Le musée du pays châtillonnais fait la fierté de Châtillon-sur-Seine, petite ville bourguignonne au nord de la Côte d'Or. Il a été réinstallé en 2009 dans une ancienne abbaye, de façon à offrir à ses collections, et en particulier au très célèbre cratère de Vix, un écrin à la hauteur de leur intérêt.
Trésors archéologiques
Avec 80 000 objets, le musée présente un aperçu intéressant de l'histoire locale et notamment de la vie d'un enfant du pays, Auguste de Marmont, Maréchal d'Empire, duc de Raguse et pair de France.
Il mourut dans l'impopularité pour avoir livré son corps d'armée aux Alliés en 1814 et réprimé les insurgés parisiens de 1830 à la tête de la garde nationale.
Le musée est riche surtout des vestiges de l'époque gauloise, parmi lesquels de nombreux ex-voto offerts par les pèlerins aux divinités des sources guérisseuses de la région. Ces ex-voto représentent les parties du corps que les divinités ont été sensées guérir.
Une découverte inespérée
La vedette de ces collections est sans conteste le cratère de Vix. Il s'agit d'un splendide et monumental récipient en bronze destiné à présenter le vin lors des banquets qui réunissaient les citoyens de la cité.
D'une hauteur de 1,64 mètres, d'un poids de 208 kilos et d'une contenance de 1000 litres, il a été réalisé dans un atelier des environs de Naples ou de Tarente, en Grande Grèce, au VIe siècle av. J.-C., à une époque où Rome n'était encore qu'un gros bourg.
Il est sans doute passé entre plusieurs mains avant d'arriver entre celles d'une riche dame gauloise et de finir dans son tombeau. C'est là que deux archéologues amateurs l'ont par le plus grand des hasards découvert en 1953.
Ces deux archéologues fouillaient le mont Lassois, près du village de Vix, à 6 kilomètres de Châtillon-sur-Seine, en quête de vestiges de l'ancienne cité gallo-romaine sise à cet endroit. Par ce lieu où la Seine n'était plus navigable transitaient des marchandises de toutes origines : étain, ambre, salaisons, vin…
Le 29 décembre 1952, n'ayant rien trouvé de significatif mais n'ayant pas complètement épuisé les subventions qu'ils avaient reçues de l'État, les deux archéologues décidèrent de fouiller un champ voisin où l'un d'eux, M. Moisson, agriculteur de son état, avait repéré des cailloux de provenance étrangère à la localité.
La chance aidant, ils découvrent l'anse du cratère. Celui-ci, composé de feuilles de bronze de 1 à 2 mm d'épaisseur, a été écrasé quand les parois en bois de la fosse funéraire se sont effondrées au fil du temps. Il a été néanmoins protégé d'une destruction totale par l'oxydation de la surface.
Magnifiquement restauré, le cratère a conservé de son séjour dans la terre une vilaine teinte verte qui n'a rien à voir avec l'aspect doré de sa vie antérieure.
La mondialisation avant l'heure
On a aussi retrouvé dans la tombe de Vix maints autres objets très instructifs, pour la plupart exposés au musée de Châtillon-sur-Seine. Ils constituent un témoignage incomparable du premier Âge du Fer en Europe, aussi appelé « culture de Hallstatt » (de 1200 av. J.-C. au milieu du 1er millénaire av. J.-C.).
La tombe a fait l'objet au musée d'une reconstitution dans son état d'origine. On peut voir qu'il s'agissait d'une fosse rectangulaire de 4 mètres de profondeur et de côté, couverte de lambris.
Outre le cratère, elle contenait tous les ustensiles nécessaires aux banquets : une cruche pour puiser le vin dans le cratère et une coupe pour le boire. Ainsi la défunte pouvait-elle retrouver dans l'au-delà les petits plaisirs d'ici-bas.
La dame de Vix était allongée avec tous ses bijoux sur un char processionnel. Ce char, fait remarquable, possède un train directionnel avant, pour mieux tourner ; il s'agit d'une invention celte qui ne sera retrouvée qu'à la fin du Moyen Âge. Ses quatre roues, disposées sur le côté de la tombe, sont cerclées en fer à la manière celte.
Parmi les bijoux figurent un collier d'ambre et un splendide torque (collier gaulois) fait d'une feuille roulée de 480 grammes d'or. Le torque, sans doute de fabrication régionale, s'orne de deux petites représentations du cheval Pégase, preuve que les motifs décoratifs propres aux Grecs influençaient les artisans celtes.
Le cratère venait, on l'a vu, du sud de l'Italie et la cruche de la région d'Athènes. Les perles d'ambre venaient peut-être, quant à elles, de la mer Baltique.
Ces observations témoignent de l'importance du commerce international dans cette région, au VIe siècle av. J.-C., quand Rome était encore une petite cité sans importance mais qu'Athènes et la Grèce rayonnaient sur l'Europe danubienne, sur la Méditerranée et jusqu'à Marseille.
Véritable vitrine des relations internationales, Vix et le Mont Lassois se trouvaient alors sur la grande voie de commerce de l'étain entre les îles britanniques et le bassin de la Méditerranée, sur un point de rupture de charge entre la vallée de la Seine et celle de la Saône et le Rhône. De là sans doute la prospérité des édiles locaux.
La mondialisation, on le voit, n'est pas un phénomène propre à notre époque, il s'en faut de beaucoup !
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