Aquitaine

Balade autour de Castillon-la-Bataille

La guerre de Cent Ans a pris fin en 1453 à Castillon, sur les bords de la Dordogne.

Chaque été, depuis 30 ans, ce village du vignoble bordelais commémore l'événement avec un spectacle grandiose et chaleureux. C'est l'occasion de découvrir en une ou deux journées paisibles une région riche en patrimoine culturel et en agréments de toutes sortes.

Riches terroirs

La Gironde, autrement dit le Bordelais, a de tout temps séduit les hommes par son climat et ses paysages de collines, bois et vignobles.

Trois écrivains de premier plan l'ont illustrée : Michel de Montaigne, qui a écrit et est mort à un jet de pierre de Castillon, Charles de Montesquieu, qui a vécu plus au sud, à la Brède, et François Mauriac, dont la résidence estivale de Malagar domine l'Entre-Deux-Mers, entre Garonne et Dordogne.

La grande réputation du vignoble, qui remonte à l'époque romaine, a fait la richesse de la région... Si l'Aquitaine (ou Guyenne) a engendré d'illustres troubadours, tels Bertrand de Born et Guillaume IX, aïeul de la duchesse Aliénor, sans doute le vin y est-il pour quelque chose !...

André Larané
Le château de Duras

Nous entamons notre approche de Castillon-la-Bataille par Duras, en bordure de l'ancien duché de Guyenne. Cette ancienne forteresse médiévale domine la pittoresque vallée du Dropt, un affluent de la Garonne. Elle a été construite par le pape Clément V, Bertrand de Got, pour son neveu. Disputé entre les Anglais et les Français pendant la guerre de Cent Ans, Duras est érigé en duché par Louis XIV et sa sombre forteresse transformée en agréable demeure aristocratique.

Outre un panorama superbe, la visite du château réserve de belles surprises : la fastueuse salle «des Trois Maréchaux» (Jacques-Henri de Durfort, premier duc de Duras en 1689, son fils Jean-Baptiste et son petit-fils Emmanuel), la charpente en nef de navire, le musée des traditions rurales...

Notons qu'une écrivaine, Marguerite Donnadieu, écrivit à Duras son premier roman, Les Impudents, et par amour pour la beauté du site, lui emprunta son nom, sous lequel elle demeure dans le panthéon des lettres : Marguerite Duras (1914-1996).

L'abbaye de Saint-Ferme

Le petit village de Saint-Ferme est dominé par une église abbatiale et les derniers vestiges d'une abbaye bénédictine construite ici, au XIIe siècle, sur l'un des chemins du pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle.

Le village de Castelmoron-d'Albret

Voici la plus petite commune de France. À peine trois hectares. Le village a conservé le plan fortifié d'origine et la plupart de ses maisons médiévales. Aujourd'hui restauré, c'est un lieu touristique très animé.

Le nom double du village rappelle à la fois son caractère défensif (c'était une ancienne sénéchaussée, qui exerçait la justice royale sur les environs) et ses anciens seigneurs, la famille d'Albret (d'après le nom de son village d'origine, dans le Lot-et-Garonne voisin).

L'Histoire retient en particulier le nom de Jeanne d'Albret, mère du roi Henri IV.

La bastide de Sauveterre-de-Guyenne

Sauveterre-de-Guyenne, comme l'indique son nom, est une ancienne bastide anglaise. C'est une cité franche, autrement dit une «terre sauve» [de droits seigneuriaux]. Elle appartient à l'ancien duché de Guyenne (altération phonétique d'Aquitaine), constitué en 1259 par le traité de Paris. Elle a été fondée peu après, en 1281, à l'initiative du roi anglais Édouard 1er, pour protéger le duché contre les incursions françaises.

Comme toutes les bastides créées dans le sud-ouest, à cette époque-là, tant du côté anglais que du côté français, pour défendre la frontière, Sauveterre-de-Guyenne présente un plan géométrique, avec des maisons enserrées dans de solides fortifications, qui ne ménagent que quatre grandes portes. Au centre du village, une grande place rectangulaire bordée de maisons à arcades sert aux marchés et surtout (c'est sa vocation première) aux manoeuvres militaires.

