Stanislas Leszczynski traverse son siècle sans le comprendre ni le dominer. Et pourtant, les occasions d'agir ne lui manquent pas mais toujours il leur tourne le dos, par négligence ou par manque de courage, préférant cultiver ses passions intimes, la gourmandise, la musique, l'architecture, les fêtes et la chasse. Il aurait pu être Malraux, il aura été Candide.
Malgré ses faiblesses, Stanislas Leszczynski reste dans l'Histoire comme l'arrière-grand-père de trois rois de France, Louis XVI, Louis XVIII et Charles X. Il perdure aussi dans la mémoire de ses sujets polonais comme un roi éphémère et romantique qui lutta (un peu) pour préserver leur indépendance face à la mainmise saxonne et russe.
Il reste enfin dans la mémoire des Lorrains comme le grand architecte de Nancy. Et c'est justice que la plus belle place de la ville, qu'il fit aménager sur ses indications et avec sa cassette personnelle, porte son prénom.
Troubles querelles
Stanislas Leszczynski naît à Lwow (aujourd'hui Lviv, en Ukraine) le 20 octobre 1677. Il est l'héritier du palatin de Posnanie. A 21 ans, ce noble aux talents prometteurs épouse la fille d'un magnat polonais illustre, Catherine Opalinska. Elle lui donnera deux filles, dont l'aînée mourra dans l'adolescence et la seconde deviendra par un extraordinaire hasard reine de France.
En 1703, la Diète de Pologne se réunit pour élire un nouveau roi. C'est d'abord le roi de Saxe, un Allemand, qui gagne la faveur des électeurs et se fait élire sous le nom d'Auguste II. Mais le nouveau roi de Suède, le jeune Charles XII (18 ans), intervient à son tour dans les affaires polonaises et, ralliant Stanislas à sa cause, le fait élire roi de Pologne le 12 juillet 1704.
Mais son protecteur Charles XII est entraîné dans un conflit avec le tsar de Russie, Pierre 1er le Grand. Le Suédois et son armée, après d'extraordinaires succès, s'épuisent dans la plaine ukrainienne et se font battre à Poltava en 1709. Charles XII, blessé, trouve refuge chez... le sultan ottoman. C'est là que le rejoint le bon Stanislas, désireux d'être relevé de sa promesse de fidélité et déchargé de sa couronne que des envieux plus énergiques s'apprêtent à lui enlever.
Charles XII lui offre la petite principauté de Zweibrücken (Deux-Ponts), entre la France et l'Allemagne, pour le consoler de son éphémère royauté. A la mort du Suédois, Stanislas, sa petite famille et sa petite cour obtiennent refuge dans la ville de Wissembourg, en Alsace, sous l'autorité du roi de France.
C'est là que le sort va basculer d'une façon qu'aucun romancier n'aurait pu imaginer.
Stanislas Leszczynski a la surprise un jour, dans sa retraite de Wissembourg, de recevoir une lettre du duc de Bourbon lui présentant une demande en mariage du roi (15 ans) pour sa fille Marie (22 ans). On imagine la surprise de l'un et de l'autre !
Le mariage est célébré le 4 septembre 1725. Louis XV, bel adolescent de 15 ans, se montre sincèrement amoureux de sa femme et celle-ci, bonne épouse, lui donnera pas moins de dix enfants en dix ans avant qu'il ne cherche d'autres plaisirs dans les bras des marquises.
Peu après, en 1733, le roi de Pologne Auguste II meurt et Stanislas tente mais en vain de reprendre la couronne avec le soutien de son puissant gendre. C'est la guerre de Succession de Pologne.
Là-dessus se pose la question de la succession de l'empereur d'Allemagne, Charles VI de Habsbourg. À l'instigation des grandes puissances, le duc de Lorraine et du Barrois, François III cède ses duché à Stanislas avant d'épouser Marie-Thérèse. Il est convenu aussi, qu'à la mort de leur nouveau titulaire, les duchés reviendront à jamais au roi de France.
C'est ainsi qu'à soixante ans passés, le bon Stanislas reçoit les titres qui vont lui valoir une immortelle renommée. Ses titres sont surtout symboliques et la réalité du pouvoir, sous son règne, appartient au chancelier nommé par le roi de France, Chaumont de la Galaizière. Reste que le nouveau duc dispose d'une confortable pension. Elle lui permettra jusqu'à la fin de sa vie d'entreprendre à Lunéville et Nancy de grands travaux de mécénat.
• 23 février 1766 : la Lorraine devient française
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