L’Égypte des Mamelouks (de 1250 à 1517)
À la fin du XIIe siècle, l’Égypte est redevenue le centre du monde arabo-musulman grâce à l’impulsion de Saladin. À partir de 1250, les Mamelouks vont l’emmener vers un apogée remarquable.
Faisons le point sur la situation en 1223 : centrée sur la ville du Caire, la dynastie ayyoubide fondée par Saladin s’étend alors jusqu’aux villes de Damas et d’Alep. Malgré la reprise de Jérusalem, des États latins subsistent sur la côte. La dynastie s’affaiblit à partir de 1223 lorsque les trois fils du sultan al Adel entrent en conflit au lieu de s’allier contre leurs ennemis. Ça permet à l’empereur germanique Frédéric II de s’emparer de Jérusalem en 1229 à l’occasion de la Sixième Croisade. Ça contribue encore à affaiblir le prestige des Ayyoubides qui se retrouvent de plus en plus sous l’influence de leurs troupes d’élite, les Mamelouks.
Le système des Mamelouks est ancien puisqu’il remonte aux années 830 sous le califat abbasside. Il s’agit d’aller capturer des jeunes esclaves parmi les populations situées juste au-delà du monde musulman. Au début, ça concernait surtout les Turcs d’Asie Centrale, mais leur islamisation a fini par tarir ce premier vivier. A présent, les esclaves viennent surtout du Caucase où vivent notamment les Circassiens, et des steppes d’Europe Orientale habitées par des Turcs appelés les Coumans.
Ces esclaves capturés connaissent une formation islamique et militaire dans des endroits dédiés qui leur donne un fort sentiment d’appartenance à une nouvelle famille. Une fois adultes, ils sont affranchis et deviennent des guerriers d’élite particulièrement efficaces.
En 1240, ce sont les Mamelouks eux-mêmes qui placent le sultan Ayyoub sur le trône, ce qui renforce considérablement leur influence politique. Puis en 1249, la Septième Croisade menée par Saint Louis parvient à s’emparer de Damiette, ce qui accélère l’effondrement des Ayyoubides : la mort d’Ayyoub au plus fort de la guerre pousse le chef des Mamelouks Aybak d’origine turque à s’emparer lui-même du trône en 1250, fondant le sultanat mamelouk.
La Septième Croisade est finalement repoussée et l’unité du sultanat est rétablie, juste à temps pour faire face à l’arrivée des Mongols. En 1260, le nouveau sultan mamelouk nommé Baybars remporte la victoire décisive d’Aïn Djalout qui stoppe leur progression. Puis il attaque le royaume chrétien de Nubie en amont du Nil qui perd sa partie nord et doit ensuite payer un tribut régulier. Le royaume arménien de Cilicie est également contraint de payer tribut. Le sultanat mamelouk s’impose durablement comme la première puissance du monde musulman, ce qui lui vaut l’allégeance des villes saintes du Hedjaz.
La mort de Baybars en 1277 n’empêche pas le sultanat de poursuivre son expansion. Les derniers états francs sont peu à peu reconquis jusqu’à la chute de Saint-Jean d’Acre en 1291. C’est à cette époque qu’on assiste à des conversions massives du christianisme vers l’islam, y compris en Egypte où l’islam devient pour la première fois majoritaire.
La menace mongole perdure jusqu’au traité de paix de 1323 avec l’Ilkhanat. L’apogée est atteint à cette époque sous le règne d’An Nasir, avant de céder place à une certaine forme d’instabilité politique à partir de 1341, aggravée par l’épidémie de Peste Noire en 1348. En 1365, la ville d’Alexandrie subit un raid du roi de Chypre qui pille la cité pendant trois jours. Le sultanat parvient néanmoins à annexer le royaume arménien de Cilicie en 1375, ce qui marque une dernière phase de prospérité. Sept ans plus tard, on assiste à une véritable bascule au sommet de l’état avec l’avènement de chefs mamelouks circassiens aux dépens des Turcs qui dirigeaient jusqu’alors le pays.
De 1400 à 1403, ils doivent faire face à l’invasion de Tamerlan qui occupe temporairement la région du Levant avant d’être repoussé. Une nouvelle épidémie de peste se déclenche dans la foulée qui provoque un déclin démographique et économique durable.
En 1425, les Mamelouks mènent un raid victorieux sur le royaume de Chypre vestige des croisades, mais ça profite surtout à Gênes et à Venise qui y accroissent leur influence. Le sultanat conserve ensuite une stabilité territoriale par-delà l’instabilité politique. Finalement, deux évènements majeurs vont avoir raison de lui à la charnière des XVe et XVIe siècles : en 1498, le Portugais Vasco de Gama parvient à gagner l’Inde en contournant l’Afrique, ce qui fait perdre aux Mamelouks le contrôle sur le commerce des épices. Pendant ce temps-là, l’empire ottoman est en pleine expansion, notamment grâce au développement d’une arme nouvelle, l’artillerie. L’armée des Mamelouks, qui repose sur une stratégie dépassée, est balayée une première fois en Syrie en 1516, puis une deuxième près du Caire en 1517. L’empire ottoman peut ainsi s’emparer de l’Egypte, ce qui met fin au sultanat mamelouk.
Ça ouvre une nouvelle époque qui sera abordée dans une autre série. En attendant, on va retourner en Asie Centrale où prospèrent les héritiers d’un conquérant particulièrement sanguinaire : Tamerlan.
Vincent raconte...
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