La civilisation maya domine toutes les autres civilisations d'Amérique centrale par sa durée - près de deux millénaires - et son rayonnement, du Honduras au Yucatàn.
Elle s'est éteinte dans le silence de la forêt peu après l'arrivée de Christophe Colomb et n'est réapparue à la lumière qu'au milieu du XIXe siècle. Elle n'a pas fini de nous surprendre.
La civilisation maya s'étant éteinte d'elle-même par les guerres et les disettes, les Espagnols purent s'emparer de son territoire sans avoir à la combattre ni même à soupçonner son existence. Tout juste y eut-il un évêque, au milieu du XVIe siècle, au Yucatàn, pour s'intéresser aux innombrables manuscrits en circulation, mais ce fut pour les brûler sans rémission. Peut-être pris de remords, il prit la peine de recueillir le témoignage d'un ancien noble maya dans un livre intitulé Relacion de las cosas de Yucatan. Il fallut attendre 1863 pour qu'un chercheur, le Français Charles-Étienne Brasseur de Bombourg, y mette la main dessus aux archives nationales de Madrid et s'y intéresse.
Quelques années plus tôt, un archéologue anglais, John Lloyd Stephens, avait repéré dans quelques textes très ordinaires de vagues allusions à des vestiges architecturaux dans les forêts d'Amérique centrale. Sans trop hésiter, il s'associa à un ami architecte et dessinateur, Frederick Catherwood, et avec lui prit la route du Honduras. Après des péripéties sans nom, les deux explorateurs découvrirent en 1839 le site de Copàn. Après avoir défriché le site, ils mirent à jour de magnifiques stèles. Stephens se porta acquéreur du site pour la somme royale de 50 dollars.
Les Mayas sortirent d'un coup de l'oubli avec la publication de son récit de voyage en 1842, à New York : Incidents of travel in Central America, Chiapas and Yucatan, complété par les dessins remarquables de Catherwood.
Jusqu'à la fin du XIXe siècle, toutefois, archéologues et commentateurs rechignèrent à imaginer que les ancêtres des misérables habitants de la région aient pu développer une civilisation de pareille ampleur. Toutes les alternatives furent évoquées, comme le débarquement de Grecs, de Romains ou de rescapés de la myhique Atlantide... Aujourd'hui, le doute n'est plus permis. Les Mayas ont retrouvé leur fierté.
Entre l'Âge de pierre et Dr Folamour
Héritiers directs des Olmèques, les Mayas ont fait fructifier d'une manière ô combien remarquable le savoir-faire de leurs prédécesseurs dans l'architecture comme dans les sciences. Ils vécurent dans une région tropicale moitié moins étendue que la France, à cheval sur le Salvador, Belize, le Guatemala et les États mexicains du Chiapas et du Yucatàn, aujourd'hui les plus déshérités du pays. Leur nombre a dépassé les 4 millions d'habitants à leur apogée... Leurs descendants, généralement misérables, sont une dizaine de millions ; les trois quarts vivent au Guatemala dont ils forment la moitié de la population.
Ils développèrent leur propre système d'écriture à partir du IIIe siècle après J.-C. (début de la période classique). Mais la plupart de leurs manuscrits ont été détruits au XVIe siècle par les prédicateurs espagnols qui y voyaient l'oeuvre du diable.
Trois manuscrits ont échappé aux autodafés, dont le plus célèbre est à Dresde : Codex Dresdensis, Codex Persianus et Codex Trocortesianus. L'écriture maya demeure néanmoins visible sur les monuments et les statues de pierre et son déchiffrement est déjà très avancé, en dépit des variantes linguistiques d'une cité à l'autre.
Les prêtres et savants mayas se montrèrent excellents mathématiciens. Ils utilisaient un système vigésimal (base 20) et connaissaient le zéro !
Ils se montraient surtout très habiles dans l'établissement des calendriers. Croyant en un déroulement cyclique de l'Histoire, avec naissance, mort et résurrection, ils prenaient grand soin de calculer les dates optimales de chacun des grands moments de la cité, à commencer par la fondation de celle-ci.
Cela les conduisit à mesurer la durée de l'année solaire avec une précision inouïe, plus élevée encore que celle de notre calendrier grégorien, avec une année moyenne de 365,242129 jours (année grégorienne : 365,242500 ; année astronomique : 365,242198), divisée en 18 mois de 20 jours et un mois complémentaire de 5 jours.
Ils prévoyaient les éclipses mais ce ne furent pas pour autant de grands astronomes... Ainsi voyaient-ils la Terre plate et le Soleil tourner autour d'elle. Ils ne faisaient pas non plus la différence entre planètes et étoiles.
