Katyn

Un film qui dérange

13 avril 2009 : Katyn sort en France dans la plus grande discrétion et ne tourne que dans une douzaine de salles ! L'ayant vu et apprécié, nous nous en étonnons...

Rappelons les faits : le 13 avril 1943, la radio allemande annonce la découverte d'un charnier dans la forêt de Katyn, près de Smolensk. Il s'agit des restes de plusieurs milliers d'officiers polonais, prisonniers de guerre délibérément exécutés par les Soviétiques lorsque ceux-ci, conformément au pacte germano-soviétique, s'étaient emparés en 1939-1940 de la partie orientale du pays. Pendant plusieurs décennies, les communistes persisteront à rejeter le crime sur les nazis.

En 2007, le grand cinéaste polonais Andrzej Wajda (82 ans) a tiré un film témoignage de ce drame dont son propre père a été l'une des victimes. Disons-le d'emblée, Katyn est un film d'une excellente facture : la mise en scène est talentueuse ; les acteurs, les décors et les scènes de vie tout à fait dans le ton des années 1940. La tension monte très vite et quand défile le générique de fin dans un silence mortuaire, c'est avec peine que les spectateurs s'arrachent à leur siège.

Ces qualités rendent d'autant plus étrange le refus des grands circuits de distribution de montrer le film au public français. Sans doute Gaumont, UGC et MK2 ont-ils craint de s'attirer des ennuis avec un film décapant qui rappelle la collusion entre nazis et communistes dans les premiers mois de la Seconde Guerre mondiale (c'est pour dénoncer cette collusion que la police française avait arrêté en 1940 des militants communistes comme le jeune Guy Môquet).

Le déni du crime

Andrzej Wajda est l'un des plus grands cinéastes actuels (Palme d'or au Festival de Cannes 1981 pour L'Homme de fer, film sur la révolution de Solidarnosc). Il déroule dans son dernier film les circonstances qui ont conduit au massacre de Katyn. En croisant les destins de plusieurs officiers et de leurs familles, il révèle surtout le traumatisme qui a suivi, dans la Pologne communiste de l'après-guerre, quand il a fallu taire la vérité pour complaire au vainqueur, l'URSS.

Tout commence le 17 septembre 1939 quand les Polonais qui fuient vers l'est l'avance des chars allemands se heurtent à leurs compatriotes qui fuient, eux, l'invasion soviétique ! On apprend alors que l'Armée rouge libère les soldats polonais capturés au fil des combats mais retient les officiers. Or, à la différence de l'Allemagne, l'URSS n'a pas signé la convention de Genève sur la protection des prisonniers de guerre...

Au printemps 1943, deux ans après la rupture du pacte germano-soviétique, la propagande nazie ne se fait pas faute d'exploiter la découverte des charniers de Katyn. L'horrible litanie des noms des victimes, diffusée dans les journaux et par haut-parleur dans les rues, veut convaincre les Polonais que le mal absolu est le communisme que combat désormais la Wehrmacht !

Retournement de situation en 1945, à la chute du nazisme, avec l'installation à Varsovie d'un gouvernement communiste aux ordres de Moscou. Ce dernier tente sans y réussir de convaincre l'opinion que les massacres de Katyn sont postérieurs au repli soviétique de juin 1941 et donc le fait des Allemands. Pour les familles des officiers, la date du décès - avril 1940 - devient désormais un enjeu vital.

André Larané
Où sont les juifs ?

Remarquable document sur un aspect de la Seconde Guerre mondiale méconnu des Français et des Occidentaux, le film de Wajda fait toutefois silence sur l'existence de nombreux juifs dans la Pologne de 1939. Celle-ci compte en effet 3,2 millions de juifs (un dixième de la population totale), présents en masse dans les villes et les couches intellectuelles et bourgeoises, et le judaïsme imprègne profondément les grandes villes comme Cracovie. Parmi les victimes de Katyn, on estime entre 300 et 500 le nombre de juifs (essentiellement des médecins qui avaient obtenu un grade d'officier du fait de leur fonction).

Publié ou mis à jour le : 2020-04-09 16:04:44
pmlg (28-12-2017 15:20:52)

Où sont les juifs ? Quand il s'agit d'histoire et le site est remarquable sur ce point il faut éviter les amalgames et les glissements qui font se superposer des événements parce qu'ils ont un poi... Lire la suite

Régis Hulot (12-04-2011 15:41:22)

L'Histoire est écrite par les vainqueurs... Sur le massacre de Katyn, on peut lire deux livres qui m'ont frappé et qui, écrits par des témoins directs ou indirects dignes de foi, m'ont personne... Lire la suite

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