc à celles de la Perse, des portes de Vienne aux rives de l'océan Indien (il s'adjoindra un peu plus tard Chypre et la Crète).
Le sultan, soucieux de bonne gestion, a aussi doté l'empired'un code de lois, le Kannuname.
L'empire ottoman connaît sous son règne une grande effervescence artistique, dont témoignent les réalisations du célèbre architecte d'origine grecque Sinan comme les mosquées Chéhéadé et Suleymaniye (Constantinople) et Selimiye (Andrinople).
On est alors en pleine Renaissance et les petits États batailleurs d'Europe occidentale ne sont pas en reste, multipliant les palais et basiliques, réinventant les sciences et les arts...
Derniers feux
La fin du long règne de Soliman sera assombrie par les intrigues de la sultane Roxelane, une esclave originaire de Ruthénie, devenue sa seule épouse légitime ! Le sultan en viendra à laisser exécuter son fidèle ami Ibrahim Pacha et lui-même acceptera le meurtre de son propre fils aîné, le brillant Moustafa, né d'une précédente favorite.
Roxelane meurt le 18 avril 1558 et Soliman le 6 septembre 1566, au cours d'une ultime expédition en Hongrie. L'un de leurs fils monte sur le trône sous le nom de Sélim III et liquide comme il se doit ses propres frères ! Sélim sera surnommé l'Ivrogne. Autant dire qu'il n'aura rien des qualités de son père.
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Boutté (23-09-2016 07:26:27)
N'ai-je pas lu quelque part que Soliman était Kurde? Origine compatible avec l'appellation d'Ottoman .