L'abbaye de Blasimon

Sur la route qui descend vers la Dordogne, on peut voir, dans un cadre de verdure romantique, les vestiges de l'abbaye de Blasimon.

Cette ancienne dépendance de l'abbaye cistercienne de La Sauve-Majeure, fondée en 721 et restaurée en 980, a conservé de son riche passé un clocher-mur, un portail de la transition romano-gothique, l'un des plus beaux d'Aquitaine (1160-1170), et quelques beaux chapiteaux ouvrés.

On peut voir de part et d'autre une chasse au sanglier et une chasse au cerf ainsi que les vertus théologales : foi, espérance, charité... Peu à peu délaissée après les guerres de religion, l'abbatiale a fermé ses portes en 1770. Elle vient d'être joliment restaurée.

 

L'abbaye de La Sauve-Majeure

Au coeur du village de La Sauve, dans l'Entre-deux-Mers, des ruines imposantes témoignent du prestigieux passé de cette abbaye bénédictine.

Appelée Grande Sauve ou Sauve-Majeure (du latin médiéval silvamajor, qui signifie grande forêt) (grande forêt), elle a été fondée en 1079, dans une grande période d'effervescence religieuse, par saint Gérard de Cordie, avec le soutien du duc d'Aquitaine.

L'abbaye prospère rapidement du fait de sa situation sur l'un des grands chemins de Saint-Jacques de Compostelle et compte jusqu'à 300 moines.

La Sauve-Majeure conserve de superbes chapiteaux romans, décorés de sujets bibliques ou de motifs végétaux.

On a la chance de pouvoir ici les détailler car ils se tiennent sur des colonnes de faible hauteur. Ils témoignent admirablement de l'art du XIIe siècle.

On reconnaît ci-contre une évocation du prophète Daniel dans la fosse aux lions.

Le château de Rauzan

Sur son rocher, la forteresse de Rauzan rappelle l'époque où l'Aquitaine était anglaise. Partie intégrante de la ligne de fortifications qui défendait l'Aquitaine des Plantagenêt contre les empiètements du roi de France, elle a été édifiée par le triste roi Jean sans Terre et considérablement renforcée en 1305, jusqu'à abriter 5 000 hommes d'armes. 

Rauzan a été enlevé aux Anglais beaucoup plus tard, en 1377, par le connétable Bertrand du Guesclin. En partie ruiné, le château conserve de très beaux restes qui soulignent sa puissance. À noter la possibilité de visiter dans le village, sous le rocher, une curieuse grotte découverte au XIXe siècle, la grotte Célestine.

La cité de Saint-Émilion

Le nom de Saint-Émilion est connu dans le monde entier. Il est associé en effet à l'un des meilleurs crus du Bordelais, du moins depuis le XIXe siècle, qui a vu se développer les transports longue distance et permis aux exploitants agricoles de se spécialiser. Auparavant, le terroir était encore voué à la polyculture et le village tirait une grande partie de ses revenus de l'exploitation du calcaire de son sous-sol.

Mais Saint-Émilion n'est pas seulement un vin. C'est aussi l'un des plus beaux villages de France. Étagé sur un éperon rocher, il nécessite pour la visite de bonnes chaussures. Les talons pointus sont formellement déconseillés ! De la place supérieure, on bénéficie d'une vue d'une beauté inexprimable sur les toits en tuiles du village, le sombre donjon voisin et le vignoble alentours.

Sur la place en contrebas, on peut visiter la grotte où aurait vécu l'ermite éponyme Saint Émilion jusqu'à sa mort en 767. À côté se visite aussi l'église monolithe ou troglodythe (elle est creusée dans le rocher) creusée dans le plateau à l'initiative du seigneur Pierre de Castillon. Revenu de croisade au XIIe siècle, il aurait souhaité reproduire les églises de Cappadoce. D'une taille impressionnante mais austère, voire sinistre, la nef a servi pendant la Seconde Guerre mondiale de remise pour les verrières des grandes cathédrales gothiques, ainsi protégées contre d'éventuels bombardements. Pour le côté artistique, on préfèrera la collégiale gothique (ci-contre).

