Le programme de cinquième invite, comme le programme de sixième, à sortir de l'Europe pour étudier des civilisations lointaines, cette fois-ci en Afrique.
Au début de l'année, les élèves de cinquième ont étudié le chapitre consacré aux « débuts de l'Islam » : ils ont entraperçu les contacts que la civilisation arabo-musulmane entretient avec l'Europe et aussi avec les peuples d'Afrique.
Le chapitre qui s'intitule Regards sur l'Afrique est placé tout à la fin des thématiques sur l'histoire du Moyen-Âge, mais pour le comprendre plus facilement, il faut le lire à la suite du chapitre sur les Débuts de l'Islam.
Ce chapitre sur l'histoire de l'Afrique au Moyen-âge s'articule autour de deux études :
⁃ Dans un premier temps, on aborde l'histoire de ce continent dans le «temps long». On étudie, entre le VIIIe et le XVIe siècle, une civilisation parmi quatre proposées dans le programme : l'empire du Ghana (VIIIe – XIIe siècle) ; l'empire du Mali (XIIIe – XIVe siècle) ; l'empire Songhaï (XIIe – XVIe siècle) ; l'empire du Monomotapa (XVe – XVIe siècle).
⁃ Dans un second temps, on étudie un circuit de trafic des esclaves noirs vers l'Afrique du Nord ou l'Orient (c'est à dire l'Asie).
Afin de contenter tous les lecteurs de cet article, il sera d'abord proposé l'étude des quatre civilisations possibles, et ensuite, il sera évoqué le trafic des esclaves noirs au Moyen Âge.
III] Regards sur l'Afrique
I – Quelques grandes civilisations de l'Afrique subsaharienne entre le VIIIe et le XVIe siècle :
Avant de commencer l'étude des civilisation, il faut tout d'abord définir ce qu'est «l'Afrique subsaharienne» : en géographie, c'est la partie de l'Afrique qui se situe au sud d'un grand désert chaud et sec, le Sahara. L'Afrique subsaharienne est peuplée de populations très majoritairement à peau noire ou sombre, c'est aussi pourquoi on parle d' «Afrique noire», par opposition à l'Afrique du Nord, qualifiée d' «Afrique blanche», car les populations y ont la peau plus claire.
Ensuite, il faut s'interroger sur la période choisie par le programme : pourquoi étudier l'Afrique subsaharienne entre le VIIIe et le XVIe siècle ?
Le VIIIe siècle, c'est à dire à partir des années 700, correspond au début de la présence des Arabes musulmans en Afrique du Nord. Très rapidement, ces Arabes ont des contacts commerciaux avec les peuples de l'Afrique subsaharienne, nous y reviendrons.
Le XVIe siècle est ici la fin de ce chapitre d'histoire pour deux raisons. C'est d'une part la fin du Moyen-âge (datée en 1492) et d'autre part cela correspond aux grandes découvertes géographiques des Européens : ils découvrent l'Amérique (1492), et contournent pour la première fois l'Afrique par le sud (1498). Ces bouleversements vont donc alimenter de nouveaux contacts, et ouvrir une nouvelle page de l'histoire de l'Afrique.
L'empire du Ghana se situe en Afrique de l'Ouest, entre les fleuves Sénégal et Niger et à la limite du désert du Sahara. La date d'apparition de l'empire est incertaine : Ve siècle avant ou après Jésus-Christ ? Des historiens arabes penchent plutôt pour le Ve siècle après J-C. Du VIIIe au XVe siècle, les empereurs du Ghana agrandissent leur territoire. Mais la puissance du Ghana suscite la jalousie d'un roi du Maroc, qui s'empare de leur capitale Koumbi Saleh au XIe siècle. L'empire affaibli finit par être absorbé par l'empire du Mali à la fin du XIIe siècle.
Le souverain du Ghana est un chef proche de son peuple : il tient des audiences pour écouter les plaintes de ses sujets. C'est un homme riche : ses chevaux, ses boucliers, ses épées sont montés en or et ses enfants ont les cheveux tressés d'or.
C'est un chef respecté : ses ministres sont assis par terre devant lui lors des conseils, et ses sujets doivent se mettre à genoux devant lui lorsqu'ils sont reçus au palais. Enfin, c'est un chef puissant : l'historien arabe Al Bakri écrit au XIe siècle, que le souverain peut lever une armée de 200.000 hommes dont plus de 40.000 sont armés d'un arc.
Les habitants du Ghana vivent de l'agriculture au Sud de l'empire, tandis qu'au nord on pratique l'élevage. La capitale Koumbi Saleh est une plaque commerciale importante : les habitants du Ghana vendent aux marchands arabes de l'or et des esclaves, tandis que les marchands arabes apportent des métaux (cuivre, argent), des céréales, des fruits secs (dattes), des peaux et des étoffes.
