Un groupe de jeunes officiers turcs de Salonique et de Macédoine se mobilisent contre le sultan Abdul-Hamid II auquel ils reprochent de livrer l'empire ottoman aux appétits étrangers et de montrer aussi trop de complaisance pour les Arabes.
Le sultan cède à leurs exigences et rétablit une Constitution le 24 juillet 1908.
L'empire ottoman, objet de toutes les convoitises
Depuis le Congrès de Berlin qui a présidé trente ans plus tôt au dépeçage des provinces européennes de l'empire ottoman, celui-ci est clairement devenu l'« homme malade de l'Europe ».
La Grande-Bretagne exerce une tutelle prégnante sur le gouvernement de Constantinople, tout autant d'ailleurs que sur le gouvernement rival d'Athènes. C'est ainsi un amiral britannique, Sir Arthur Limpus, qui commande jusqu'en 1914 la flotte ottomane du Bosphore.
Désireux de se détacher des Britanniques, le sultan fait des avances aux Allemands, lesquels souffrent de n'avoir pas sur la scène internationale une place à la mesure de leur puissance économique. L'empereur Guillaume II effectue des voyages officiels en Turquie, en octobre 1889 et en octobre 1898. D'autre part, les banques allemandes s'impliquent dans la construction du chemin de fer d'Anatolie puis, à partir de 1903, de la mythique ligne Berlin-Bagdad.
Vers une réaction ultranationaliste
Les officiers rebelles sont à l'origine du sentiment national turc. En qualifiant leur mouvement de « Jeunes-Turcs », ils veulent se démarquer des « Vieux-Turcs » qui, au début du XIXe siècle, s'opposèrent à la modernisation de l'empire.
Le rétablissement de la Constitution ne leur suffit pas. Le 27 avril 1909, ils déposent Abdul-Hamid II et installent sur le trône un nouveau sultan, Mohamed V, sous l'étroite surveillance d'un Comité Union et Progrès (CUP, en turc Ittihad) dirigé par Enver pacha (27 ans).
Ils donnent au pays une Constitution ainsi qu'une devise empruntée à la France : « Liberté, Égalité, Fraternité ». Ils laissent espérer un sort meilleur aux minorités de l'empire ottoman, sur des bases laïques.
Mais leur idéologie emprunte au nationalisme le plus étroit et très vite se heurte à l'obsolescence de l'empire.
Confrontés à un lent démembrement de l'empire multinational et à sa transformation en puissance asiatique (l'empire ne possède plus en Europe que la région de Constantinople), les Jeunes-Turcs doivent eux-mêmes subir l'humiliation d'une lourde défaite dans les deux guerres balkaniques.
Assumant le pouvoir sans partage, ils entraînent la Turquie dans la Grande Guerre aux côtés de l'Allemagne et de l'Autriche-Hongrie et s'appliquent à renforcer son caractère proprement turc et musulman, ce qui les conduit à commettre le génocide arménien.
Le populaire Enver Pacha se fera après la défaite de 1918 le champion du « touranisme », une idéologie qui prône l'union de tous les peuples de langue turque ou assimilée, de la mer Égée aux confins de la Chine (Anatolie, Azerbaïdjan, Kazakhstan, etc) (note).
Moustafa Kémal, maintenu à l'écart par la direction du CUP, relèvera le pays de ses ruines et bâtira la Turquie dont avaient rêvé les Jeunes-Turcs.
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