Castillon-la-Bataille

Castillon-sur-Dordogne (devenu Castillon-la-bataille en 1953, tourisme oblige) est, comme son nom l'indique, une ancienne cité fortifiée dont la première mention remonte à l'époque carolingienne. Mais des fouilles archéologiques, sur la commune voisine de Mouliets-et-Villemartin, sur la rive opposée de la Dordogne, attestent aussi de la présence d'un village gaulois et gallo-romain important.

Tiraillé entre Anglais et Français au temps de la guerre de Cent Ans, puis entre protestants et catholiques au temps des guerres de religion, le village tombe dans l'escarcelle d'Henri de la Tour d'Auvergne, vicomte de Turenne et de Castillon (et père du célébrissime maréchal de Turenne). Celui-ci fait raser le château en 1622 sur ordre de Louis XIII.

Il fait également  construire un hospice pour ses vieux soldats, au-dessus de la Dordogne, selon un plan circulaire très original qui rappelle la Renaissance italienne. Ce bâtiment aux lignes élégantes abrite aujourd'hui l'hôtel de ville.

Au XVIIIe siècle, en 1741, son fils fait reconstruire l'église Saint-Symphorien au bord de l'ancien fossé de la ville médiévale, aujourd'hui converti en allées plantées. Il affecte au chantier un legs de son père primitivement destiné au «soulagement des pauvres qui se convertiraient à la religion catholique». 

Le village (3.000 habitants) protège tant bien que mal son patrimoine architectural contre des ennemis tout aussi radicaux que les armées féodales : voies pénétrantes et parkings, lotissements sauvages, grandes surfaces... On y célèbre, outre les vertus du vin, celles de l'entrecôte à la bordelaise, de l'alose (un ragoût de poissons de la Dordogne) et des civelles (jeunes anguilles).

Canoë sur la rivière «Espérance»

De Castillon, on peut remonter en bicyclette la rive droite de la Dordogne, l'un des plus beaux cours d'eau français, pour découvrir une colonne érigée en hommage à John Talbot, le général anglais mort le 17 juillet 1453 ; on peut aussi se promener sur la rive gauche, jusqu'à Flaujeagues et au-delà, dans un décor de rêve.

Le Rowing-Club de Castillon, célèbre entre tous dans le milieu de l'aviron, loue des canoës pour la descente de la rivière en famille au départ de Flaujeagues, Pessac ou Lamothe-Montravel jusqu'au pont de pierre de Castillon. Il organise aussi une grande régate inter-associations le 24 août 2008.

La tour de Montaigne

Montaigne (1533-1592) est né et est mort dans son château familial, au milieu de collines et de bois, à un jet de pierre de Castillon.

Il ne subsiste de sa demeure qu'une tour, avec sa chambre, sa chapelle et la fameuse «librairie», en fait le bureau-bibliothèque où il a écrit l'oeuvre qui l'a rendu immortel : les Essais. On peut encore y voir les devises latines qu'il a fait peindre ou graver sur le plafond.

Michel Eyquem de Montaigne a mené une vie active de gentilhomme, comme maire de Bordeaux, diplomate et conseiller du roi, avant de se retirer en 1572 «dans le sein des doctes vierges», autrement dit d'écrire et de réfléchir !

Publié en 1580, pendant les guerres de religion, la première édition de son recueil de jugements personnels sur la vie et sur soi a acquis immédiatement un tel succès qu'il a servi depuis lors à dénommer tous les ouvrages du même genre (essais).

Le château de Castegens

Le château de Castegens surplombe le site sur lequel se déroule chaque année la reconstitution de la bataille de Castillon. Cette belle résidence est aussi un château viticole réputé du vignoble des Côtes de Castillon, lequel supporte la concurrence avec son voisin (Saint-Émilion).

Publié ou mis à jour le : 2021-07-07 17:49:38
chapard claude btE1 la rouvier (22-07-2008 10:53:53)

Superbe découverte de cette région. Dieu que la France est belle quand on sait regarder. Encore merci.

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