Saint Martin est inhumé à Tours en grande pompe le 11 novembre 397.
Né vers 316 à Sabaria, en Pannonie (aujourd'hui Szombathely, en Hongrie), l'évangélisateur des Gaules s'est acquis une stature exceptionnelle au terme d'une vie agitée, tissée de grands voyages à travers toute l'Europe. Il nous est surtout connu par le récit de l'un de ses disciples, Sulpice-Sévère.
Sa longue existence se déroule entre les règnes de Constantin et de Théodose. Sous le règne du premier prennent fin les persécutions contre les chrétiens. Les empereurs eux-mêmes deviennent chrétiens mais la nouvelle religion est encore très minoritaire dans l'empire romain et confinée aux villes. Sous le règne du second, en 380, le christianisme devient la seule religion autorisée dans l'empire et c'est au tour des païens de subir les persécutions.
La fête de la Saint Martin, le 11 novembre, est demeurée très populaire jusqu'à la Révolution, en France mais aussi dans le reste de la chrétienté occidentale. C'est ainsi que le 11 novembre, l'on dansait et chantait nuit et jour ! La Saint Martin était aussi l'occasion de faire bombance avant le jeûne de l'Avent, c'est-à-dire de la période précédant Noël (ledit jeûne est tombé en désuétude, l'Église n'ayant conservé que le jeûne du Carême, avant Pâques). On savourait alors une oie grasse de sorte que l'expression : « faire la Saint-Martin » est devenue synonyme de bonne chère. On buvait aussi, sans trop de retenue, le « vin de la Saint-Martin », un vin de vendange tardive.
Une pieuse légende raconte que, lorsqu'on transféra la dépouille du saint de Candes à Tours, les buissons se mirent à refleurir à son passage le long de la Loire ! Ce miracle serait à l'origine de l'été de la Saint-Martin, un redoux en fait occasionné par des vents du sud-ouest qui touchent la France autour du 11 novembre, fête de la Saint Martin. De l'autre côté de l'Atlantique, des phénomènes météorologiques différents occasionnent aussi un bref redoux à l'automne. C'est l'été indien. Au Québec, ce phénomène survient aux alentours de la fête de l'Action de grâces (second lundi d'octobre). Notons encore que c'est en référence à Saint Martin qu'en novembre 1918, à l'instigation du général Foch, les négociateurs français auraient choisi de fixer au 11 novembre la date de l'armistice (de préférence au 9 ou 10 novembre).
À l'occasion de son 1700e anniversaire (2016), saint Martin a retrouvé une nouvelle jeunesse.
Autour de Tours sont rouverts les anciens chemins qu'il a empruntés, vers l'ouest, comme vers la Germanie, l'Italie ou les régions danubiennes. Ils permettent de redécouvrir un patrimoine architectural, artistique et spirituel commun à toute l'Europe.
Pour le Conseil de l'Europe, cette renaissance de saint Martin, le centurion qui offrit la moitié de son manteau à un mendiant, est aussi l'occasion de magnifier le partage, une valeur universelle qui transcende les religions...
L'évangélisateur des campagnes
Fils d'un tribun romain originaire du bassin du Danube, Martin est enrôlé malgré lui dans la légion à 15 ans sans se départir d'une attirance pour le christianisme et la vie religieuse.
Devenu centurion, après une vingtaine d'années de service militaire, il entre en catéchuménat, autrement dit se prépare à recevoir le baptême.
Sa réputation de charité ne connaît pas de bornes. En garnison à Amiens, un jour d'hiver, il est ému par la rencontre d'un mendiant transi de froid. À défaut de mieux, il lui donne la doublure en peau de son manteau.
Le manteau proprement dit - une belle pièce de laine pourpre appelée chlamyde - est payé par l'armée et Martin considère qu'il n'a pas le droit de donner cette partie qui appartient à l'État.
La nuit suivante, le Christ lui apparaît en songe, revêtu du vêtement. Troublé, Martin se fait baptiser sans attendre.
En 356, à Worms (Germanie), il peut enfin se libérer de ses obligations militaires et se rend à Poitiers, auprès du très renommé évêque Hilaire. Ce Gallo-Romain très cultivé est l'auteur de nombreux ouvrages de théologie réputés. Il est aussi sans doute à l'origine de la construction du baptistère Saint-Jean, l'un des plus vieux édifices chrétiens de France.
Pendant un exil forcé de l'évêque en Orient, Martin se rend en Pannonie en vue de convertir ses parents. Sa mère seule consent à recevoir le baptême. Sur le chemin du retour, il évangélise les campagnes d'Illyrie.
Puis il s'établit comme ermite au sud de Poitiers, à Ligugé, en un lieu anciennement dédié au dieu gaulois comme l'indique son nom. Dans une villa gallo-romaine cédée par Hilaire, Martin fonde le premier monastère d'Occident. Il est toujours en activité sous le nom d'abbaye Saint-Martin de Ligugé.