Polythéistes, les Mayas révérèrent de nombreuses divinités qui se retrouvent sous des noms quelque peu différents chez les autres peuples mésoaméricains (ainsi en allait-il aussi entre les Grecs et les Romains).
Toutes ces divinités participaient à la répétition des fameux cycles naturels, tant terrestres que célestes. C'est en référence à l'un de ces cycles que les Aztèques virent en Cortès le retour du « Serpent à plumes » Quetzalcoalt, dieu de la résurrection (ils ne tardèrent pas à déchanter) ; c'est un autre cycle qui a inspiré à un cinéaste américain astucieux l'idée de la fin du monde en 2012 !
Mais les religions mayas et plus généralement mésoaméricaines ont un côté moins innocent, à savoir la pratique des sacrifices humains.
Ces sacrifices s'apparentent à une action de grâces : il s'agit de remercier les divinités pour tous leurs bienfaits, à commencer par le bienfait de la vie, et pour cela, au nom d'un juste équilibre des choses, on leur sacrifie quelques malchanceux : en premier lieu les prisonniers de guerre et les blessés mais aussi les vaincus des jeux de balle rituels !
Les sacrifices se pratiquent par arrachement du coeur à vif (!) ou par décapitation. Ils se déroulent sur la terrasse des fameux temples pyramidaux dont on a retrouvé des vestiges impressionnants dans la jungle, au coeur des anciennes cités. En fait de « pyramides », il s'agit d'escaliers monumentaux qui peuvent s'élever jusqu'à 60 mètres comme à Chichen Itza. Ils symbolisent le chemin qui mène de la terre au ciel.
La guerre est un fait constant de la civilisation maya comme en témoignent les épigraphes et les découvertes de charniers.
Meurtrières, les guerres sont l'apanage des nobles mais les classes populaires sont aussi contraintes de se mobiliser lorsque leur cité est menacée d'une destruction totale. L'un des buts de guerre est de pourvoir les prêtres en victimes sacrificielles.
La période dite « préclassique » ou « formative » s'étire du deuxième millénaire avant notre ère jusqu'à la fin du IIIe siècle de notre ère, qui voit l'apparition des premières inscriptions sur les monuments mayas.
Durant cette période protohistorique, lesdits Mayas ou leurs ancêtres établissent leurs premières cités dans les basses terres, à la périphérie de la région du lac Peten (Guatemala actuel) : El Mirador, Tikal...
D'ores et déjà, l'art témoigne d'une remarquable maturité comme l'attestent les céramiques des musées guatémaltèques, à l'image de l'urne funéraire anthropomorphe ci-contre.
Rappelons que les céramiques, y compris les vases et pots, sont réalisées à la main et sans tour (on a vu que les populations mésoaméricaines ne maîtrisaient pas les usages de la roue).
Les archéologues font débuter la période classique avec la première inscription relevée sur la cité de Tikla, au nord du Guatemala et la font terminer avec la dernière inscription relevée dans la même région, entre le Chiapas et le Honduras.
Cette période a été autrefois appelée de manière impropre « Ancien Empire » ! Les Mayas n'ont jamais constitué d'empire, loin s'en faut, à la différence des Toltèques, Aztèques et autres Incas.
À l'image de nos Grecs, ils formaient des cités-États jalouses de leur indépendance et régulièrement en guerre les unes contre les autres.
Furent ainsi fondées les prestigieuses cités de Tikal, Uaxactun (vers 328) et Copàn (vers 369, dans le Honduras actuel), puis Palenqué (vers 638, au Chiapas).
L'expansion se poursuivit vers l'intérieur de la région et le lac Peten, par la création de nouvelles cités, au fur et à mesure de l'épuisement des sols...
Les Mayas se nourrissaient essentiellement de trois plantes, le maïs, le haricot et le potiron. Ils avaient mis au point des sytèmes d'irrigation très complexes et malgré cela, semble-t-il, durent à plusieurs reprises abandonner des terroirs devenus stériles et reconstruire leur villes et leurs infrastructures un peu plus loin.
Ces cités témoignent de la splendeur de la civilisation maya, tant par leurs monuments que par leurs objets en céramique vernissée, en jade, en obsidienne, en alliage de cuivre et d'or...
Au IXe siècle, une crise gravissime liée très certainement à la surpopulation, à l'épuisement des sols et à des jacqueries entraîne l'effondrement de la civilisation. Les villes sont désertées et une partie de la population va survivre dans la forêt et y préserver ses traditions jusqu'à nos jours.
