Près d'un siècle après la croisade contre les Albigeois qui avait mis à feu et à sang le Midi de la France, la ville de Toulouse retrouve son antique prospérité et sa joie de vivre...
Deux siècles après l'âge d'or de la poésie courtoise (ou « poésie de cour »), sept amateurs se réunissent le 1er novembre 1323 en vue de faire revivre celle-ci. Ils sont à l'origine du premier concours de poésie d'Europe, sinon du monde. Leur compagnie existe toujours sous le nom d'Académie des Jeux Floraux. Elle tient son siège dans le magnifique hôtel d'Assézat...
Le premier concours de poésie
Si l'on en croit la chronique, les sept personnes à l'origine des Jeux Floraux sont le troubadour Bernard de Panassac ainsi qu'un habitant du bourg de Toulouse, deux changeurs, deux marchands et un notaire. Ils donnent à leur compagnie le nom de « compagnie du Gai Savoir ». Dans cet intitulé plein de gouaille perce déjà l'esprit de Rabelais !
Les capitouls, bourgeois qui gouvernent la ville au nom du comte de Toulouse, conviennent d'offrir aux futurs gagnants du concours une joya (fleur en métal précieux), en l'occurrence une violette d'or. Un souci d'argent et une églantine d'or viendront aussi s'ajouter aux prix qui seront décernés chaque année.
Le 3 mai 1324 est ainsi organisée la première joute poétique entre troubadours, trouvères et ménestrels de tous pays.
Les concurrents doivent s'exprimer en langue d'oc, la langue du Midi toulousain. Cette langue, imprégnée de tournures latines ou romanes, se distingue de la langue du Bassin parisien, la langue d'oïl, d'où nous vient le français actuel (leur nom respectif vient de ce que oui se disait oc à Toulouse et oïl à Paris).
Parmi les premiers lauréats du concours, au milieu du XIVe siècle, figure Gaston III de Foix, comte de Foix-Béarn, un magnifique représentant de la chevalerie médiévale, plus connu sous le nom de Gaston Fébus !
En 1515, la compagnie prend le nom de Compagnie des Jeux Floraux. Elle se place peu après sous le patronage de Clémence Isaure, une dame du siècle précédent qui lui aurait fait don de ses biens... mais dont l'existence n'est en rien avérée.
De la langue d'oc au français
En 1694, signe des temps, la Compagnie des Jeux Floraux renonce volontairement à la langue d'oc pour le français, qui a pour lui le prestige de la cour de Versailles. Elle se place sous la protection du roi Louis XIV et prend le nom d'Académie, en référence à une Accademia romaine et sans doute aussi pour concurrencer, autant que faire se peut, la jeune Académie française.
Le jury des Jeux Floraux a fait la preuve de sa sagacité en récompensant d'une Églantine Pierre de Ronsard en 1554 et d'un lys d'or le jeune Victor Hugo (19 ans). Chateaubriand a été également couronné. Et bien sûr le poète François Fabre d'Églantine qui nous a légué le calendrier révolutionnaire et « Il pleut, il pleut, bergère... » (la deuxième partie de son nom rappelle l'églantine d'argent remportée aux Jeux Floraux et dont il était très fier !).
L'Académie des Jeux Floraux est aujourd'hui hébergée dans le somptueux hôtel d'Assézat, une demeure de style Renaissance, en pierre et en brique, bâtie à la fin du XVIe siècle par un marchand enrichi dans le commerce du pastel.
Elle poursuit dans une relative discrétion la promotion de la langue d'oc depuis qu'en 1895, le poète provençal Frédéric Mistral réintroduisit cette langue en son sein (elle est aujourd'hui faussement appelée occitan).
Vos réactions à cet article
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Hans (04-05-2020 15:20:02)
Dans un article "Devinettes" de ce jour, à la question "Où et quand s'est déroulé le premier concours de poésie d'Europe ?" vous donnez la réponse suivante : "Le 3 mai 1324, à Toulouse, de ric... Lire la suite
Cyd (09-10-2006 14:39:33)
Pour essayer une conciliation, peut être devront on dire "le plus vieux concours de poésie encore en cours," plutot que le "1er concours de poésie", qui il est vrai, doit remonter au moins à la pr... Lire la suite
xerxes (12-07-2006 21:51:41)
Intituler cet article "Naissance des Jeux Floraux" ne veut pas dire que son auteur prétend que ces derniers ont été inventés en France ; car si on lit bien ledit article, on s'aperçoit qu'il ne t... Lire la suite