À la fin de l'Antiquité, quand s'effondre l'empire romain, l'Église médiévale demeure en Occident la seule institution stable et respectée. C'est à elle qu'il va revenir de jeter les fondations morales des temps à venir.
Concernant le mariage, elle s'inscrit dans la tradition romaine et promeut l'égalité de l'homme et de la femme dans le couple. Elle met en avant aussi le devoir de solidarité et d'affection.
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Des Francs aux premiers Capétiens
Les plus grands rois d'Occident, de Pépin le Bref à Philippe Auguste, se font sermonner par les évêques et les abbés sur leurs mœurs conjugales non conformes. Plusieurs sont excommuniés et de fait mis au ban de la société.
Les griefs de l'Église portent sur la polygamie, la répudiation et la consanguinité.
Dans les campagnes, la question ne se pose pas. On s’unit sans formalité, sans même la présence d’un prêtre, et jusqu’à l’An Mil, le vernis chrétien est encore trop mince pour modifier en profondeur les mœurs héritées du passé.
Le combat le plus décisif que mène l'Église au Moyen Âge est dirigé contre les mariages « consanguins » ou « incestueux ». Les clercs donnent une acception très large à ce concept. Ils considèrent consanguins des mariages entre cousins jusqu'au septième degré, autrement dit avec un seul parent commun... à la septième génération !
Pour l'écrasante majorité de la population, qui ne s'éloigne jamais de son village natal, cette règle est proprement inapplicable, tous les habitants du village étant peu ou prou cousins.
L'Église ferme les yeux sur cette réalité paysanne mais dégaine volontiers l'interdit de consanguinité pour déstabiliser un puissant seigneur ou au contraire s'attirer ses bonnes grâces.
La sacralisation du mariage
La grande période du Moyen Âge (XIIe-XIIIe siècles) voit l’avènement de sociétés stables fondées sur le droit, le développement des villes et la construction des cathédrales. L'Église médiévale jouit d’une primauté incontestée.
Dès lors, d’un concile à l’autre, elle impose ses préceptes moraux jusque dans les campagnes les plus reculées. C’est ainsi que le grand concile œcuménique Latran IV, en 1215, jette les bases du mariage chrétien, qui ne changeront plus guère jusqu’à la Révolution française.
Le concile rappelle que le mariage est indissoluble (mais peut être annulé en cas de consanguinité ou de non-consommation). C'est une façon d'affirmer le devoir d'assistance entre les époux et d'empêcher les répudiations de convenance.
Surtout, le concile, à la suite de plusieurs autres, impose le libre consentement des futurs époux, lequel doit s’exprimer devant un prêtre.
Le sexe bienvenu dans le mariage
Contrairement à une idée convenue, l'Église médiévale se montre compréhensive à l'égard du « congrès » (ce mot désigne les relations sexuelles sous l'Ancien Régime). À l'exception de quelques théologiens obtus, les clercs le tiennent pour une affaire privée qui n'a rien à voir avec la recherche de Dieu, ce qui explique aussi leur propre liberté à l'égard du sexe.
L'Église condamne toutefois les relations hors mariage mais c'est avant tout pour protéger les filles contre la violence masculine et les grossesses non désirées. Elle condamne de même l'adultère qui brise la confiance entre les époux, mais les personnes concernées, en état de péché mortel, peuvent toutefois obtenir le pardon en confessant leur faute et en faisant pénitence.
Il est à souligner que l'adultère ne justifie en aucune façon la rupture du mariage et du projet familial qu'il sous-tend mais tout au plus une séparation de corps. C'est ainsi qu'après le scandale de la tour de Nesle, les brus du roi Philippe le Bel, convaincues d'adultère, sont enfermées dans un couvent mais sans que leur époux puisse se remarier.
Ces dispositions sur le mariage vont de pair avec une singulière émancipation de la femme au Moyen Âge, visible au moins dans les classes supérieures. Elles héritent et gèrent leurs affaires. Elles peuvent régner (Aliénor) et parfois combattre (Jeanne d’Arc).
Pour en prendre la mesure révolutionnaire, il faut les comparer à ce que l'on observe dans l'islam et le judaïsme. Dans ces sphères religieuses, l'adultère féminin est puni par la lapidation à mort, l'adultère masculin étant quant à lui parfaitement toléré. C'est le propre de sociétés fortement misogynes qui ravalent la femme au statut de reproductrice.
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Florence Delestre (17-11-2013 22:28:55)
Merci à tous ceux très savants qui rédigent ces articles. Quelle source de bonheur que de vous lire. Je suis passionnée d'histoire depuis toujours et j'anime un groupe de lecture (principalement ... Lire la suite