Une autre partie des Mayas prend le chemin du nord et gagne la péninsule du Yucatàn. Elle établit de nouvelles cités et, pour s'approvisionner en eau dans une région plus sèche et au relief karstique, creuse et aménage de nombreuses cuvettes de rétention. Ces nouvelles cités - en particulier Chichen Itza, Uxma et Mayapán - vont bénéficier de l'arrivée de lointains cousins, les Toltèques...
Avant notre ère, la région de l'actuelle Mexico, sur les hauts plateaux volcaniques du Mexique, a connu le développement d'une grande cité, Teotihuacán, dont les habitants, encore pleins de mystère, devaient être apparentés aux Olmèques et aux Mayas. Ils ont érigé comme eux de magnifiques temples pyramidaux à escaliers dont les ruines ont été entraperçues par Cortès et ses soldats lors de la conquête de l'empire aztèque.
Teotihuacan a rayonné sur sa région. Elle a commercé avec l'ensemble du Mexique et en particulier avec les cités mayas jusqu'aux environs de l'an 750 de notre ère. Elle a alors décliné et disparu, peut-être sous l'effet d'une invasion, et laissé le champ libre à de nouveaux-venus, les Toltéques.
Ces derniers dominent le nord du Mexique au cours des Xe et XIIe siècles. Ils constituent une brillante civilisation autour de Tula, leur capitale, au nord-ouest de l'actuelle Mexico. Comme les Mayas, ils pratiquent les sacrifices humains et utilisent des calendriers d'une remarquable précision. Mais à leur différence, ils forgent un empire centralisé et étendu (il alla peut-être d'un océan à l'autre).
Malgré sa puissance, les Toltèques ont un Âge d'Or de courte durée. D'après les chroniques, ils sont chassés de Tula vers 1168 et repoussés vers l'est, sans doute par des envahisseurs étrangers.
Le souvenir de cette tragédie perdure dans le mythe de l'affrontement entre Quetzalcoalt, dieu de la résurrection des Toltèques comme des Mayas, et le dieu de la guerre Tezcatlipoca.
Quoi qu'il en soit, les Toltèques se réfugient au Yucatàn, en particulier à Chichen Itza et Mayapán, deux des plus grandes cités mayas du Yucatan. Ils vont rénover ces villes et contribuer au redressement de la civilisation maya dans l'époque postclassique.
Lorsqu'ils souhaitent remplacer un vieux temple, ils ne le détruisent pas au préalable mais, selon une technique habituelle aux Mayas et à eux-mêmes, enveloppent le nouveau temple autour et au-dessus de l'ancien !
C'est ainsi que beaucoup d'ensembles monumentaux apparaissent comme des imbrications de différents monuments.
Sur les hauts plâteaux du Mexique, les Aztèques, des nomades en provenance de ce qu'ils appellent la « terre blanche », probablement au nord-ouest du Mexique, supplantent les Toltèques.
Arrivés vers 1270, ils s'imposent progressivement aux autres peuples de la région mais adoptent en même temps de grands pans de leur culture. Vainqueurs des Chichimèques, ils ne tardent pas à dominer toute la vallée de l'actuelle Mexico. En 1325, ils fondent leur capitale, Tenochtitlan, au milieu de marais qui la rendent quasi-imprenable.
À la fin du XVe siècle, les Aztèques constituent un puissant empire militaire et centralisé et pénètrent jusqu'au Nicaragua et au Guatemala actuels, soumettant à leur autorité brutale les peuples et les cités-États. Fortement ritualisée, leur pratique de la guerre est liée à des cycles cosmiques définis par les prêtres. L'une de ses utilités, et non la moindre, est de procurer aux prêtres des victimes en nombre suffisant pour les sacrifices rituels. Cela vaut aux Aztèques d'être craints et haïs par leurs vassaux.
Le 19 février 1519, lorsque Cortès accoste à l'emplacement actuel de Veracruz, il est bien accueilli par les adversaires traditionnels des Aztèques, les Tlaxcaltèques. Beaucoup de Tlaxcaltèques ont en effet péri sur les autels aztèques, après avoir été faits prisonniers. Quand il arrive à Tenochtitlan, où vivent alors 300 000 personnes - c'est à dire trois fois plus qu'à Rome à la même époque - Cortès est émerveillé : « Aucune langue humaine ne peut exprime la grandeur et l'originalité de la ville », écrit-il. L'empereur Moctezuma II, au service duquel se trouve une importante bureaucratie, règne alors sur les Aztèques.
Après la célèbre « Noche triste », Cortès vainc les Aztèques en août 1521 et fonde la ville de Mexico à l'emplacement de Tenochtitlan. Les Mayas devront pour leur part se soumettre à l'envahisseur espagnol vingt ans plus tard.
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