Le 1er février 1328, le roi de France Charles IV le Bel, troisième et dernier fils de Philippe le Bel, meurt sans postérité mâle comme ses frères aînés. Il ne laisse que des filles et sa troisième femme, Jeanne d'Évreux, est à nouveau enceinte.
Le jour même de la mort du roi, les Grands du royaume attribuent la régence au comte Philippe de Valois (31 ans), dont le père Charles était le frère cadet de Philippe le Bel. Philippe est donc le cousin germain des trois derniers rois et son élévation paraît de nature à rallier tous les suffrages en attendant la naissance espérée d'un garçon.
Arrive deux mois plus tard le moment de l'accouchement. La reine donne le jour à... une fille. Pour la première fois depuis l'avènement d'Hugues Capet, il ne se trouve pas un garçon pour perpétuer la dynastie en ligne directe. La succession par les femmes est rejetée comme elle l'avait déjà été onze ans plus tôt, après la mort de Louis X le Hutin et de son fils Jean Ier le Posthume.
La monarchie renoue avec le rite ancien de l'élection
Il ne reste plus aux Grands du royaume qu'à élire le futur roi, selon une pratique commune aux premiers temps de la féodalité. Elle était devenue obsolète en France à partir de Philippe Auguste, quand chacun s'était accoutumé à ce que le fils aîné du souverain régnant recueille sa succession ; la meilleure façon que l'on eut trouvée d'éviter les querelles d'héritage.
Mais voilà que ces querelles ressurgissent ! Trois prétendants revendiquent en effet des droits sur la couronne :
• Le régent Philippe de Valois : il n'est que le neveu de Philippe le Bel mais il fait valoir sa filiation avec le père de celui-ci, Philippe III le Hardi.
• Le roi d'Angleterre Édouard III Plantagenêt : il est le petit-fils de Philippe le Bel par sa mère Isabelle, soeur des précédents rois.
• Le comte Philippe d'Evreux : il est aussi en droit de revendiquer la couronne car il est l'époux de Jeanne de Navarre, fille du précédent roi, Louis X le Hutin, mais il n'insiste pas (son futur fils Charles II le Mauvais, par contre, se montrera beaucoup plus revendicatif).
Après moult délibérations, à Vincennes, les Grands du royaume se décident le 8 avril 1328 à confier la couronne au régent Philippe de Valois. Aux yeux des féodaux et des juristes qui les assistent, celui-ci a pour principal avantage de n'être ni Anglais ni Navarrais ! C'est ainsi qu'il devient roi sous le nom de Philippe VI. Il est sacré à Reims le 29 mai suivant.
Beaucoup plus tard, confrontés à la contestation d'Édouard III, les juristes tenteront de justifier l'élection de Philippe VI de Valois en invoquant une prétendue « loi salique » qui prohibe la transmission de la couronne par les femmes dans la tribu des Francs Saliens dont sont issus Clovis et ses descendants. En fait de « loi salique », ils exhiberont un vieux document où il est simplement dit à propos de contrats de droit privé : « femme ne peut servir de pont et de planche » !
Fin des Capétiens directs
L'élection du 8 avril 1328 consacre la fin des Capétiens directs. Après trois siècles de succession de père en fils, la couronne passe à la branche cadette des Valois. Sur le moment, le roi d'Angleterre accepte sa mise à l'écart. Le 6 juin 1329, dans la cathédrale d'Amiens, il rend l'hommage féodal à Philippe VI pour la Guyenne, qu'il tient du roi de France.
Mais moins de dix ans plus tard, Edouard III va se rétracter et provoquer un conflit à multiples rebondissements entre les rois de France et d'Angleterre, entrecoupé de longues trêves. Il sera qualifié par les historiens du XIXe siècle de guerre de Cent Ans.
Isabelle, mère du roi d'Angleterre, a été mariée par son père Philippe le Bel au roi d'Angleterre Édouard II en 1308. Elle avait 16 ans et son époux 24. Homosexuel notoire, Édouard II se laisse manipuler par ses favoris et amants, en particulier un certain Gaveston, qui est assassiné par les barons en colère. Le roi se fait également battre par les Écossais et doit reconnaître leur indépendance sous l'autorité de leur roi Robert Bruce.
Isabelle, surnommée la « Louve de France », ne se fait pas faute de prendre un amant, lord Roger Mortimer. De France, où elle s'est réfugiée, elle noue une conspiration contre son mari et le renverse en 1326 avant de le faire exécuter quelques mois plus tard dans sa prison. Elle gouverne dans un premier temps au nom de son fils, né en 1312. Mais en 1330, Édouard III relègue sa mère au château de Norfolk et fait exécuter Mortimer. Il s'affirme très vite comme un souverain énergique, aux antipodes de son père.
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RUAULT (12-03-2018 19:02:40)
La loi salique interdisait aux femmes de régner (interprétation extensive car dans le texte initial il n'est question que de l'interdiction d'hériter de terres).L'expression "faire le pont et la pl... Lire la suite
Max (04-01-2017 08:49:56)
Bonjour.
Quelqu'un pourrait-il expliciter cet énigmatique «femme ne peut servir de pont et de planche» !
Merci.