Né à Bombay, aux Indes, dans la famille d'un père sculpteur, Joseph Rudyard Kipling acquiert la célébrité avec des romans destinés à la jeunesse : The Jungle Book (Le livre de la Jungle, 1895) et Captains Courageous (Capitaines courageux, 1897). Il est le premier Britannique à recevoir le prix Nobel de Littérature en 1907.
Le jeune Rudyard va conserver toute sa vie la nostalgie des Indes britanniques bien qu'il ait quitté la colonie dès l'âge de trois ans et l'ait retrouvé quinze ans plus tard pour occuper un emploi de rédacteur dans un journal de Bombay. Soucieux de se faire connaître comme auteur de nouvelles et de romans, il quitte une bonne fois pour toutes les Indes en 1889 et gagne l'Angleterre après avoir visité le Sud-Est asiatique et l'Amérique.
Il se marie, s'établit à la campagne et ne tarde pas à connaître la gloire avec ses romans inspirés par ses voyages et ses souvenirs des Indes.
L'écrivain se fait le chantre de l'impérialisme britannique, et du « fardeau de l'homme blanc ». Son plus célèbre poème est paru en février 1899 dans McLure's Magazine, à un moment critique où l'expansion coloniale de l'Occident touchait à ses limites :
« Take up the White Man's burden
The savage wars of peace
Fill full the mouth of Famine,
And bid the sickness cease » (en anglais)
« Assumez le fardeau de l'homme blanc
Les sauvages guerres de la paix
Nourrissez la bouche de la famine
Et faites que cesse la misère » (traduction française)
Ce poème traduit la mentalité progressiste de la fin du XIXe siècle, tel qu'elle s'exprimait dans l'action de Jules Ferry, de Joseph Chamberlain ou encore de Léon Blum. Elle n'est pas dépourvue de générosité, loin s'en faut, et le poème ci-dessus pourrait parfaitement être repris par les militants tiers-mondistes d'aujourd'hui, les médecins sans frontières, les organisations non-gouvernementales... Il n'y aurait besoin que de changer le mot « blanc » par « riche » ou « développé », qui lui sont, en ce début du XXIe siècle, peu ou prou équivalents.
Poète agnostique, Kipling est représentatif d'une époque qui se détourne de Dieu et place ses espoirs dans le progrès scientifique et le retour à la Nature. C'est ainsi qu'il exalte les vertus viriles dans son poème : If - (Si, 1910). Ce poème s'achève par le vers : you'll be a Man, my son ! (Tu seras un Homme, mon fils !). Cette philosophie orgueilleuse trouve un tragique aboutissement dans la Grande Guerre (1914-1918).
Le fils aîné de Kipling, John, s'engage volontairement, bien que myope, pour ne pas décevoir son illustre père. Il est tué dès le premier assaut. En songeant à lui, le poète, amer, écrira après la guerre : « Si on vous demande pourquoi nous sommes morts, dites-leur que c'est parce que nos pères ont menti » (Common Form, 1919).
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JdB (04-01-2016 02:02:52)
A JPL. Ne me faites pas l'injure de penser que je fais référence au surhomme version Adolf ! La distinction que je fais, c'est bien entre le Surhomme nietzschéen, sorte d'idéal humain né de la mo... Lire la suite
François Courajoud (29-12-2015 14:49:22)
Comme il est triste qu'on puisse assimiler "If" à un poème d'exaltation du surhomme. Je l'ai découvert à quinze ans et je l'ai appris par cœur. Depuis plus de 50 ans, c'est un inusable appui pour... Lire la suite
JPL (29-12-2015 13:41:16)
À JdB (18-01-2014). Je ne vois pas en quoi rattacher 'If' aux théories du surhomme peut paraître très excessif, sinon faux, d'autant plus que "la vertu, la sagesse, la maîtrise de soi, voire l'as... Lire la suite