L'armée allemande franchit la frontière polonaise le 1er septembre 1939 sur ordre de Hitler. Pour l'opinion mondiale, il ne fait guère de doute que cette agression sans déclaration de guerre préalable marque le début de la Seconde Guerre mondiale.
De fait, deux jours après, le 3 septembre 1939, le Premier ministre britannique Neville Chamberlain se résigne à déclarer la guerre à l'Allemagne. Il est suivi quelques heures après par le Président du Conseil français Édouard Daladier. L'un et l'autre assument l'échec cuisant de leur politique de temporisation (appeasement en anglais) amorcée à Munich un an plus tôt...
La montée des tensions
Hitler a brutalement occupé Prague et annexé la Bohême-Moravie le 15 mars 1939, peu après les accords de Munich.
Fort de ses premiers succès sur la scène internationale, il a aussitôt commencé à émettre des revendications sur Dantzig (Gdansk en polonais), dont la population est majoritairement allemande. Il s'agit d'une « ville libre » instaurée par le traité de Versailles de 1919 pour ménager à la Pologne un accès portuaire sur la mer Baltique. À côté de Dantzig, la Pologne bénéficie aussi d'un étroit « corridor » qui lui offre une ouverture directe sur la mer et à l'extrémité duquel elle a créé le port de Gdynia. Ce corridor a l'inconvénient de séparer la Prusse orientale (et Dantzig) du reste de l'Allemagne.
Dès le 31 mars 1939, le Premier ministre britannique Neville Chamberlain a proclamé son soutien à la Pologne. Le 6 avril suivant, il a conclu avec elle un traité d'assistance pour garantir son intégrité territoriale. De son côté, le chef d'état-major français Maurice Gamelin a rassuré le 13 avril 1939 ses homologues polonais sur la détermination de la France à les aider de tout son poids... Pour Londres comme pour Paris, il n'est plus question de reculer face à Hitler comme à Munich à propos de la question sudète.
Qu'à cela ne tienne, le 27 avril, Hitler adresse un mémorandum à la Pologne par lequel il réclame la cession de Dantzig et des droits d'extraterritorialité à travers le « corridor de Dantzig ».
Le tout-puissant ministre des affaires étrangères polonais, le colonel Jozef Beck, s'oppose à ces revendications, bien qu'il se soit, à l'automne précédent, associé à l'Allemagne dans la curée de la Tchécoslovaquie en annexant la ville de Teschen, et pratique une politique ultranationaliste et antisémite.
Déclenchement de la Seconde Guerre mondiale
L'affaire s'enlise jusqu'à la fin de l'été 1939. Enfin, coupant court aux négociations sur le « corridor de Dantzig », le Führer prend prétexte d'une prétendue attaque polonaise survenue dans la nuit sur la frontière orientale de l'Allemagne pour attaquer son voisin sans s'embarrasser d'une déclaration de guerre. En fait d'attaque, il s'agit d'une macabre machination montée par l'armée allemande avec des cadavres de détenus revêtus d'uniformes polonais.
L'Angleterre se résigne à déclarer la guerre à l'Allemagne le 3 septembre après avoir jusqu'au dernier moment espéré une paix de compromis. Mais pendant les mois qui suivent, les deux alliés restent l'arme au pied, derrière la ligne Maginot, un ensemble de fortifications qui protègent la France sur sa frontière avec l'Allemagne...
Londres ne peut faire moins que d'envoyer un ultimatum à Berlin en suggérant une ultime conférence internationale ! Hitler dédaignant de répondre, la guerre est de facto déclarée à l'expiration de l'ultimatum, le 3 septembre à 11 heures. Le Président du Conseil français Édouard Daladier et son ministre des affaires étrangères Georges Bonnet demandent au président de la République Albert Lebrun de déclarer à son tour la guerre au nom des engagements internationaux de la France (et sans consulter le Parlement). C'est chose faite à 17h.
L'armée française lance pour la forme une dérisoire offensive sur quelques kilomètres en Sarre. Après cela, les troupes franco-anglaises, sous le commandement du général Maurice Gamelin (68 ans), ancien vainqueur de la Marne aux côtés de Joffre, prennent leurs quartiers d'hiver derrière la ligne Maginot ! Elles ne profitent hélas pas de ce que le front occidental est dégarni, la Wehrmacht étant presque toute entière occupée à envahir la Pologne.
Au grand désespoir des Polonais, les soldats français et anglais se tiennent l'arme au pied devant la « ligne Siegfried », le pendant allemand de la ligne Maginot.
Pendant de longs mois, ces soldats vont traîner leur ennui, entre parties de cartes et saoûleries, empêchés de se battre comme de retrouver leur famille... C'est la « drôle de guerre », d'après une expression de Roland Dorgelès (Sitzkrieg en allemand ; Phoney War ou « guerre factice » en anglais). Elle prendra fin dans des conditions tragiques le 10 mai 1940 avec l'invasion allemande.
