5 avril 2023. Après une fiction autour du personnage de Gustave Eiffel qui nous avait ravi : Eiffel, Martin Bourboulon nous offre une nouvelle adaptation des Trois Mousquetaires en nous prévenant bien qu'il y aura une suite dès décembre 2023.
Que retenir de cet épisode-ci ? La présence de vedettes du grand écran : Romain Durys en Athos, Vincent Cassel en Aramis, etc. Et des combats à l'épée qui raviront les amateurs de jeux vidéo. Pour la fidélité à la littérature et la vraisemblance historique, on repassera...
Le septième art s’est emparé très tôt de l’œuvre littéraire d’Alexandre Dumas. Rien que les romans les plus connus, Les Trois Mousquetaires et Le Comte de Monte-Cristo, ont été adaptés presque quarante fois à l’écran, depuis le film muet de Georges Méliès : Les Mousquetaires de la reine, daté de 1903, jusqu’au premier volet du diptyque réalisé par Martin Bourboulon.
Gageons que celui-ci ne restera pas longtemps dans les mémoires malgré le torrent de louanges dont il bénéficie dans les médias. À l'opposé du roman, tout en fantaisie et rêve, cette énième adaptation se réduit à une succession de combats à l'épée ou au mousquet entrecoupés de courses à cheval dans une campagne ripolinée.
Les anachronismes historiques sont légion. Dans l'année où débute l'action (1625 dans le roman, 1627 dans le film), le roi Louis XIII et la reine Anne d'Autriche ont environ 25 ans ; dans le film, les acteurs qui les interprètent assument une cinquantaine quelque peu fatiguée... et l'on a peine à comprendre, à voir son aspect dépenaillé, que le duc de Buckingham fut en son temps réputé le « plus bel homme du monde » !
Plus dommageables sont les écarts avec le récit de Dumas, à croire que les scénaristes ne l'ont lu qu'à travers un résumé wikipediesque. Constance Bonacieux, dont le jeune d'Artagnan n'a de cesse de réclamer les faveurs, n'est pas ici la savoureuse épouse d'un bourgeois jaloux et chicaneur mais une ingénue tout droit sortie du couvent des Oiseaux.
Aramis apparaît quant à lui non plus comme un jésuite en rupture de ban mais comme un protestant quelque peu complotiste. Et au lieu de développer comme il se doit l'histoire des ferrets de diamants que la reine a imprudemment offerts à son soupirant Buckhingham, le film la réduit à une rapide cavalcade picarde pour ensuite s'étendre sur un prétendu complot calviniste d'une invraisemblance qui dépasse l'entendement.
C'est ainsi que la cour et le roi lui-même, réunis dans l'église de Saint-Germain-l'Auxerrois, se voit mitraillés par des tueurs parpaillots déguisés en moines. La prochaine fois, j'imagine que les scénaristes transformeront ces terroristes en djihadistes pour mieux faire le lien avec notre époque et rattacher les ignares que nous sommes à quelque chose de familier !
Passons sur les anachronismes et erreurs de détail : dans l'auberge de Meung-sur-Loire où débute l'action, on voit Milady s'abriter de l'orage sous un parapluie que porte diligemment son chevalier servant ; qu'importe que les parapluies aient été inventés un siècle plus tard...
Au moins la sortie tintamaresque du film de Martin Bourboulon nous encouragera-t-elle à lire ou relire les aventures des Trois Mousquetaires dans le texte originel. La lecture en est fluide et légère, pleine de dialogues savoureux et incisifs, accessible à tous les publics sachant un tant soit peu lire. C'est un délassement sans égal que l'on peut aussi partager avec les enfants.
Alexandre Dumas aurait-il fait un bon cinéaste ?
Faut-il croire qu'Alexandre Dumas aurait fait du cinéma s'il avait vécu de nos jours ? Pas sûr. Le cinéma est dans l'action, Dumas parle à notre imagination. Il n'empêche que depuis l’invention du cinéma, ses œuvres ont été parmi les plus adaptées à l’écran, avec un bonheur variable. Entre les scènes de bataille épiques, les histoires d’amours impossibles et les honneurs bafoués, tous les éléments étaient déjà réunis pour fournir aux cinéastes une mine d'inspiration.
Cela a commencé avec le film parodique L’Étroit mousquetaire de Max Linder (1922), l'une des plus drôles et paradoxalement l'une des plus fidèles adaptations du roman du grand Alexandre ! Retenons aussi les deux volets réalisés en 1961 par Bernard Borderie. Ce réalisateur qui a aussi porté Angélique marquise des Anges à l'écran a su donner aux mousquetaires de Dumas la fantaisie qui fait leur charme.
En France bien sûr, on se souvient aussi de La Reine Margot (Patrice Chéreau, 1994) avec Isabelle Adjani ou encore La Tour de Nesle (Noël Herpe, 2020). En Italie, les drames d’Alexandre Dumas fils trouvèrent aussi un écho particulier à travers l’adaptation de La Femme de Claude (Gero Zambuto, 1918) ou de L’Affaire Clemenceau (1917, Alfredo de Antoni).
Les romans inspirèrent aussi de nombreuses productions au Mexique, en Russie, ou même en Inde avec le film Tamoul Les Trois bagarreurs (Vijayapuri veejan). Mais c'est surtout en Angleterre et aux États-Unis que l'auteur français a rencontré le plus d'écho avec, pour commencer, le Monte Cristo de Francis Boggs produit en 1908 et considéré comme le premier film hollywoodien.
Très vite, tous les grands acteurs et actrices rêvèrent d’interpréter les héros dumasiens tels qu’Edmond Dantès ou D’Artagnan... sans parler de Marguerite Gautier, l'héroïne malheureuse de La Dame aux Camélias, le roman qui a assuré la célébrité d'Alexandre Dumas fils. On retiendra le film de George Sidney, The Three Musketeers (1948), avec Gene Kelly dans le rôle de D’Artagnan, puis Cagliostro, un film de 1949 réalisé par Gregory Ratoff avec Orson Welles dans le rôle-titre, et plus récemment, L’Homme au masque de fer (1998) de Randall Wallace interprété notamment par Leonardo DiCaprio.
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