C'est le début de la renommée. Les pèlerins en quête de réconfort ou de guérison se pressent pour recevoir la bénédiction de Martin... Après la mort de son protecteur Hilaire, les habitants de la ville voisine de Tours l'élisent contre son gré évêque de leur ville. L'élection se déroule le 4 juillet 371.
Malgré ses nouvelles obligations, Martin reste fidèle à l'idéal monastique. Il fonde le monastère de Marmoutier, aux portes de Tours, sur les bords de la Loire. De là partiront de nombreux missionnaires. L'évêque lui-même continue de sillonner les campagnes gauloises et occidentales. Partout où il passe, il détruit les oratoires païens, fonde à leur place des églises, les confie à un prêtre et regroupe autour de lui les habitants des environs, non sans les avoir au préalable baptisés ! Ainsi naissent les nouvelles paroisses, à l'origine du tissu rural médiéval.
Saint patron de la France
Très âgé, Martin s'éteint le 8 novembre 397 à Candes, au confluent de la Loire et de la Vienne, en aval de Tours, où il s'était rendu pour ramener la paix entre les moines du lieu. La chronique lui prête cette ultime prière : « Si je suis encore nécessaire à Votre peuple, Seigneur, je ne refuse pas le travail. Cependant, que Votre volonté soit faite ». En signe d'humilité, il se couche sur un lit de cendres et c'est là-dessus qu'il meurt.
Une délégation de Tours se rend à Candes en gabarre (le bateau traditionnel à fond plat de la Loire) afin de ramener le saint dans sa bonne ville. On raconte que les Tourangeaux auraient volé le corps en le passant par une fenêtre ! Cette anecdote est figurée sur un vitrail de l'église locale.
Une pieuse légende raconte que, le long de la Loire, au passage de la dépouille du saint, de Candes à Tours, les buissons se mirent à refleurir ! Ce miracle serait à l'origine de l'été de la Saint-Martin, un redoux en fait occasionné par des vents du sud-ouest autour du 11 novembre, fête de la Saint Martin.
Fiers de leur bon coup, les Tourangeaux inhument leur saint évêque dans le cimetière chrétien de leur ville. Un siècle plus tard, une basilique est édifié sur l'emplacement du tombeau. Clovis vient s'y recueillir avant sa conversion et fait de Martin le saint patron de la monarchie franque.
Le tombeau, lieu de pèlerinage couru de tout le pays, va faire la fortune de ses habitants... et attiser la convoitise des pillards (c'est ainsi qu'une troupe de musulmans venus d'Espagne tentera en 732 une razzia sur la ville mais sera arrêtée entre Poitiers et Tours par les Francs de Charles Martel).
Jusqu'aux alentours de l'An Mil, ce sera le troisième pèlerinage d'Occident en concurrence avec Rome et Jérusalem, avant d'être détrôné par Saint-Jacques de Compostelle.
La ville de Tours abrite la moitié de manteau qui a fait la célébrité de saint Martin. Ce manteau ou chape (en latin, capa) a été conservé précieusement dans un sanctuaire qui a pris en conséquence le nom de capella. De ce mot, on a fait le mot chapelle qui désigne une petite église ou une pièce attenant à une nef d'église et contenant elle-même un autel.
Saint Martin a fortement contribué à la diffusion du christianisme en Gaule. En témoignage de son influence, 485 lieux (villes ou villages) portent son nom en France ainsi que 3675 lieux de culte ! Son patronyme est aussi le plus répandu dans le pays.
La fête de la Saint-Martin, célébrée le 11 novembre, est demeurée très populaire jusqu'à la Révolution, en France mais aussi dans le reste de la chrétienté occidentale ! La Saint Martin était aussi l'occasion de faire bombance avant le jeûne de l'Avent, c'est-à-dire de la période précédant Noël (ledit jeûne est tombé en désuétude, l'Église n'ayant conservé que le jeûne du Carême, avant Pâques). On savourait alors une oie grasse de sorte que l'expression : « faire la Saint-Martin » est devenue synonyme de bonne chère. On buvait aussi, sans trop de retenue, le « vin de la Saint-Martin », un vin de vendange tardive.
Notons que, par un heureux hasard, les négociateurs de l'Armistice de 1918 ont fixé celui-ci à la onzième heure du onzième jour du onzième mois de l'année, soit le jour de la Saint-Martin, fête très populaire tant en France qu'en Allemagne.
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HORATIO (13-11-2017 17:00:36)
"...les négociateurs français auraient choisi de fixer au 11 novembre la date de l'armistice (de préférence au 9 ou 10 novembre)." Si cela est vrai, qu'est-ce que ces 2 ou 3 jours de combats supp... Lire la suite
HORATIO (13-11-2017 16:50:16)
À Hervé Camier (11-11-2013 08:04:12); Votre opinion, de savoir qui a converti qui à Nicée en 325, mérite un certain développement, sinon un développement certain ! Je suppose que la manie de ... Lire la suite
Hervé Camier (11-11-2013 08:04:12)
Au concile de Nicée (325) ce n'est pas Constantin qui s'est converti au Christ, c'est l'Église qui s'est convertie à Constantin. Écrivez-moi