À l'Est, la première « guerre éclair »
Pendant ce temps, les bombardiers allemands clouent au sol l'aviation polonaise et détruisent les infrastructures, ponts, casernes et gares, entravant ainsi la mobilisation de l'armée polonaise, réputée être la cinquième d'Europe. La moitié de ses 42 divisions sont empêchées d'atteindre le front !
Présumant de ses forces, le maréchal Rydz-Smigly, inspecteur général de l'armée polonaise, concentre ses troupes à l'entrée du corridor de Dantzig en vue d'une marche sur Berlin ! Il escompte qu'à la frontière nord et sud, les marais et les crêtes suffiront à arrêter les troupes allemandes.
Or, c'est précisément à ces endroits-là que la Wehrmacht va porter ses efforts en s'appuyant sur ses divisions blindées, les fameuses Panzerdivisionen. Par une percée au nord à partir de la Prusse orientale et au sud à partir de la Slovaquie et de la Silésie, elle prend l'armée polonaise en tenaille.
Elle enfonce le front par des attaques combinées des chars et de l'aviation, celle-ci procédant à des attaques en piqué avec ses stukas au sinistre sifflement. Cette « guerre éclair » d'un nouveau style stupéfie les stratèges européens mais ceux-ci négligent d'en tirer les leçons... Ils seront tout autant surpris quelques mois plus tard, quand Hitler emploiera la même stratégie dans son offensive contre la France, la Hollande et la Belgique !
Le coup de grâce
Dès le 14 septembre 1939, la IIIe armée allemande de von Küchler, venue du nord, rejoint à l'est de Varsovie la Xe armée de von Reichenau venue de Silésie. La capitale polonaise est dès lors assiégée. Le sort de la guerre est joué.
Trois jours plus tard, l'Armée rouge de Staline s'invite au festin sans s'embarrasser non plus d'une déclaration de guerre. Elle pénètre en Pologne orientale en vertu du pacte de non-agression conclu avec Hitler le 24 août précédent et qui prévoit un partage du malheureux pays. Le gouvernement polonais se réfugie en Roumanie et Varsovie capitule le 27 septembre après une courte mais héroïque résistance.
La Pologne est le même jour partagée entre les deux larrons conformément à leur accord secret. Tandis que l'ouest revient à l'Allemagne, l'Union soviétique annexe la partie orientale et reporte sa frontière sur la « ligne Curzon », du nom de lord Curzon, secrétaire du Foreign Office britannique qui, en 1919, dans la foulée du traité de Versailles, avait dessiné les frontières de la Pologne reconstituée. Les Polonais, victorieux de la Russie bolchévique en 1920, avaient imprudemment reporté à l'est leur frontière. Staline rétablit donc en 1939 la ligne Curzon et c'est toujours celle-ci qui marque la limite orientale de la Pologne.
La guerre devient générale
Dans la foulée de leur victoire sur la Pologne, Hitler attaque le Danemark et la Norvège et Staline la Finlande. En dépit d'une résistance héroïque, cette dernière doit finalement se soumettre comme les autres pays et signer un armistice le 12 mars 1940. Déçus par la Finlande, les Français et les Anglais le sont aussi par la Norvège. Dans ce pays, leur corps expéditionnaire doit en mars 1940 se replier en catastrophe et laisser aux nazis le contrôle du pays ainsi que l'accès aux très riches mines de fer de Suède.
Ces premiers échecs causent la chute des deux chefs de gouvernement temporisateurs, qui furent aussi les signataires des accords de Munich. Le Français Édouard Daladier est remplacé par Paul Reynaud le 21 mars. Une semaine plus tard, celui-ci signe avec le Premier ministre britannique Neville Chamberlain un engagement mutuel à ne pas conclure d'armistice ou de traité de paix séparé.
Le 10 mai 1940, le Führer met fin à la « drôle de guerre » sur le front occidental en envahissant la Belgique. Le même jour, en soirée, Winston Churchill succède à Chamberlain au 10, Downing Street avec la ferme volonté de résister au nazisme et de le vaincre...
Vos réactions à cet article
Recommander cet article
Hugues Marie (01-09-2024 11:19:10)
L'Histoire, est toujours écrite par les vainqueurs, c'est la règle. Pour autant, certains s'arrangent avec l'histoire, pour donner davantage de crédibilité, à icelle. Ainsi, nous pouvons lire ail... Lire la suite
yann (17-11-2007 18:23:15)
Je viens de voir sur France3 un documentaire "Angers, capitale de la Pologne". Je ne connaissais pas cet épisode de la drôle de guerre. Je n'ai rien trouvé sur Herodote.net sur ces mois qui m'ont b... Lire la suite