Le 11 novembre 1417, à Constance, un concile met fin au Grand Schisme d'Occident, vieux de près de quarante ans.
Consécutif à l'exil de la papauté à Avignon, ce conflit de personnes au sein de la haute hiérarchie de l'Église catholique a affaibli celle-ci. Il a permis l'émergence de mouvements contestataires et, à plus long terme, de la Réforme protestante.
La crise de la chrétienté médiévale avait débuté avec l'installation du pape Clément V à Avignon en 1309. Il ne devait s'agir que d'un exil provisoire motivé par les troubles civils qui endeuillaient Rome. Mais le pape, un Français du Midi, s'installe durablement dans sa nouvelle résidence, avec les encouragements du puissant roi de France.
Humiliée par Philippe le Bel quelques années plus tôt, la papauté, il est vrai, n'a plus les moyens de défier les souverains comme autrefois, du temps du combat contre l'empereur allemand pour imposer le règne de Dieu sur terre.
Avignon connaît ses plus grands fastes sous le pontificat de Clément VI (1342-1352), un moine de la Chaise-Dieu. Dans le même temps débute la guerre de Cent Ans et survient la Grande Peste. Autant de malheurs que les contemporains ne se font pas faute de présenter comme une punition divine à l'égard du Saint-Siège.
En 1367, Urbain V, ancien abbé de Saint-Victor, à Marseille, se décide à revenir à Rome mais son administration reste à Avignon. C'est seulement en 1377 que son successeur, Grégoire XI, met un terme définitif à la « captivité de Babylone », sur les recommandations pressantes d'une jeune dominicaine mystique, sainte Catherine de Sienne
Grégoire XI meurt le 27 mars 1378, peu après son pénible voyage de retour à Rome.
Seize cardinaux s'enferment en avril 1378 pour élire le nouveau titulaire de la chaire de Saint Pierre. Le conclave ne tarde pas à se diviser en trois clans : les Français du nord, ceux du Midi et les Italiens. C'est finalement la populace de Rome qui a le dernier mot. Elle enfonce les portes du conclave et sa colère n'est désarmée que par l'élection à la quasi-unanimité (15 voix sur 16) d'un Italien de 60 ans qui devient pape sous le nom d'Urbain VI. Excessif, sinon déséquilibré, il soulève immédiatement contre lui la plupart des cardinaux.
Le roi de France Charles V conteste les conditions de l'élection et treize cardinaux, essentiellement français, se réunissent à Anagni, au sud de Rome, pour élire un nouveau pape, Robert de Genève, qui prend le nom de Clément VII et s'en retourne derechef à Avignon.
L'Europe se divise entre « urbanistes » et « clémentistes ». C'est le début du « Grand Schisme ». Notons qu'il ne touche pas au dogme et laisse indifférents la plupart des catholiques, qui n'ont en matière de religion d'autre interlocuteur que leur curé.
Les divisions au sein du Saint-Siège ne vont cesser de s'aggraver dans les années suivantes.
Or, la papauté en lambeaux doit faire face au renouveau des hérésies et à la contestation d'illustres théologiens. L'Anglais John Wyclif et le Tchèque Jan Hus appellent à une réforme de l'Église et à un retour aux commandements de l'Évangile.
La restauration de l'autorité pontificale se fait pressante. La France, principale puissance de l'époque, serait susceptible d'y contribuer mais elle est ravagée par la querelle des Armagnacs et des Bourguignons et bien incapable d'agir.
Il faut attendre 1415 pour que l'empereur allemand Sigismond, excédé, impose enfin la réunion d'un concile sur les bords du lac de Constance. Pas moins de 70 000 personnes se déplacent pour l'occasion.
À Constance, le collège des cardinaux révoque les trois papes du moment et en élit un et un seul. Celui-ci, Oddone Colonna, appartient à la noblesse romaine. Comme il n'est pas encore prêtre, on répare cet oubli en lui conférant hâtivement le sacrement de l'ordination. Prenant le nom de Martin V, le nouveau pape s'établit définitivement à Rome. Son élection, le 11 novembre 1417, met pratiquement fin au Grand Schisme.
Un nouveau concile se réunit à Bâle le 3 mars 1431, à l'initiative du nouveau pape en vue de réformer l'Église, voire de réunir les Églises d'Orient et d'Occident, les orthodoxes et les catholiques. Malheureusement, cette réforme ne viendra pas car le pape Eugène IV, successeur de Martin V, n'en a cure et dissout le concile.
Notons que certains pères conciliaires s'insurgent contre cette décision. Ils se transportent à Constance, où ils élisent à la papauté le duc Amédée VIII de Savoie. Le dernier des anti-papes prend le nom de Félix V. La chrétienté voit resurgir le spectre du schisme. Heureusement, celui-ci n'a guère de soutiens et le bon Félix V finit par se défaire de son autorité entre les mains du pape Nicolas V.
C'en est bien fini des papes et des anti-papes qui se sont entredéchirés pendant un demi-siècle, entre Rome et Avignon. Il n'empêche que le mal a été fait. La révolution religieuse en germe dans l'Empire allemand triomphera un siècle plus tard avec Martin Luther.
En attendant, en publiant le 7 juillet 1438 la « Pragmatique Sanction » de Bourges qui lui permet de choisir lui-même les évêques français et de contrôler leurs activités, le roi de France Charles VII profite de la faiblesse du Saint-Siège pour donner corps au « gallicanisme » : au pape ce qui relève de la foi ; au clergé français et à son souverain ce qui relève de l'administration de l'Église française.
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