La population conçoit la nature comme peuplée d’esprits invisibles. Elle vénère ceux-ci, représentés par des statuettes : c'est l'animisme. Mais au contact des marchands arabes, la religion musulmane (islam) se diffuse. D'ailleurs, l'empereur fait de l'islam la religion officielle. Cependant, une partie de la population pratique encore l'animisme.
2 – L'empire du Mali du XIIIe au XIVe siècle
L'empire du Mali se situe en Afrique de l'Ouest juste au Sud su Sahara ; il est traversé par un fleuve, le Niger. L'empire du Mali a été fondé par le souverain Soudiata Keita en 1235. C'est au départ un petit territoire autour de la ville de Niani, qui en est la capitale. Puis l'empire s'étend de la côte atlantique jusqu'aux limites du Sahara.
Au XIVe siècle, l'empire est au fait de sa puissance, puis il décline au XVe siècle après que les Songhaï ont détruit la ville de Tombouctou.
Les Maliens ont pour chef un empereur. C'est un personnage puissant et riche d'après la description du géographe Ibn Batuta au XIVe siècle : l'empereur est coiffé avec des parures en or fixées par un bandeau en or, il porte une tunique de velours rouge, et son palais est décoré par des tapisseries en soie. Ses musiciens ont des guitares en or et argent. Lorsqu'il se déplace, l'empereur est suivi par trois cents esclaves armés.
Les Maliens vivent avant tout des ressources de la terre : ils extraient l'or des mines, ils pratiquent l'agriculture, l'élevage des bovins, la chasse et la pêche. Ils ont aussi développé l'artisanat : fabrication de statuettes et de poteries. Tous ces produits sont vendus à Niani, la capitale de l'empire. Les Maliens entretiennent des relations commerciales avec les marchands arabes : les Maliens leurs vendent de l'or, de l'ivoire et des esclaves ; en échange, les marchands arabes vendent aux Maliens des tissus, des armes, des bijoux et du blé.
Comme de nombreux peuples d'Afrique, les Maliens sont animistes. Cependant, au contact des marchands musulmans, les Maliens adoptent la religion de l'islam. L'empereur du Mali demande même la construction d'une mosquée. Mais de nombreux Maliens demeurent toutefois animistes. Ces contacts expliquent pourquoi certains peuples d'Afrique pratiquent l'islam actuellement.
3 – L'empire Songhaï du XIIe au XVI e siècle
L'empire Songhaï est situé sur une grande partie de l'Afrique de l'Ouest. Entre le XIIe et le XVe siècle, c'est un royaume dominé par l'empire du Mali. Puis à partir de la fin du XVe siècle, ce petit royaume s'étend et remplace l'empire du Mali. Mais la puissance songhaï gêne le sultan du Maroc qui envahit l'empire et en fait une province marocaine à la fin du XVIe siècle.
L'empereur songhaï est un personnage autoritaire. Il exerce les pleins pouvoirs (politique, judiciaire, militaire, et religieux), mais il s'entoure de ministres pour gouverner et demande le conseil à des savants et des juristes (des hommes spécialistes du droit et de la loi). L'empereur maintient la diffusion de l'Islam.
Désormais, les échanges commerciaux avec les arabes se font à Tombouctou, qui devient la capitale intellectuelle, religieuse et commerciale de l'empire Songhaï. Une université réputée y voit le jour ; des grandes caravanes de marchands arabes traversent le Sahara pour venir acheter les produits songhaï (voir «vivre dans l'empire du Mali» pour la liste des produits échangés). À la fin du XVe siècle, l'empire Songhaï fait du commerce avec les Portugais qui installent des comptoirs sur la côte atlantique : ils échangent des chevaux contre de l'or et des esclaves.
4 – L'empire du Monomotapa du XVe au XVIe siècle
L'empire du Monomotapa se situe au Sud-Est de l'Afrique, sur l'actuel État du Zimbabwe. Cette région a été occupée dès le début du Moyen Âge car des ruines datant du Ve et VIe siècles y ont été retrouvées. Monomotapa signifie «seigneur des mines» : en effet, la puissance des souverains du Monomotapa repose au XVe siècle sur la présence de mines d'or. Cependant, plusieurs événements brisent la puissance de cet empire : à la fin du XVe siècle, le territoire se divise en plusieurs États, puis la conquête des côtes africaines au XVIe siècle par les Portugais entraîne la disparition de cette civilisation.
L'empereur du Monotapa est un chef puissant et semble t-il, inaccessible d'après ce qu'écrit l'historien guinéen Ibrahima Baba Kaké en 1991 : «Du souverain du Grand Zimbabwe, la plupart de ses sujets ne connaissent que la voix, car personne en dehors de ses intimes et de ses courtisans, ne peut le voir».
L'empereur a neuf épouses, qui ont chacune une cour. Au total, quelque 3000 femmes sont au service de la famille de l'empereur. L'empereur vit dans une cité fortifiée par des murs de dix mètres de haut, appelée Grand Zimbabwe, ce qui signifie «grande maison de pierre» et «résidence du chef».
Les habitants vivent des ressources de la terre : ils extraient l'or des mines, ils pratiquent l'agriculture, l'élevage du bétail, et des activités d'artisanat.
Ils entretiennent aussi des relations commerciales avec les marchands arabes : ils leurs vendent de l'or, de l'ivoire et des esclaves en échange de coton bleu, armes, bijoux et blé. Ces échanges commerciaux sont réalisés à Sofala, un comptoir arabe sur la côte de l'Océan Indien. Plus tard, ce sont les Portugais qui prendront le relais des Arabes.
Les habitants du Monomotapa ont des croyances religieuses animistes : des fragments de sculptures de la forteresse du Grand Zimbabwe représentent des oiseaux et des cocrodiles, qui étaient des animaux vénérés par ce peuple.
II – Le trafic des esclaves noirs en Afrique subsaharienne
Le trafic des esclaves noirs est désigné par une expression précise : «la traite négrière» ou traite des Noirs. Ce trafic est pratiqué au Moyen Âge par les Arabes musulmans pour qui l'esclavage n'est pas une pratique interdite. En revanche, les Européens ne pratiquent plus l'esclavage car l'Église chrétienne l'a fait progressivement disparaître à la fin de l'Antiquité, dans les dernières années de l'empire romain.
Les esclaves sont capturés par des cavaliers arabes dans des villages africains. Il y a aussi des prisonniers résultant des guerre entre tribus africaines et que les chefs revendent à des marchands arabes.
Les marchands arabes revendent ces esclaves à de riches personnes qui habitent en Espagne, en Afrique du Nord, en Sicile, au Proche-Orient et même en Inde. Les esclaves servent de domestiques, d'équipage sur des navires, de soldats ou travaillent dans les mines et les champs.
Les marchands arabes font le trafic d'esclaves suivant deux circuits principaux. L'un part de l'Afrique subsaharienne et aboutit à l'empire arabo-musulman : on parle alors de «traite transsaharienne» car les caravanes d'esclaves traversent le désert du Sahara. L'autre part de la côte Est de l'Afrique pour alimenter ensuite la péninsule arabique et l'Inde : on parle donc de «traite orientale» car les esclaves traversent l'Océan Indien en bateau pour être vendu dans la région du Moyen-Orient.
La traversée du désert du Sahara est un danger à lui seul : il faut entre un et trois mois, car le Sahara est immense, et c'est épuisant de marcher autant. Les points d'eau sont rares (dans les oasis). La mortalité parmi les captifs est élevée car les conditions du voyage sont horribles : le jour, la température est brûlante, et la nuit il fait froid dans le désert ; on peut être attaqué par des pillards ; on peut disparaître dans une tempête de sable...
Pour aller plus loin
Les premiers royaumes africains : [synthèse]
Amours afro-toulousaines au XVe siècle : [récit]
Fin de l'empire songhaï : [récit]
Grand Zimbabwe, mystérieuse capitale du Monomotapa : [récit]
La traite musulmane : [synthèse]
Des outils pour comprendre
Notre première animation multimédia présente la géographie du continent et son peuplement au fil des millénaires.
Dans la deuxième animation multimédia, nous montrons l'émergence des premiers royaumes et empires en Afrique subsaharienne, le développement des échanges commerciaux et l'arrivée des navigateurs européens, en l'occurence des Portugais.
Ce film de l'illustre cinéaste Jean Rouch nous présente les descendants du peuple songhai, sur les bords du Niger... [voir la vidéo]
Vérifier les connaissances
Avec quel peuple les habitants d'Afrique subsaharienne font-ils du commerce au Moyen Âge ? [réponse]
Quelles sont les croyances religieuses des habitants du Mali ? [réponse]
À quel trafic certains marchands arabes participent-ils à travers le désert du Sahara ? [réponse]
Vos réactions à cet article
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Bernard (14-03-2013 22:56:14)
Vivre dans l'empire du Mali au moyen age.
Dans la dernière phrase... accord du verbe !
Merci de rectifier.
Catherine Lefèvre (11-03-2013 21:38:26)
Bonjour, Je suis ravie qu'on enseigne l'Histoire de l'Afrique au Moyen Age ! j'ai travaillé sur ce sujet pour ma maîtrise d'Histoire à la Sorbonne (en 1971) et j'ai eu pour assistant de TD M.Ibrah... Lire la suite